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Argentine : le Comité des personnes handicapées salue des progrès institutionnels et législatifs mais reste préoccupé par des questions telles que la capacité juridique et la participation des personnes handicapées, la situation dans les hôpitaux psychiatriques

16 mars 2023

Le Comité des droits des personnes handicapées a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique de l'Argentine sur les mesures prises par le pays en vertu des dispositions de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Le rapport a été présenté par le Directeur exécutif de l'Agence nationale du handicap, M. Fernando Gastón Galarraga, qui a notamment fait valoir l’augmentation des budgets consacrés à ce secteur et le renforcement de sa propre institution. M. Galarraga a déclaré que les autorités avaient réalisé des progrès en particulier dans deux domaines sensibles, en améliorant le fonctionnement du programme fédéral de pensions non contributives – qui bénéficie aujourd'hui à plus d’1,2 million d’Argentins – et en menant à bien un programme important de transfert de ressources aux municipalités et aux organisations de terrain en vue de financer des activités et programmes tels que la construction de centres de réadaptation ou le versement d’aides directes aux personnes en situation de vulnérabilité sociale.

La délégation, dont plusieurs membres intervenaient par visioconférence, était également composée d'autres fonctionnaires de l'Agence nationale du handicap, ainsi que de représentants des Ministères de la justice et des droits de l'homme et du Ministère des affaires étrangères, du commerce international et du culte, ainsi que de responsables des droits de l'homme de la province de Buenos Aires. La délégation a répondu aux questions et observations des membres du Comité s'agissant notamment des droits politiques des personnes handicapées, des mesures de tutelle, de l’accès à la justice, de l’accessibilité, ou encore de l’intégration des besoins des femmes et des filles handicapées dans les politiques nationales sur le handicap.

Les membres du Comité ont salué les efforts de l’Argentine pour se conformer à la Convention, notamment la création de l'Agence nationale du handicap ou encore le processus de rédaction d'un projet de loi-cadre sur les droits des personnes handicapées. Ils se sont néanmoins inquiétés d'un projet de réforme de la loi sur la santé mentale prévoyant notamment que la signature d'un psychiatre suffira pour ordonner un internement. La participation des personnes handicapées, limitée aux sphères militantes et aux organisations de la société civile, demeure lacunaire dans l’élaboration des politiques publiques en matière de handicap, ont noté des membres du Comité. Il semble en outre que plus de six millions de personnes en Argentine soient privées de leur capacité juridique en raison de leur handicap, et ainsi privées de droits fondamentaux. L’Argentine a été encouragée à adopter, à l'égard des personnes handicapées, un modèle fondé sur les droits de l’homme et non plus sur le modèle caritatif.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances à huis clos, des observations finales sur le rapport de l'Argentine, qui seront rendues publiques après la clôture de la session, le 24 mars prochain.

Le Comité des droits des personnes handicapées conclut cet après-midi son dialogue avec la délégation du Pérou , entamé mardi après-midi.

Examen du rapport de l'Argentine

Le Comité est saisi du rapport de l'Argentine ( CRPD/C/ARG/2-3 ), établi sur la base d’une liste de points à traiter qui lui avait été adressée par le Comité.

Présentation du rapport

M. FERNANDO GASTÓN GALARRAGA, Directeur exécutif de l’Agence nationale argentine du handicap (ANDIS), a d’abord insisté sur la volonté de son pays d’avancer dans la voie de la participation réelle et de l’exercice effectif de leurs droits par les personnes handicapées, au sein d’un société qui change le regard qu'elle porte sur les personnes handicapées et qui oublie les préjugés pour s’enrichir de la diversité. Le Gouvernement entend nouer le dialogue nécessaire pour que chaque acteur social assume son rôle pour faire tomber les obstacles à l’inclusion des personnes handicapées.

