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Le Conseil des droits de l'homme tient un débat sur les enfants privés de liberté et les enfants de parents incarcérés

Arrière

08 mars 2012

APRES MIDI

8 mars 2012

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, cet après-midi, une réunion-débat sur les questions relatives aux enfants privés de liberté et aux enfants de parents incarcérés, dans le cadre de deux séances consacrées aux droits de l'enfant, dont la première s'est tenue ce matin.

Les échanges ont été ouverts par M. Sandeep Chawla, Directeur exécutif adjoint de l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime. Les panélistes étaient Mme Marta Santos Pais, Représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence à l'égard des enfants, qui a traité de la prévention et des réponses à la violence contre les enfants dans le système de justice; Mme Rani Shankardass, Secrétaire générale de l'Association pour la réforme pénale et la justice (PRAJA-Inde) qui a abordé la question des enfants de parents incarcérés dans les pays en développement; M. Luis Pedernera, du Réseau d'Amérique latine et des Caraïbes pour la défense des enfants et des adolescents (REDLAMYC), qui a fait un exposé sur les conditions of détention; M. Dainius Pûras, chef du Centre de psychiatrie enfantine et de pédiatrie sociale de l'Université de Vilnius et ancien membre du Comité des droits de l'enfant, qui a attiré l'attention sur le droit à la santé en détention, notamment la santé mentale; et M. Abdul Manaff Kemokai, Directeur exécutif de Defence for Children International au Sierra Leone, qui a fait une présentation sur la réhabilitation et la réintégration dans la société.

M. Chawla a souligné que plus d'un million d'enfants étaient privés de liberté dans le monde. Beaucoup n'ont commis aucun crime ou délit et n'ont été appréhendés que pour faits de vagabondage. La grande majorité des enfants en attente de procès n'a jamais rencontré d'avocat. Dans la plupart des pays, le cadre légal est inadapté, tandis que les institutions d'État manquent de capacités opérationnelles. Les systèmes de justice pénale sont alors censés remplacer des systèmes de protection inadéquats, a constaté le Directeur exécutif adjoint de l'ONUDC.

Mme Santos Pais a attiré l'attention sur une réunion d'experts qui avait notamment conclu qu'il est essentiel de promouvoir des systèmes de protection de l'enfance nationaux forts et cohérents, de réduire les cas d'enfants en contact avec le système de justice des mineurs et de traiter la question de la protection des enfants contre la violence au sein du système de justice. M. Pûras a souligné qu'un domaine important souvent négligé est celui de la santé mentale et du bien-être émotionnel des jeunes délinquants. La question de santé mentale doit être considérée comme une des priorités dans la gestion des problèmes de santé des enfants et des adolescents privés de liberté, le suicide étant le plus important d'entre eux.

Mme Shankardass a souligné que les États avaient des obligations particulières envers les enfants de personnes détenues; dans les pays en développement, ce sujet est le parent pauvre du système pénal, confronté à des lacunes importantes et profondément ancré dans une tradition coloniale de bureaucratie pesante et de codes rigides. S'agissant de l'Amérique latine, M. Pedernera a déclaré que la tendance actuelle consiste à accuser de l'insécurité les mineurs livrés à eux-mêmes et à imposer des mesures restrictives à leur encontre. Il faudrait donner la priorité aux mesures préventives et renoncer à la répression et aux mesures punitives. En ce qui concerne la situation en Afrique, M. Kemokai a rappelé que le traitement des jeunes délinquants doit avoir pour objectif majeur leur réinsertion au sein de sa famille ainsi que leur réadaptation sociale. La réadaptation des délinquants implique le pardon et la réconciliation avec la victime, y compris les victimes indirectes.

Au cours du débat, tout en mettant en avant les dispositions les plus favorables de leur propre législation, de nombreuses délégations ont souligné le besoin de connaître les meilleures pratiques dans le monde sur ces questions. La détention des mineurs devrait constituer une mesure de dernier recours, a-t-il été fréquemment souligné, et elle devrait être aussi brève que possible car elle favorise de fait la récidive. Plusieurs orateurs ont rappelé qu'il convenait de prendre en considération l'environnement de l'enfant, la délinquance étant souvent favorisée par la pauvreté, la marginalité et le déclassement.

