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El Salvador: le Comité des travailleurs migrants note que l'initiative salvadorienne de « consulat virtuel » pourrait servir de modèle ; l'attention se porte également sur une diminution des départs suite à l'amélioration de la situation sécuritaire dans le pays

03 avril 2023

Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille a conclu cet après-midi le dialogue avec la délégation d'El Salvador, qui présentait son rapport sur la mise en œuvre de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Le rapport a été présenté par la Vice-Ministre des relations extérieures chargée de la diaspora et de la mobilité humaine, qui a d'abord fermement condamné les événements qui se sont déroulés le 28 mars dernier dans un centre de rétention de Ciudad Juárez, au Mexique, où des migrants ont été victimes d'un incendie, dont des Salvadoriens. La délégation a souligné que son pays était aujourd'hui un pays d'origine, de transit, de destination et de retour, et qu'il était fermement déterminé à garantir des migrations régulières, ordonnées et sûres et à assurer le respect des droits de l'homme de tous les migrants et de leur famille, quel que soit leur statut d'immigration et sans discrimination aucune. Des efforts sont déployés pour créer des opportunités et donner l'espoir aux Salvadoriens de rester au pays, ainsi que pour réintégrer les rapatriés de manière durable et empêcher une deuxième migration. Par ailleurs, El Salvador s'attache à veiller à ce que ses ressortissants de la diaspora puissent travailler régulièrement ou temporairement dans le respect du droit du travail.

La délégation de haut niveau était également composée du Ministre salvadorien de l'éducation, M. José Mauricio Pineda Rodríguez, ainsi que du Secrétaire juridique de la Présidence de la République, M. Conan Castro, et des vice-ministres des Ministères de la santé et de la culture, de même que de hauts fonctionnaires des Ministères de l'économie, des finances et de la justice, de la Direction générale des migrations et des étrangers, de la Police nationale, notamment. La délégation a fourni des réponses complémentaires s'agissant, notamment, de la prise en charge des enfants de migrants, de l'accès des migrants à l'éducation, à la santé et à la justice, des procédures d'accueil des personnes migrantes étrangères qui arrivent à la frontière, des mesures prises dans la lutte contre la traite des êtres humains, du maintien des liens de l'État avec la diaspora salvadorienne, des mesures visant à favoriser le retour et la réinstallation des migrants salvadoriens. Elle a aussi souligné que la sécurité constituait le principal facteur poussant les Salvadoriens à partir, mais a fait valoir qu'El Salvador était devenu un pays sûr et qu'une diminution des départs a pu être constatée.

Les membres du Comité ont notamment porté leur attention sur l'aide consulaire fournie aux travailleurs salvadoriens à l'étranger, exprimant en particulier leur intérêt pour l'initiative salvadorienne du « consulat virtuel », qui pourrait servir de modèle pour d'autres pays. Ils se sont par ailleurs intéressés aux programmes de réinsertion de personnes rentrées au pays, en particulier s'agissant des femmes, ainsi que des enfants qui reviennent sans parents.

El Salvador était le dernier État partie dont le rapport devait être examiné à la présente session, par le Comité, qui tiendra cette semaine des séances privées consacrées notamment à l'élaboration d'observations finales sur les quatre rapports examinés depuis le début de la session, le 27 mars dernier.

La prochaine séance publique du Comité des travailleurs migrants se tiendra le vendredi 6 avril à 17h30, afin de clore les travaux de sa trente-sixième session.

Examen du rapport d'El Salvador

Le Comité des travailleurs migrants est saisi du rapport d'El Salvador (CMW/C/SLV/3 et annexes), établi en réponse à une liste de points à traiter qui lui a été adressée par le Comité.

Présentation du rapport

MME CINDY MARIELLA PORTAL, Vice-Ministre chargée de la diaspora et de la mobilité humaine au Ministère des relations extérieures d'El Salvador, a d'emblée attiré l'attention sur un événement qui a plongé des familles salvadoriennes et des frères et sœurs d'Amérique centrale dans le deuil. Le Gouvernement d'El Salvador a fermement condamné les événements qui se sont déroulés à Ciudad Juárez, au Mexique, où des migrants ont été abandonnés dans leurs cellules sans aucune possibilité de se mettre à l'abri d'un incendie. De tels actes sont déplorables et de tels faits ne peuvent rester impunis et laisser la possibilité qu'ils se répètent au détriment de groupes vulnérables tels que les migrants en transit. La Vice-Ministre a indiqué qu'elle se rendrait personnellement à Ciudad Juárez pour suivre le processus de soutien au rapatriement des ressortissants salvadoriens et participer aux efforts visant à faire la lumière sur ce drame.