L’Argentine a bien montré, ces dernières années, que le handicap était devenu une priorité pour elle. Cette priorité s’est traduite notamment par l’augmentation des budgets consacrés au handicap et par le renforcement de l’ANDIS. Des programmes, mesures et politiques en faveur des personnes handicapées visent à permettre à l'État d’assumer pleinement son rôle. Le Gouvernement se nourrit, ce faisant, de ce qui a été construit en Argentine pour les personnes handicapées, depuis longtemps, par la société civile et par les mouvements sociaux.

Les autorités ont réalisé des progrès dans deux domaines sensibles, a poursuivi M. Galarraga. D’abord, pour répondre aux plaintes et revendications des personnes handicapées et de leurs familles, le fonctionnement du programme fédéral de pensions non contributives a été revu et amélioré, s’agissant en particulier de son financement. Aujourd’hui, plus d’1,2 million d’Argentins reçoivent à ce titre une pension, dont le Gouvernement a relevé le montant et dont il garantit le versement ponctuel.

Le Gouvernement a, d’autre part, mené à bien un programme important de transfert de ressources aux municipalités et aux organisations de terrain. Ainsi, le Fonds national pour l’inclusion des personnes handicapées octroie-t-il des financements pour des activités et programmes tels que la construction de centres de réadaptation ou le versement d’aides directes aux personnes en situation de vulnérabilité sociale. L’ANDIS est, par ailleurs, en train de simplifier l’octroi du « certificat unique de handicap », qui donne accès aux prestations sociales par les personnes handicapées et leurs familles, a fait valoir son directeur. 

M. Galarraga a précisé que son administration appliquait une approche transversale des questions relatives au handicap et que plus de 12 000 fonctionnaires avaient été formés à cette fin. L’ANDIS s’est dotée d’une unité d’inclusion sur le marché du travail pour remédier au problème de l’exclusion sociale des personnes handicapées, ainsi que d'une unité chargée de l’égalité entre les sexes et de l’intégration de la dimension sexospécifique dans toutes ses activités.

Un processus est en cours en vue de la révision des réglementations générales sur le handicap, a poursuivi le chef de la délégation. Le cadre réglementaire actuel remonte en effet à 1981 et reflète une conception du handicap ancrée dans le modèle de la réadaptation médicale, qui conçoit la personne handicapée comme un sujet de soins et non comme un sujet de droits à part entière. L'ANDIS a organisé en 2022 une consultation pour inviter tous les secteurs de la société à contribuer à un débat sur l'élaboration d'une nouvelle loi-cadre sur le handicap, en réponse aux observations finales du Comité sur le rapport de l'Argentine examiné en 2012.

Au chapitre des difficultés à surmonter, M. Galarraga a estimé que son pays devait encore progresser sur la voie d’une éducation qui soit vraiment inclusive, et garantir l'exercice effectif de la capacité juridique des personnes handicapées.

Questions et observations des membres du Comité

MME AMALIA GAMIO, corapporteuse pour l’examen du rapport de l’Argentine, a salué les efforts considérables consentis par l’Argentine pour se conformer aux dispositions de la Convention, notamment la création en 2017 de l'Agence nationale du handicap (ANDIS), le processus de rédaction d'un projet de loi-cadre sur les droits des personnes handicapées, ou encore le Programme national d'assistance aux personnes handicapées dans leurs relations avec l'administration de la justice (ADAJUS).

Cependant, le Comité est préoccupé par certains aspects de la mise en œuvre de la Convention qui montrent, non seulement des retards, mais même des reculs. Ainsi, en matière de tutelle, l'intervention de « facilitateurs de la capacité juridique », qui prennent des décisions pour les personnes handicapées dans des domaines tels que la sécurité sociale, le logement ou les droits sexuels et reproductifs, est préoccupante.  L’experte a recommandé que l’Argentine défende réellement l'autonomie des personnes handicapées en allouant des ressources pour des projets de vie communautaire et autonome.

