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Le Conseil des droits de l'homme tient une réunion-débat sur la violence à l'égard des femmes dans les situations de conflits armés

Arrière

10 juin 2011

Conseil des droits de l'homme
APRES-MIDI 10 juin 2011

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, cet après-midi, une réunion-débat sur la violence contre les femmes dans les situations de conflits armés, dans le cadre de sa journée annuelle de débats consacrés aux droits fondamentaux des femmes.

Le débat a été ouvert par la Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, Mme Kyung-Wha Kang, qui a constaté que ce type de violence était reconnue depuis peu, ayant été longtemps négligée en tant que crime relevant du droit pénal. Des progrès importants ont été réalisés ces dernières années, notamment la définition d'un cadre institutionnel et législatif. En 2000, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1325 sur «les femmes, la paix et la sécurité», dans laquelle il appelait toutes les parties à un conflit à protéger les femmes et les filles. Mme Kang a également mis l'accent sur le rôle Conseil des droits de l'homme pour favoriser la sensibilisation de la communauté internationale aux vulnérabilités spécifiques et aux besoins des femmes et des filles dans les situations de conflit armé.

La Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la lutte contre les violences sexuelles dans les conflits armés, Mme Margot Wallström, a énuméré les résolutions du Conseil de sécurité relatives à cette question et rappelé les conséquences sociales et psychologiques de ces actes assimilables à des crimes contre l'humanité. Elle a cité l'exemple de la guerre en Bosnie-Herzégovine et l'exigence de justice de la part des très nombreuses femmes de ce pays victimes de viol, constatant qu'un très petit nombre de responsables avaient été traduits en justice. Malheureusement, «la Bosnie est la règle plus que l'exception», a déploré Mme Wallström. Au bout du compte, le Conseil de sécurité et le Conseil des droits de l'homme doivent créer les conditions grâce auxquelles les groupes armés considéreraient la violence sexuelle comme un inconvénient plutôt que comme un outil brutal, mais efficace, dans leur lutte pour le pouvoir. Il faut augmenter le coût des atrocités, de telle sorte qu'il devienne encore plus insupportable à ceux qui les commettent qu'à ceux, et celles, qui les subissent.

La Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, Mme Rashida Manjoo, a pour sa part constaté que les femmes étaient souvent victimes de trafic transfrontalier à des fins de service sexuel pour les combattants armés. Les conflits armés augmentent en effet le risque pour les femmes d'être victimes de violence sexuelle ou de prostitution forcée. Pour Mme Manjoo, le désintérêt des donateurs pour le soutien à des projets ciblant spécifiquement les femmes, associé à l'ancienne discrimination dont elles sont victimes dans nombre de sociétés, risque de condamner les femmes à subir des situations abusives en tant que seul moyen de subvenir aux besoins de leurs familles.

Le Conseil a également entendu Mme Zohra Rasekh, Vice-Présidente du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, qui a souligné l'importance de la participation égalitaire des femmes à tous les processus de reconstruction, de maintien de la paix et de négociations de paix, et M. Marek Marczynski, d'Amnesty International, qui a notamment souligné la difficulté que rencontrent les femmes qui demandent justice à l'issue d'un conflit; les victimes ont droit à la vérité, qui est elle-même une condition essentielle de la paix.

Au cours des échanges, plusieurs délégations ont souligné l'importance du dixième anniversaire de la résolution 1325 sur «les femmes, la paix et la sécurité», et sur la prise de conscience, par la communauté internationale, de la nécessité de trouver le moyen de prévenir les exactions massives visant spécifiquement les femmes. Un État membre a estimé que la prise de conscience internationale sur ces questions avait permis de renforcer les mandats de maintien de la paix.

Les délégations des pays suivants ont participé au débat: Estonie, Suède, Argentine, Palestine (au nom du Groupe arabe), Gabon, France, Émirats arabes unis, États-Unis, Colombie, Portugal, Fédération de Russie, Équateur, Maroc, Burkina Faso, Suisse, Algérie, Bangladesh, Iraq, Qatar, Sri Lanka, République de Corée, Népal, Soudan, Mexique, Irlande, Danemark, Espagne, Norvège et Royaume-Uni.

