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COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME : PRÉSENTATION DE RAPPORTS SUR LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO, L'IRAQ ET CUBA
01 avril 2003
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Commission des droits de l'homme
59ème session
1er avril 2003
Matin
La Commission entend une déclaration du
Ministre de la justice de la République du Congo
et commence son débat général sur
la question des violations dans tous les pays
La Commission des droits de l'homme a entamé ce matin le débat général sur la question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales, où qu'elle se produise dans le monde, après avoir entendu les présentations des Rapporteurs spéciaux chargés, respectivement, de la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo, Mme Iulia-Antoanella Motoc, et de la situation des droits de l'homme en Iraq, M. Andreas Mavrommatis. Mme Christine Chanet, Représentante personnelle du Haut-Commissaire aux droits de l'homme à Cuba depuis le mois de janvier, a évoqué les débuts de son mandat. La Commission a en outre entendu M. Jean-Martin Mbemba, Ministre de la justice et des droits de l'homme de la République du Congo.
M. Mbemba a souligné qu'il n'y a pas de développement durable si l'homme ne jouit pas d'une bonne santé physique et mentale. Il a notamment évoqué à cet égard la prévalence du paludisme et du VIH/sida en Afrique. Il faut que les droits économiques, sociaux et culturels fassent l'objet de la même attention que les droits civils et politiques au sein de la Commission, a insisté le Ministre congolais, car tous les droits humains sont liés entre eux et se renforcent mutuellement. C'est la raison pour laquelle le programme de développement économique et social du Gouvernement de la République du Congo considère la promotion et la protection des droits de l'homme comme une des priorités fondamentales, à travers notamment le programme de la «Nouvelle Espérance».
S'agissant de la République démocratique du Congo, Mme Motoc a rendu compte de sa dernière mission dans le pays en février et mars 2003. Elle a déclaré s'être entretenue avec des représentants de la société civile, notamment des victimes de violences sexuelles à Kisangani et avec les familles des victimes des massacres. À cet égard, la Rapporteuse spéciale a recommandé la création de centres de réhabilitation des victimes de violences sexuelles. Elle a en outre exprimé de vives préoccupations face à la persistance du phénomène des enfants soldats, estimant que la démobilisation est très limitée alors que le recrutement reste massif à l'est du pays. Il y aurait quelque trente mille enfants soldats dans le pays. La République démocratique du Congo a répondu à cette présentation.
M. Mavrommatis a espéré que la guerre en Iraq cesserait au plus tôt et a enjoint les combattants à respecter scrupuleusement le droit international humanitaire et les droits des civils, y compris leur droit à la vie. Le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Iraq a pu se rendre dans le pays avant le déclenchement des hostilités et a eu des discussions avec des responsables du Gouvernement. Il estime que la situation de droits de l'homme reste préoccupante et il souligne que sa tâche revêt une importance accrue compte tenu des circonstances actuelles. L'Iraq a fait une déclaration à la suite de cette présentation.
Mme Christine Chanet, Représentante personnelle du Haut-Commissaire aux droits de l'homme à Cuba, a déclaré qu'il était prématuré de se livrer à une évaluation générale de la situation des droits de l'homme à Cuba, son mandat n'ayant débuté qu'en janvier de cette année. Elle a indiqué que les autorités cubaines avaient fait part de leur refus d'accepter la résolution de l'an dernier de la Commission qui instaurait son mandat, au motif qu'elle est «injuste, sélective et discriminatoire». En revanche, le Gouvernement cubain s'est dit prêt à continuer de répondre aux demandes d'informations du Haut Commissaire et des mécanismes thématiques de la Commission. De même, Cuba envisage d'étudier la possibilité de prendre des mesures pour ratifier les instruments internationaux auxquels elle n'est pas encore partie.
Les représentants des États suivants ont fait des déclarations dans le cadre du débat général sur la question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales, où qu'elle se produise dans le monde : Pakistan (au nom de l'Organisation de la conférence islamique), Afrique du Sud (au nom du Groupe africain), République de Corée, Argentine, Grèce (au nom de l'Union européenne) et Syrie.
Les représentants de Cuba, d'Israël, de l'Arménie, de l'Iraq, du Pakistan, de l'Inde et de la Palestine ont exercé leur droit de réponse.
La Commission reprendra cet après-midi le débat sur la question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales où qu'elle se produise dans le monde. Au titre des droits économiques, sociaux et culturels, la Commission doit notamment entendre la présentation de rapports sur le droit à l'alimentation, le droit à la santé, le droit à l'éducation, le droit à un logement convenable, l'extrême pauvreté, le déversement de déchets toxiques.
Déclaration du Ministre de la justice et des droits humains de la République du Congo
M. JEAN-MARTIN MBEMBA, Ministre de la justice et des droits humains du Congo, a déclaré que la multiplication des foyers de tension dans le monde et ses corollaires, notamment la prolifération des armes, le terrorisme international, les guerres civiles et les ingérences de toutes sortes, sont autant de défis qui rendent illusoire tout discours sur les droits de l'homme en ce début du XXIe siècle. S'agissant des foyers de tension, la délégation du Congo souhaite, au sujet de la guerre en Iraq, qu'une solution rapide soit trouvée sur fond de respect, par toutes les parties, des droits de l'homme et du droit international humanitaire. La situation au Moyen-Orient demeure préoccupante et la Commission se doit de l'examiner afin de faire cesser l'escalade de la violence de telle sorte que le peuple palestinien puisse enfin exercer son droit inaliénable à l'autodétermination.
Le ministre congolais a souligné qu'il n'y a pas de développement durable si l'homme, qui en est l'agent et le bénéficiaire, ne jouit pas d'une bonne santé physique et mentale. Comment réaliser un développement durable en Afrique lorsque plus d'un million de personnes succombent du paludisme chaque année ? Comment envisager la mise en œuvre du droit au développement quand plus de vingt millions de personnes infectées par le VIH attendent la mort, faute de soins? Il est aussi nécessaire que les droits économiques, sociaux et culturels fassent l'objet de la même attention que les droits civils et politiques au sein de la Commission, car tous les droits humains sont liés entre eux et se renforcent mutuellement. C'est la raison pour laquelle le programme de développement économique et social du Gouvernement de la République du Congo considère la promotion et la protection des droits de l'homme comme une des priorités fondamentales, à travers notamment le programme de la Nouvelle Espérance. Dans cette perspective, aucun effort n'a été épargné pour ériger un cadre politique et institutionnel fiable et consolider la paix après les guerres civiles récurrentes qu'a connues le Congo-Brazzaville depuis 1993. Au nombre des efforts accomplis pour atteindre ces objectifs figurent notamment les Accords de cessez-le-feu et de cessation des hostilités entre le Gouvernement et les factions rebelles (novembre-décembre 1999) et l'accord récent entre le Gouvernement et le pasteur Ntumi (mars 2003). Le Gouvernement s'est engagé à procéder à une large amnistie, à garantir la sécurité des ex-combattants et leur réinsertion.
