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Organes conventionnels

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels examine le rapport de la République de Chypre

Rapport de Chypre

22 septembre 2016

Comité des droits économiques,
sociaux et culturels

21 septembre 2016

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier matin et cet après-midi, le rapport présenté par Chypre sur les mesures prises par le pays pour mettre en œuvre le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Présentant ce rapport, Mme Leda Koursoumba, Commissaire aux lois de la République de Chypre, a assuré que depuis sa création en 1960, son pays attachait une grande importance à la sauvegarde des droits de l'homme.  La Constitution contient une déclaration des droits qui incorpore tous les droits fondamentaux consacrés dans les instruments internationaux et régionaux de droits de l'homme.  Mme Koursoumba a fait valoir que le Pacte avait été ratifié il y a 40 ans et que Chypre, qui fonctionne sur la base d'un système démocratique, coopère pleinement avec les organes conventionnels des Nations Unies. 

Du point de vue économique, après avoir mis en place un programme d'ajustement économique avec la Commission européenne et le Fonds Monétaire international (FMI), Chypre a pu empêcher que sa population souffre de la crise financière.  Le pays ne connaît plus aujourd'hui la récession mais profite, au contraire, d'un taux de croissance satisfaisant, a déclaré la Commissaire aux lois, estimant qu'il fallait néanmoins maintenir les efforts réalisés dans le domaine des dépenses publiques.  Notant qu'une baisse constante du chômage, en 2016, avait favorisé une amélioration des conditions de vie des populations les plus vulnérables, avec des répercussions positives sur la lutte contre la pauvreté, elle a également fait état de l'allocation d'un revenu minimum garanti aux plus vulnérables, attribuable à tous les individus qui sont sur le territoire chypriote depuis plus de 5 ans, qu'ils soient indépendants, chômeurs et employés, personnes bénéficiant de la protection internationale et enfants handicapés. 

Une aide juridique est aussi prévue pour les demandeurs d'asile ainsi que pour les ressortissants de pays tiers ayant accepté le retour au pays.  De même pour les personnes victimes d'abus et de la traite notamment, le système d'entraide judiciaire gratuite est offert dans les matières civiles et pénales pour les infractions aux droits de l'homme ou les procédures entamées devant les tribunaux des familles.  La Commissaire aux lois a en outre rendu compte des mesures prises afin d'encourager les victimes à dénoncer les actes de discrimination et de les aider dans les procédures.  De son côté, le Ministère de la santé veille à ce que tous les citoyens aient accès à des soins de santé.  Suite à la loi de 2013, les migrants et les réfugiés ont eux aussi un accès moins cher aux services de santé publique.  Mme Koursoumba a également insisté sur les progrès significatifs de l'enseignement dans le milieu pénitentiaire.  

La délégation chypriote était également composée, entre autres, de M. Andreas Ignatiou, Représentant permanent de Chypre auprès des Nations Unies à Genève; de M. Demetris Samuel, Représentant permanent adjoint; ainsi que de représentants des Ministères de la justice, de l'intérieur et du travail. 

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de l'intégration des dispositions du Pacte dans la législation nationale; de l'Ombudsman; des politiques économiques; du revenu minimum garanti; des inégalités salariales entre les sexes; de la détention des demandeurs d'asile; de la situation des travailleurs migrants, des travailleurs domestiques, des violences domestiques et intrafamiliales et des mesures de protection sociale.

M. Alan Abashidze, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Chypre, a souligné que le Comité tenait compte des difficultés rencontrées par le pays de par sa division.  Il a souhaité savoir comment la mise en œuvre du Pacte était assurée dans l'ordre juridique interne du pays.  Le Rapporteur a noté qu'à Chypre l'accès à l'entraide judiciaire est toujours limité pour les personnes défavorisées.  Les demandeurs d'asile n'ont pas accès à l'entraide judiciaire lors des premières étapes dans la procédure de demande d'asile, a-t-il encore noté.  Concernant les lois de lutte contre les discriminations, M. Abashidze a souligné qu'en dépit de l'existence de nombreux textes, l'examen juridique de ces lois faisait encore défaut.  Abordant la question des effets de la crise économique, le Rapporteur a relevé que certains programmes macroéconomiques semblaient moins efficaces aujourd'hui avec comme conséquences une forte diminution du pouvoir d'achat, une augmentation du taux de chômage et une augmentation des personnes vivant en-dessous du seuil de pauvreté.

Dans ses remarques de conclusions à l'issue de l'examen, le Rapporteur a déclaré que le  Comité était heureux d'avoir pu prendre connaissance de mesures novatrices comme celle concernant le revenu minimum garanti.  Toutefois, à l'instar du Président du Comité, il a recommandé à Chypre d'adhérer au Protocole facultatif se rapportant au Pacte. 