La cheffe de délégation a souligné que son pays était aujourd'hui un pays d'origine, de transit, de destination et de retour, et a affirmé qu'il était fermement déterminé à garantir des migrations régulières, ordonnées et sûres et à assurer le respect des droits de l'homme de tous les migrants et de leur famille, quel que soit leur statut d'immigration et sans discrimination aucune. El Salvador ne considère pas la migration comme « des listes qui gonflent les chiffres », a poursuivi la Vice-Ministre.

Mme Portal a expliqué que, depuis 2019, le Gouvernement salvadorien cherchait à mitiger les facteurs structurels qui motivent la migration irrégulière, à promouvoir une approche globale de la mobilité humaine et à accorder la priorité à la valeur de la diaspora salvadorienne en tant que partenaire du développement. Cela se fait dans le cadre d'une approche globale, intergouvernementale et intersectorielle.

El Salvador a souffert pendant des décennies de violences criminelles qui ont placé le pays parmi ceux qui connaissent les taux d'homicides les plus élevés. Selon les données de la Banque mondiale, en 2015, ce taux s'élevait à 105 homicides pour 100 000 habitants. Une stratégie globale de sécurité a été appliquée pour faire face rapidement et efficacement à cette escalade de la barbarie commise par des groupes terroristes, a indiqué la vice-ministre, mentionnant qu'aucun homicide n'a été signalé ce mois-ci, mars 2023 étant donc le mois le plus sûr de l'histoire du pays.

Parallèlement, des efforts sont déployés pour créer des opportunités en donnant l'espoir aux Salvadoriens de rester dans leur pays, au cœur de leurs communautés d'origine, afin que rester au pays soit perçu comme une option permettant de réaliser ses projets de vie. Ainsi, des travaux sont en cours sur la reconstruction du tissu social, à travers la mise en œuvre des Centres urbains de bien-être et d'opportunités (CUBO). Ces espaces, actuellement au nombre de onze dans tout le pays, servent à promouvoir le développement à travers la peinture, le dessin, la danse, la culture, le sport, les clubs de lecture, les cours d'anglais, l'utilisation des outils informatiques, entre autres, et sont équipés des outils nécessaires, afin que les personnes, principalement les enfants et les jeunes, puissent se développer de manière intégrale.

El Salvador a fait face à la situation de la pandémie de COVID-19 de manière exceptionnelle en mettant au centre de toutes les actions de l'État la protection de la vie et des biens de la population par l'allocation de fonds – envisagés dans les budgets 2021 et 2022 – dans les domaines de l'éducation, de la santé, de la sécurité, de l'agriculture et de l'économie en général.

Des efforts ont été mis en commun aux niveaux interinstitutionnel et intersectoriel pour fournir des informations sur la migration irrégulière et ses risques, ainsi que pour empêcher les migrants de tomber dans des réseaux de passeurs. Ainsi, 13 « fenêtres d'attention intégrale aux personnes en mobilité », réparties sur tout le territoire national, ont permis de fournir des services à près de 6 000 personnes jusqu'en 2022.

Pour aider les rapatriés à retrouver des racines, des programmes tels que Transformando Vidas ont été mis sur pied, dont l'objectif est de réintégrer les rapatriés de manière durable et d'empêcher une deuxième migration en améliorant leurs compétences et leurs capacités pour leur développement personnel, celui de leurs communautés et du pays. En outre, des activités récréatives sont menées dans les territoires prioritaires, ce qui permet de travailler avec les jeunes vulnérables et de leur donner l'occasion de participer à des ateliers informatifs visant à décourager la migration irrégulière et, en même temps, offrir des alternatives dans le pays pour continuer à se former et à se développer.

El Salvador gère la migration de main-d'œuvre en identifiant des entreprises dans des pays tels que les États-Unis, le Canada et d'autres destinations importantes, qui permettent aux migrants de travailler régulièrement ou temporairement, dans le respect du droit du travail. Des séances d'orientation avant le départ sont offertes aux travailleurs migrants et un accompagnement psychosocial est assuré aux familles.