Les délégations suivantes ont pris la parole: Royaume-Uni, Algérie, Arménie, Suisse, États-Unis, Brésil, Azerbaïdjan, Mauritanie (au nom du Groupe arabe), Slovénie, Turquie, République démocratique du Congo, Uruguay, République de Corée, Tunisie, Géorgie, Chili, Cuba, Fédération de Russie, Maroc, Portugal, Maldives, Comité consultatif mondial de la Société des amis - Quakers, Union arabe de juristes, Défense des enfants - international et l'Organisation internationale du travail.

À la reprise des travaux, demain matin à 10 heures, le Conseil reprendra son débat général sur la promotion et la protection de tous les droits de l'homme. À 15 heures, il doit se pencher sur le rapport de la Commission d'enquête sur la situation des droits de l'homme en Libye.

Promotion et protection des droits des enfants privés de liberté et des enfants de parents incarcérés

Déclaration liminaire

M. SANDEEP CHAWLA, Directeur exécutif adjoint de l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a déclaré que la principale difficulté pour les États réside dans le manque de statistiques relatives aux enfants en contact avec la justice. Dans la plupart des pays, le cadre légal est inadapté, tandis que les institutions d'État manquent de capacités opérationnelles. Les systèmes de justice pénale sont alors censés remplacer des systèmes de protection inadéquats, a analysé M. Chawla. Selon les chiffres disponibles, plus d'un million d'enfants sont privés de liberté dans le monde. Très peu d'entre eux ont commis des crimes violents. Beaucoup n'ont commis aucun crime ou délit et n'ont été appréhendés que pour faits de vagabondage. La grande majorité des enfants en attente de procès n'a jamais rencontré d'avocat. Par ailleurs, les conséquences des violations des droits de l'enfant dans l'administration de la justice ne doivent pas être sous-estimées, notamment en ce qu'elles entravent le développement de l'enfant, a poursuivi M. Chawla. Dans ce contexte, il a rappelé l'obligation que constitue la protection des enfants dans le cadre des engagements internationaux des États parties aux instruments pertinents. Les réponses à ces problèmes sont multiples. De son côté, l'ONUDC a pris plusieurs initiatives, dont des consultations d'experts sur la prévention et les réponses à la violence contre les enfants dans les systèmes de justice pour enfants. Une de ces consultations s'est tenue à Vienne, les 23 et 24 janvier dernier. Le rapport sur ces consultations sera soumis au Conseil à sa session de septembre prochain.

Présentations de panélistes

MME MARTA SANTOS PAIS, Représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence contre les enfants, a indiqué avoir participé à la consultation d'experts susmentionnée sur la prévention et les réponses à la violence contre les enfants dans le système de justice des mineurs et a retenu trois recommandations importantes issues de cette réunion. En premier lieu, il est essentiel de promouvoir des systèmes nationaux de protection de l'enfance forts et cohérents. En second lieu, il est tout aussi essentiel de réduire les cas d'enfants en contact avec le système de justice des mineurs. Car cette forme de justice ne peut constituer une réponse à l'absence de système de protection de l'enfance. On ne doit pas donner le champ libre à la stigmatisation, à la criminalisation et à la traduction en justice des enfants les plus vulnérables de la société. Il est essentiel de dépénaliser les comportements de survie et de préserver les droits des enfants à risques. Il est urgent de faire coïncider l'âge minimal de la responsabilité pénale avec les normes internationales, de même qu'il est vital de réduire limiter la privation de liberté aux situations où elle constitue réellement une mesure d'ultime recours et pour la durée la plus brève possible. Il est en effet essentiel de ne pas favoriser les conditions favorisant la récidive. La troisième dimension mise en évidence par la consultation de Vienne a trait à la responsabilité de la protection des enfants contre la violence au sein du système de justice. Les enfants risquent de subir la violence au moment de l'arrestation, pendant la détention avant le jugement et après la condamnation. Nombre de mineurs subissent des violences de toutes natures, particulièrement lorsqu'ils incarcérés avec des adultes. Cette violence invisible et cachée illustre la forte tension entre des normes très protectrices de l'enfant et une réalité bien différente.

Malgré cette triste réalité, on dispose de peu d'informations solidement étayées, ce qui alimente une culture de l'impunité. Il est donc crucial de responsabiliser les intervenants concernés, de créer des mécanismes de prévention de la violence, d'enquêter sur les abus et de demander des comptes à leurs auteurs. Pour atteindre cet objectif, il faut notamment interdire, par la loi, l'utilisation de la violence comme un moyen d'imposer la discipline; et contrôler les lieux de détention pour mineurs, par exemple par le biais des visites inopinées d'institutions indépendantes chargés des droits de l'enfant.