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de le Chypre et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le 7 octobre.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport périodique de la Pologne.


Présentation du rapport de Chypre


Le Comité est saisi du rapport périodique de Chypre, ainsi que des réponses du pays à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité.

MME LEDA KOURSOUMBA, Commissaire aux lois de la République de Chypre, a assuré que depuis sa création en 1960, la République de Chypre attachait une grande importance à la sauvegarde des droits de l'homme.  La Constitution contient une déclaration des droits qui incorpore tous les droits fondamentaux consacré dans les instruments internationaux et régionaux de droits de l'homme.  Chypre a ratifié la majorité de ces instruments, y compris ceux adoptés sous l'auspice des Nations Unies et ses organisations comme l'UNESCO et sous l'auspice d'institutions régionales comme le Conseil de l'Europe ou l'Union Européenne.

Mme Koursoumba a souligné que le Pacte avait été ratifié il y a 40 ans.  Chypre coopère pleinement avec les organes conventionnels des Nations Unies.  Chypre fonctionne sur la base d'un système démocratique.

Dans le domaine de l'économie, après avoir mis en place un programme d'ajustement économique avec la Commission européenne et le Fonds Monétaire international (FMI), Chypre a pu empêcher que sa population souffre de la crise financière.  Le pays ne connaît plus aujourd'hui la récession mais profite, au contraire, d'un taux de croissance satisfaisant.  Mme Koursoumba a estimé qu'il fallait maintenir les efforts réalisés dans le domaine des dépenses publiques.  Le taux de chômage, comme les autres grandes variables, accusent une baisse constante en 2016, ce qui favorise l'amélioration des conditions de vie des populations les plus vulnérables.  Ce taux de chômage a des répercussions positives notamment dans la lutte contre la pauvreté. 

Un revenu minimum garanti vise à renforcer la résilience des populations les plus vulnérables.  L'objectif est de veiller à ce que les personnes qui n'ont pas les ressources pour satisfaire les besoins fondamentaux aient un minimum de revenus.  Tous les individus qui sont sur le territoire chypriote depuis plus de 5 ans ont le droit à ce revenu minimum: indépendants, chômeurs et employés, personnes bénéficiant de la protection internationale et enfants handicapés notamment.  L'introduction de cette prestation vise à faire baisser le taux de pauvreté absolue.

Une aide juridique est aussi prévue pour les demandeurs d'asile ainsi que pour les ressortissants de pays tiers ayant accepté le rapatriement dans leur pays, et pour les personnes victimes d'abus et de la traite.  Le système d'entraide juridictionnelle gratuite est offert dans les matières civiles et pénales pour les infractions aux droits de l'homme ou les procédures entamées devant les tribunaux des familles. 

Par entraide juridictionnelle, il faut entendre conseil juridictionnel et accès aux documents de la justice, a précisé la Commissaire aux lois de la République de Chypre.

D'un autre côté, les autorités ont mené des campagnes contre le risque d'exploitation sexuelle.

S'agissant des discriminations, une déclaration de politique de la police pour la prévention a été faite en 2013 par la police et l'Ombudsman.  Elle prévoit d'encourager les victimes à dénoncer les actes de discrimination et à les aider dans les procédures.  Les membres de la police ont aussi été formés contre les discours de haine afin de renforcer leur capacité à identifier ce type de crimes. 

L'organe national de certification a vu le jour en avril 2014.  Son mandat consiste à évaluer dans quelle mesure les entreprises incorporent les bonnes pratiques concernant l'égalité en matière de traitements notamment.  Les entreprises peuvent ainsi obtenir le label «Employeur en faveur de l'égalité». 

L'accès des femmes au marché de l'emploi a été encouragée par une loi de 2015 sur la maternité, qui prévoit un congé de maternité supplémentaire de 4 semaines dans le cas de grossesses multiples auquel il faut ajouter les 18 semaines légales.  Les élections législatives de cette année ont permis l'élection davantage de femmes au parlement (12,5% en 2011 à 17,85% en 2016).  

Le Ministère de la santé veille, quant à lui, à ce que tous les citoyens aient accès au soin de santé.  Suite à la loi de 2013, les migrants et les réfugiés ont un accès moins coûteux aux services de santé publique.  L'accès aux soins est aussi renforcé pour toutes les femmes enceintes appartenant à des groupes vulnérables.

Le droit de l'éducation doit pouvoir profiter à tous les enfants sans discrimination aucune.  Le Gouvernement a opéré des changements d'ordre structurel aux fins d'améliorer la qualité de l'enseignement.  L'objectif du système éducatif est d'offrir des possibilités d'enseignement à tous, sur la base de l'égalité, de l'inclusion, de la créativité et de l'innovation. 