Les représentants de l'Organisation internationale de la francophonie, de l'Union africaine, de l'Union européenne, du Fond des Nations Unies pour la population et du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) ont également pris la parole ainsi que des représentants de trois organisations non gouvernementales: Alliance internationale d'aide à l'enfance, Association colombienne des juristes et Union de l'action féminine.

Mardi prochain, 14 juin, dès 9h, le Conseil des droits de l'homme doit débattre du dernier rapport du Haut-Commissariat aux droits de l'homme sur les suites au rapport de la mission internationale indépendante d'établissement des faits concernant l'incident de la flottille humanitaire pour Gaza.

Réunion-débat sur la violence à l'égard des femmes dans les situations de conflit armé

Déclaration liminaire

MME KYUNG-WHA KANG, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a souligné que les situations de conflit armé exacerbent la vulnérabilité des femmes et des filles en particulier. Elle a recommandé des mesures punitives pour pénaliser les multiples formes de violences infligées à cette catégorie de la population. Ces violences sont très fréquentes dans les périodes d'instabilité, d'effondrement des institutions étatiques de justice, de transition ou de reconstruction à l'issue d'une guerre. Pendant longtemps, cette violence n'a pas été reconnue et a été négligée en tant que crime relevant du droit pénal. Or, des progrès importants ont été réalisés ces dernières années, notamment la définition d'un cadre institutionnel et législatif. Mme Kang a cité à cet égard le cas Ayakesu, jugé en 1998 par le Tribunal pénal international pour le Rwanda, qui a établi que des viols de femmes tutsies avait été commis à grande échelle dans l'intention de détruire le groupe tutsi dans son ensemble, ce qui constitue en soi un élément du crime de génocide. D'autre part, en octobre 2000, le Conseil de sécurité adoptait sa résolution 1325 sur «les femmes, la paix et la sécurité», dans laquelle il appelait toutes les parties à un conflit armé à protéger les femmes et les filles de toutes les formes de violence. Cela n'a pas empêché d'autres violences sexuelles, auxquelles le Conseil de sécurité a toutefois répondu par ses résolutions 1820, 1888 et 1960, spécialement axées sur la violence sexuelle et sur la riposte à y apporter.

Mme Kang a également mis l'accent sur le rôle qu'a joué l'ancienne Commission des droits de l'homme, puis le Conseil des droits de l'homme, dans la sensibilisation de la communauté internationale aux vulnérabilités spécifiques et aux besoins des femmes et des filles dans les situations de conflit armé. À cet égard, Mme Kang a réaffirmé la responsabilité des États dans la prévention et la réponse aux violences, principalement par le respect strict de leurs obligations en vertu du droit international et du droit international humanitaire. Elle a estimé que les discussions d'aujourd'hui favoriseront une réflexion sur la manière dont le Conseil des droits de l'homme et ses mécanismes pourraient contribuer aux efforts de suivi et de rapport sur les violences à l'égard des femmes et des filles dans les périodes de conflit.

Réfutant la thèse selon laquelle il serait impossible d'appliquer les traités relatifs aux droits de l'homme aux situations de conflit armé, Mme Kang a assuré qu'au contraire le droit international et le droit international humanitaire sont complémentaires et se renforcent mutuellement. Elle a encouragé le Conseil des droits de l'homme et ses mécanismes à jouer un rôle de premier plan dans le suivi des agissements des États et, le cas échéant, des acteurs non étatiques. Mme Kang a aussi jugé indispensable d'accorder plus d'attention au travail des procédures spéciales, tant dans le contexte des visites de pays qu'à travers leurs recommandations et études thématiques. La Haut-Commissaire adjointe a recommandé enfin une coopération étroite entre les titulaires de mandats et les Représentants spéciaux du Secrétaire général chargés de cette question.

Interventions des panélistes

MME MARGOT WALLSTRÖM, Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la lutte contre les violences sexuelles dans les conflits armés, a rapporté les paroles d'une femme libérienne qui lui a dit un jour: «La phase d'après-guerre est une "fenêtre d'opportunité" pour les femmes. Mais les femmes n'ont que faire d'une fenêtre pour contempler un avenir plus radieux: elles ont besoin d'une porte pour y entrer». Mme Wallström s'est dite heureuse de s'adresser à une institution qui «ouvre des portes» pour les femmes durant et après les conflits. Les actions visant à concrétiser les droits de l'homme et la justice sociale sont aussi des actions de prévention de la violence et des conflits, a-t-elle relevé. Pourtant, dans les guerres actuelles, les femmes et les petites filles sont les premières cibles de la violence sexuelle, qui est alors une tactique de guerre.