La mise en place d'institutions telles que Parlement, Médiateur de la République, Cour constitutionnelle, Conseil supérieur de la liberté de communication et surtout d'une Commission nationale des droits de l'homme totalement indépendante, vise les objectifs du renforcement de l'état de droit et de la garantie d'une paix durable. Par ailleurs il importe de souligner que le Congo s'efforce d'honorer ses obligations découlant des conventions internationales relatives aux droits de l'homme de l'homme auxquelles il est partie. Sur le plan interne, les autorités judiciaires congolaises s'emploient à traduire en justice les auteurs de violations des droits de l'homme afin qu'ils répondent de leurs actes. Pour lutter contre l'impunité, le gouvernement a mis en place des organes de contrôle, de même qu'il a lancé un certain nombre d'actions d'envergure pour mieux préparer les magistrats à leur mission.
Présentation de rapports au titre de la question des violations des droits de l'homme où qu'elles se produisent dans le monde
Situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo
MME IULA MOTOC, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo, a rendu compte de sa dernière mission dans le pays, du 28 février au 10 mars 2003, et indiqué s'être rendue d'abord à Kinshasa, puis à Goma et à Kisangani. Elle a regretté n'avoir pu aller à Bunia dans l'Ituri ni à Gbadolite à cause des mauvaises conditions de sécurité. Au cours de cette visite, la Rapporteuse spéciale s'est entretenue avec le Président Joseph Kabila, le Ministre des affaires étrangères, le Ministre des droits humains et le Ministre de la justice. Elle fait part également de sa rencontre avec les autorités du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) à Goma et à Kisangani. Elle a en outre déclaré avoir pu s'entretenir avec des représentants de la société civile, notamment des victimes de violence sexuelle à Kisangani et avec les familles des victimes des massacres. À cet égard, lors de son séjour à New York, elle a envisagé, avec la directrice du Fonds de développement des Nations Unies pour les femmes (UNIFEM), la possibilité de mettre en place des centres de réhabilitation pour les victimes de violence sexuelle.
La Rapporteuse spéciale a déclaré qu'à la suite des accords de paix signés à Pretoria en décembre 2002, les diverses parties concernées, à savoir le gouvernement, le RCD, le Mouvement de libération congolais (MLC), le RCD-ML, le RCD-N et les Maï-Maï, étaient parvenus, le 6 mars, à un accord sur le projet de constitution de la transition. Toutefois, elle a fait savoir que, dans le territoire contrôlé par le Gouvernement, les défenseurs des droits de l'homme qui participent aux efforts de recherche et de dénonciation des abus des procès politiques diligentés par la Cour d'ordre militaire (COM) n'étaient pas en sécurité. Malgré des développements positifs, elle a estimé que la situation des droits de l'homme demeure très grave. Ainsi, la région de l'Ituri continue d'être le théâtre de confrontations armées, de déplacements de population et de restrictions à l'accès humanitaire. À partir du mois d'août, des représailles interethniques sanglantes se sont poursuivies entre les deux communautés ethnique Hema et Lendu et leurs alliés respectifs. Elle a ajouté qu'une nouvelle vague de violence avait commencé le 6 mars 2003, date à laquelle les troupes armées ougandaises ont repris la ville de Bunia. Elle a appuyé ses propos en citant le rapport d'enquête menée par la Mission des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC), en date du 15 janvier 2003, sur les exécutions arbitraires, les viols, tortures et disparitions forcées perpétrées par le MLC. Elle a également relaté qu'au Nord et au Sud-Kivu, les droits les plus élémentaires de la population sont remis en cause par les affrontements armés qui semblent se multiplier, notamment entre l'armée nationale du Congo, le RCD-Goma, les forces banyamulenge du commandant Masanzu et de nombreux groupes Maï-Maï. Elle a exprimé de graves préoccupations face à la persistance du phénomène des enfants soldats, estimant que la démobilisation est très réduite alors que le recrutement reste massif à l'est du pays. Il y aurait quelque 30 000 enfants soldats sur le territoire de la République démocratique du Congo.
La Rapporteuse spéciale a ensuite mis l'accent sur la nécessité de mettre fin à l'impunité et s'est félicitée que la République démocratique du Congo compte parmi les États parties à la Cour pénale internationale. En vue de favoriser la réconciliation nationale, elle a jugé urgent qu'une stratégie commune soit mise en place par tous les organes et mécanismes de l'ONU, notamment par la mise en place d'une mission conjointe d'enquête sur les allégations de massacres et autres violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire commises entre 1996-1997. Estimant qu'à l'heure actuelle, il serait difficile pour le système judiciaire congolais de mener les enquêtes et de juger et punir les coupables des massacres qui ont fait plus de 3 millions de morts, elle a préconisé l'établissement d'une cour spéciale à l'image de celle qui fonctionne actuellement en Sierra Leone. La Rapporteuse spéciale a dénoncé le pillage des ressources naturelles et a félicité le Gouvernement pour avoir suspendu les responsables cités dans le rapport et la décision du Procureur général.
Au vu de la gravité des violences sexuelles, des viols en masse et des allégations d'esclavage sexuel, Mme Motoc a recommandé la création de centres de réhabilitation des victimes de violences sexuelles. Par ailleurs, elle a recommandé au Gouvernement de la République démocratique du Congo d'imposer un moratoire immédiat sur les exécutions capitales prononcées par la Cour d'ordre militaire et de poursuivre l'application des mesures prises dans le domaine de la démobilisation des enfants, du pillage des ressources naturelles, de l'administration de la justice. Elle a recommandé au RCD et au MLC de prendre des mesures nécessaires pour mettre fin à l'impunité générale et de continuer les enquêtes sur les massacres de Kisangani et de Mambasa par les autorités judiciaires et civiles en toute indépendance. En dernier lieu, elle a recommandé à la communauté internationale d'appuyer le processus de transition démocratique et d'aider le développement des capacités locales dans les domaines de l'administration de la justice, de la protection de la femme et des enfants.