Mme Koursoumba a fait état de progrès significatifs dans l'enseignement en milieu carcéral pour adultes.  A l'heure actuelle, l'enseignement en prison est de la même qualité que dans le monde extérieur, le but étant d'aider tous les citoyens à s'instruire.  Ainsi, la moitié de la population carcérale a pu profiter d'un enseignement en prison. 

Examen du rapport


Questions et commentaires des membres du Comité

M. ASLAN ABASHIDZE, Rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Chypre, a insisté sur le fait que le Comité tient compte des difficultés rencontrées par le pays de par sa division.  Il a souhaité savoir comment la mise en œuvre du Pacte était assurée dans l'ordre juridique interne du pays et s'il était appliqué de manière directe ou pas.  Il a sollicité de plus amples informations sur les mesures prises par le parlement pour garantir  la conformité des lois par rapport aux dispositions du Pacte.  Il s'est aussi enquis des raisons qui font que tous les droits visés par le Pacte ne sont pas pleinement couverts dans le droit interne.  M. Abashidze a ensuite demandé si la délégation avait connaissance d'affaires pour lesquelles les droits affirmés dans le Pacte ont été évoqués devant les tribunaux.  Le Rapporteur a émis des doutes sur la désignation des membres du Commissariat aux droits de l'homme.  Selon lui, ces désignations ne répondent pas aux procédures stipulées dans les Principes de Paris.  Il a aussi posé une question sur le financement de ce Commissariat. 

La Rapporteur a noté qu'à Chypre l'accès à l'entraide judiciaire est toujours limité pour les personnes défavorisées. 

Le Rapporteur a souligné, par ailleurs, que les demandeurs d'asile n'avaient pas accès à l'entraide judiciaire lors des premières étapes de la procédure de demande d'asile.  Concernant les lois de lutte contre les discriminations, le Rapporteur a remarqué que de nombreuses lois sont en vigueur à Chypre dans ce domaine mais que l'examen juridique de ces lois faisait encore défaut. 

Le Rapporteur a également noté que les demandeurs d'asile n'avaient accès à l'emploi que six mois après avoir déposé une demande d'asile, et qu'ils ne pouvaient occuper un emploi que dans certains domaines telles que l'agriculture ou la pêche et ce, quelles que soient leurs compétences professionnelles.  M. Abashidze s'est demandé si l'État partie envisageait d'autoriser les demandeurs d'asile à occuper un emploi dans davantage de secteurs.

Au sujet des effets de la crise économique, certains programmes macroéconomiques  semblent moins efficaces aujourd'hui avec comme conséquences une forte diminution du pouvoir d'achat et une hausse du chômage, ainsi qu'une augmentation de nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté. 

Un membre du Comité a salué, pour sa part, les signes de relance  économique dans le pays.  Il a demandé dans quelle mesure l'amélioration du marché de travail est due aux changements macroéconomiques opérés par le Gouvernement et si les données de 2016 confirmaient ces tendances positives.  Cet expert a souhaité recevoir des données ventilées concernant le taux de chômage et son évolution durant les 5 dernières années, le chômage des jeunes plus particulièrement.  Il a ensuite demandé quel programme spécifique était mis en place pour permettre l'emploi des jeunes, quel était le taux de personnes travaillant dans des conditions précaires, et quel écart y a-t-il en termes de chômage chez les jeunes en zones urbaine et rurale. 

L'expert a salué la légère diminution de l'écart entre les salaires des hommes et des femmes, de même que la proclamation d'une journée pour l'égalité salariale.  Il a relevé que plus d'un millier d'inspections n'avait révélé aucune violation de la loi si bien même l'écart salarial persiste.  Il a prié la délégation d'expliquer cette ambiguïté. 

Passant à l'économie informelle, l'expert a voulu savoir quel était le pourcentage des travailleurs dans ce secteur et quelle part celui-ci représentait dans l'économie globale du pays. 

L'expert a fait observer les efforts du Gouvernement tendant à l'amélioration des conditions de travail des migrants.  Il a sollicité davantage d'informations sur les conclusions des inspections du travail dans ce domaine, et sur les procédures de plainte.  Il a souhaité aussi savoir ce qui était prévu pour protéger les travailleurs migrants sans papier de l'exploitation, et quelles étaient les mesures prévues pour protéger les droits des travailleurs migrants qui ne sont pas issus de l'Union européenne dans le domaine de l'agriculture et le travail domestique.  L'expert a souhaité savoir si le gel temporaire des retraites allait bientôt être levé.