Après avoir énuméré les résolutions du Conseil de sécurité relatives à cette question – en particulier la résolution 1960 relative aux groupes armés et à la détermination de leur responsabilité –, Mme Wallström a rappelé les conséquences sociales et psychologiques de ces actes assimilables à des crimes contre l'humanité. Elle a cité la guerre en Bosnie-Herzégovine et l'exigence de justice de la part très des nombreuses femmes de ce pays victimes de viol, 20 000 et 50 000. Or, seules 18 personnes ont été traduites en justice et seules 12 condamnations ont été prononcées par le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie. À cet égard, «la Bosnie est la règle plus que l'exception», a regretté Mme Wallström. En République démocratique du Congo (RDC), pas une seule victime, pas une seule communauté n'a eu droit à des réparations pour des violences sexuelles subies, pas même les 2000 survivantes qui ont réussi à obtenir un jugement en leur faveur. Au Liberia, l'explication que Mme Wallström a entendu le plus fréquemment pour justifier les nombreux viols qui ont été commis durant la guerre civile était «la façon dont les femmes s'habillaient», a-t-elle relaté, constatant que, bien souvent, l'opinion publique faisait porter aux femmes le blâme du viol qu'elles ont subi. La violence sexuelle profite du silence et de l'impunité, a aussi noté Mme Wallström.

La Représentante spéciale a indiqué qu'elle avait défini cinq priorités lors de sa nomination: mettre fin à l'impunité, autonomiser les femmes, mobiliser les responsables politiques, généraliser la reconnaissance de la violence sexuelle comme tactique de guerre et enfin obtenir une réaction plus cohérente du système de l'ONU. En dernière analyse, le Conseil de sécurité et le Conseil des droits de l'homme peuvent créer les conditions grâce auxquelles les groupes armés considéreraient la violence sexuelle comme un inconvénient plutôt que comme un outil brutal, mais efficace, dans leur lutte pour le pouvoir. Il faut à cet effet augmenter le «coût»des atrocités, de telle sorte qu'il devienne encore plus insupportable à ceux qui les commettent qu'à ceux, et celles, qui les subissent.

Concrètement, lorsque débute un processus de paix, il faut faire en sorte que les auteurs de crimes sexuels ne détiennent aucune responsabilités ni n'exercent aucune influence, dans le domaine militaire, politique ou économique. Par ailleurs, la violence sexuelle ne devrait jamais être utilisée pour influencer l'issue d'un scrutin, comme cela s'est vu de manière troublante au Kenya, en Guinée et plus récemment en Côte d'Ivoire. Aucune société ne peut bâtir une paix globale si la moitié de la population n'en est pas pleinement partie prenante, a conclu Mme Wallström.

MME RASHIDA MANJOO, Rapporteuse spéciale sur la violence à l'égard des femmes, ses causes et ses conséquences, a observé que les situations de conflit exacerbent les inégalités entre les sexes et placent les femmes et les filles dans des situations de risque de violence. Dans ce contexte, a poursuivi Mme Manjoo, la Recommandation générale no 19 du Comité sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes doit faire l'objet d'une attention particulière. Mme Manjoo a par ailleurs relevé que la résolution 1325 du Conseil de sécurité est une étape importante pour une meilleure protection des femmes, de même que la création d'un mandat spécifique dédié à la question de la violence faite aux femmes. La Rapporteuse spéciale a déclaré que, pendant les conflits, les femmes sont souvent victimes de trafic transfrontalier à des fins de service sexuel pour les combattants armés. Par conséquent, les conflits armés augmentent le risque pour les femmes d'être victimes de violence sexuelle ou de prostitution forcée. Il est, d'autre part, évident que la plupart des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays sont souvent des femmes et des enfants: dans ce contexte, Mme Manjoo a rappelé les principes directeurs qui invitent les États à fournir aide et protection aux femmes et enfants en tant que personnes vulnérables. Pour Mme Manjoo, le désintérêt des donateurs pour le soutien à des projets ciblant spécifiquement les femmes, associé à l'ancienne discrimination dont elles sont victimes dans nombre de sociétés, risque de condamner les femmes à subir des situations abusives en tant que seul moyen de subvenir aux besoins de leurs familles.