D’autre part, malgré les efforts de l'État, les personnes handicapées se heurtent encore à des obstacles en matière d'accès à la justice, notamment en raison de l'insuffisance de personnel formé au modèle du handicap fondé sur les droits de l'homme, ou encore le manque d'infrastructures et d'informations accessibles, a dit Mme Gamio.

Mme Gamio a encore jugé « régressif » le projet de réforme de la loi sur la santé mentale, qui prévoit que la signature du psychiatre suffira pour ordonner un internement. « Il ne faut pas accepter la résistance des psychiatres à abandonner leur pouvoir sur les personnes souffrant de handicaps psychosociaux », a demandé Mme Gamio. Elle a aussi jugé inquiétantes les mesures actuelles de désinstitutionnalisation : dans de nombreux cas, les résidences dites « assistées » sont toujours sous le contrôle du personnel de l'État, les résidents étant contraints de se voir administrer des médicaments psychotropes et être soumis à des thérapies de groupe.

MME VIVIAN FERNÁNDEZ DE TORRIJOS, corapporteuse, a notamment voulu savoir si le Gouvernement envisageait de promulguer un plan national d'accessibilité qui inclut l'accessibilité physique, l'accès à l'information et à la communication. L’experte a aussi fait remarquer que, parmi les plaintes reçues par l'Institut national contre la discrimination (INADI), la première cause de discrimination mentionnée était le handicap, avec 24,14 % des plaintes reçues en 2018.

D’autres membres du Comité ont posé des questions sur les procédures mises en place en Argentine pour consulter les organisations de personnes handicapées dans le cadre de l'élaboration, du suivi et de la mise en œuvre des lois et des politiques, de même que pour sensibiliser la population aux droits des personnes handicapées.

Une experte a estimé que l’Argentine manquait de mécanismes concrets pour intégrer les besoins des femmes et des filles handicapées dans les politiques nationales sur le handicap et dans les stratégies et les plans d'action nationaux sur l'égalité des sexes. Elle a demandé si les femmes handicapées pouvaient participer, par l'intermédiaire des organisations qui les représentent, aux activités et aux programmes de l'Institut national des femmes et au Conseil fédéral des personnes handicapées.

Des membres du Comité ont regretté que les dispositions sur la stérilisation forcée de femmes handicapées n'aient pas encore été abrogées en Argentine.

D’autres questions ont porté sur le cadre réglementaire relatif au handicap psychosocial, notamment les politiques publiques appliquées en matière de désinstitutionnalisation, de fermeture d’institutions psychiatriques et de création de structures de soins ambulatoires et d'inclusion sociale. Plusieurs experts ont attiré l’attention de l’Argentine sur l’ observation générale n° 5 du Comité sur l’autonomie de vie et l’inclusion dans la société.

Une experte a jugé positif que l’Argentine, dans son rapport, ait mentionné le besoin d’élaborer des politiques spécifiques visant l'inclusion des autochtones handicapés.

La même experte a déclaré que le Comité avait reçu des informations inquiétantes faisant état de nombreux décès dans des centres de santé mentale en raison de la violence et de la négligence institutionnelles, ainsi que de pratiques qui portent atteinte aux droits de l'homme. La délégation a été priée de communiquer des données concernant les décès dans les institutions psychiatriques, leurs causes et les mesures prises pour les prévenir.

Une experte a voulu savoir s’il était envisagé d’interdire, dans les hôpitaux psychiatriques, certaines pratiques pouvant constituer des actes de torture et des mauvais traitements, notamment l'isolement, la contention et les électrochocs. D’autres experts ont demandé pourquoi tous les hôpitaux psychiatriques n’avaient pas été fermés en 2020, comme le Gouvernement s’y était engagé, et pourquoi tant d'enfants et d'adolescents étaient placés dans des institutions. 

Un autre expert a demandé si une personne qui se voit retirer sa capacité juridique pouvait contester cette décision, et si elle pouvait la récupérer par la suite.