Pour l'examen de cette question, la Commission était saisie d'un rapport sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo (E/CN.4/2003/43, à paraître).
M. ANTOINE MINDUA KESIA-MBE (République démocratique du Congo) a souligné que pour bien appréhender la question des droits de l'homme dans son pays, surtout dans les territoires occupés par les États agresseurs avec leurs complices congolais, il faut maintenir un contact permanent avec le terrain par des visites régulières, spécialement dans les zones rebelles où de graves violations des droits de l'homme se commettent au quotidien. «Quand on sait que l'avant-dernière visite de la Rapporteuse spéciale remonte à un an et onze jours, soit du 13 au 19 février 2002, et la dernière du 1er au 10 mars 2003, on peut comprendre pourquoi certaines parties de son rapport ne reflètent pas les réalités du terrain», a-t-il déclaré. «En effet, je précise que sa dernière visite dans mon pays remonte plutôt du 1er au 10 mars et non du 28 février au 10 mars 2003. Et pourtant, la Rapporteuse spéciale aurait pu exploiter cette journée du 28 février ne fut-ce que pour visiter l'Ituri, Beni et Mambassa où des accusations de cannibalisme, étayées de témoignages et rapports probants, venaient d'être fraîchement portées sur la scène nationale et internationale à l'encontre du MLC, de l'UPC et du RCD-National», a déclaré le représentant. Il s'est demandé pourquoi Mme Motoc a accepté ce mandat alors qu'elle savait qu'elle ne serait pas physiquement disponible. Il a néanmoins salué le fait que Mme Motoc vienne à nouveau, dans son rapport, de confirmer les atrocités de Kisangani des 14 et15 mai 2002. Le représentant a en revanche déploré que Mme Motoc ne dresse pas le constat qu'elle a fait à l'issue de sa visite des prisons de Kisangani.
On ne peut parler du processus de paix en République démocratique du Congo sans évoquer explicitement la question du retrait des troupes armées d'agression du Rwanda et de l'Ouganda, a poursuivi le représentant. Curieusement, a-t-il ajouté, Mme Motoc ne cite pas les États ainsi incriminés et qui se sont même déjà affrontés à trois reprises sur le sol congolais durant ce conflit pour le contrôle des richesses du pays. Ce qui est également malheureux, c'est de voir la Rapporteuse spéciale parler de la situation en termes d'hypothèses et affirmer que le droit à la démocratie est le plus fondamental. «À ce sujet, nous croyons plutôt qu'on ne peut appliquer la démocratie que sur des individus en vie et non sur des cadavres et que, dès lors, le droit le plus sacré est plutôt d'abord le droit à la vie», a souligné le représentant. À ce jour, a-t-il en outre précisé, aucun activiste des droits de l'homme ni même aucun journaliste ne se trouve en prison dans la partie sous contrôle gouvernemental.
Le représentant de la République démocratique du Congo a par ailleurs indiqué que son gouvernement considère que le non-retrait des troupes étrangères d'agression est la cause manifeste de la recrudescence des conflits armés et que cela entame sensiblement le processus de paix. Il a ajouté que son gouvernement ne ménage aucun effort pour lutter contre l'impunité et est favorable à la création d'une juridiction, à caractère international, afin de permettre le jugement de tous les responsables de crime de génocide, de guerre et contre l'humanité, aussi bien nationaux qu'étrangers. Contrairement à la résolution 1468 du Conseil de sécurité, Mme Motoc a omis de souligner la nécessité du retrait des troupes armées du Rwanda et de l'Ouganda, sans lequel il est difficile de faire aboutir le processus de paix et de consolidation de l'État de droit. Il reste à l'heure actuelle 20 000 soldats rwandais à l'Est de la République démocratique du Congo, a rappelé le représentant.
Dialogue interactif avec la Rapporteuse spéciale sur la République démocratique du Congo
La représentante de la Grèce, au nom de l'Union européenne, a demandé quelles étaient les réflexions de la Rapporteuse spéciale sur la manière d'intégrer les droits de l'homme dans le processus en cours? Quant à sa proposition d'établir une Cour internationale pour lutter contre les effets de l'impunité : quels seront les rapports de cette Cour avec la Commission de conciliation déjà instituée et avec la Cour pénale internationale?
Le représentant des États-Unis a demandé à Mme Motoc quels mécanismes la communauté internationale devrait, selon elle, mettre en place pour lutter contre la faiblesse du système judiciaire?
Le représentant du Canada a encouragé Mme Motoc à se pencher sur la question de l'exploitation illégale des ressources naturelles et de se rendre dans les États mentionnés par l'Ambassadeur de la République démocratique du Congo.
La Rapporteuse spéciale, MME MOTOC, a déclaré que de graves violations des droits de l'homme continuent de se produire dans l'Est de la République démocratique du Congo et qu'on l'avait en outre dissuadé de se rendre en Ituri du fait de la situation qui prévalait dans cette région. La Rapporteuse spéciale a fait observer que s'il est vrai que les deux défenseurs des droits de l'homme sur la situation desquels elle avait attiré l'attention l'an dernier (il s'agit de MM. Nsii Luanda et Willy Wenga) ont été libérés, il n'en demeure pas moins que ces deux personnes restent en liberté provisoire et sont obligées de vivre dans la clandestinité. Soulignant qu'aucun rapporteur spécial ne pourrait couvrir tout le territoire du pays, Mme Motoc a expliqué qu'elle doit par conséquent se concentrer sur certaines zones du pays en tenant compte des informations fournies, entre autres, par les organisations non gouvernementales. S'agissant de la question de l'impunité, la Rapporteuse spéciale a rappelé que le mandat de la Cour pénale internationale couvrira la période qui court à partir de juillet 2002 (date d'entrée en vigueur des statuts de Rome de la Cour), ce qui laisse une période de 6 ans non couverte pour ce qui est des faits qui se sont produits en République démocratique du Congo. C'est pourquoi il faut mettre en place un mécanisme judiciaire afin de punir les violations graves des droits de l'homme qui se sont produites entre 1996 et juillet 2002 dans le pays, a expliqué Mme Motoc.