A l'occasion d'une série de questions supplémentaires, une experte s'est interrogée sur les effets des coupes budgétaires sur le revenu minimum garanti et sur la politique envisagée par les pouvoirs publics pour «faire sortir les personnes» de ce système.  Elle a également demandé si les bénéficiaires de  l'ancien système de protection sociale avaient tous accès au revenu minimum garanti.  Dans la négative, à quelle allocation peuvent-ils prétendre.  Un autre expert a souhaité avoir une appréciation plus critique du système de revenu minimum garanti.

Faisant remarquer que les demandeurs d'asile détenus, qui déposent une demande, ne sont pas libérés, un expert a rappelé qu'il ne pouvait y avoir de privation injustifiée de liberté.  S'agissant des personnes handicapées, il a requis des précisions sur la politique de leur recrutement dans l'administration, et sur les types d'indemnités prévues en cas de handicap.  Il s'est aussi enquis du mécanisme de salaire minimum et du taux de couverture, faible selon lui.  L'expert a voulu également obtenir davantage d'informations au sujet du paiement des heures supplémentaires et des absences pour maladie (pas de congés de maternité pour les femmes indépendantes). 

Un expert a demandé à la délégation comment les droits économiques sociaux et économiques étaient appliqués dans les bases militaires souveraines britanniques sur le territoire chypriote, Akrotiri et Dhekelia. 

Notant que Chypre présente son sixième rapport périodique devant le Comité, un expert a cependant estimé que tant les informations reçues que les réponses n'étaient pas suffisamment étayées pour apaiser les doutes des membres du Comité. 

Une autre experte a fait remarquer, pour sa part, que la législation chypriote sur la famille n'était pas uniforme et ce, en raison de la coexistence de lois spécifiques en fonction des appartenances religieuses.  Elle s'est ensuite renseignée sur les mesures effectives prises par l'État dans le dessein de garantir aux familles la protection la plus large possible.  Elle a aussi posé une question sur la protection des femmes en cas de séparation. 

Un de ses homologues a demandé davantage d'informations concernant les violences domestiques et la prise en compte de ce problème par le Gouvernement.  Il a noté par ailleurs un taux de condamnation pour traite des personnes disproportionnellement faible par rapport aux nombre de victimes.  D'un autre côté, les sanctions ne correspondent nullement à la gravité du crime.  Cet expert a aussi demandé à la délégation comment l'état était arrivé à la conclusion qu'il n'y avait pas de personnes sans-abris sur son territoire.  Concernant le droit à la santé, l'expert a souligné la diminution des dépenses et de la couverture d'assurance, rendant l'accès limité.  Il a demandé des informations à la délégation sur le plan d'action qui doit veiller à ce que chacun puisse jouir des soins de santé et des efforts tendant à faire face à l'absence de stratégie en matière de santé sexuelle et génésique. 

Un membre du Comité a aussi fait part des difficultés rencontrées lors de la réécriture des manuels scolaires et de l'enseignement de l'histoire, différents selon le système scolaire.  Il a noté qu'il n'y avait quasi aucune  évaluation des manuels.  L'expert a souligné que le système éducatif chypriote avait été qualifié de système «helléno-centrique à caractère religieux», et invité la délégation à dire comment le Gouvernement chypriote percevait ces critiques relatives en particulier à l'enseignement de l'histoire. 

Dans des questions de suivi, un membre du Comité a relevé que des personnes étaient confrontées à un risque de pauvreté, les personnes âgées entre autres.  Il a souhaité savoir quels étaient les résultats des mesures prises par le Gouvernement à ce propos.  Cet expert a aussi évoqué l'impact des coupes budgétaires sur les aides au logement pour les personnes vulnérables.  Il a ainsi  relevé que le nombre d'expulsions forcées avaient augmenté et demandé quelles personnes étaient touchées par ces expulsions.  Il a demandé à la délégation s'il y avait une loi qui protégeait les personnes contre les expulsions et comme la délégation a noté qu'il n'y avait pas de sans-abris, comment étaient accueillies les personnes expulsées.  Quel était le pourcentage de personnes handicapées dont les besoins spécifiques sont couverts par des aides publiques, a demandé une experte.  Un autre membre du Comité a encouragé l'État partie à envisager des mesures plus efficaces en vue d'un développement harmonieux du système éducatif.  Un autre encore s'est intéressé à la possibilité de créer une couverture d'assurance médicale universelle.  Il a souhaité savoir s'il existait un test précoce pour les enfants atteint d'un handicap.  Cet expert a demandé à la délégation s'il existait une définition juridique de l'éducation inclusive dans le pays.  Existe-t-il des mesures de protection des sites du patrimoine culturel situé sur le territoire qui n'est pas sous le contrôle du Gouvernement, a-t-il enfin demandé.

