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LES RAPPORTEURS SPÉCIAUX SUR LA SITUATION DES DROITS DE L'HOMME AU BURUNDI ET AU MYANMAR PRÉSENTENT LEURS RAPPORTS

31 mars 2003



Commission des droits de l'homme
59ème session
31 mars 2003
Après-midi





Le Ministre togolais de la justice s'adresse à la Commission



Les Rapporteurs spéciaux sur la situation des droits de l'homme au Burundi et au Myanmar ont présenté cet après-midi leurs rapports à la Commission des droits de l'homme. Le Ministre de la justice du Togo, M. Katari Foli Bazi, s'est également adressé à la Commission. Elle a aussi entendu les derniers orateurs au titre du débat général sur la question de la violation des droits de l'homme dans les territoires arabes occupés, y compris la Palestine.
Le Ministre togolais de la justice, chargé de la promotion de la démocratie et de l'état de droit, a reconnu que le poids des mentalités antagonistes, les structures totales et l'histoire de chaque pays constituaient encore de véritables défis à relever. Il a toutefois demandé que l'on comprenne l'évolution de toute société de façon progressive, conformément à ses propres réalités. Sans un minimum vital garanti, sans une couverture sanitaire suffisante, les droits de l'homme restent bien fragiles, a-t-il insisté. Certains foyers de tension sont de véritables volcans qui risquent de se réveiller encore, a-t-il mis en garde en citant l'exemple de la Côte d'Ivoire, jadis havre de paix dans la région occidentale de l'Afrique et aujourd'hui minée par une guerre fratricide aux conséquences imprévisibles et lourdes pour la région.
Mme Marie-Thérèse Kéita-Bocoum, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme au Burundi, a estimé que les atteintes au droit à la vie étaient autant le fait des forces de l'État que des divers groupes armés intervenant sur le territoire. Elle s'est prononcée en faveur de la tenue d'une conférence internationale sur la paix, la sécurité et la stabilité dans la région des Grands Lacs préconisée part le Conseil de sécurité. Après l'intervention du Burundi, en tant que partie concernée, un «dialogue interactif» s'est engagé avec les délégations.
Malgré les développements positifs de la situation des droits de l'homme au Myanmar, le Rapporteur spécial, M. Paulo Sérgio Pinheiro, a regretté d'avoir dû interrompre, la semaine dernière, sa visite du fait de la découverte d'un dispositif d'écoute dans les locaux de la prison ou il procédait à des auditions de détenus. Dans sa réponse en qualité de partie concernée, le représentant du Myanmar a réitéré les regrets de son Gouvernement face à cet incident qu'il a qualifié de «malheureux» et assuré que son Gouvernement procédait à une enquête sur ce point. Le Rapporteur spécial a transmis l'immense espoir du peuple du Myanmar qui aspire à la paix et a recommandé que l'Envoyé spécial du Secrétaire général puisse se rendre prochainement dans la région pour favoriser la reprise du processus de réconciliation nationale. Par ailleurs, M. Pinheiro s'est félicité des efforts de l'Organisation internationale du travail dans le cadre des activités visant à l'élimination rapide et effective du travail forcé. En outre, le représentant du Myanmar a informé la Commission de la libération, le 16 mars 2003, de quarante cinq prisonniers politiques supplémentaires. Un dialogue interactif a ensuite eu lieu.
En début de séance, la Commission a achevé son débat général sur la question de la violation des droits de l'homme dans les territoires arabes occupés, y compris la Palestine, en entendant les déclarations de plusieurs organisations non gouvernementales : Amnesty International; Commission internationale de juristes; Organisation arabe des droits de l'homme; l'Union mondiale pour le judaïsme libéral; Human Rights Watch; Alliance internationale d'aide à l'enfance; Fédération syndicale mondiale; Fédération des associations pour la défense et la promotion des droits de l'homme; Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples; Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale; Union des avocats arabes; Centre Simon Wiesenthal; Cairo Institute for Human Rights Studies; United Nations Watch et Société pour les peuples en danger.