Mme Manjoo a déclaré que le précédent titulaire de son mandat avait effectué des visites de pays en conflit, dont l'Afghanistan, Timor Leste, la Sierra Leone ou la Colombie. Dans chacun de ces pays, le Rapporteur spécial avait noté que les femmes et les jeunes filles subissaient les conséquences des conflits: viols, assassinats, amputations ou encore esclavage sexuel et mariages forcés. Dans tous les cas, l'absence d'enquête et de poursuites contre les auteurs de ces actes a créé un climat d'impunité. La Rapporteuse spéciale a observé enfin qu'en temps de conflit, les États ne sont pas exemptés de leur obligation de protéger et de prévenir les actes de violence à l'égard des femmes.

MME ZOHRA RASEKH, Vice-Présidente du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, a déclaré que, depuis sa création, le Comité a toujours fait preuve de vigilance quant aux atteintes aux droits des femmes en période de conflit armé et dans les situations d'après-conflit. Pour ce faire, le Comité examine les rapports des États parties qu'il complète par des observations, et formule des recommandations, en particulier ses Recommandations générales no 19 et no 28. Dans le cadre de ses attributions, le Comité demande aux États parties de produire des rapports exceptionnels sur les droits des femmes dans les situations de crise, de conflit et d'après-conflit. À 48e session, le Comité a ainsi examiné le rapport d'un État partie où les femmes avaient été victimes d'abus d'ordres sexuel, psychologique, social et économique.

Mme Rasekh a encore rappelé que le Comité réclame depuis toujours la participation égalitaire des femmes à tous les processus de reconstruction, de maintien de la paix et de négociations de paix. Étant donné que la violence à l'égard des femmes – et sa forme la plus abjecte, la violence sexuelle dans les situations de conflit – est devenue épidémique, le Comité a aussi décidé, à sa 47e session, en octobre 2010, d'adopter une Recommandation générale qui met en exergue l'impact unique et disproportionné des conflits armés sur les femmes. Mme Rasekh a noté que les périodes de transition et les activités de maintien de la paix au sortir d'un conflit fournissent des opportunités stratégiques pour transformer l'existence des femmes, dans tous ses aspects. Au bout du compte, les sociétés en reconstruction et émergeant de conflits ont la possibilité de jeter les bases législatives et politiques de la protection les femmes, pour donner un sens aux concepts de responsabilisation, de reddition de compte, de sécurité, de paix, de justice et de réparations.

M. MAREK MARCZYNSKI, d'Amnesty International, a indiqué avoir eu l'occasion de parler à des femmes victimes de violence en Bosnie-Herzégovine. Ces femmes lui ont expliqué que les responsables des exactions dont elles avaient souffert étaient au pouvoir, et qu'ils avaient même parfois la responsabilité de décider des indemnisations aux victimes. Le représentant a regretté que les femmes n'aient pas voix au chapitre à ce sujet. Selon Amnesty International, après un conflit armé, les femmes ayant subi des violences demandent avant tout justice. La difficulté est de réunir les conditions pour que la justice soit rendue. Les sociétés dominées par des hommes ne jugent pas cette question prioritaire, a constaté le représentant, notamment parce que le viol commis à grande échelle n'y est pas considéré comme un crime contre l'humanité. Amnesty International a d'ailleurs constaté une absence de définition du viol conforme aux normes internationales dans nombre de codes pénaux.

Les victimes ont droit à la vérité, qui est elle-même une condition essentielle de la paix, a ajouté M. Marczynski. Or, dans l'après-guerre, la priorité va aux hommes, aux anciens combattants notamment, qui obtiennent aisément des pensions, contrairement aux femmes qui doivent surmonter de nombreux obstacles pour faire valoir leurs droits. Le soupçon quant à la réalité de ce qu'elles ont subi est la règle, un soupçon qui s'appuie de manière particulièrement injuste sur le fait que ces femmes victimes ont survécu à leur épreuve, a conclu M. Marczynski.