Mme Portal a ensuite déclaré que depuis 2019, le pays n'a pas connu de flux migratoires irréguliers massifs. Elle a fait état d'une rencontre de haut niveau en 2021 à Corinto, Honduras, entre El Salvador, le Guatemala, le Honduras et le Mexique, où une déclaration régionale a été adoptée pour renforcer la réponse transnationale au trafic illicite de migrants et à la traite des personnes, ainsi que pour favoriser des stratégies communes d'assistance aux migrants en situation de vulnérabilité.

Le Gouvernement garantit le droit universel à la santé par l'accès et les soins pour toutes les personnes sur le territoire, quel que soit leur statut d'immigration, a ensuite déclaré la vice-ministre. En outre, l'accès à la justice pour les étrangers est garanti par l'intermédiaire du Bureau du Procureur général de la République, grâce à des services juridiques, humanitaires et sociaux gratuits, assurant une prise en charge complète des étrangers en transit, à destination, en résidence temporaire, permanents, dans des conditions migratoires spéciales ou en conflit avec la loi, entre autres.

La loi sur les migrations de 1958 a été abrogée en vertu de l'entrée en vigueur de la loi spéciale sur les migrations et les étrangers et de ses règlements, en 2019. Dans ce contexte, le personnel chargé des migrations et des étrangers a été formé et les manuels de procédures ont été mis à jour pour faciliter l'application de la nouvelle législation. En outre, des journées d'octroi de cartes de séjour sont organisées dans le but de régulariser les travailleurs migrants étrangers. D'autre part, un processus d'extension de la carte spéciale pour un transit frontalier sûr aux Salvadoriens résidant dans les territoires du Honduras et dans la bande frontalière d'El Salvador concernée par l'arrêt de la Cour internationale de justice du 11 septembre 1992 (concernant le différend frontalier entre El Salvador et le Honduras), est en cours d'élaboration depuis septembre 2022. Grâce à cette initiative, plus de 18 000 documents seront émis. Le droit d'option à la double nationalité a également été facilité. À ce jour, 145 documents d'identité ont été délivrés aux Honduriens, facilitant ainsi le passage à la frontière.

Mme Portal a ajouté que son mandat relatif à la diaspora et la mobilité humaine a été défini en 2021 pour garantir une migration sûre, ordonnée et régulière, aborder les étapes du cycle migratoire, promouvoir la coopération avec les pays partenaires pour gérer les possibilités d'emploi à l'étranger, améliorer la qualité des soins pour la diaspora salvadorienne et assurer le respect des droits de l'homme des migrants et de leurs familles, quel que soit leur statut d'immigration. Quelque 40 millions de dollars ont été affectés à la réalisation des droits des migrants salvadoriens et de leur famille. Ainsi, des changements importants ont été apportés aux services de soins et de protection par l'entremise du réseau diplomatique et consulaire.

Un « consulat virtuel » a été créé pour mettre à disposition un centre d'assistance à distance pour la diaspora en fournissant des conseils, des orientations et des informations sur divers sujets d'intérêt pour les migrants de manière agile et facilement accessible. Actuellement, la plateforme s'adresse à la population salvadorienne installée au Mexique, aux États-Unis et au Canada. Bientôt, le service à la diaspora basée en Europe sera élargi.

En 2022, la loi spéciale pour l'exercice du suffrage à l'étranger est entrée en vigueur, qui vise à garantir l'exercice du droit de vote et de se présenter aux élections populaires des Salvadoriens à l'étranger pour les élections qui auront lieu en 2024. Ainsi, les travailleurs migrants et leurs familles pourront voter par voie électronique. De même, le droit des Salvadoriens domiciliés à l'étranger de se présenter aux élections populaires pour les élections présidentielles, des députés à l'Assemblée législative, des députés au Parlement centraméricain et des membres des conseils municipaux est reconnu et garanti, pour peu qu'ils satisfassent à toutes les exigences établies par les lois électorales.

Questions et observations des membres du Comité

M. PABLO CERIANI CERNADAS, rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport d'El Salvador, a voulu obtenir des informations sur le projet de réforme du cadre normatif sur les travailleurs migrants, ainsi que sur les modalités de fonctionnement et les priorités du Vice-Ministère de la diaspora et de la mobilité humaine.