À l'issue de ces débats, les États-Unis, Israël et la Syrie ont exercé leur droit réponse.
La Commission poursuivra, demain mardi 1er avril, à partir de 10 heures, l'examen des violations des droits de l'homme où qu'elles se produisent dans le monde. Elle entendra les rapporteurs spéciaux sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo et en Iraq, ainsi que la Représentante personnelle du Haut Commissaire aux droits de l'homme pour Cuba.

Déclaration du Ministre de la justice du Togo
M. KATARI FOLI BAZI, Garde des sceaux et Ministre de la justice, chargé de la promotion de la démocratie et de l'état de droit du Togo, a salué les efforts accomplis par la communauté internationale en matière de concrétisation des idéaux contenus dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, tout en relevant que la défense et la promotion des droits de l'homme constituent un défi quotidien, un travail jamais achevé. Le poids des mentalités antagonistes, les structures totales et l'histoire de chaque pays constituent de véritables défis à relever. Aussi faut-il comprendre que l'évolution de toute société se fait de façon progressive, conformément à ses propres réalités. Or, les hommes connaissent des déterminations historiques: il y a des continents qui sont traversés par des calamités, des pays qui ont plus de problèmes que d'autres. Certains hommes sont plus nantis que d'autres. Sans un minimum vital garanti, sans une couverture sanitaire suffisante, les droits de l'homme restent bien fragiles. Certains foyers de tension sont de véritables volcans qui risquent de se réveiller encore. C'est ainsi que la Côte d'Ivoire, jadis havre de paix dans la région occidentale de l'Afrique, est aujourd'hui minée par une guerre fratricide aux conséquences imprévisibles et lourdes pour ce pays et pour toute la sous région.
M. Foli Bazi a souligné que la jouissance effective de l'ensemble des droits de l'homme est subordonnée à un niveau de développement économique et à la réalisation du progrès social dans nos États. C'est pourquoi la politique de sanctions économiques pour cause de violation des droits de l'homme apparaît comme un paradoxe majeur dans la mesure où elle engendre et exacerbe une situation de crise qui n'est guère favorable au respect de la dignité humaine.
Le Ministre togolais a rappelé qu'il y a un an, le Togo dénonçait à cette même tribune l'instrumentalisation des questions des droits de l'homme à des fins politiciennes, en même temps qu'il faisait état de la volonté du Gouvernement d'œuvrer pour l'instauration d'un véritable état de droit. C'est ainsi qu'une Commission des droits de l'homme a été créée dès 1987 et constitutionnalisée en 1992. En 2002, la Constitution a institué un Médiateur de la République chargé de régler les conflits non juridictionnels entre les citoyens et l'administration. Sur le plan institutionnel, le Togo a ratifié cinquante conventions internationales, notamment la convention relative aux droits de l'enfant. D'autre part, et compte tenu du fait que l'éducation aux droits de l'homme constitue sans doute la meilleure prévention contre les violations massives des droits de l'homme, le Togo a lancé l'enseignement des droits de l'homme dans les établissements scolaires et proclamé l'année 1999 «Année des droits de l'homme et du dialogue».