Situation des droits de l'homme en Iraq
M. ANDREAS MAVROMMATIS, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Iraq, a regretté que la voie du désarmement pacifique n'ait pas été poursuivie et que la guerre, avec son cortège d'horreurs, ait commencé. Ses pensées sont allées aux civils iraquiens, notamment les femmes et les enfants qui ont déjà tant souffert par le passé. Il a émis l'espoir que ne se reproduisent pas les massacres tels que celui du marché de Bagdad vendredi. Il a rappelé que le respect du droit à la vie imposait des limites quant aux cibles lorsque le risque de pertes civiles est trop important. Il a ajouté que les attaques suicide accroissaient également les risques pour les civils. Il a repris les termes du Secrétaire général et enjoint les belligérants à respecter scrupuleusement de droit international humanitaire et a insisté sur le fait qu'aucune attaque ne devait être menée contre les civils. Il a en outre regretté que l'évolution des événements l'ait obligé à repousser sa deuxième visite et rendait sa tâche particulièrement difficile. À cet égard, il a indiqué qu'il s'était tenu prêt à participer à une séance extraordinaire sur l'Iraq et qu'il avait, dans les jours qui ont précédé le rejet de cette proposition, eu des contacts utiles. Ainsi, il a rendu compte d'une rencontre, le 27 mars 2003, avec la Mission permanente iraquienne et des délégués de Bagdad. À cette occasion, le représentant iraquien a fait de nombreux commentaires sur l'additif au rapport qui fut rédigé avant le début des hostilités.
Dressant le bilan de trois années de travail et de ses rencontres, M. Mavrommatis a déclaré que la communauté internationale, les Nations Unies et particulièrement le Haut Commissaire se doivent d'aider le peuple iraquien à panser ses plaies et à résoudre la crise humanitaire, en vue d'assurer le droit à la vie. Il s'est ensuite tourné vers l'avenir à moyen et long terme et a estimé qu'il faudrait veiller désormais à ne plus jamais se retrouver dans une telle position d'impuissance. Il a néanmoins précisé que la mise en œuvre de ses recommandations demandera une pleine coopération de l'Iraq et qu'il fallait maintenant s'attacher à venir en aide concrètement au peuple iraquien. Il a recommandé le déploiement d'une présence en ce qui concerne les droits de l'homme Iraq, en coopération avec les autorités, pour veiller à ce que le respect des droits de l'homme soit ancré dans les institutions et l'avenir.
Pour l'examen de cette question, la Commission est saisie d'un rapport sur la situation des droits de l'homme en Iraq (E/CN.4/2003/40) dans lequel le Rapporteur spécial indique qu'il continuera de suivre toutes les questions relatives aux droits de l'homme soulevées pendant sa visite exploratoire en Iraq en février 2002 et dans ses deux derniers rapports à la Commission et à l'Assemblée générale, ainsi que les questions abordées dans le présent rapport et examinera minutieusement toute nouvelle information sur les violations des droits de l'homme. La priorité sera accordée aux informations sur les violations graves en cours du droit à la vie, y compris les exécutions extrajudiciaires et la peine de mort, ainsi que sur la torture, les déplacements forcés, l'absence de procès équitables, la liberté d'expression et d'association et la liberté de religion. Parmi les autres questions à examiner, figureront les réformes prévues dans le secteur pénitentiaire et leur mise en œuvre, le décret autorisant les personnes à changer leur nationalité ou appartenance ethnique pour devenir arabe, l'«arabisation» ainsi que le décret relatif au choix du nom des enfants. Le Rapporteur spécial continuera de suivre la question des effets non recherchés de l'embargo et maintiendra ses contacts à ce sujet avec les institutions spécialisées, y compris l'UNICEF et le Bureau du Programme Iraq.
Le Rapporteur spécial réitère toutes ses précédentes recommandations, en particulier celles figurant dans ses deux derniers rapports. Un respect total et sans réserve par le Gouvernement iraquien de toutes les obligations qui lui incombent en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ou du droit international coutumier est un impératif, poursuit le rapport, ajoutant que la communauté internationale devrait dans le même temps être prête à apporter son assistance dans le cadre de ce processus selon qu'il conviendra. Cela concerne aussi le Rapporteur spécial, précise le rapport. En conséquence, quelle que soit l'évolution future de la situation en ce qui concerne l'Iraq, les droits de l'homme doivent avoir la priorité absolue dans l'avenir. Cela devrait inclure la mise en place d'une antenne droits de l'homme en Iraq qui garantirait, en coopération avec le Gouvernement, que la législation, les pratiques et les institutions requises pour la mise en œuvre des normes relatives aux droits de l'homme soient en place et dans le même temps, suivrait le respect de ces normes, ferait des recommandations et présenterait des rapports selon qu'il conviendrait. Des ressources suffisantes devraient être réservées dès à présent pour l'application des mesures susmentionnées, indique le rapport.
L'additif 1 au rapport de M. Mavrommatis, daté du 4 mars 2003, indique que, compte tenu des circonstances qui prévalent en ce qui concerne l'Iraq, le Rapporteur spécial a décidé de ne pas effectuer la deuxième mission qu'il avait prévu de faire dans ce pays. Le Rapporteur spécial reconnaît que le processus de coopération avec le Gouvernement iraquien est lent et laborieux et que de nombreuses années d'un régime autoritaire de parti unique expliquent l'absence de culture des droits de l'homme, d'institutions démocratiques opérationnelles et de mécanismes efficaces visant à assurer la protection des droits et des libertés individuelles.
M. DHARI KHALIL MAHMOOD (Iraq) a fait observer que dire que l'Iraq n'a pas été désarmé et que cela a abouti à la guerre est contraire à la position du Conseil de sécurité. Il a en outre relevé que l'additif au rapport de M. Mavrommatis, où il est affirmé que la coopération du Gouvernement iraquien est lente et difficile, marque un infléchissement de la position du Rapporteur spécial. Indiquant qu'au lieu de se rendre en Iraq, le Rapporteur spécial a rencontré des délégations gouvernementales à Genève, le représentant iraquien a souligné que cette démarche a donné lieu à un dialogue intense au cours duquel la délégation iraquienne a fourni nombre de renseignements requis au Rapporteur spécial qui n'en fait pourtant nullement état dans son rapport. En vertu de son mandat, le Rapporteur spécial aurait dû se rendre en Iraq et ne pas être arrêté par l'éventualité d'une agression. À la lumière de l'agression américano-britannique, tous les mécanismes des droits de l'homme devraient se rendre immédiatement en Iraq pour mettre en lumière les violations des droits de l'homme perpétrées par les forces d'invasion, a estimé le représentant iraquien. Dans l'additif au rapport de M. Mavrommatis, on peut voir l'influence de la campagne qui a été menée contre l'Iraq, a-t-il insisté. Il a affirmé que le Rapporteur spécial a été très sélectif, mettant en exergue des mensonges et des idées préconçues alors que de graves violations des droits de l'homme ont été causées par l'embargo qui a frappé l'Iraq pendant tant d'années. Les Nations Unies et la communauté internationale seront tenues pour responsables de «leur position peureuse» face à l'agression menée contre le peuple iraquien, a affirmé le représentant de l'Iraq. De nombreuses protestations et manifestations à travers le monde, y compris de la part d'acteurs à Hollywood, n'ont pas empêché la Commission de refuser de tenir une séance spéciale consacrée à l'Iraq au cours de la présente session. L'Iraq en appelle au Rapporteur spécial et à toutes les autorités compétentes des Nations Unies pour qu'ils se rendent en Iraq afin d'enquêter sur les violations des droits de l'homme perpétrées par les envahisseurs du XXIe siècle.