La délégation a été priée de dire si le refus d’aménagement raisonnable était considéré en Argentine comme une forme de discrimination à l’encontre des personnes handicapées.

Un membre du Comité a recommandé d’éliminer les lourdeurs bureaucratiques liées à l’obtention du certificat de handicap. 

Une experte a insisté sur l’importance fondamentale de la participation des personnes handicapées à toutes les décisions qui les concernent. Elle a par ailleurs regretté que les six organisations de personnes handicapées consultées par le Gouvernement dans le cadre de l’élaboration de la nouvelle loi sur le handicap aient dû signer un accord de confidentialité.

Les personnes de petite taille n’ont pas uniquement besoin de médicaments, tel le Voxzogo, comme s'il s'agissait uniquement de traiter une maladie, mais aussi de services d’adaptation et de réhabilitation qui tiennent compte de leur condition de personnes handicapées, a souligné une experte. Elle a déploré l’approche médicale qui prévaut en Argentine s’agissant de la prise en charge des personnes de petite taille.

Plusieurs membres du Comité ont demandé ce qui était fait pour faciliter l’accès des enfants handicapés aux établissements scolaires ordinaires et pour y mettre à leur disposition le matériel, les infrastructures et le soutien dont ils ont besoin.

D’autres membres du Comité ont regretté que la législation argentine contienne des dispositions qui restreignent le droit des personnes handicapées de voter et d’être élues. Une experte a fait part de préoccupations s’agissant de la séparation d’enfants de leurs parents handicapés.

Reconnaissant les progrès réalisés en Argentine sur la question de la capacité juridique des personnes handicapées, un membre du Comité a relevé que les tribunaux étaient par contre en retard dans l’interprétation de l’article 12 de la Convention, relatif à la personnalité juridique de personnes handicapées.

Une experte a demandé comment l’État garantissait l’accès des personnes handicapées aux services de santé, et en particulier aux orthèses et prothèses.

Réponses de la délégation

Répondant aux questions du Comité relatives au cadre juridique et institutionnel, la délégation a d’abord précisé que la Convention avait rang constitutionnel et qu’elle primait sur les lois argentines. Les différents acteurs au sein de l'État sont conscients du caractère volontairement transversal de l’action du Gouvernement en matière de handicap, a aussi assuré la délégation. Elle a ajouté que le dialogue étant la seule voie pour concrétiser les choix du Gouvernement, ce dernier avait créé un « Bureau pour le dialogue avec la société civile » actif dans les 24 juridictions argentines. La délégation a donné plusieurs exemples de la manière dont les droits des personnes handicapées sont pris en compte, de manière transversale, dans des initiatives gouvernementales concernant, par exemple, la santé, l’égalité entre les sexes et la lutte contre la violence au travail.

La délégation a aussi indiqué que le Gouvernement entendait accompagner les changements structurels en faveur des personnes handicapées par un changement de perception au sein de la société. Ainsi, les autorités ont lancé plusieurs initiatives de sensibilisation dans ce domaine. Les messages sont axés sur une image positive et active des personnes handicapées, et sur les obstacles qu’elles rencontrent dans la vie quotidienne.

Par ailleurs, le Gouvernement est en train de numériser et de simplifier le processus de certification du handicap, laquelle est actuellement octroyée par 1500 organismes différents, afin que la démarche ne constitue plus un obstacle pour les personnes handicapées, en particulier dans les zones rurales. La délégation a précisé par la suite que le Gouvernement avait créé une plateforme nationale et s’efforçait de rapprocher les services de certification des citoyens. Quant au certificat numérique, également disponible, il est valable au même titre que le document traditionnel sur papier.