MME RANI SHANKARDASS, Secrétaire générale de l'Association pour la réforme pénale et la justice (PRAJA-Inde), a souligné que les États ont des obligations particulières envers les enfants de personnes détenues, notamment en remédiant aux répercussions de l'absence des parents. Dans les pays en développement, ce sujet est le parent pauvre du système pénal, confronté à des lacunes importantes en matière de collecte de statistiques et profondément ancré dans une tradition coloniale – bureaucratie pesante et codes rigides. Nombre de pays d'Asie du Sud ont adopté des lois et instruments nationaux ou internationaux sur la justice pour mineurs, ce qui n'empêche pas que la catégorie «enfants de parents incarcérés» brille par son absence de reconnaissance dans le système de justice pénale. De plus, les familles des personnes incarcérées sont généralement les plus pauvres et démunies, elles sont privées des moyens et des connaissances nécessaires pour faire valoir leurs droits. Pour remédier aux effets de l'incarcération des parents sur leurs enfants, on commencera par porter le problème à l'ordre du jour national, par combler les lacunes statistiques concernant cette catégorie de justiciables et par tenir compte des conséquences familiales de l'incarcération des femmes.

M. LUIS PEDERNERA, du Réseau d'Amérique latine et des Caraïbes pour la défense des enfants et des adolescents (REDLAMYC), a déclaré qu'en Amérique latine, la tendance actuelle consiste à accuser les enfants de l'insécurité et à imposer des mesures restrictives à leur encontre. Le débat fait rage: faut-il sanctionner les enfants de la même manière que les adultes? M. Pedernera a souligné que bien que les pays de la région aient ratifié la plupart des instruments internationaux relatifs à la protection de l'enfance, rien n'a été fait pour les traduire en réalité sur le terrain. Ainsi, les policiers continuent-ils d'arrêter des enfants en fonction de leur apparence; le système judicaire les prive de liberté, hors de toute proportionnalité, quitte à causer des problèmes de surpopulation carcérale. De même, les pays de la région continuent de condamner des enfants à mort, de les torturer et de nier la nécessité de leur rétablissement psychosocial, de détenir avec leurs parents des enfants n'ayant commis aucun délit... De façon globale, le système ne cesse de régresser. Il faudrait au contraire donner la priorité aux mesures préventives et renoncer à la répression et aux mesures punitives. Il faudrait, en résumé, ne plus considérer les enfants comme des ennemis, a-t-il plaidé, soulignant qu'il revient aux institutions internationales, dont la Cour interaméricaine de droits de l'homme, de prendre leurs responsabilités en ce sens.

M. DAINIUS PÛRAS, Directeur du Centre de psychiatrie infantile et de pédiatrie sociale de l'Université de Vilnius (Lituanie), membre du Comité des droits de l'enfant de l'ONU de 2007 à 2011, a attiré l'attention sur le domaine important mais souvent négligé de la santé mentale et du bien-être émotionnel des jeunes délinquants. Les questions de santé mentale doivent être considérées comme une des priorités dans la gestion des problèmes de santé des enfants et des adolescents privés de liberté, le suicide étant le plus important d'entre eux. Les taux élevés de tentatives de suicide et les suicides réussis chez les mineurs privés de liberté illustrent la vulnérabilité de cette population et la nécessité urgente d'aborder de manière adéquate la santé mentale et le bien-être émotionnel de ces enfants. Il est d'une importance cruciale que les problèmes de santé mentale soient traitées de manière thérapeutique, non-stigmatisante, en prenant garde de ne pas renforcer le cercle vicieux de la violence.

À cet égard, il est d'une importance capitale à garder à l'esprit que la violence devrait être gérée comme un problème de santé publique, a-t-il observé. De ce point de vue, la violence, qu'elle soit initiée par l'individu, le groupe ou le système lui-même, est une expression d'échec. Elle est généralement un symptôme de désespoir et de manque de compétences efficaces pour faire face à des difficultés. Les interventions modernes en matière de santé publique, en particulier dans le domaine de la santé mentale, sont basées sur la non-violence, en faveur de relations empreintes de respect. Il s'agit, en quelque sorte, d'investir dans «l'alphabétisation émotionnelle» et d'apprendre aux mineurs aux adultes à gérer leurs sentiments et leurs comportements de manière constructive. M. Pûras juge alarmants les nombreux signes de régression observés ces dernières années par le Comité des droits de l'enfant. Une tendance répressive se fait jour, étayée moins par des preuves d'une hypothétique augmentation des cas de violence chez les jeunes que par les accès de panique du grand public et des politiques, avec une forte tendance à la diabolisation des jeunes dans les médias. En corollaire, on enregistre un durcissement des politiques pénales envers les mineurs.