Un membre du Comité a souhaité savoir s'il était possible pour les travailleurs migrants d'entamer une procédure en cas de litige avec l'employeur devant un tribunal si la décision de la procédure administrative ne les contentait pas.  Un expert a voulu savoir si le pays était touché par le phénomène des flux migratoires lié au conflit en Syrie.  Un membre du Comité s'est enquis de la part du travail non-déclaré dans le marché de l'emploi à Chypre et s'est demandé si les inspections étaient les seuls outils de lutte contre ce phénomène. 

Réponses de la délégation

Concernant les droits énoncés dans le Pacte et leur transposition dans le droit interne, la délégation a précisé que toute la structure législative est fondée sur les droits de l'homme.  En vertu de la Constitution, tous les traités internationaux deviennent partie intégrante du droit interne avec un rang supérieur sur toutes les autres lois.  Si une norme de loi est contraire aux traités, elle serait décrétée inconstitutionnelle.  Les droits de l'homme évoluent, s'étoffent; plus le temps passe, mieux les autorités les mettent en œuvre.  Avant de déposer des instruments de ratification, il faut une décision du Conseil des ministres laquelle sera ensuite avalisée par le Parlement.  Le pacte n'est pas souvent invoqué devant les tribunaux.  Les avocats à Chypre connaissent très bien la Constitution et vont davantage l'invoquer.

La délégation a affirmé que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels pouvait être invoqué devant les tribunaux et que les droits qui y figurent sont opposables devant les tribunaux.  D'ailleurs, il existe une loi permettant de s'opposer aux droits visés par le Pacte.

La délégation a admis que l'Ombudsman ne répondait pas entièrement aux Principes de Paris mais qu'il est habilité à choisir son personnel.  Le budget pour l'Ombudsman n'a pas été augmenté ni diminué et ce,   contrairement à beaucoup d'autres institutions.  L'Ombudsman a été créé par une loi pour qu'il devienne l'Institut national des droits de l'homme de Chypre.  Compte tenu du fait que Chypre est un petit pays aux ressources humaines limitées, les compétences de l'Ombudsman ont été élargies dont le mandat a été concrètement délimité par cette loi. 

L'entraide judiciaire est possible pour les demandeurs d'asile dont la demande a été refusée.  Cependant, la demande doit être faite par la seule personne requérante.  En cas d'appel de la décision administrative, le demander a le droit à une aide judiciaire.  La liste des emplois pour les demandeurs d'asile est certes très limitée.  Une partie de l'aide financière a été remplacée par de l'aide matérielle aux fins d'améliorer les conditions de vie.  Il peut ainsi s'agir de bons alimentaires ou vestimentaires, de paiement du loyer ou autres.  L'État considère que limiter les secteurs dans lesquels les demandeurs d'asile peuvent travailler permet de limiter les demandes.

Les politiques économiques de ces dernières années ont mis l'accent sur la stabilité financière.  Aujourd'hui, ces réformes portent leur fruit avec une reprise de la croissance et une baisse du chômage.  Le secteur du tourisme a aussi permis d'améliorer ces résultats.  La confiance dans le système bancaire reprend également.  Quant aux restrictions de capital, elles ont été entièrement levées. 

Une personne qui refuse un emploi est susceptible, à l'issue d'une  enquête, de se voir refuser le revenu minimuM. L'objectif est de réintégrer les personnes vulnérables sur le marché du travail.  Les mesures d'activation ciblée prévoient l'organisation de formations et des programmes spécifiques.  Leur application est prévue d'ici fin 2016.  En outre, la mise en œuvre du revenu minimum garanti fait l'objet d'un suivi.  Des simulations préliminaires ont conclu que le système aurait des effets importants sur la prévalence de la pauvreté et sur la pauvreté extrême.  Il n'y a pas encore d'études a posteriori sur ces mesures puisque le programme est encore très récent.  Chypre a obtenu de nombreuses observations positives et sert d'exemple notamment à l'organisation internationale du travail (OIT) pour ce qui est du revenu minimum garanti.  Il y a aujourd'hui davantage de critères pour avoir accès au système de revenu minimum garanti que pour l'ancien système.  Le nouveau dispositif est beaucoup plus ciblé et lutte contre les abus de l'ancien système. 

L'âge légal de la retraite a été relevé et le gel temporaire des retraites sera levé au moment venu.  Les prestations versées sont supérieures à la moyenne des pays de l'Union Européenne. 