L'expert a requis des détails sur des informations faisant état de décès et disparitions de personnes dans le nord du pays. Il s'est demandé si le Procureur de la République collabore avec le mécanisme d'appui extérieur créé il y a quelques années par le Mexique. Il a aussi sollicité des informations sur les migrants en transit, notamment africains et asiatiques, sachant que ces migrants se trouvent dans une situation de vulnérabilité.

Le rapporteur a également voulu savoir quelles mesures sont prises en faveur des enfants salvadoriens qui reviennent seuls au pays. Il a demandé si le programme de réinsertion de personnes rentrées au pays, ou celui pour l'accueil des femmes qui reviennent, ont été évalués.

M. EDGAR CORZO SOSA, corapporteur pour El Salvador, a lui aussi posé des questions sur la réforme du cadre normatif en vue d'aligner celui-ci sur les dispositions de la Convention suite aux précédentes recommandations du Comité. Il s'est déclaré par ailleurs surpris de la réserve à l'article 92 de la Convention, qui prévoit qu'un différend pourra être soumis à la Cour internationale de Justice si les parties ne parviennent pas à un accord l'arbitrage. M. Corzo a souligné que la procédure prévue par cet article est pourtant normale.

Le corapporteur a invité la délégation à décrire la valeur ajoutée de l'aide apportée aux Salvadoriens dans le cadre du « consulat virtuel », une initiative qui pourrait servir de modèle pour d'autres pays.

M. Corzo a aussi voulu connaître la situation s'agissant des caravanes de migrants, actuellement interdites par El Salvador.

Parmi les autres membres du Comité, un expert a demandé des précisions sur l'aide consulaire fournie aux travailleurs salvadoriens à l'étranger. Un autre a demandé si El Salvador disposait d'une institution nationale des droits de l'homme indépendante habilitée à mener des enquêtes, en particulier sur les atteintes aux droits des travailleurs migrants.

Un membre du Comité s’est enquis de la prise en charge par El Salvador de la situation spécifique des migrants en situation de handicap. Il a aussi demandé des chiffres concernant la politique d’identification des personnes disparues, notamment le nombre de personnes qui ont été retrouvées grâce à elle. Enfin, il a demandé quels mécanismes de participation des organisations de la société civile étaient mis en œuvre pour s’assurer du suivi des recommandations des organes conventionnels des Nations Unies.

Réponses de la délégation

Répondant d'abord à des questions sur la prise en charge des enfants de migrants, la délégation d'El Salvador a notamment indiqué que le Conseil national de la petite enfance, de l'enfance et de l'adolescence a pour mission la protection, la prévention et le rétablissement des droits de tous les enfants et adolescents qui se trouvent sur le territoire national, c'est-à-dire les enfants salvadoriens mais aussi les enfants qui s'y trouvent pour une raison ou une autre. Dans le cadre de la nouvelle loi Creciendo juntos (grandir ensemble) et sur la base de la politique nationale pour la protection intégrale des enfants et des adolescents, le plan pour la prise en charge intégrale et la protection des enfants et adolescents migrants de retour et de leurs familles oriente l'action des institutions responsables de la protection des droits des enfants et des adolescents, ainsi que des entités de la coopération internationale, vers une approche globale des droits des enfants et des adolescents qui ont connu une migration irrégulière. Le Conseil de la petite enfance, de l'enfance et de l'adolescence a ouvert des bureaux dans deux villes du Mexique afin d'apporter un soutien aux enfants migrants et des assistants sociaux apportent un appui aux familles d'accueil afin de favoriser un processus serein et stable et d'éviter une seconde migration.

Dans le cas des enfants migrants en transit, 23 centres d'accueil spécialisés travaillent sur les différents cas en vue de garantir un retour sûr, a indiqué la délégation. El Salvador respecte les droits de l’enfant migrant conformément à la Convention internationale des droits de l’enfant et aux observations finales du Comité des droits de l’enfant. La délégation a par la suite précisé que près de 2000 enfants accompagnés de leurs parents ou de proches se trouvent légalement dans le pays aujourd’hui. S’agissant des mineurs non accompagnés qui quittent El Salvador, la délégation a fait savoir que plusieurs unités administratives étaient à pied d’œuvre pour assurer le regroupement familial de ces enfants. Une assistance spécifique est accordée aux migrants mineurs qui se rendent en El Salvador. Ils ne sont en aucun cas séparés de leurs parents.