Aperçu des déclarations

La délégation de l'Estonie a appuyé les résolutions du Conseil de sécurité relatives aux violences faites aux femmes dans les situations de conflit et a estimé que ce sujet devrait constamment être dans le collimateur du Conseil des droits de l'homme et autres mécanismes des Nations Unies. L'Estonie a participé, il y a un an, au débat animé du Conseil de sécurité à l'occasion du dixième anniversaire de la résolution 1325 sur «les femmes, la paix et la sécurité», a fait savoir la déléguée. La délégation des États-Unis a également mentionné le dixième anniversaire de la résolution 1325, de même que l'intervention d'Hillary Clinton, dans laquelle la Secrétaire d'État appelait à l'indispensable lutte contre la violence à l'égard des femmes dans toutes les activités liées aux conflits armés et au maintien de la paix. La prévention de cette violence n'est toujours pas reconnue comme un élément important de la réalisation de la paix et de la sécurité internationales, a remarqué la représentante, faisant part de sa préoccupation également devant les violences faites aux femmes pendant la période de transition dans plusieurs pays arabes, en particulier en Syrie, en Libye et au Yémen.

Le représentant de la Palestine, au nom du Groupe arabe, a souligné que la lutte contre la violence à l'égard des femmes dans les territoires palestiniens occupés exige non seulement une approche multisectorielle mais également des ressources spécifiques. La délégation du Gabon a situé le débat dans le contexte de la dignité de l'être humain. Elle a souligné que les violences à l'égard des femmes sont trop souvent «subtiles», ayant lieu dans la sphère privée. Elle a indiqué que le nouveau Président gabonais a mis en place un cadre juridique et des plans d'action en faveur de la femme et a encouragé le Conseil à organiser davantage de journées thématiques. La délégation de la France a décrit les différentes mesures prises par son pays, tant au plan national qu'au sein de l'Union européenne, en vue du renforcement de la prise en compte des besoins des femmes dans les conflits armés. La prise de conscience internationale a conduit au renforcement des mandats de maintien de la paix, de prévention et de suivi et de la lutte contre l'impunité, s'est félicité le représentant. L'une des solutions réside aussi dans la prise en compte de cette dimension par les pays émergeant d'un conflit. Le représentant a salué le rôle important du Haut Commissariat dans la documentation des crimes, en particulier.

La déléguée des Émirats arabes unis a mentionné l'approche multisectorielle adoptée par son pays dans la lutte contre la violence à l'égard des femmes, ainsi que les mesures pénalisant cette forme de violence adoptées par les Émirats arabes unis. Des foyers et des centres de soutien social ont été ouverts; les médias ont été sollicités pour des campagnes de sensibilisation; un Bureau du rôle de la famille a été créé. Dans les commissariats de police, plusieurs initiatives visent à atténuer les souffrances des femmes. La délégation de l'Argentine a informé sur la profonde réforme institutionnelle dans son pays visant notamment une meilleure insertion professionnelle des femmes et l'égalité entre les sexes. Pour appliquer la résolution 1820 du Conseil de sécurité, les responsables de la police et de l'armée sont formés aux principes du code de conduite des Casques bleus, a encore informé la représentante argentine.

La délégation du Portugal a déclaré que la violence conjugale et la violence domestique comptent parmi les formes les plus graves de violence. Il a indiqué que le Portugal a élargi les concepts juridiques de victime et d'auteur de ce crime, et les peines encourues aggravées. Le Portugal a adopté un plan national de lutte contre la violence, prévoyant l'accès des victimes à des mécanismes de plaintes, a conclu le représentant. La représentante de la Colombie a déclaré que l'axe central de la loi 1207 adoptée en 2008 est le rejet de la violence et l'affirmation du droit de la femme à vivre dans une société exempte de violence sexiste. La déléguée de la Fédération de Russie a qualifié de «crime odieux» la violence domestique et s'est érigée contre l'usage excessif de la force par les autorités. Elle a appelé à l'application de la résolution 1325 du Conseil de sécurité, qui n'a pas été réellement appliquée, plus de dix années après son adoption. L'Équateur a observé que la violence présente «de nombreux visages et nuances», à commencer par la pauvreté, l'exclusion, la marginalisation, la migration, l'exploitation sexuelle, la traite, la migration, les déplacements et le fait de ne pas avoir voix au chapitre. La représentante équatorienne a appelé les États à œuvrer avec la société civile. Le représentant du Maroc a estimé que la violence contre les femmes appelle la mobilisation de tous les pays. Le représentant du Burkina Faso a indiqué que son pays a souscrit à tous les instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de la personne, et donc de la femme.