La délégation a ensuite fait valoir un renforcement des structures de l’État chargées de l’accessibilité. Par exemple, plus de 5000 heures d’interprétation dans la langue des signes ont ainsi été assurées dans les services publics. Pendant la pandémie, les autorités ont veillé à faciliter l’accès à l’information de santé par les personnes handicapées. D’autres mesures incitatives visent l’accessibilité physique des bâtiments.

Concernant les droits des enfants et des adolescents handicapés, la délégation a indiqué que le Gouvernement avait lancé une réforme pour intégrer de manière transversale le handicap dans la loi sur la protection des enfants. Les autorités compétentes mènent campagne pour inciter des familles à adopter les enfants handicapés privés de soins parentaux et placés dans des institutions.

L’État réalise par ailleurs une étude pour quantifier les besoins des personnes handicapées autochtones.

La loi de 2020 sur l’interruption volontaire de grossesse prévoit notamment que les personnes handicapées ont le droit de donner leur consentement éclairé pour subir des interventions chirurgicales de contraception, et qu’elles ont le droit de recevoir des informations à ce sujet.

Les personnes handicapées victimes de violence sont assistées par le programme ADAJUS d’accès à la justice. Entre autres prestations, celui-ci offre une aide technique – y compris l’interprétation en langue des signes – aux victimes et à leurs familles et assure la formation des fonctionnaires concernés. Le Code de procédure pénale modifié en 2019 garantit l’accès des personnes handicapées aux locaux de justice.

Le plan d’action national contre la violence fondée sur le genre tient compte explicitement des besoins spécifiques des personnes handicapées, a-t-il été précisé. La ligne d’appel vidéo d’urgence a ainsi recruté des conseillers sourds et compétents en langue des signes. La Cour suprême recense chaque année le nombre de morts imputables à la violence sexiste, y compris les féminicides : en 2021, on comptait 251 victimes, dont quatre personnes handicapées, a indiqué la délégation.

La loi sur la santé mentale, adoptée il y a douze ans, vise notamment à garantir les droits des personnes atteintes dans leur santé mentale, de favoriser leur prise en charge communautaire et de veiller à leur réinsertion, a indiqué la délégation. Le contrôle de l’application de la loi sur la santé mentale dans les établissements de santé est effectué, avec la participation des personnes handicapées, par plusieurs organes de l’État et certaines autorités locales. Depuis quatre ans, le budget consacré à la santé mentale est en progression, a souligné la délégation. Un projet de réforme de la loi sur la santé mentale est largement abordé dans les médias depuis deux ans et fait l’objet de critiques tout en donnant lieu à des propositions contestées, notamment celle consistant à redonner au juge la possibilité d’ordonner un internement, a détaillé la délégation.

Le Gouvernement préconise, pour sa part, de fermer les hôpitaux psychiatriques et de les remplacer par d’autres structures mieux adaptées aux besoins des personnes handicapées, la délégation précisant que la loi sur la santé mentale prévoyait des délais à cet égard. Depuis l’adoption de cette loi, le placement en institution est strictement contrôlé au niveau municipal et national, a par la suite complété la délégation. Elle a aussi expliqué que, placées sous curatelle, la moitié des personnes internées ne sont pas en mesure de gérer leurs propres ressources économiques, telles que pension de retraite ou logement.

Les hôpitaux psychiatriques ont accueilli 12 000 personnes en 2019, contre plus de 20 000 en 2007. En 2020, 7,9% des enfants et adolescents placés en institution étaient handicapés, a-t-il aussi été indiqué. En réponse à d'autres questions, la délégation a par ailleurs précisé que tout décès survenu dans un hôpital psychiatrique est considéré comme une mort suspecte et donne lieu à une enquête.

La délégation a indiqué que les autorités de la province de Buenos Aires avaient lancé leur propre réforme de la santé mentale, axée notamment sur la désinstitutionnalisation, la fermeture des « asiles », la mise en place d’équipes soignantes communautaires et l’autonomisation des personnes handicapées. La province applique des lignes directrices basées sur la Convention relative aux droits des personnes handicapées pour guider ses initiatives de désinstitutionnalisation, a ajouté la délégation.