A Chypre, l'économie informelle est considérée illégale.  En conséquence, il n'existe pas d'économie informelle en tant que telle.  D'ailleurs, les autorités tentent de détecter les employés qui ne sont pas déclarés.  Les inspecteurs détectent les cas d'infractions de la loi du travail mais il existe aussi une ligne téléphonique qui permet de dénoncer certaines pratiques et de porter plainte.  La délégation a souligné que le risque de sombrer dans la pauvreté a augmenté à Chypre bien que la situation devrait néanmoins s'améliorer.  Les mesures qui ont été prises dans le cadre de la crise n'ont pas encore été évaluées. 

S'agissant des inégalités entre les sexes, la délégation a indiqué qu'un programme, comportant plusieurs mesures positives, avait été mis en place pour lutter contre les inégalités salariales.  Des inspecteurs ont été formés pour étudier cette question et mettre en œuvre des critères spécifiques.  Un manuel a été conçu, qui définit des concepts clairs pour déterminer les inégalités salariales.  D'autres mesures sont prises aux fins de lutter contre les stéréotypes liés à l'emploi.  Ces dernières années, le taux de chômage a augmenté de manière plus importante chez les hommes que chez les femmes.  Le taux varie en fonction du groupe d'âge.  Chez les jeunes, la différence entre le chômage des hommes et des femmes n'est pas si marquée. 

S'agissant de la détention des demandeurs d'asile, la procédure ne permet pas la fin de la détention et ce, conformément aux arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne.  Ceci, pour éviter les demandes abusives une fois que la personne est mise aux arrêts.  Si un appel a été interjeté et aucune décision n'a été prise dans les 50 jours, la personne sera alors libérée.

Le pays considère que le cadre juridique est complet concernant la lutte contre les discriminations, plusieurs articles de la Constitution garantissant ce droit à la non-discrimination.  La délégation a déclaré que les droits pour les couples homosexuels étaient équivalant à ceux des couples hétérosexuels. 

Actuellement, la protection accordée aux groupes vulnérables n'est pas moins complète mais plus ciblée et s'adresse aux personnes qui en ont vraiment besoin en vue de leur réinsertion. 

Concernant la situation des filles chypriotes turques et les élèves roms, la délégation estime que la description faite par un expert du Comité correspond à la situation des filles présentes sur le territoire au Nord, là où le Gouvernement n'a pas un contrôle effectif, comme stipulé dans les décisions des tribunaux internationaux et les résolutions pertinentes des Nations unies.  La délégation a ensuite informé que, pour les élèves turcs chypriotes, garçons et filles, qui viennent dans les régions sous contrôle du Gouvernement, tous les efforts sont consentis pour garantir leurs droits.  Dans le secondaire, le Gouvernement paie leur frais de scolarité dans les institutions privées même s'ils vivent dans la région qui n'est pas sous le contrôle du Gouvernement.  S'agissant de l'enseignement primaire, on ne ménage aucun effort dans les écoles qu'ils fréquentent pour répondre à leurs besoins.  Cela est vrai par exemple pour l'école élémentaire Aghios Antonios, fréquentée par des élèves turcs chypriotes rom, où il y a deux enseignants turcs chypriotes et où leur dialecte Kourbetch est enseigné.  La délégation a néanmoins souligné qu'il fallait un nombre suffisant d'enfants pour ouvrir une école.  Certains étudiants issus de la partie Nord de l'île suivent des cours dans l'enseignement supérieur auquel ils ont gratuitement accès.

La délégation a attribué la baisse du chômage aux politiques macroéconomiques, à la multitude de programmes, à l'incitation à l'embauche, à la mobilisation des services publics chargés de l'emploi et aux activités de formation.  Des fonds de l'Union Européenne ont en outre permis l'exécution de certains programmes.  Ainsi, la confiance est revenue dans le pays.  Le taux de chômage chez les jeunes est de 24%.  Environ 5 000 jeunes étaient au chômage dans les zones urbaines et 2 200 dans les zones rurales. 

Le Gouvernement a prévu une série de programmes pour améliorer les conditions de vie des personnes handicapées: accès à des soins adapté, accès aux infrastructures publiques, véhicules adaptés, carte de parking.  Selon les données disponibles, entre 2010 et 2015, 100 personnes handicapées ont été employées grâce à la loi élargie sur le secteur public.  

Concernant l'indemnisation des heures supplémentaires et des congés, la délégation a répondu que, d'après la directive sur le temps de travail, le congé payé était de quatre semaines par an, et qu'il n'existait pas de mesures spécifiques pour les heures supplémentaires.  