Fin du débat sur la question de la violation des droits de l'homme dans les territoires arabes occupés, y compris la Palestine
MME MELINDA CHING (Amnesty International) a rappelé que les résolutions adoptées l'an dernier par la Commission s'agissant de la situation en Israël et dans les territoires occupés sont restées lettre morte, tout comme l'essentiel des autres résolutions adoptées ces trente dernières années s'agissant de cette situation. Au cours de l'année écoulée, on a assisté à une escalade des meurtres et les destructions et Amnesty International n'a eu de cesse que de condamner les graves violations des droits de l'homme commises par les deux parties. Depuis septembre 2000, plus de 2 000 Palestiniens et 700 Israéliens ont été tués. Aujourd'hui, plus de la moitié de la population palestinienne vit en dessous du seuil de pauvreté et la malnutrition ainsi que d'autres problèmes de santé se sont aggravés au sein de cette population. L'impunité dont jouissent ceux qui se rendent coupables de violations des droits de l'homme encourage de nouvelles violations, a fait observer la représentante d'Amnesty International, soulignant que les soldats israéliens qui commettent des violations massives et des crimes de guerre jouissent de l'impunité alors que les Israéliens qui refusent de servir dans l'armée dans les territoires occupés, parce qu'ils refusent de contribuer à de telles violations, sont emprisonnés. Une paix et une sécurité durables ne pourront se concrétiser que si les droits de l'homme sont intégrés à part entière dans les négociations et les initiatives de paix. La Commission doit prendre des mesures visant à assurer que les parties concernées respectent leurs engagements en matière de droits de l'homme. À cette fin, des mécanismes concrets devraient être mis en place. Des observateurs internationaux dotés d'un solide mandat en matière de droits de l'homme devraient être déployés sans délai. Leur présence pourrait contribuer à sauver des vies israéliennes et palestiniennes.
MME HASSIBA HADJ SAHRAOUI (Commission internationale de juristes) a regretté que le Rapporteur spécial de la Commisson n'ait pu se rendre dans les territoires occupés et a exprimé son extrême préoccupation face au refus du Gouvernement israélien d'envoyer une délégation devant le Comité des droits de l'homme la semaine dernière pour l'examen de son rapport périodique. Elle a condamné fermement les attentats par des groupes armés palestiniens visant des civils israéliens et a dénoncé les violations dont se rendent coupables les autorités israéliennes au regard des instruments internationaux. Elle a mis l'accent sur l'usage disproportionné de la force, le recours à des armes lourdes dans des zones civiles, le recours à la torture et aux traitements inhumains dégradants. S'agissant des détentions arbitraires, elle a déclaré que la Commission internationale de juristes était d'autant plus inquiète que la Cour suprême d'Israël a entériné cette pratique des forces de sécurité israéliennes dans une décision de janvier 2002. Elle a ensuite dénoncé la pratique d'une politique de bouclage des territoires occupés et la multiplication des points de contrôle, qui constituent des restrictions inacceptables à la liberté de mouvement et la négation des droits économiques, sociaux et culturels les plus élémentaires. Elle s'est inquiétée des destructions systématiques des maisons des familles des auteurs présumés d'attentats suicide et des peines collectives qui prennent la forme d'expulsion vers la bande de Gaza. Elle a appelé l'attention sur la décision de la Cour suprême israélienne qui a entériné ces déportations par une décision de septembre 2002. De même, a-t-elle poursuivi, l'implantation de nouvelles colonies de peuplement ou l'expansion des violations du droit international humanitaire. La représentante a salué le courage des objecteurs de conscience israéliens qui refusent de servir dans les territoires occupés, alors que ceux qui refusent d'obéir à des ordres illégaux sont condamnés et emprisonnés. Partant, elle a prié instamment la Commission de rappeler à Israël et à l'Autorité palestinienne qu'ils ont l'obligation de poursuivre les auteurs de crimes de guerre ; d'appeler les parties au conflit à cesser ces violations et de mettre en place une présence internationale de surveillance des droits d l'homme dans les territoires occupés palestiniens.