Dialogue interactif avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Iraq
Le représentant de la Syrie a déclaré que le rapport de M. Mavrommatis était pauvre en faits concrets rapportés et a demandé au Rapporteur spécial pourquoi il avait mis tant de temps avant d'effectuer sa deuxième visite en Iraq, sachant qu'il y avait déjà sur place des centaines de fonctionnaires de l'ONU, jusqu'à quarante-huit heures avant l'agression. M. Mavrommatis s'est contenté des témoignages d'opposants vivant à l'étranger: n'est-ce pas là une lacune qui mine les conclusions de son rapport?
Le représentant de Cuba a demandé ce que pensait M. Mavrommatis des violations qui se produisent en Iraq suite à l'agression actuelle? À la lumière de ces événements, ne faudrait-il pas réviser son mandat et y faire figurer une enquête sur les massacres qui ont lieu actuellement? Se propose-t-il de faire une visite en Iraq pour vérifier ce qu'il s'y passe?
Le représentant du Canada a demandé quel pourrait être à l'avenir, de l'avis du Rapporteur, le rôle des Nations Unies pour l'instauration de mécanismes de respect des droits de l'homme ancrés dans les lois et la vie quotidienne de l'Iraq?
Répondant à ces questions, le Rapporteur spécial, M. Mavrommatis, a expliqué au représentant iraquien que les derniers paragraphes de son rapport sont consacrés au respect des instruments internationaux relatifs au droit de l'homme. Il a reconnu qu'il y avait eu un certain degré de coopération, mais qu'elle avait été longue à se mettre en place, puisqu'il avait fallu deux ans pour qu'il puisse se rendre dans le pays. S'agissant de sa deuxième visite, il a précisé que celle-ci devait être longue de deux semaines et qu'il devait être accompagné de personnel des Nations Unies et que c'est pour cette raison qu'il avait été préférable de la reporter. Il a déclaré qu'il était prêt à se rendre dans le pays dès que les circonstances le permettraient. Par ailleurs, il a réitéré que la coopération s'était accrue récemment avec les autorités iraquiennes, mais que le retard pris ne lui avait pas permis de recevoir des réponses concernant certaines allégations. Il a rendu compte de progrès notables dans le traitement des prisonniers et de la libération de certains détenus, mais a déploré qu'il ait été si laborieux de les obtenir. S'agissant des questions relatives au pouvoir judiciaire, il a déclaré qu'il ne comprenait pas ce qui justifiait l'existence de tribunaux spéciaux, ni la nécessité qu'il y ait une cour devant laquelle le Président peut déférer directement des prévenus.
Aux questions de la Syrie, M. Mavrommatis a réitéré qu'il était prêt à se rendre en Iraq demain, à condition que la sécurité du personnel qui l'accompagne puisse être assurée, que sa visite puisse durer deux semaines et qu'il ait une totale liberté de mouvement. Il a refuté les accusations selon lesquelles il ne se serait entretenu qu'avec des iraquiens en exil. Il a fait part de sa rencontre avec des dignitaires religieux, notamment chrétiens, à Bassora, et avec des ministres. Il a déclaré qu'il n'était pas un novice et qu'il savait comment évaluer les témoignages. En outre, a-t-il précisé, il a donné à l'État partie un temps amplement suffisant pour répondre et se justifier.
Aux questions posées par Cuba, le Rapporteur spécial a rappelé les termes de son mandat et indiqué qu'il enquêterait sur toutes les allégations qui sont portées à son attention et qui entrent dans le cadre de son mandat. Il a ajouté que c'était à la Commission de modifier les termes de son mandat si elle le jugeait utile, mais que ce n'était pas à lui d'en décider. En dernier lieu, il a répondu au Canada qu'une présence était indispensable et qu'il appartenait au Haut Commissaire d'en décider les modalités. Il a rappelé qu'il y a dix ans, l'Iraq avait amorcé un processus de modification de sa constitution et de réformer son pouvoir judiciaire. Dans ce contexte, il a estimé que l'Iraq aurait beaucoup à gagner d'une bonne coopération avec les Nations Unies qui pourraient l'aider dans son processus de réformes.
Présentation de la Représentante personnelle du Haut Commissaire aux droits de l'homme à Cuba
MME CHRISTINE CHANET, Représentante personnelle du Haut Commissaire aux droits de l'homme à Cuba, a indiqué que, désignée à ce poste le 27 janvier dernier conformément à la résolution 2002/18 de la Commission, elle a fait parvenir à l'Ambassadeur de Cuba auprès des Nations Unies à Genève le 7 février dernier une lettre sollicitant des observations sur les modalités et tous les autres aspects que pourrait revêtir un dialogue constructif entre le représentant du Haut Commissaire et les autorités cubaines. Dans un document consignant le point de vue du Gouvernement cubain sur la résolution 2002/18 et transmis au Haut Commissaire le 11 février, les autorités cubaines font part de leur refus d'accepter cette résolution qu'ils jugent injuste, sélective et discriminatoire. En revanche, le Gouvernement cubain se dit prêt à continuer de répondre aux demandes d'informations du Haut Commissaire et d'autre part aux communications qui leur parviendront à travers les mécanismes thématiques de la Commission, a indiqué Mme Chanet. De même, dans ce document, Cuba indique être disposé à «analyser la possibilité de prendre des mesures pour ratifier les instruments internationaux auxquels cet État n'est pas encore partie», a précisé la Représentante personnelle du Haut Commissaire.