Le Ministre salvadorien de l'éducation, M. José Mauricio Pineda Rodríguez, a pour sa part mis en exergue le système d'éducation inclusif pour permettre aux enfants rentrés au pays de bénéficier d'une école qui leur soit accessible. La loi « Creciendo juntos » donne la possibilité de passer un test de niveau sans que soit pris en compte le lieu d'origine ou d'arrivée de l'enfant. Un portail informatique facilite aussi les études en ligne depuis l'étranger, ce qui prépare à un retour et à une réinsertion dans le système scolaire national. La délégation a ajouté qu'en 2022, des migrants de 38 pays sont entrés dans le système scolaire salvadorien, dont 54% de filles.

Le Vice-Ministre de la santé, M. Carlos Gabriel Alvarenga Cardoza, a affirmé que le système de santé d'El Salvador était non-discriminatoire ; les enfants non accompagnés sont accueillis dans des centres prévus à cet effet, passent un contrôle médical pour ensuite être pris en charge, le cas échéant. Un programme du Gouvernement est axé sur la mise en place d'un climat propice aux enfants de migrants qui reviennent au pays.

La délégation a déclaré que la Direction générale de l'immigration et des étrangers appuyait l'adoption d'une loi traduisant dans le détail les dispositions de la Convention s'agissant des conditions de travail. Étant donné les changements apportés par la pandémie dans le monde du travail, une réflexion est menée concernant le télétravail, phénomène qui a un impact également sur la recherche de travail par les migrants. L'utilisation de l'internet peut en outre offrir des solutions pour faciliter les procédures pour les travailleurs migrants.

Il a été constaté que la sécurité constituait le principal facteur poussant les Salvadoriens à partir. Mais après avoir été un des pays les plus violents d'Amérique latine et du monde, El Salvador est devenu un pays sûr, s'est enorgueilli la délégation, qui attribue ce succès au développement d'une communication croisée entre toutes les municipalités et un grand développement dans la région orientale du pays, qui avait été négligée par les gouvernements précédents. Le tourisme a fortement progressé, notamment avec des championnats mondiaux de surf. Le plan Cuzcatlán est un plan de développement d'El Salvador sur une période de cinq ans, prenant en compte la place de la diaspora et mettant en place des principes de bonne gouvernance. Par ailleurs, un projet de loi sur la mobilité humaine est en cours d'élaboration par l'Assemblée législative, en consultation avec des institutions nationales et internationales. La délégation a par la suite souligné les efforts de renforcement du tissu social pour garantir la sécurité de la population et la création d'opportunités en faveur des groupes vulnérables laissés pour compte depuis des décennies, car la violence endémique des « pandillas » et trois décennies de conflit armé ont « mis à genoux » les gouvernements successifs, et sont des facteurs importants dans le fait que 3 millions de Salvadoriens se soient établis hors du pays.

En réponse à une question du rapporteur, la délégation a précisé que le Centro de Atención Integral para Personas Migrantes Extranjeras ne procède pas à des mesures de détention mais permet une prise en charge intégrée des personnes migrantes étrangères qui arrivent à la frontière, qui reçoivent de la nourriture, une aide juridique, les coordonnées de leur ambassade si elles désirent retourner dans leur pays, ou les moyens de se prévaloir de leur droit de migrer. Chacun peut quitter le Centre à tout moment ; la durée de séjour dans ce centre dépend du choix de chacun.

La loi spéciale sur l'immigration prévoit l'octroi d'un permis de travail dès lors que le migrant satisfait à un certain nombre de critères. Les étrangers qui investissent reçoivent un permis et s'ils restent assez longtemps dans le pays, peuvent prétendre à une carte de séjour. La délégation a par la suite apporté des compléments d'information, expliquant que les personnes souhaitant travailler en El Salvador doivent produire un contrat de travail, ou bien, concernant les indépendants, l’objet de leur travail. Une fois les documents nécessaires présentés, le permis de travail est délivré en quinze jours, a assuré la délégation. Les coûts de délivrance d’un permis de travail sont faibles, a-t-elle insisté, indiquant que les personnes issues d’Amérique centrale payaient un coût bien plus faible que les autres. Il a été ajouté que lorsqu’une personne faisait état de circonstances humanitaires particulières, elle pouvait se voir délivrer un permis de travail gratuitement.