M. MOHAMMED FAYEK (Organisation arabe des droits de l'homme) a déclaré qu'une quantité phénoménale d'incidents s'étaient produits depuis l'an dernier dans les territoires palestiniens occupés, en particulier l'occupation israélienne des régions théoriquement sous contrôle palestinien et une guerre totale contre le peuple palestinien dans une tentative de le subjuguer. Tous les efforts pour aboutir à un règlement négocié ont été gelés, le règlement étant soumis par la partie israélienne à des conditions impossibles à remplir. Il est regrettable que les États-Unis aient décidé de soutenir les politiques israéliennes relatives au problème palestinien. Le plan qu'ils ont proposé de règlement du conflit, la «feuille de route», adopté par le «Quartet», ne définit pas la nature de l'État palestinien qu'il promet, ni ne donne de solution aux problèmes de Jérusalem, du retour des réfugiés ou du retrait des colonies. La «feuille de route» demande en fait la fin de l'Intifada et de toute activité militaire palestinienne, dans l'espoir que la partie israélienne reprenne les négociations. D'ailleurs, Israël a d'ores et déjà rejeté la «feuille de route» de même que tout autre plan qui exigerait de lui qu'il cesse ses activités de colonisation. La Commission doit maintenant condamner les violations israéliennes des droits de l'homme des Palestiniens et l'occupation des territoires palestiniens.
M. DAVID LITTMAN (Union mondiale pour le judaïsme libéral) a cité Shakespeare : « Il y a dans les affaires humaines une marée montante ; qu'on la saisisse au passage, elle mène à la fortune ; qu'on la laisse passer, tout le voyage de la vie échoue dans les bas-fonds et les misères» (Jules César, acte IV, scène III). Il a affirmé que les «bas-fonds» et les «misères» des Palestiniens résultent d'une direction corrompue, maintenant reconnue comme telle. M. Littman a déclaré que l'actuel dirigeant palestinien a adressé à plusieurs reprises de chaleureuses félicitations à Saddam Hussein qu'il a remercié, notamment, d'avoir promis un chèque de 25 000 dollars aux familles des «bombes humaines du djihad». Après la tragique guerre en Iraq, il faut espérer qu'il y aura une opportunité de paix globale et de réconciliation au Moyen Orient. Toutefois, l'Autorité palestinienne ne deviendra un véritable partenaire avec Israël que lorsque la rupture aura été radicalement consommée avec le Hamas. M. Littman a dénoncé l'acte odieux que constitue l'attentat perpétré hier au café London à Netanya et revendiqué par le Djihad islamique.
MME EMMANUELLE WERNER (Human Rights Watch) a regretté qu'une fois de plus, ce sont les civils qui paient le prix fort des violations répétées des droits de l'homme et du droit international humanitaire par les forces de défense israéliennes. Il a déploré les actes du Gouvernement israélien qui pèsent lourdement sur les civils et a condamné vigoureusement le recours par les Palestiniens aux attentats suicide. Soulignant l'importance du respect du droit international, il a émis l'espoir que la feuille de route proposée par le Quartet ouvre la voie à la possibilité d'une reprise des négociations. Il a exhorté la Commission à adopter une résolution qui condamne fermement les violations des droits de l'homme commises par les deux parties et la grave crise humanitaire. Cette résolution devrait également demander à la communauté internationale d'assumer ses responsabilités au titre de la quatrième Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre . Il a également estimé urgent de dépêcher des observateurs des droits de l'homme en Israël et dans les territoires occupés, ainsi la Commission devrait exhorter le Conseil de sécurité à autoriser sans délai l'établissement d'une mission d'observation.
MME ULLA BLOMQUIST (Alliance internationale d'aide à l'enfance) a exprimé sa préoccupation pour la situation des enfants israéliens et palestiniens. Tous leurs droits sont ignorés. Le couvre-feu et le blocus ont entraîné la détérioration de la situation économique générale, ce qui diminue d'autant la capacité des services publics du côté palestinien. Pratiquement, les droits de l'homme des enfants sont gravement menacés. Ils n'ont plus d'enfance et se comportent de plus en plus comme des adultes. La malnutrition augmente ainsi que la dépendance vis-à-vis de l'aide internationale. Des centaines d'enfants sont blessés ou tués sur le chemin de l'école. Les enfants courent davantage de risques d'être marginalisés, ils n'ont plus confiance dans leur avenir. Leur éducation est sérieusement compromise: plus de 1100 jours d'école ont été perdus pendant l'Intifada et 54 000 heures de cours perdues à cause d'attaques israéliennes en avril et mai 2002. La Commission doit insister auprès du Gouvernement israélien afin qu'il assume ses responsabilités vis-à-vis des enfants et qu'il se retire des territoires qu'il occupe.