M. ABDUL MANAFF KEMOKAI, Directeur exécutif de Defence for Children International en Sierra Leone, a rappelé qu'aux termes de la Charte africaine sur les droits et le bien-être des enfants – instrument régional complétant la Convention relative aux droits de l'enfant – le traitement des jeunes délinquants a pour objectif majeur leur réinsertion au sein de sa famille ainsi que leur réadaptation sociale. La réintégration et réadaptation constituent un processus de réforme des délinquants devant s'inscrire dans le cadre d'une législation à caractère contraignant. Le processus consiste à ramener au sein de leur famille, ou de leurs communautés, des enfants qui étaient à la rue ou placés en institution. M. Kemokai a signalé que, bien que les deux termes paraissent différents, ils sont en fait synonymes dans leur application puisque la réintégration passe d'abord par la réadaptation. Celle-ci requiert des changements psychologiques et physiques positifs chez l'enfant, ce qui signifie des comportements acceptables aux yeux de la société. Il en ressort que la réadaptation des délinquants implique le pardon et la réconciliation avec la victime, y compris les victimes indirectes. Au demeurant, la participation des victimes à un tel processus doit être de nature strictement volontaire; elle s'avère, dans certains cas, très difficile.

La première démarche consiste à mieux connaître l'enfant, ce qui exige un recours à des assistants sociaux qualifiés, susceptibles de fournir des renseignements exacts sur l'enfant et sur son environnement. En effet, les enfants en conflit avec la loi ne révèlent que rarement leur identité véritable que, la plupart du temps, le système judiciaire utilise à leur détriment plutôt que pour leur venir en aide. D'où la nécessité de mettre en place un système judiciaire attentif, qui évite de culpabiliser l'enfant, ce qui lui causerait d'autres traumatismes. L'expert a ensuite expliqué les différentes formes de réadaptation, notamment traditionnelles et culturelles – cérémonies de purification ou arrangements sociaux et financiers – en vigueur dans nombre de cultures africaines. Il a aussi décrit des formes de réadaptation institutionnalisée, de type colonial, qui ont encore cours dans de nombreux pays, en particulier la privation de liberté. En conclusion, l'expert a recommandé que le système de justice juvénile ne se limite pas au délit commis mais envisage un contexte élargi qui tienne compte des injustices sociales et économiques au sein de la famille et de la société. Une telle perspective est cruciale pour la prévention, la réadaptation et la réintégration, a conclu M. Kemokai.

Débat

Certaines délégations ont énuméré l'ensemble des mesures et législations en vigueur dans leur pays et dont le but est de protéger les droits et intérêts de l'enfant dans le cadre de l'administration de la justice. Ainsi, au Royaume-Uni, le système de justice a pour objectif, d'une part de prévenir les comportements criminels, d'autre part de favoriser la justice réparatrice, deux impératifs dont les juges doivent tenir compte lorsqu'ils prononcent des peines. En Algérie, les châtiments corporels contre les enfants qui auraient commis des délits sont illégaux. Les enfants dont les parents sont incarcérés sont placés, par les juges, dans des centres d'accueil où l'accent est mis en particulier sur la prise en charge psychologique. La justice en Arménie peut, compte tenu des dispositions légales, prononcer à l'encontre des mineurs des sanctions autres que la prison. Dans tous les cas, la détention doit rester le dernier recours et être de la plus courte durée possible, a pour sa part plaidé la Norvège.

La Suisse a observé que des millions d'enfants dans le monde sont affectés par l'incarcération d'un parent. Les États-Unis estiment essentiel que ces enfants puissent avoir des relations avec leurs parents détenus, à condition que ces derniers s'engagent à assumer leurs responsabilités parentales. Des programmes de formation peuvent être offerts à certains détenus afin qu'ils acquièrent précisément ces compétences. Le Comité consultatif mondial de la Société des amis - Quakers s'est interrogé sur les conditions de vie des enfants incarcérés avec leurs parents.

Les panélistes ont été priés par le Brésil de donner des exemples de pratiques de référence dans l'administration de la justice des jeunes qui puissent servir de source d'inspiration, tandis que l'Azerbaïdjan a souligné le besoin et l'utilité d'un recueil des bonnes pratiques dans ce domaine.