Les organisations non gouvernementales qui ont participé aux débats ont apporté des informations puisées sur le terrain illustrant les répercussions préjudiciables des situations de conflit sur les femmes. La représentante de l'Alliance internationale d'aide à l'enfance a relevé le grave impact sur les enfants de la destruction des infrastructures économiques. Elle a mentionné des rapports et statistiques sur les incidences dramatiques des conflits sur les enfants en Sierra Leone, en République démocratique du Congo et ailleurs. La représentante de l'Association colombienne des juristes a décrit sa propre situation. Mère de trois enfants, elle a été déplacée de force et s'est consacrée aux droits des personnes déplacées. En tant que femme d'ascendance africaine, elle a été menacée, ainsi que les femmes de sa communauté, a-t-elle expliqué. La représentante a informé le Conseil que mercredi, à Medellin, Mme Cordoba, une femme déplacée d'ascendance africaine, a été assassinée parce qu'elle réclamait le respect de ses droits. La représentante de la Colombie s'était auparavant elle aussi émue du sort de Mme Cordoba.

La délégation de la Suisse a déclaré que le droit international, même en temps de conflit, est sans équivoque: les crimes sexuels sont interdits et les auteurs de ces actes doivent être traduits en justice. Pour l'Algérie, la lutte contre ces phénomènes doit se faire dans la cadre global des politiques sociales incluant l'accès à l'éducation ou l'autonomisation. Dans son pays, la prévention est prioritaire, a déclaré la délégation. De plus, l'Algérie partage l'idée que la violence ou l'occupation étrangère accroissent les risques pour les femmes de subir des violences. La délégation du Bangladesh a pour sa part estimé que la pauvreté est une des causes des violences à l'égard des femmes. C'est pour cela que son pays se focalise sur la lutte contre la pauvreté. En Iraq, les femmes sont devenues les égales des hommes, ce principe ayant été inscrit dans la Constitution, a déclaré sa représentante. Les femmes iraquiennes jouissent, aujourd'hui, du statut le plus favorable dans le monde arabe, même si elles subissent encore des pressions, notamment du fait du terrorisme. Le représentant du Qatar a, lui, qualifié de «fléau» la violence à l'égard des femmes et estimé que la violence domestique était la pire qui soit.

À Sri Lanka, les femmes sont reconnues comme des partenaires du développement; la loi interdit expressément toute violence à leur égard, a souligné son représentant. Le représentant de la République de Corée a regretté que, malgré l'ampleur du fléau, aucune solution n'ait encore été trouvée à la violence contre les femmes dans les conflits. Les acteurs non-étatiques ne doivent pas être dédouanés de leur responsabilité, surtout en temps de conflit: les groupes armés doivent répondre des actes de violence commis sur les femmes.

Le représentant de l'Organisation internationale de la Francophonie a indiqué que l'OIF avait mené sur le terrain des actions de réhabilitation auprès de 800 femmes, particulièrement dans la région du Kivu, en République démocratique du Congo. Il lui est apparu que le problème majeur était l'absence de coordination entre les différents acteurs de terrain. Dans ce contexte, le représentant a plaidé pour une meilleure concertation entre organisations non gouvernementales, institutions financières internationales et agence des Nations Unies, dans le but de rationaliser les actions et accroitre l'efficacité sur le terrain. Le représentant de l'Union africaine a regretté que l'on soit toujours incapable d'exploiter «la meilleure partie de l'humanité» pour renforcer les démocraties et promouvoir le développement. Opinion partagée par le Danemark, selon la représentante duquel les femmes sont des acteurs cruciaux du développement. Avec la délégation de l'Espagne, la représentante danoise a demandé aux panélistes comment le Conseil peut-il contribuer aux efforts de la communauté internationale, et notamment ceux du Conseil de sécurité.