MME HELEN DUSSOLLIET GOND (Fédération syndicale mondiale) a déclaré que, pour son organisation, «les morts sont délibérées dans les territoires arabes contre la population arabe de la part de l'occupant israélien». Elle a affirmé que l'on tente d'occulter cette réalité par l'arrivée au devant de la scène internationale des menaces d'agression et de l'attaque du Gouvernement des États-Unis contre l'Iraq, «avec l'accord et la connivence des autorités sionistes et à leur profit», a-t-elle ajouté. Ce n'est pas seulement maintenant que Tel-Aviv exerce la politique d'extermination de la population de Palestine; il s'agit vraiment d'un terrorisme d'État délibéré, a-t-elle affirmé. Israël refuse depuis trente ans de respecter les résolutions du Conseil de sécurité qui font appel au retrait des troupes des territoires occupés. Il faut exiger qu'Israël respecte les résolutions des Nations Unies et mette fin à la violation inadmissible des droits de l'homme, a conclu la représentante.
M. EMILIO GILOLMO (Fédération des associations pour la défense et la promotion des droits de l'homme), estimant que l'Autorité palestinienne s'était conformée aux résolutions du Conseil de sécurité, a dénoncé la mauvaise volonté israélienne à négocier. Il a considéré que l'attitude de la puissance occupante était source de désespoir qui avait conduit à la deuxième Intifada. Il a exhorté les Nations Unies à mettre en marche les mécanismes nécessaires et urgents en vue de faire respecter le droit international et les résolutions du Conseil de sécurité, qui demandent le retrait d'Israël de tous les territoires occupés. Il est temps de mettre définitivement fin à l'occupation de la Palestine par Israël, a-t-il déclaré.
MME VERENA GRAF (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples) a déploré qu'il n'y a apparemment pas de terme à la détérioration des conditions de vie des Palestiniens. En tout, 73 résolutions et décisions de règlement de la situation sont restées lettre morte et les attaques militaires d'Israël continuent de battre leur plein. Les transports de fournitures et d'aide sont compromis, de même que les services sanitaires, tout cela dans l'indifférence de la communauté internationale. Il n'est donc pas étonnant que certains Palestiniens recourent à la violence aveugle. Il faut maintenant s'attaquer aux racines de cette situation. L'Intifada est la réaction à une occupation étrangère. L'escalade que l'on constate aujourd'hui est due à l'utilisation d'une force excessive par l'armée israélienne. Les Palestiniens doivent pouvoir disposer d'un État de même qu'Israël a le droit d'exister dans des frontières sûres, a conclu la représentante.
M. ABDALLA SHARAFEDDIN (Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale) a déclaré que ce qui se passe ces derniers temps promet un avenir sombre si les choses perdurent sur la voie qu'elles sont en train d'emprunter. Quels sont les objectifs des États-Unis et le Royaume-Uni en Iraq, mais aussi en Palestine et dans d'autres pays arabes, s'est-il interrogé? Les peuples du monde ne permettront pas que de tels objectifs racistes se réalisent, a-t-il affirmé. Il a par ailleurs rappelé qu'Israël continue de faire fi de centaines de résolutions adoptées par les Nations Unies. Il faut s'élever contre la guerre et contre toutes les forces de destruction, a déclaré le représentant.