Mme Chanet a par ailleurs précisé que lors d'une réunion interne au Haut Commissariat, elle a pu avoir un échange de vues avec l'équipe qui assiste les rapporteurs thématiques afin de recueillir leurs informations sur la situation des droits de l'homme à Cuba. Mme Chanet a également indiqué que des documents lui ont été adressés émanant de plusieurs organisations non gouvernementales qui souhaitaient lui communiquer leurs informations, les dernières qui lui sont parvenues concernant les arrestations intervenues à Cuba ces derniers jours. «Mais force est de constater qu'il est tout à fait prématuré de procéder à une évaluation d'ensemble, sérieuse et objective de la situation générale des droits de l'homme à Cuba et sur les progrès réalisés dans le domaine des droits civils et politiques, à Cuba, pendant la période visée par la résolution», a déclaré Mme Chanet. En effet, une évaluation impartiale exige une analyse exhaustive de toutes ces informations qui émanent d'ailleurs de sources très diverses, une vérification de ces informations, un recoupement de celles-ci avec d'autres éléments recueillis, notamment auprès des rapporteurs thématiques et des différents comités devant lesquels Cuba a présenté un rapport, a expliqué la Représentante personnelle du Haut Commissaire. Il va de soi qu'une période de deux mois (c'est la période écoulée depuis la nomination de la Représentante personnelle) est insuffisante pour mener à bien une telle mission, a déclaré Mme Chanet.
Dialogue interactif avec la représentante spéciale pour Cuba
Le représentant de Cuba a déclaré que son pays se réservait le droit de répondre ultérieurement sur le rapport de Mme Chanet.
Le représentant des États-Unis a demandé comment, puisque le Gouvernement de Cuba lui avait interdit l'entrée de son territoire, Mme Chanet se proposait-elle au juste de faire aboutir son mandat? D'autre part, il y a quelques jours, soixante-dix dissidents cubains se sont retrouvés en prison pour avoir exprimé leur désaccord avec la politique officielle. Mme Chanet peut-elle donner des informations sur cet événement? Quelles mesures prendra-t-elle pour obtenir leur libération?
Répondant aux États-Unis, MME CHANET, Représentante personnelle du Haut Commissaire pour Cuba, a déclaré qu'elle n'avait malheureusement aucune information sur les arrestations dont il a été question car les faits étaient encore trop récents. Mme Chanet a regretté n'avoir pu se rendre à Cuba, car il est évidemment très positif de pouvoir évaluer la réalité des informations qu'elle reçoit en se rendant sur le terrain. Elle a fait part de sa détermination à poursuivre sa mission et à tenter de se rendre sur le territoire cubain.
Autres rapports
Au titre de la «Question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales, où qu'elle se produise dans le monde», la Commission est en outre saisie du rapport du Secrétaire général Situation des droits fondamentaux des détenus libanais en Israël (E/CN.4/2003/32); du rapport du Secrétaire général sur la question des droits de l'homme à Chypre (E/CN.4/2003/31); des rapports du Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme au Timor-Leste (E/CN.4/2003/37 et Add.1) et en Sierra Leone (E/CN.4/2003/35); ainsi que du rapport du Secrétaire général sur la coopération avec les représentants d'organes de l'Organisation des Nations Unies chargés des droits de l'homme (E/CN.4/2003/34).
Débat sur la question de la violation des droits de l'homme où qu'elle se produise dans le monde
M. SHAUKAT UMER (Pakistan, au nom de l'Organisation de la Conférence islamique - OCI) a fait part de sa vive préoccupation face aux situations où les droits de l'homme de populations musulmanes ont été soumis à des violations flagrantes et systématiques de leurs droits. Il a également fait part de sa préoccupation face au silence autour du phénomène du terrorisme d'État et de l'exploitation des événements du 11 septembre aux fins d'intensifier la répression des populations musulmanes occupées. L'invasion à grande échelle et la nouvelle occupation des territoires palestiniens par les forces de défense israéliennes au cours des trente derniers mois écoulés, ainsi que le nombre de morts occasionnées dans la population, sont une source de profonde inquiétude pour le monde islamique.
L'OCI se réjouit de la mise en place de l'Autorité intérimaire afghane et exhorte la communauté internationale à soutenir les efforts déployés par le Gouvernement afghan en faveur de la reconstruction du pays et de la restauration des institutions nationales. Le représentant du Pakistan a par ailleurs rappelé que l'Organisation de la conférence islamique a condamné les violations massives des droits de l'homme du peuple cachemiri au Jammu-et-Cachemire et soutient le droit à l'indépendance de ce peuple. Elle demande un règlement pacifique de la question du Jammu-et-Cachemire conformément aux résolutions pertinentes des Nations Unies. L'OCI reste en outre préoccupée par l'occupation de territoires azerbaïdjanais, ainsi que par les souffrances des réfugiés et personnes déplacées azerbaïdjanais. L'OCI demande un règlement pacifique du conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan qui soit respectueux des principes d'intégrité territoriale des États et d'inviolabilité des frontières internationalement reconnues. L'OCI prône en outre le respect de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de l'indépendance politique de l'Iraq. Elle demande une résolution rapide du problème des prisonniers et des personnes disparues du Koweït et d'autres pays. L'OCI réaffirme en outre son soutien ferme à la juste cause des musulmans turcs de Chypre.
M. SIPHO GEORGE NENE (Afrique du sud, au nom du Groupe africain) a regretté que la politisation des débats de la Commission des droits de l'homme nuise à la qualité des débats sur la question des violations des droits de l'homme. Les résolutions prises sur les pays ne suivent pas la procédure de négociation et divisent la Commission entre Nord et Sud, ce qui n'est pas constructif. La méthode de désignation de coupables est une menace à la crédibilité de la Commission. Chaque pays doit prendre la responsabilité et aider les pays concernés à améliorer leur situation. Le groupe africain estime que faute de respecter l'esprit de la Déclaration des droits de l'homme, les initiatives des parrains des résolutions n'aboutissent pas. Il faut une approche équilibrée dans le traitement de droits économiques, sociaux et culturels. La réalisation pratique des droits de l'homme ne peut advenir dans un contexte de pauvreté et de disparités économiques. Certains sponsors de résolutions ne tiennent pas compte de ces réalités, ce qui nuit à leur efficacité.