Par ailleurs la Mauritanie, au nom du Groupe arabe, a dénoncé les dérives constatées lors de catastrophes naturelles, notamment les enlèvements d'enfants. Dans ce cadre, la communauté internationale doit assumer ses responsabilités auprès des États victimes de catastrophes afin d'assurer la protection des enfants. L'Union arabe de juristes a décrit la situation catastrophique des enfants iraquiens, avant de tenir le Gouvernement de ce pays pour responsable et incapable de les protéger.

La Slovénie a assuré ne procéder à la détention de mineurs qu'en tout dernier ressort. Le délégué a prié les panélistes de donner des exemples de bonnes pratiques en matière de sensibilisation des professionnels de la justice en contact avec les enfants, et a posé des questions sur le traitement différentié des filles et des garçons dans le système judiciaire. La Turquie a observé que pour la première fois dans son histoire, des amendements à la Constitution sont spécifiquement consacrés à la promotion et à la protection des droits de l'enfant. Le délégué turc a invité à un Symposium international sur les enfants à risque, qui se tiendra les 24-25 avril 2012 à Ankara.

La République démocratique du Congo a ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant et deux Protocoles facultatifs s'y rapportant, ainsi que la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant. Elle a remercié l'UNICEF pour ses efforts d'accompagnement du Gouvernement dans la mise en œuvre de ses obligations internationales, en particulier s'agissant de l'enregistrement gratuit des naissances. En Uruguay, l'ouverture de centres de détention mieux adaptés au développement et aux besoins des mineurs, la formation du personnel, la construction d'espaces de détente et de loisirs, l'offre de formations professionnelles sont autant de mesures destinées à améliorer les conditions de vie des jeunes délinquants incarcérés.

La République de Corée a indiqué avoir remplacé ses «écoles de redressement» par des institutions inculquant des valeurs sociales, pour mieux réintégrer les jeunes. La déléguée a souligné les difficultés que posent la création de nouvelles infrastructures et la formation du personnel, particulièrement au plan budgétaire. La Tunisie a indiqué avoir institué un système législatif exhaustif, garantissant les droits des enfants et les protégeant contre la violence et l'exclusion. L'institution du juge familial a été créée en vertu de l'article 32 du nouveau code du statut personnel et a pour mission d'assurer la protection de l'enfant à risque.

En Géorgie, le taux de criminalité figurait, jusqu'à récemment, parmi les plus élevés de la région. La priorité a été accordée à la prévention et à l'assistance des jeunes les plus exposés aux risques de délinquance. Le Code pénal a été réformé en juillet 2010 pour permettre au Procureur de soustraire les jeunes, dans certains cas de faible gravité, au système de justice pénale. À ce jour, 95 jeunes ont d'ores et déjà bénéficié de cette nouvelle procédure.

Le Chili a encouragé l'adoption d'une approche plus favorable aux enfants à chaque étape de la procédure judiciaire, en prenant en compte le sexe et l'âge de l'enfant. À cet égard, la collaboration active des organisations internationales, de la presse et des organisations de la société civile est indispensable.

Cuba a indiqué que les jeunes Cubains qui ont besoin d'une assistance supplémentaire peuvent compter sur une assistance zélée et qualifiée au sein notamment des «écoles de réintégration». Ces établissements dispensent un enseignement professionnel doublé de travaux pratiques, un enseignement général et des programmes de modification du comportement. À leur sortie, les jeunes bénéficient d'une aide à la recherche d'un emploi. La Fédération de Russie a indiqué qu'un certain nombre d'établissements pénitentiaires sont en cours de réfection en vue de leur conversion en centres de réintégration et de préparation à la réinsertion sociale. Un Code de procédure pénale adapté aux mineurs a été adopté et des médiateurs ont été nommés dans différentes zones: ils ont librement accès aux mineurs pris dans le système judiciaire. On observe depuis peu, en Russie, une diminution régulière du taux de criminalité et de récidive chez les mineurs. Le Maroc a décrit ses nouvelles stratégies destinées à favoriser le bien-être des mineurs; en particulier, le Code du statut personnel a été modifié. Le Code pénal contient désormais des dispositions précises sur la garde des enfants de parents incarcérés.

