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Presentation de M. Bacre Ndiaye, Directeur de la division du Conseil des droits de l'homme et des procédures spéciales - Séminaire francophone sur la mise en oeuvre des recommandations de l'Examen périodique universel, Tunis, 31 octobre-1 novembre 2011

Arrière

31 octobre 2011

Monsieur l’Ambassadeur Moncef Baati,
Monsieur le Délégué à la Paix, à la Démocratie et aux Droits de l’homme de l’OIF ,
Excellences, Mesdames, Messieurs, Chers Collègues

C’est un plaisir renouvelé  d’abord de me retrouver en terre fraternelle de Tunisie et de participer à ce troisième séminaire francophone sur l’examen périodique universel que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme organise conjointement avec l’Organisation Internationale de la francophonie. Ma gratitude va donc à notre partenaire ainsi qu’à notre hôte, le Gouvernement Tunisien  qui nous offre  soutien à nos travaux et hospitalité dans un cadre agréable, à un moment particulièrement important de son histoire.

Je me joins à tous ceux qui m’ont précédé pour saluer le peuple et le gouvernement tunisiens et les féliciter de l’évolution de la situation depuis le 14 janvier. La tenue d’élections démocratiques la semaine dernière est un signe encourageant  pour le pays et la région. Le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, qui vient d’ouvrir un Bureau, s’est engagé à soutenir la Tunisie dans ses efforts pour construire  une société libre et démocratique et un système politique basé sur l'Etat de droit et le respect des droits de l'homme.

Chers collègues,

Le premier cycle de l’EPU sera formellement clos en Mars 2012 avec l’adoption des documents finaux des 17 derniers pays qui ont été examinés par le groupe de travail ce mois-ci.

Tous s’accordent à reconnaître que l’EPU est un mécanisme globalement positif qui a ouvert la voie au dialogue, non seulement entre les Etats sur le plan international mais également entre les différents acteurs nationaux.

192 ou 193 Etats –si nous comptons le Sud Soudan ont été ainsi examinés. Tous les pays se sont présentés, et 80% d’entre eux étaient représentés au niveau ministériel, alors que les autres étaient représentés au niveau de Secrétaire d’Etat ou d’Ambassadeur, démontrant par là-même l’importance accordée au mécanisme et le sérieux de leur préparation. Sur les 192 Etats examinés, seulement quatre n’ont pas présenté de rapport national écrit. De même, alors que la présentation d’un document écrit clarifiant la position des pays sur les recommandations qui ont été soumises à leur considération est purement optionnelle, elle est devenue au fil du premier cycle une pratique constante.

Sur le plan national, l’EPU est devenu un outil d’autoréflexion critique sur la situation des droits de l’homme. Il a renforcé la notion d’universalité des droits de l’homme et a offert un espace de coopération entre structures étatiques et entre les autorités et la société civile. Il a également contribué à la création de banques de données en matière des droits de l’homme, élément essentiel pour assurer la mise en œuvre des recommandations et des obligations internationales des droits de l’homme.

Il faut se rappeler que l’EPU n’en est encore qu’à ses débuts. C’est un mécanisme qui évolue certes rapidement, qui suscite espoirs et attentes, mais qui n’existe que depuis quatre ans. De plus, il convient de rappeler qu’entre le moment où l’Assemblée Générale des Nations Unies a prévu la création de l’EPU, l’adoption de ses modalités et sa mise en œuvre moins de deux ans se sont écoulés.

Les conséquences de cette rapidité sont doubles.

En premier lieu, un manque de recul nous permettant de tirer pleinement les leçons du premier cycle et donnant parfois l’impression que l’EPU navigue à vue, et en second lieu la nécessité d’évaluer l’efficacité du mécanisme sur la base de ses modalités de fonctionnement.

Tout d’abord en dépit du manque de recul, ce premier cycle qui s’achève nous offre néanmoins quelques éléments d’appréciation.

L’EPU a sans nul doute joué un rôle de catalyseur de changement dans la coopération avec les mécanismes des droits de l’homme. En effet, dans les mois qui ont précédé ou suivi l’examen, des invitations ouvertes à toutes les  procédures spéciales, ou ciblant des mandats spécifiques ont été lancées. Les pays ont mis un point d’honneur à répondre aux communications des procédures spéciales. Les examens ont souvent coincidé avec la ratification d’instruments des droits de l’homme, la levée de réserves et la présentation de rapports attendus par les organes des traités.

La dimension publique de l’examen symbolisée par la diffusion télévisée directe  des dialogues interactifs sur le site internet des Nations Unies a été un formidable  outil de vulgarisation du mécanisme et a permis de rendre les Nations Unies potentiellement plus accessibles a toutes les  populations de  l’univers.

Ensuite s’agissant de l’évaluation le Conseil des droits de l’homme avait dès sa création prévu d’examiner ses modalités de fonctionnement au bout de cinq ans d’existence.

Ce processus d’évaluation a duré une année et s’est achevé en juin 2011. Les Etats membres et observateurs se sont penchés sur les différentes modalités et mécanismes du Conseil afin de déterminer les points à rationaliser et renforcer. L’EPU a fait l’objet de nombre de discussions qui ont été menées sous l’égide de l’Ambassadeur du Maroc, Omar Hilale en sa qualité de facilitateur.