Interrogée sur la question des pratiques préjudiciables, la délégation a indiqué que les autorités, après une enquête approfondie, ont conclu que les psychochirurgies étaient des pratiques expérimentales non encore homologuées, et validées dans certains cas par des tuteurs de personnes handicapées. Les autorités ont recommandé très clairement que les électrochocs ne soient plus appliqués ; mais cette pratique est déjà en voie de disparition. Quant à la contention mécanique et chimique, elle est considérée comme une mesure de dernier recours face à une crise entraînant des actes de violence.

Le handicap en soi n’est pas une raison suffisante pour limiter la capacité juridique d’une personne, a indiqué la délégation. Le Gouvernement prépare un projet de révision des conditions d’exercice de la capacité juridique, axé plus particulièrement sur les femmes, les filles et les personnes autochtones handicapées. La délégation a ensuite décrit le système argentin d’aide juridique gratuite et les modifications qui y sont apportées pour que les personnes handicapées puissent faire valoir leurs droits.

L’ANDIS est par ailleurs consciente de la nécessité de transformer le système de prestations sociales de base destinées aux personnes handicapées. L’Agence entend que chaque prestation favorise l’intégration des personnes handicapées dans la société et soit conforme à l’esprit de la Convention.

La délégation a assuré le Comité que, conformément à la Convention, le refus d’aménagement raisonnable était considéré en Argentine comme une discrimination envers les personnes handicapées.

La délégation a ensuite fait état d’une baisse du nombre des inscriptions d’élèves handicapés dans le système spécialisé, qui va de pair avec la progression des inscriptions dans le système scolaire général. Mais le Gouvernement est conscient des problèmes qu’il reste à surmonter dans le domaine de l’éducation inclusive. C'est pourquoi le Gouvernement œuvre au renforcement des compétences des enseignants, à l’élimination des préjugés, à la fourniture de matériel pédagogique adapté aux besoins des enfants ou encore à l’amélioration de l’accès aux locaux.

Le Gouvernement s’efforce par ailleurs de mieux intégrer les personnes handicapées dans le monde du travail par des initiatives telles que l’imposition de quotas et le renforcement des compétences.

La délégation a également présenté les mesures prises par le Gouvernement pour lever les obstacles structurels qui empêchent encore les personnes handicapées d’exercer leur droit de vote, y compris l’accès aux locaux de vote. Le projet de loi-cadre sur les droits des personnes handicapées contient un article qui garantira le droit de vote des personnes handicapées, a-t-il été précisé.

Conclusions

Le chef de la délégation argentine a insisté sur le soutien politique qui a permis à son pays d’avancer dans la réalisation des droits des personnes handicapées, et sur le fait que l’État assumait désormais son rôle de garant de ces droits. Il a rendu hommage à nombre de militants des droits des personnes handicapées victimes de la dictature dont l’Argentine est sortie voici quarante ans. Le pays doit maintenant poursuivre sa transformation profonde pour garantir l’inclusion des personnes handicapées, a conclu M. Galarraga.

Une corapporteuse pour l’examen du rapport de l’Argentine a regretté que la participation des personnes handicapées soit limitée aux sphères militantes et aux organisations de la société civile, et qu’elle demeure lacunaire dans l’élaboration des politiques publiques en matière de handicap. Mme Fernández de Torrijos a regretté que plus de six millions de personnes en Argentine soient toujours privées de leur capacité juridique en raison de leur handicap, et ainsi privées de leurs droits humains. L’experte a recommandé que l’Argentine adopte, à l'égard des personnes handicapées, un modèle fondé sur les droits de l’homme et non plus sur le modèle caritatif.

Lien : https://www.ungeneva.org/fr/news-media/meeting-summary/2023/03/experts-committee-rights-persons-disabilities-commend-argentinas

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