Défense des enfants - international a dénoncé les conditions d'incarcération d'enfants mineurs, souvent en compagnie d'adultes et sans accès à l'éducation. Il a appelé à un recours minimal à la détention préventive. La détention d'enfants migrants ne saurait d'autre part être justifiée.

L'Organisation internationale du travail a posé plusieurs questions portant notamment sur les mesures permettant de poursuivre des adultes qui entraînent des mineurs dans la délinquance. Elle s'est aussi interrogée sur les mesures à prendre pour assister, réhabiliter et réintégrer socialement les enfants victimes d'exploitation.

Le Portugal a demandé aux experts quels exemples de bonnes pratiques ils pouvaient donner quant à la participation des enfants aux procédures judiciaires, ainsi qu'aux remèdes effectifs que les systèmes judiciaires pouvaient apporter à cet égard.

Enfin, la représentante des Maldives s'est alarmée de l'accroissement de l'implication des enfants mineurs dans la violence des gangs. Elle a indiqué que son pays avait créé un tribunal des mineurs qui veille au respect des droits de cette catégorie de la population. La loi sur la protection des mineurs est en train d'être amendée afin de l'aligner sur les dispositions de la Convention des droits de l'enfant.

Conclusions des experts

M. CHAWLA a insisté sur la priorité à donner à l'insertion plutôt qu'à la punition. La coordination des systèmes judiciaire, éducatif, sociaux et de santé publique doit être le maître mot, a-t-il également souligné.

MME SANTOS PAIS a mis en garde contre la marginalisation des jeunes confrontés à la justice. La majorité de ces enfants ne devrait d'ailleurs pas être déférés à la justice, sachant qu'il existe des mesures plus efficaces que l'incarcération. Lorsqu'ils sont engagés dans une procédure, les enfants doivent pouvoir se faire entendre et comprendre les tenants et les aboutissants des démarches qui les concernent. Ils doivent aussi savoir que des personnes sont prêtes à les aider à trouver une solution. Les enfants ne doivent plus être considérés comme une source de danger. Mme Santos Pais a aussi évoqué la question de la justice réparatrice, qui doit contribuer à empêcher la stigmatisation et la marginalisation des enfants. Quant à la récidive, elle s'est félicitée des efforts extraordinaires accomplis dans ce domaine par un pays comme l'Indonésie. Nous espérons apprendre de votre expérience en la matière, a-t-elle dit à l'intention de cette délégation. Parmi d'autres bons exemples, elle a aussi cité Zanzibar, où elle s'est rendue récemment.

MME SHANKARDASS a observé que la création d'un environnement carcéral propice aux enfants est illusoire: la prison n'est pas un milieu sain pour un enfant. Des recherches doivent être réalisées sur la manière dont les enfants ayant des parents incarcérés s'accommodent ou non de leur sort. Par ailleurs, l'experte a appelé à la rédaction de lignes directrices sur l'incarcération des parents: pour sa part, elle estime que l'on ne devrait pas incarcérer les mères.

M. PEDERNERA, répondant à une question de l'Allemagne sur le rôle des médias, a estimé qu'ils doivent d'autant plus agir que ce sont eux qui stigmatisent les jeunes, en Amérique latine notamment. S'agissant de l'application de bonnes pratiques, M. Pedernera a estimé que les enfants doivent tout simplement aller à l'école: c'est encore la meilleure manière d'éviter leur stigmatisation par les autres enfants ou par les médias. M. Pedernera estime aussi que les établissements carcéraux fermés pour mineurs délinquants ne sont pas une bonne solution. Les mineurs doivent au contraire être encouragés à interagir avec le monde extérieur. Les peines privatives de liberté sont chères et contreproductives.

M. PÛRAS a déclaré que la prévention secondaire peut réduire le nombre d'enfants détenus. Cette forme de prévention exige cependant une volonté politique. La pire situation est celle des bébés placés en institutions pendant que leur mère est incarcérée: des études neurologiques ont montré les effets négatifs de cette situation en termes de développement de l'enfant.

M. KEMOKAI a précisé que ce sont, généralement, les bébés ou les enfants de moins de cinq ans qui sont autorisés à rester avec leur mère en prison. À partir d'un certain âge, les enfants doivent quitter la prison. Le Gouvernement doit alors trouver une personne compétente pour s'occuper de l'enfant. En Sierra Leone, les grands-mères ou les tantes sont souvent chargées de l'enfant séparé de sa mère. Un travailleur social est affecté à l'enfant, chargé de suivre ses progrès scolaires et son intégration dans la communauté.

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