Aucun pays ne peut se prévaloir d'une situation parfaite en matière de respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les héritages historiques de l'esclavage, du colonialisme et de l'apartheid ont entraîné des violations massives des droits de l'homme sur le continent africain. Les pays développés eux-mêmes sont passés par différentes phases de développement, ce qui ne s'est pas passé sans violations graves des droits de l'homme et des libertés fondamentales. De nombreux rapports confirment la nouvelle tendance en matière de violations qui prennent les formes, entre autres, de pollution de l'environnement, de trafics d'êtres humains du sud vers le nord, de nouvelles formes de racisme et de tendances xénophobes. L'on ne peut donc plus se comporter comme si la Commission se composait d'une part des pays respectueux des droits de l'homme et d'autre part ceux qui ne les respectent pas.
M. CHUNG EUI-YONG (République de Corée) a regretté qu'en cette année de dixième anniversaire de la Déclaration et du Programme d'action de Vienne et après l'adhésion de la majorité des membres des Nations Unies aux six principaux instruments relatifs aux droits de l'homme, on continue d'assister à de graves violations des droits de l'homme partout dans le monde, et particulièrement dans les régimes dictatoriaux et les zones de conflit. La communauté internationale, par un effort concerté, doit mettre un terme aux violations commises par les régimes répressifs dans le seul objectif de se maintenir au pouvoir. Le représentant a ensuite attiré l'attention sur la situation tragique de ceux qui sont obligés de chercher de la nourriture dans les pays voisins ou un refuge contre l'oppression politique et a jugé indispensable de leur accorder une protection, non seulement à ceux qui peuvent être classés comme réfugiés mais aussi à ceux qui, ayant un statut juridique ambigu, connaissent une situation désespérée.
Le représentant coréen a ensuite rendu compte du processus de réunification des familles amorcé depuis le sommet inter-coréen de juin 2000. À cet égard, il a précisé que les deux Corée étaient parvenues à un accord, en septembre 2002, portant sur la création d'un centre permanent de réunion en vue de faciliter les échanges entre les familles. Insistant ensuite sur les liens étroits qui existent entre les droits de l'homme et la démocratie, il a fait part du Plan d'action de Séoul, adopté en novembre dernier par la deuxième conférence ministérielle de la communauté des démocraties, qui réaffirme que le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales est l'un des éléments fondamentaux de la démocratie représentative et définit des mesures concrètes pour la promotion de la démocratie aux plans international, régional et national.
MME NORMA NASCIMBENE DE DUMONT (Argentine) a rappelé que la Commission examine la question des droits de l'homme à Chypre de manière ininterrompue depuis 1976. Elle a fait observer que lorsque le 11 novembre dernier, le Secrétaire général avait présenté un document qui cherchait à promouvoir les bases d'un accord global sur la question de Chypre, chacun espérait que la Commission pourrait se réjouir de la réalisation de cet accord tant attendu. Il est regrettable que ces efforts n'aient pas été couronnés de succès, a déclaré la représentante argentine. La Commission n'en devrait pas moins continuer à maintenir à son ordre du jour l'examen de la question puisque, comme le signale le rapport du Secrétaire général sur le sujet, la poursuite de la division de Chypre a des conséquences dans toute l'île sur la jouissance des divers droits de l'homme. La représentante a rappelé que la question chypriote revêt une importance particulière pour son pays du fait, entre autres, que l'Argentine fournit des troupes à la force des Nations Unies à Chypre.
M. TASSOS KRIEKOUKIS (Grèce, au nom de l'Union européenne) a déclaré que l'abolition de la peine de mort est une contribution à la dignité de l'homme et au renforcement progressif des droits de l'homme. L'Union européenne œuvre donc à son abolition universelle et prend des mesures systématiques à cet égard dans ses relations avec les pays tiers. De même, la torture et les traitements dégradants figurent parmi les crimes les plus abominables, et leur éradication est une priorité pour l'Union européenne. L'Union européenne se déclare particulièrement préoccupée par la situation des droits de l'homme au Myanmar, en Colombie, en République démocratique du Congo, dans la République démocratique populaire de Corée, en Iraq, dans les territoires palestiniens occupés, dans la République de Tchétchénie, au Soudan, au Timor-Leste, au Turkménistan et au Zimbabwe. Concernant l'Iraq, l'Union européenne réitère son inquiétude en ce qui concerne les violations systématiques et très graves des droits de l'homme et du droit humanitaire par le Gouvernement de l'Iraq. L'UE espère que le conflit actuel s'achève avec le minimum de pertes humaines possible. Toutes les parties doivent respecter leurs obligations juridiques internationales, notamment les Conventions de Genève. L'Union présentera bientôt une initiative sur la situation des droits de l'homme en Iraq.
L'Union européenne accueille favorablement certains développements survenus en Turquie dans le domaine des droits de l'homme et soutiendra les initiatives du Gouvernement turc à cet égard. L'Union est aussi satisfaite des progrès accomplis dans l'Europe du sud-est en matière de droits de l'homme, mais est profondément choquée par l'assassinat de M. Djindjic. Tous les États doivent collaborer avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie. L'UE regrette que les efforts déployés par le Secrétaire général pour trouver une solution définitive au problème de la division de Chypre n'aient pas abouti. Elle regrette le manque de volonté du Bélarus dans l'application des réformes démocratiques; se déclare inquiète du contrôle présidentiel sur le processus législatif et la vie politique au Kazakhstan. Elle suit de près l'évolution de la situation des droits de l'homme en Ouzbékistan et reste préoccupée par les informations faisant état de la pratique systématique de la torture dans ce pays. Au Cambodge, il faut souligner les développements positifs en matière de droits de l'homme, malgré certaines difficultés. En Chine, la situation des droits de l'homme est toujours source d'inquiétudes, malgré des avancées cette année; l'UE invite la Chine à accepter un calendrier de visites des mécanismes pour lesquels des invitations formelles ont été données. La Chine n'a pas ratifié le Pacte international sur les droits civils et politiques, et l'Union est préoccupée par le non-respect des droits culturels et religieux au Tibet et les violations des droits de l'homme au Xianjian. Elle exprime sa déception devant le fonctionnement du tribunal ad hoc pour Timor-Leste et demande au Gouvernement de prendre les mesures pour le rendre efficace. L'Union se félicite du cessez-le-feu intervenu au Népal, qui marque peut-être le retour à la paix et à la stabilité. Au Pakistan, il faut relever certains progrès en matière de droits de l'homme, notamment la proclamation d'une loi de réforme policière. L'Union européenne salue aussi les efforts et les réussites du Vietnam dans l'amélioration des droits socio-économiques de son peuple, bien que des violations de la liberté d'association subsistent.