Le Gouvernement a usé de plusieurs moyens pour lutter contre la violence domestique, avec notamment des campagnes de sensibilisation; la formation systématique des professionnels et l'encouragement à porter plainte.  Un manuel est en cours d'élaboration sur les violences domestiques à l'encontre des mineurs.  Toute personne qui omet de dénoncer des violences contre des personnes avec une déficience mentale est passible d'une poursuite pour crime.  Le pays compte deux refuges pour les femmes et les enfants victimes de violences domestiques dont la gestion relève d'une association.  Les victimes sont accompagnées dans leur démarche devant la justice.  Le nouveau plan d'action vise à prévenir les violences domestiques.  La délégation a dit ne pas avoir de réponse concernant le faible nombre de condamnations pour violence domestique.  Le Gouvernement recueille des données auprès des services de police concernés.  Un rapport de police est établi chaque année et les services de police sont formés à cette problématique.  Le Gouvernement coopère avec les organisations non gouvernementales au sujet des auteurs de cette forme de violence.  Les parties prenantes interviennent dès que l'incident a été dénoncé à la police; tandis qu'un programme de thérapie familial est offert aux familles qui le souhaitent.

La délégation a rappelé qu'il n'y avait pas de sans-abris à Chypre.  Dès qu'une personne se retrouve dans la rue, elle est prise en charge par les services spécialisés et accueillie immédiatement dans un centre.

Une loi spéciale sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes, adoptée en 2016, prévoit jusqu'à 15 ans de prison pour les auteurs de la traite.  Un fonds a été mis en place pour les victimes.  Un manuel recensant l'ensemble des droits des victimes est également prévu.  Les victimes doivent pouvoir défendre leurs droits tout en obtenant l'assistance dont elles ont besoin.  Une victime de la traite a le droit d'être indemnisée par toute personne qui aurait des responsabilités face à cette situation.  Toute victime peut avoir accès à un conseil juridique et si elle n'a pas les ressources financières elle a accès au système d'entraide juridique.  Les victimes de la traite peuvent recevoir une aide au logement, et sont éligibles pour le revenu minimum garanti.

Suite à la crise économique, les dépenses publiques ont diminué.  Tous les secteurs ont pâti de ces mesures d'austérité.  Concernant le système de soins, le nombre de patients et d'ordonnance n'ont pas diminué depuis 2013.  Un certain nombre de mesures ont été prises pour éviter que le fardeau financier soit porté par les seuls patients.  Une loi garantit aux personnes vulnérables un accès gratuit aux soins.  Ainsi, 75% de la population de Chypre a accès aux soins de santé publique.  Les autres 25% ne remplissent pas les conditions pour y avoir accès.  Tout le personnel médical est régulièrement formé à des thématiques spécifiques: violence intrafamiliale, migration ou droits de l'homme.  En coopération avec l'Ombudsman, le ministère de la santé organise une formation continue sur les personnes intersexuées.  Le Gouvernement va mettre en place un Système national de santé publique et espère réaliser une réforme globale: optimisation des hôpitaux, création de clinique universitaire et mise en place du système national de santé publique.  Ce système devrait être opérationnel d'ici 2020.

Concernant la loi relative à l'attribution des biens entre époux, suite à un divorce chaque époux aura droit à une part proportionnelle à hauteur de la contribution de chacun dans l'enrichissement du foyer.  L'époux aura au minimum un tiers de cette part quelle que soit sa contribution.

Au sujet la participation des filles issues des minorités dans l'enseignement supérieur, la délégation a répondu qu'en règle générale, les filles sont encouragées à poursuivre  leurs études.  Il n'y a pas de disparité entre les filles et les garçons concernant l'inscription à l'éducation tertiaire. 

Tout est fait pour que les enfants handicapés aient accès à l'éducation inclusive en leur apportant un soutien notamment pour les transports et les besoins spécifiques dont ils ont besoin pour suivre les cours.

L'éducation est obligatoire et gratuite sur une période de 10 ans.  Les écoliers chypriotes turcs peuvent aller à l'école.  Le taux de non-scolarisation de ces enfants a sensiblement baissé.  Malgré cette réduction, le nombre d'enseignants turcophones est resté le même.  Les mesures prises par le Gouvernement sont considérées comme adéquates pour répondre aux attentes des enfants chypriotes turcs.  Un cours d' «histoire langue et culture» est spécialement prévu pour les enfants Rom chypriotes turcs.  Il est aussi possible de suivre des cours bilingues.  Il y a un appui psychologique spécialement prévu pour les enfants RoM. L'accès aux programmes financés par l'Union Européenne est limité pour les étudiants d'origine turcs qui étudient dans des établissements dans la zone occupée puisque ces établissements ne sont pas reconnus officiellement.  Les enfants chypriotes trucs peuvent néanmoins suivre leur formation dans des établissements hors de la zone occupée.  Ce qui leur permet d'étudier dans un environnement différent.