M. FAROUK ABU EISSA (Union des avocats arabes) a dénoncé la situation dans les territoires palestiniens et les violations commises en connivence avec la superpuissance et dans le silence coupable de la communauté internationale. Il s'est indigné de la collusion de «la superpuissance» avec les autorités israéliennes et particulièrement le gouvernement Sharon. Il a déclaré qu'Israël avait utilisé toutes les armes pour réprimer l'Intifada sans que l'administration des États-Unis s'en offusque. Il a considéré que les pratiques israéliennes visaient à éliminer toute trace de la Palestine et que cette attitude démontrait que ce pays n'avait aucune intention de revenir à la table des négociations.
M. SHIMON SAMUELS (Centre Simon Wiesenthal) a déclaré que l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) avait peut-être, en plus de cinquante ans d'activités, contribué à perpétuer le statut de réfugié palestinien en décourageant tout développement autonome, en prévenant les efforts internationaux visant à doter la population d'une infrastructure propice à la normalisation; en servant les politiques des pays arabes voisins qui sont opposés à toute intégration des réfugiés, préférant attiser le conflit; en gardant les réfugiés dans les limbes; et en favorisant les sinécures et le népotisme dans l'administration. L'UNRWA a saboté les accords d'Oslo, ce qui l'a mise en porte-à-faux avec l'UNICEF. L'UNRWA, qui n'a jamais condamné l'exploitation des enfants dans le conflit qui s'inscrit dans une culture de la mort, doit faire l'objet d'une enquête quant à son fonctionnement financier et à ses pratiques d'emploi, a estimé le représentant. Il a déploré la politisation de l'organisation qui est devenue «un instrument de haine et de propagande».
MME CATHERINE FERRY (Cairo Institute for Human Rights Studies) a indiqué que son organisation partage pleinement le point de vue exprimé en tant que Rapporteur spécial par M. John Dugard, selon lequel c'est l'occupation militaire du territoire palestinien qui est responsable de la plupart des violations du droit humanitaire et des droits de l'homme. Israël ne jouit d'aucune légitimité en vertu du droit international, en tant qu'occupant belligérant. Le maintien de l'occupation illégale à laquelle se livre ce pays constitue une violation des droits des Palestiniens, y compris leur droit à l'autodétermination. La Commission devrait donc réaffirmer l'illégalité de l'occupation israélienne et fournir une force de protection internationale dans les territoires palestiniens occupés.
M. ANDREW SRULEVITCH (United Nations Watch) a contesté la légitimité de ce point de l'ordre du jour, qui selon lui a été isolé pour des raisons politiques. Il a estimé qu'il serait mieux venu que la Commission envisage de consacrer un débat général à la propagation de la pandémie du VIH/sida, rappelant que depuis septembre 2000 quelque 3000 israéliens et palestiniens confondus avaient trouvé la mort alors que dans le même temps quelque six millions d'Africains mouraient du sida. Il a ajouté que 38 millions d'Africains souffrent de la faim et mis l'accent sur les souffrances des 25 millions de personnes déplacées et des quelque 20 millions de réfugiés, ou encore sur l'analphabétisme qui entrave l'exercice des droits de l'homme les plus élémentaires. Il a jugé que la Commission s'écartait de sa mission et devrait traiter la question du conflit israélo-palestinien dans le cadre du point 9, consacré à la question des violations des droits de l'homme où qu'elles se produisent dans le monde.
M. FORTUNAT DIENER (Société pour les peuples en danger) condamne toutes les violations des droits de l'homme commises par toutes les parties au conflit: tous les Palestiniens ont gravement souffert des restrictions à leur liberté de mouvement. Les morts résultent des retards apportés aux traitements médicaux, le blocus économique imposé par Israël viole la Quatrième convention de Genève qui interdit les punitions collectives. La construction de colonies dans les territoires occupés a sans aucun doute été un facteur déterminant dans l'intensification de ce conflit et 28 Palestiniens ont été tués par des colons israéliens. Quant aux groupes extrémistes palestiniens, ils ont poursuivi leur stratégie d'attaques suicides et 269 civils israéliens ont été ainsi tués. La Société pour les peuples menacés appelle notamment la Commission à demander au Gouvernement israélien, en tant que puissance occupante, de respecter ses obligations selon la quatrième convention de Genève.