En Afrique, le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique, qui devrait amener une amélioration à la situation des droits de l'homme. L'Union reste préoccupée de l'impact sur ces droits des nombreux conflits qui ravagent le continent. Elle exprime son inquiétude à l'égard des violations des droits de l'homme au Burundi, en Côte-d'Ivoire, en Guinée équatoriale, au Libéria, au Togo. Elle est également préoccupée par la situation au Guatemala, ainsi qu'à Cuba, mais salue dans ce pays certains progrès, en particulier en matière de liberté religieuse ou de non-application de la peine de mort. En ce qui concerne le Proche-Orient, l'Union relève les réussites, comme celles décrites par le rapport de l'ONU sur le Développement humain des pays arabes : augmentation de l'espérance de vie, baisse de la mortalité infantile, notamment. L'Union salue l'engagement exprimé récemment par l'Iran de respecter les droits de l'homme et de promouvoir l'État de droit. Il faut aussi se réjouir de l'invitation ouverte lancée aux instances de la Commission par le Gouvernement iranien. Concernant l'Arabie saoudite, l'Union note certains progrès accomplis, y compris l'adoption d'un nouveau code de procédure criminelle, mais il reste des inquiétudes quant à l'application des normes de base des droits de l'homme. Enfin, l'Union européenne déclare encourageante la libération de 600 prisonniers politiques par la Syrie ces deux dernières années, de même que l'octroi de licences pour la presse.
M. AYMAN RAAD (Syrie) a exprimé sa déception devant la poursuite voire l'aggravation des violations des droits de l'homme et devant la poursuite d'une politique de deux poids deux mesures sur cette question. Il a regretté que l'on continue d'utiliser ce point de l'ordre du jour pour montrer certains pays du doigt, comme par exemple Cuba ou le Zimbabwe pour la simple raison qu'ils revendiquent le droit à la souveraineté. En même temps, Israël continue en toute impunité de commettre des violations des droits de l'homme, du droit international et des principes humanitaires. Ainsi, Israël refuse toujours de fournir les cartes des mines au Sud-Liban. Il s'est étonné du silence du Groupe occidental sur cette question, alors que les colonies illégales continuent de s'implanter et que les détentions arbitraires se multiplient. Le représentant a ensuite fait référence à divers rapports, notamment celui de M. John Dugard, Rapporteur spécial sur les territoires palestiniens occupés, et celui du Comité chargé d'enquêter sur les pratiques israéliennes. Il a noté qu'au lieu de contraindre Israël à respecter les résolutions des Nations Unies, on le récompense. Par ailleurs, le représentant syrien a souligné que le meilleur moyen de promouvoir les droits de l'homme était d'instaurer un bon climat de coopération. Il a estimé que ce point de l'ordre du jour était désormais vidé de son sens puisque son examen se limitait à promouvoir des résolutions rédigées en toute partialité.
Droit de réponse
Répondant à l'intervention faite par les États-Unis au cours du dialogue avec Mme Chanet et portant sur des arrestations à Cuba, le représentant de Cuba a relevé qu'il était normal que ce pays se préoccupe du sort de ses mercenaires et des éléments qu'il utilise dans la guerre qu'il mène contre Cuba. Il a demandé pourquoi les États-Unis ne se préoccupaient pas du sort des manifestants pacifistes arrêtés ces jours derniers sur son territoire.
Le représentant d'Israël, répondant aux interventions de la Syrie et de l'Organisation de la Conférence islamique, a regretté que deux jours de débat sur la question de la Palestine ne leur avaient pas suffi. Il a répondu que son pays avait érigé un mur de sécurité pour empêcher l'infiltration d'éléments terroristes, de même pour les postes de contrôle. Il a rappelé qu'encore hier, un attentat sur le sol israélien a fait 50 blessés. Il a demandé à l'OCI de condamner sans équivoque les attentats suicide et de privilégier le dialogue et la concertation.
Répondant à l'intervention du Pakistan au nom de l'OCI, le représentant de l'Arménie a estimé que la définition de la situation dans sa région demandait des ajustements pour refléter la situation sur le terrain. Il a réitéré son engagement en faveur d'un règlement juste et pacifique de la question du Haut-Karabakh.
Le représentant de l'Iraq a déclaré que la déclaration de l'Union européenne n'a pas étonné son pays. L'Union européenne passe sous silence les souffrances imposées au peuple iraquien du fait de l'embargo imposé au pays depuis tant d'années et du fait de l'utilisation de l'uranium appauvri dans le cadre de l'agression menée depuis 12 ans contre l'Iraq. L'agression dont est aujourd'hui victime l'Iraq est illégale, a rappelé le représentant iraquien. Les mêmes qui tendent des biscuits aux enfants iraquiens sont ceux qui les bombardent aussi avec des bombes à fragmentation.
Le représentant du Pakistan, au nom de l'OCI, a répondu à la déclaration de l'Union européenne en affirmant qu'il faudrait accorder deux heures à la déclaration de l'Union européenne puisque qu'elle semble avoir pour mission de protéger les droits de l'homme partout dans le monde sauf au sein de l'Union européenne elle-même. L'Union européenne passe sous silence des violations des droits de l'homme commises sur le territoire de ses États membres, telles les restrictions au droit d'asile, la pornographie impliquant des enfants, l'exploitation des femmes à des fins commerciales, pour n'en citer que quelques unes. L'Union européenne pense-t-elle que la guerre et les conflits ne constituent pas des violations des droits de l'homme? Pourquoi l'Union européenne ne mentionne-t-elle pas la situation actuelle?
Répondant à l'intervention du Pakistan au nom de l'OCI, le représentant de l'Inde a estimé que ce pays, qui se posait en donneur de leçons, n'hésitait pas à mener une politique de discrimination. Concernant la référence faite à la situation au Jammu-et-Cachemire, il a déclaré qu'il s'agissait en fait d'une incitation à la haine et au terrorisme. Il a ajouté que le représentant s'abritait derrière le noble principe du droit de peuples à disposer d'eux-mêmes pour tenter de cacher le fait que ce principe n'est pas respecté au Pakistan.
Le représentant de la Palestine a déclaré qu'il était incapable de garder le silence en entendant les propos du représentant d'Israël et a expliqué que cette clôture de sécurité était construite sur des terres palestiniennes spoliées. S'agissant du terrorisme, il a déclaré qu'étant soumis à l'occupation étrangère, le peuple palestinien se devait de résister à l'agression et ne faisait que son devoir. Il a rappelé que l'agression avait précédé la résistance.
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