S’agissant de l’entrée et de la libre circulation sur le territoire, la délégation a affirmé que la convention quadripartite relative aux migrations liant le Nicaragua, le Honduras, le Guatemala et El Salvador était rigoureusement respectée par les autorités nationales. Ainsi, les travailleurs temporaires transfrontaliers, notamment dans le secteur agricole, qui emploie de nombreux honduriens et nicaraguayens, disposent d’un régime spécial qui leur permet de résider et de travailler de manière légale et sécurisée dans le pays. L’accès à ce régime juridique est disponible pour un coût très faible pour les citoyens des pays limitrophes, a en outre fait valoir la délégation.

Concernant les reconduites à la frontière, un délai est octroyé aux personnes en conflit avec la loi pour quitter d’elles-mêmes le territoire. Elles peuvent toutefois effectuer un recours devant un tribunal et bénéficient pour ce faire de l’aide juridictionnelle. Ce recours est susceptible d’appel. En cas de maintien de l’ordre de reconduite à la frontière par la justice, la personne concernée est raccompagnée immédiatement dans son pays d’origine.

La délégation a indiqué que le Bureau du Procureur général disposait d'une unité responsable de la lutte contre la traite des êtres humains, qui reçoit des allégations de violations et fournit une assistance aux victimes. L'État s'est doté d'outils permettant d'aborder d'une manière globale le fléau de la traiteet de prendre en charge les victimes, en veillant à ne pas les victimiser à nouveau. Le Conseil national de lutte contre la traite est chargé de l'évaluation de la politique nationale et d'élaborer des stratégies, plans et structures de prévention de la traite et de réduction des risques. Ce faisant, El Salvador est le septième pays d'Amérique latine à prendre part à une campagne internationale de lutte contre la traite, en ciblant en particulier les étudiants, les guides touristiques, les agents culturels, notamment pour prévenir le tourisme sexuel. Le 30 juillet est célébrée la journée des victimes de la traite. Avec la pandémie de COVID-19, la riposte institutionnelle a dû s'adapter aux circonstances en utilisant davantage les technologies de communication pour identifier et mettre la main sur des réseaux d'exploitation d'enfants en lien avec la pornographie. La délégation a aussi indiqué qu'un centre de protection avait été mis en place pour les femmes migrantes qui reviennent en El Salvador, parfois victimes de la traite. Un accès à la justice leur est garanti, mais également des prestations sociales et un accompagnement psychologique, afin de leur permettre de se réinsérer.

Interrogée sur le phénomène des « caravanes » de migrants tentant de passer les frontières, la délégation a indiqué que cinq caravanes ont été dénombrées en 2019, mais aucune depuis la mise en place d'un nouveau plan territorial, ce qui peut être attribué à la campagne de la police pour la prévention et la répression de la traite des personnes et une mobilisation en matière d'information sur les risques.

La délégation a par la suite insisté pour assurer le Comité que la traite était sévèrement réprimée en El Salvador, comme en attestent plusieurs décisions judiciaires. Non seulement les personnes qui y ont recours sont emprisonnées, mais elles doivent en outre indemniser leurs victimes. Des circulaires précises à ce sujet ont été diffusées dans le système judiciaire afin que les victimes soient prises en charge et accompagnées immédiatement. Un mécanisme de retour en El Salvador est prévu pour rapatrier les personnes qui sont victimes de traite. Les migrants portés disparus à l’étranger sont recherchés par plusieurs institutions nationales, notamment de défense des droits de l’homme, afin de s’assurer qu’ils ne soient pas victimes de traite. La coopération avec les pays de transit et d’accueil des migrants salvadoriens est totale, a assuré la délégation, notamment s’agissant des enfants migrants. Plusieurs institutions nationales travaillent de concert pour apporter une aide aux victimes de la traite, en coopération étroite avec les organisations régionales et tous les pays frontaliers, en plus du Mexique et des Etats-Unis.

La délégation a expliqué que le Vice-Ministère de la diaspora et de la mobilité humaine, créé en mai 2021, s'occupe de tous les Salvadoriens qui partent à l'étranger, veille à améliorer les relations avec la diaspora tout en favorisant des activités de développement en vue de l'autonomisation des migrants et de la prévention de la migration illicite sur le territoire. En tant que pays défendant le Pacte mondial pour les migrations sûres, ordonnées et régulières, El Salvador s'applique à suivre ses recommandations. Une protection axée sur les droits de l'homme est apportée aux Salvadoriens migrants ainsi que des services pour une attention différenciée pour les plus vulnérables. Des représentations consulaires contactent les organismes chargés des enquêtes et des recherches de dépouilles sur les routes de la migration ou ailleurs. La délégation a ajouté qu'une enquête avait été diligentée concernant la récente tragédie de l'incendie dans un centre de migrants à Ciudad Juárez, au Mexique, où des migrants salvadoriens ont trouvé la mort.