Comme indiqué par la Présidente du Conseil des Droits de l’homme, la difficulté de la discussion consistait à déterminer comment améliorer un mécanisme que tout le monde s’accordait à juger globalement positif Les Etats ont du convenir des points à revoir et ensuite de l’ampleur de la révision.

Bien que nous aurons, ces prochains jours, l’occasion de passer en revue les éléments d’ajustement portés à l’EPU, je souhaiterais brièvement me focaliser sur le thème principal de notre séminaire et son implication pour le deuxième cycle ; à savoir la mise en œuvre des recommandations issues des examens. 

En effet, si le bilan de l’EPU est positif, nous sommes tous conscients que le succès du mécanisme sera jugé à l’aune de la volonté et de la capacité des Etats à mettre en œuvre les recommandations qui leur auront été adressées.

En quatre ans, l’EPU a généré plus de 20 000 recommandations. Alors que la moyenne des recommandations à la première session était de 18 par pays, elle est passée à  120 recommandations aux sessions suivantes. Les autres mécanismes des droits de l’homme génèrent également un nombre important de recommandations. L’ensemble est quelquefois difficilement gérable de recommandations par les Etats concernés.

Afin d’être utiles, ces recommandations doivent être précises, pratiques, constructives, et doivent pouvoir être mises en œuvre dans un délai raisonnable.

Les recommandations  qui ont été soumises dans le cadre de l’EPU varient dans leur forme et leur nature, certaines sont précises, quelquefois un peu trop, alors que d’autres sont particulièrement vagues. Il est à espérer que durant le deuxième cycle, les recommandations soient plus facilement gérables de par leur nombre et dans leur formulation.

De plus, Il est important que les recommandations issues de l’EPU soient complémentaires des recommandations issues des organes de traités et des procédures spéciales.

En effet, le Haut-Commissariat a trouvé préoccupant que des recommandations soumises dans le cadre de l’EPU et faisant écho à des recommandations d’autres mécanismes des droits de l’homme ne jouissent pas du soutien des Etats à qui elles étaient adressés ou alors que les Etats qui les reprenaient à leur compte pour les soumettre à la considération de leurs pairs, les reformulaient de manière à en réduire la portée.

La mise en place d’un système de suivi de la mise en œuvre des recommandations, avec des indicateurs agréés, est primordiale pour permettre de garder  trace de toutes les activités de mise en œuvre et pouvoir les refléter dans le rapport  du cycle suivant. A cet égard la présentation de bilan à mi-parcours par certains pays est une bonne pratique à encourager.  

Excellences, Mesdames, Messieurs,

Bien que le Haut-Commissariat n’ait pas reçu du Conseil des droits de l’homme un mandat spécifique pour assurer le suivi des recommandations EPU et qu’il s’agit là de la responsabilité  primaire des Etats, il n’en demeure pas moins qu’en conformité avec son  mandat,  ses priorités thématiques et par pays, le Bureau est impliqué dans la mise à disposition d’une assistance et dans le soutien au processus. Toutefois, le Haut-Commissariat a adopté une approche globale qui ne se limite pas aux recommandations issues de l’EPU mais intègre également celles émanant des organes de traités et procédures spéciales.

Dans les pays dans lesquels notre Bureau dispose d’une présence opérationnelle nous avons soutenu la mise en œuvre des recommandations. Dans la mesure où notre présence nationale et régionale est limitée, le Haut-Commissariat a établi des partenariats avec différents acteurs, qu’il s’agisse du système des Nations Unies en particulier au niveau national, des organisations régionales, d’institutions nationales ou des ONGs et autres représentants de la société civile pour encourager et faciliter le suivi des recommandations émanant des mécanismes des droits de l’homme.

Le Haut-Commissariat est actuellement en train de développer sa capacité d’assistance à la mise en œuvre des recommandations, en 1) disséminant l’information relative à l’EPU, 2) en assurant la formation des acteurs engagés dans le processus EPU, 3) en documentant toutes les initiatives et meilleures pratiques développées par les gouvernements, les représentants de la société civile,  les équipes pays des Nations Unies, et toutes les autres parties prenantes, 4) en répondant aux demandes d’assistance technique qui lui sont adressées, 5) en assurant la dissémination de l’information relative à des cas de représailles sur des personnes ayant coopéré avec les mécanismes des droits de l’homme et 6) en particulier, en évaluant l’impact de l’EPU sur la jouissance par les individus de leurs droits et libertés fondamentaux.

Chers collègues,

En conclusion,  la valeur ajoutée de l’EPU réside dans sa capacité à influencer concrètement la situation des droits de l’homme des individus dans le monde. Sa crédibilité s’exprime aussi dans l’efficacité du dialogue national et international pour la promotion des droits de l’homme qu’il a réussi à générer.

Le deuxième cycle va être crucial.

Il devra se baser sur les acquis du premier mais aussi être à la mesure des espérances exprimées et des engagements pris. Le respect de leurs engagements par les Etats et la mise en œuvre des recommandations seront un premier indicateur de la nature et du succès du deuxième cycle. Gageons que l’EPU continuera à stimuler un engagement positif de toutes les parties prenantes et marquera un tournant dans la manière d’appréhender la promotion et protection des droits de l’homme.

Je vous remercie de votre attention.    

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