Dans les manuels d'histoire, l'accent est mis sur les différentes communautés de Chypre, sur les droits de l'homme et la démocratie.  Des mesures de renforcement de la confiance sont adoptées afin d'éviter toute subjectivité.  Les manuels sur le territoire de Chypre ne contiennent aucun matériel méprisant à l'égard de la Communauté turque.  Ils ne font qu'expliquer les difficultés rencontrées par les différentes communautés de l'île.

Au sujet du respect des droits économiques, sociaux et culturels, sur les bases souveraines militaires du Royaume-Uni, la délégation a rappelé que ces zones étaient sous la responsabilité de ce pays.  Le Comité doit donc poser la question aux autorités britanniques car Chypre ne peut intervenir sur cette question.

(((en raison d'un problème technique dans la salle où se réunissait le Comité, l'interprétation a été interrompu durant la première partie des réponses mercredi après-midi)))).


Concernant la préservation du patrimoine, la délégation a souligné que de nombreux sites culturels et religieux avaient été détruits durant le conflit et que cette question est discutée dans le cadre des négociations en cours pour le règlement de la question de Chypre.  Des comités techniques ont été mis sur pied pour traiter des problèmes des sites religieux et archéologiques.  Un dialogue a été entamé entre les représentants des deux principales communautés à Chypre.  La Mission de Chypre à Genève dirige un groupe composé de plusieurs pays qui rédigent une résolution concernant la protection du patrimoine culturel et des droits culturels.

Les personnes vulnérables peuvent obtenir une aide au logement grâce au revenu minimum garanti. 

D'autre part, Chypre a un cadre législatif solide qui prévoit une même rémunération pour des emplois identiques quel que soit le sexe de la personne. 

Les travailleurs migrants ont le droit de faire appel au mécanisme de plainte, y compris le Médiateur. 

Concernant la situation des réfugiés syriens à Chypre, la délégation a relevé que depuis septembre 2014, 720 Syriens sont arrivés sur le territoire par la mer.  La plupart ont présenté une demande d'asile.  A défaut, ces réfugiés sont considérés comme protégés et ne peuvent pas être reconduit dans leur pays.  Un plan d'urgence a été élaboré.  Il couvre tous les aspects du processus: repas, soins, appui, vêtement… Chaque service et chaque département s'engagent à fournir une aide.  Les services chargés de l'asile jouent un rôle fondamental pour présenter aux réfugiés la façon de lancer une procédure d'asile.  Des mesures ont été prises pour accompagner les enfants dès le port d'arrivée.  Un système a été élaboré qui prévoit la mobilisation de tous les services d'accompagnement.  La Croix-Rouge participe à l'accueil des familles.  Très souvent, des programmes sont mis en place pour les enfants qui vivent avec les parents dans les centres.

S'agissant de l'éducation inclusive pour les enfants qui ont besoin d'assistance spécifique, la délégation a souligné que l'État apportait un soutien total à ses enfants notamment en assurant le transport entre le domicile et l'école. 

Conclusions


M. ASLAN ABASHIDZE, Rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Chypre, a souligné que le dialogue avait été très riche.  Il a permis au Comité d'en savoir plus sur la situation du pays.  Les recommandations du Comité se fondent sur la pratique progressive des états participants.  Il ne s'agit pas d'une voie à sens unique.  Le Comité est heureux d'avoir pu prendre connaissance de mesures novatrices comme celui concernant le revenu minimum garanti.  Le Rapporteur a souligné que Chypre devrait adopter le protocole facultatif qui accompagne le Pacte. 

MME LEDA KOURSOUMBA, Commissaire aux lois de la République, a assuré que les recommandations seront envoyées au Conseil des ministres.  Le Gouvernement et l'ensemble des services concernés vont veiller à l'adoption de tous les traités relatifs aux  droits de l'homme.  C'est un devoir de respecter les dispositions du Pacte.  Le respect des droits de l'homme constitue une priorité pour le gouvernement chypriote malgré la crise économique qui a touché l'ensemble de la population.

M. WALEED SAID, Président du Comité, a souligné que ce dialogue avait été très riche d'enseignements.  Il a espéré que les recommandations du Comité seront prises en compte par le Gouvernement de Chypre et l'ensemble du monde judiciaire.  Il a regretté que certains pays ne tiennent pas compte de l'importance du Pacte.  Il faut éviter que le Comité pose les mêmes questions à la prochaine session.  Le Comité a parfois l'impression de répéter les mêmes questions à la délégation de Chypre au cours des différentes séances.  Il a souhaité que le pays adopte le Protocole facultatif au Pacte. 


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