La représentante du Mexique a souligné que son pays a toujours appuyé les résolutions des Nations Unies relatives aux femmes. Dans le cadre national, le Mexique a pris des mesures de protection et des programmes spécifiques pour les femmes. Dans le même ordre d'idée, la représentante a estimé que le Conseil devait accroitre son rôle en matière de protection des droits des femmes. Intervenant à son tour l'Union européenne a indiqué avoir adopté 17 critères pour évaluer ses performances en matière de protection des droits des femmes. Cependant, les condamnations fortes des résolutions des Nations Unies doivent être accompagnées d'actions fortes sur le terrain a ajouté la Norvège.

Le Fonds des Nations Unies pour la population et le Fonds des nations Unies pour l'enfance, dans une déclaration conjointe, ont souligné qu'il fallait regarder de plus près les conditions d'inégalité, sources de discrimination. Face à ces situations, des actions urgentes sont nécessaires, a conclu l'organisation non gouvernementale Union de l'action féminine.

Réponses et conclusions des panélistes

MME WALSTRÖM a souligné que les conséquences sociales des violences contre les femmes sont totalement sous-estimées. La question doit rester à l'ordre du jour du Conseil de sécurité. Il faut aussi fixer des quotas de femmes dans les instances de gestion des situations d'après-conflit, pour que les femmes se fassent réellement entendre, a estimé la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la lutte contre les violences sexuelles dans les conflits armés. Répondant à la France, Mme Wallström a indiqué que les priorités qu'elle a fixées au début de son mandat sont toujours d'actualité. Il sera peut-être nécessaire de mettre un prix aux violences sexuelles exercées sur les femmes, a-t-elle ajouté: les treize organismes des Nations Unies concernés par le problème devraient réfléchir ensemble à cette question. Mme Wallström a enfin fait savoir qu'elle travaillait à l'élaboration d'indicateurs d'alerte rapide aux exactions de grande ampleur, pour y sensibiliser les soldats chargés du maintien de la paix.

MME MANJOO a affirmé, en réponse aux interrogations sur la possibilité de mise au point de systèmes d'alerte rapide sur les violences sexuelles, qu'il existe déjà un éventail de mesures de prévention: l'expérience acquise à ce titre permet désormais de développer des systèmes d'alerte rapide. Ceci dit, on constate aussi toute une série d'abus des droits de l'homme dans les situations de conflit, qui ne se limitent pas uniquement aux violences à l'égard des femmes, a constaté la Rapporteuse spéciale sur la violence à l'égard des femmes. Par ailleurs, le problème soulevé par Amnesty International est pertinent: il est toujours difficile de dépasser l'approche technocratique de certains États dans la mise en œuvre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et des organes des droits de l'homme de l'ONU. Il ne suffit pas d'adopter des plans d'action, a-t-elle insisté, mais bien de trouver les moyens concrets de traduire dans la réalité les principes énoncés dans le droit international se rapportant aux droits de l'homme et dans le droit international humanitaire.

M. RASEKH a déclaré que la corruption est un des facteurs de l'impunité, notamment dans les pays en conflit ou en situation d'après-conflit. L'experte du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a dit partager l'opinion selon laquelle il faut faire participer les hommes aux programmes de lutte contre la violence à l'égard des femmes. Mme Rasekh a insisté sur le rôle clef que peuvent jouer les institutions internationales dans la mise en œuvre des recommandations et résolutions de la communauté internationale, notamment la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité. «Je sais que beaucoup de pays ont signé les instruments internationaux, qu'ils appliquent la résolution du Conseil de sécurité et organisent ou participent à des forums sur ce sujet. Mais ils ne dénoncent pas l'absence des femmes à ces rencontres internationales», a regretté Mme Rasekh. Pour résoudre les situations de conflit, il faut assurer la pleine participation des femmes à la résolution des problèmes qui les concernent, a conclu Mme Rasekh.

M. MARCZYNSKI a déclaré qu'il ne suffit plus de s'engager, mais qu'il faut agir désormais. Amnesty International entend se concentrer sur la violence non seulement sexuelle mais aussi sexiste. Il est absolument prioritaire de traduire en justice les responsables d'exactions et de lancer des programmes de réparations, avec des garanties de non répétition. Ces programmes doivent être élaborés avec le concours des femmes. Il faut en finir avec la perception selon laquelle les femmes ne sont que des victimes: les femmes savent ce qu'elles veulent, elles doivent pouvoir s'exprimer.

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