Plusieurs programmes, en coopération parfois avec les municipalités, visent à favoriser le retour des travailleurs salvadoriens. La délégation a également mentionné le programme « Oportunidades », qui propose des subventions pendant un trimestre pour que les jeunes entrent en entreprise afin d'acquérir une expérience professionnelle. Un autre programme cible les personnes de plus de 40 ans. D'autres programmes sont mis sur pied en faveur des travailleurs migrants qui reviennent au pays et ont besoin de soutien pour trouver un emploi. Des accords ont été passés pour que le salaire d'un Salvadorien travaillant avec une société étrangère soit le même que dans le pays d'origine de la société.

La délégation a aussi fait valoir une baisse de plus de 26% du nombre de Salvadoriens se présentant à la frontière des Etats-Unis en 2022. Cette baisse de l’émigration salvadorienne a également été constatée au Mexique et se poursuit en 2023. Parallèlement, le nombre de retours volontaires en El Salvador est en forte hausse, s’est félicité la délégation.

Un accord a été signé en 2020 avec les États-Unis en vue de la réinstallation de Salvadoriens ayant des visas de type H1B (emploi professionnel de 3 à 6 ans) et H2B (emploi temporaire non agricole de moins de 2 ans). La prise en charge effective de ces retours a augmenté de 55% au cours des dernières années grâce en particulier à des dispositifs dans toutes les régions du pays et à une solidarité avec les Salvadoriens qui reviennent vivre chez eux. Un mécanisme permet d'appliquer des directives en matière d'accueil des femmes, qui met l'accent sur la médiation au travail, la certification des diplômes, la prise en charge psychosociale et la réinsertion professionnelle. Un magasin « Rincón azul » situé à l'aéroport facilite la vente des produits fabriqués par les Salvadoriennes revenues au pays. Parmi d'autres initiatives, un programme a été mis sur pied pour l'installation d'équipements d'énergies renouvelables comme des panneaux solaires pour les familles qui rentrent.

Depuis 2023, 4 millions de dollars ont été alloués, contre 2,2 millions en 2020, en pleine pandémie, pour l'aide aux travailleurs migrants, le montant total déboursé étant de 40 millions de dollars depuis la mise en place du nouveau gouvernement. La délégation a fait valoir le succès du « consulat virtuel », qui a répondu aux besoins de 14 000 migrants depuis le début de cette année.

L'Institut d'accès à l'information est un organisme de l'État qui œuvre à favoriser l'accès de chacun à tous les moyens d'information, notamment pour faire connaître les instruments internationaux et dispositions nationales de protection des droits de l'homme, en particulier pour permettre aux migrants, indépendamment de leur nationalité, d'être informés sur les dispositions de la Convention.

La délégation salvadorienne a souligné que le projet de loi sur la mobilité humaine – qui n’est malheureusement pas disponible publiquement car elle en est encore au stade de la rédaction – avait fait l’objet de larges consultations avec les organisations issues de la société civile et les organisations régionales et internationales, comme le Haut Commissariat pour les réfugiés et l’Organisation internationale des migrations. L’objectif est de disposer d'un cadre juridique intégré régissant les questions migratoires et d’encourager un flux migratoire régulier, ordonné et sûr et de garantir les droits des migrants à toutes les étapes du cycle migratoire. En outre, cinq conventions de l’Organisation internationale du travail ont été ratifiées récemment par El Salvador pour assurer à toutes les personnes vivant sur le territoire les droits sociaux les plus avancés, quel que soit leur statut, ressortissants ou travailleurs migrants. Ces conventions couvrent, pour certaines, spécifiquement les travailleurs migrants, notamment les travailleurs domestiques. Un projet de réforme du droit du travail est en gestation actuellement, une large consultation sera menée dans les prochains mois à ce sujet.

Un membre du Comité ayant demandé des précisions sur le nombre de personnes concernées par les déplacements forcés en El Salvador, la délégation a reconnu qu’il y avait encore un nombre élevé de déplacés qui fuyait la violence des gangs criminels. Elle a toutefois fait valoir que ce nombre était en baisse.

 

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