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Une experte des droits de l’homme de l’ONU s’inquiète de possibles représailles lors de sa récente visite au Myanmar

Arrière

24 janvier 2017

GENÈVE (24 janvier 2017) - La Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, Yanghee Lee, a mis en garde aujourd’hui contre d’éventuelles représailles à l’égard des personnes qu’elle a rencontrées lors de sa récente visite officielle dans le pays (du 9 au 21 janvier). " Il y a un mot qui a lourdement pesé sur ma conscience au cours de cette visite – les représailles, " a déclaré l’experte.

" Je suis profondément préoccupée par le sort des personnes que j’ai rencontrées et avec lesquelles je me suis entretenue, qui se montrent critiques à l’égard du gouvernement, qui défendent les droits des autres et expriment des pensées et des opinions en désaccord avec les discours de ceux qui sont au pouvoir, " a-t-elle ajouté, tout en notant le recours croissant à la section 66 (d) de la Loi sur les télécommunications contre des personnes qui n’ont fait qu’exprimer leur point de vue.

" Il est particulièrement alarmant d’apprendre la reprise des opérations des forces de sécurité à Maungdaw, un village au nord de l’État de Rakhine, après une brève accalmie, avec des raids menés dans plusieurs villages, y compris à proximité de ceux dans lesquels je me suis rendue, " a-t-elle souligné. Des allégations font état d’arrestations et de détentions arbitraires en lien avec ces derniers raids signalés.

Mme Lee s’est dit particulièrement inquiète d’avoir noté au cours de sa visite que les sentiments d’optimisme et d’espoir semblaient disparaître peu à peu au sein de la population ordinaire au Myanmar, à peine un an après avoir célébré dans l’allégresse les résultats des dernières élections générales.

La Rapporteuse spéciale a regretté de ne pas être autorisée à se rendre ailleurs qu’à Myitkyina, notamment à Laiza et Hpakant dans l’État de Kachin, pour des raisons de sécurité ; elle a toutefois pu aborder des voyageurs qui se rendaient à Myitkyina.

" Il est évident que la situation à Kachin et aux frontières septentrionales se détériore, " a-t-elle déclaré. " Dans l’État de Kachin, on me dit que la situation est pire aujourd’hui qu’elle ne l’a jamais été ces dernières années. Je n’ai pas été en mesure de voyager dans les régions les plus sévèrement touchées, mais la situation est telle à présent que même à Myitkyina, la capitale de l’État, où résident plus de 300 000 personnes, les habitants ont peur et restent chez eux après la tombée de la nuit. "
 
Dans l’État Môn, Mme Lee a visité pour la première fois un camp de travaux forcés où elle a pu observer les conditions de vie des prisonniers. L’utilisation de menottes, pour alourdir encore le châtiment infligé (y compris pour ceux qui travaillaient dans la carrière) ainsi que le manque de transparence eu égard au transfert des prisonniers à destination du camp sont pour elles des préoccupations majeures. Tout autant que l’absence de procédure de plainte individuelle dans les prisons, y compris dans les camps de travaux forcés. " J’ai été frappée par la peur de ces prisonniers, qui craignaient ce qui pouvait leur arriver une fois qu’ils m’auraient parlé. "

Dans l’État de Rakhine, la Rapporteuse spéciale s’est rendue aux postes frontières qui ont été attaqués le 9 octobre par des individus armés. Elle a transmis ses plus sincères condoléances aux familles des personnes décédées brutalement au cours des attaques.

" Je tiens à rappeler encore une fois que ces attaques ont eu lieu dans le contexte marqué par plusieurs décennies de discrimination systématique et institutionnalisée à l’encontre de la population Rohingya, " a-t-elle signalé. L’experte s’est aussi rendue dans plusieurs villages musulmans touchés.

" J’ai vu de mes propres yeux les structures qui ont été incendiées à Wa Peik, " a-t-elle indiqué, et les représentants du gouvernement ont déclaré que les villageois avaient eux-mêmes mis le feu à leurs maisons. " Un argument pour le moins incroyable, d’autant plus que les autorités n’en ont pas apporté la preuve. "

L’experte a également pris note de la vidéo, qui a d’ailleurs eu un effet viral, montrant des policiers birmans en train de battre des hommes – et des enfants – qui avaient été rassemblés lors des opérations de sécurité, et elle a souligné la possibilité qu’un tel traitement de la population locale ne soit pas un incident isolé.

Elle a insisté sur l’importance pour les forces de sécurité de toujours agir dans les limites fixées par l’état de droit et dans le respect des droits de l’homme, et pour le gouvernement de lutter contre l’apparente impunité qui semble régner ici. " Il faut que justice soit faite et que les coupables soient tenus de rendre compte de leurs actes afin de rassurer les gens ordinaires en leur montrant que personne n’est au-dessus des lois, " a rappelé Mme Lee.

" Il ressort de mes rencontres et de mes échanges avec le Conseiller d’État et divers fonctionnaires, un véritable engagement et un dévouement sincère à l’amélioration du quotidien de tous les citoyens du pays. Il faut à présent que cet engagement se traduise en actes concrets, observés sur le terrain, " a-t-elle ajouté. Elle a notamment estimé que la réponse donnée par le gouvernement suite aux allégations d’abus portées contre lui, à savoir de s’en défendre, de les rejeter et de nier en bloc, était contreproductive et dissipait le climat d’espoir qui s’était emparé du pays.

Au cours de sa visite de 12 jours, l’experte a abordé un large éventail de questions relatives aux droits de l’homme auprès des autorités et de divers acteurs, y compris des dirigeants politiques et communautaires, des représentants de la société civile, mais aussi des victimes de violations des droits de l’homme et des membres de la communauté internationale.

La Rapporteuse spéciale présentera son rapport au Conseil des droits de l’homme de l’ONU en mars 2017. Il inclura ses observations et recommandations à l’endroit du gouvernement du Myanmar.

Mme Yanghee Lee (République de Corée) a été nommée Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme au Myanmar par le Conseil des droits de l’homme en 2014. Elle est indépendante de tout gouvernement ou de toute organisation et siège à titre personnel. Mme Lee préside actuellement le Comité de coordination des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Elle a servi en tant que membre et présidente du Comité des droits de l’enfant des Nations Unies (2003-2011). Elle exerce comme professeur à l’Université Sungkyunwan de Séoul et siège au Comité consultatif de la Commission nationale des droits de l’homme de Corée. Mme Lee est la présidente fondatrice du Centre international des droits de l’enfant.

Les Rapporteurs spéciaux font partie de ce que l’on nomme les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Le terme " procédures spéciales ", qui désigne le plus grand corps d’experts indépendants au sein du système onusien des droits de l’homme, est généralement attribué aux mécanismes indépendants d’enquête et de supervision mis en place par le Conseil des droits de l’homme. Les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales sont des experts des droits de l’homme indépendants nommés par le Conseil des droits de l’homme, qui s’occupent de la situation particulière d’un pays ou de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Ils n’appartiennent pas au personnel de l’ONU et sont indépendants de tout gouvernement ou de toute organisation. Ils siègent à titre personnel et ne perçoivent pas de salaire pour leur travail.

Droits de l’homme, Nations Unies, page d’accueil du pays: Myanmar.

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