Droit de réponse
La représentante des États-Unis a rappelé que le Président Bush a récemment réitéré sa vision, figurant sur la feuille de route pour la paix au Moyen Orient. Mais cette vision ne pourra se réaliser tant que les violences liées aux attaques terroristes se poursuivent. La représentante des États-Unis a affirmé que la Commission rejette tout le blâme sur Israël et que cela ne constitue pas une approche équilibrée, pas plus que n'est équilibrée l'attitude qui consiste pour la Commission à consacrer un point séparé de son ordre du jour à la question. De l'avis des États-Unis, il faudrait en outre que le mandat du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés s'étende aux violations des droits de l'homme commises par les Palestiniens, tant contre les Israéliens que contre les Palestiniens eux-mêmes. Le manque d'équilibre au sein de la Commission s'agissant de ces questions sape la crédibilité de cette instance, a déclaré la représentante des États-Unis. Elle a rappelé que le 14 mars dernier, le Président Bush a demandé à toutes les parties de renoncer à la haine. Or des paroles telles que celles qui ont été prononcées au sein de la Commission ces derniers jours peuvent enflammer l'opinion publique. Les États-Unis souhaitent pour leur part être partenaire actif de ceux qui rechercheront la paix véritable.
Le représentant d'Israël s'est adressé à son homologue de la Syrie, qui a prétendu que les Arabes israéliens ne peuvent construire de maison, en invitant cette personne à se rendre en Israël pour voir ce qu'il en est et constater que tel n'est pas le cas. Le représentant israélien a affirmé que lorsqu'il est question des droits de l'homme dans le monde, une seule et même norme s'applique aux 192 États membres des Nations Unies sous le point 9 de l'ordre du jour de la Commission alors qu'une norme distincte a été introduite pour un seul pays sous le point 8 de l'ordre du jour consacré à Israël. Il en va de même en ce qui concerne le mandat du Rapporteur spécial qui, s'agissant d'Israël, est partial et à durée indéterminée. En outre, une double norme s'applique en ce qui concerne la définition du terrorisme : lorsque des civils sont attaqués de par le monde, tout le monde s'accorde pour parler de terrorisme, alors que lorsque des enfants israéliens sont réduits en pièces, certains parlent de «résistance» légitime.
Le représentant de la Syrie a déclaré que le peuple palestinien a célébré le Jour de la terre, au moment précis où Israël confisque les terres palestiniennes. Israël prétend que les Arabes peuvent construire des maisons : or on voit tous les jours des maisons arabes rasées par les bulldozers. Il y a quelques jours, une pacifiste américaine a d'ailleurs été tuée devant une de ces maisons. Ce qui est pris pour cible par la résistance, c'est le régime d'apartheid qui sévit en Israël. Si ce régime cesse, les pays arabes seront heureux de traiter avec lui sur un pied d'égalité. Mais Israël ne cesse d'induire en erreur ses propres amis, accuse la Syrie de soutenir des terroristes, de vendre des armes à l'Iraq : ce n'est pas vrai.
Le représentant d'Israël a dit que son pays souhaitait la paix avec les pays arabes, mais pas à des conditions unilatérales, par le biais de négociations. Les Arabes d'Israël ont eux aussi célébré la Journée de la terre - mais quel est le jour de la dernière manifestation publique en Syrie? Enfin, il faut rappeler encore une fois la liste d'organisations terroristes hébergées par la Syrie.
Le représentant de la Syrie a rejeté l'affirmation selon laquelle il y aurait des Israéliens arabes, estimant qu'il s'agissait de Palestiniens qui ont été privés de leur droit et dont Israël ne permet pas qu'ils jouissent de leur droit élémentaire à l'autodétermination. Il a souligné qu'ils fêtaient cette journée de la terre parce qu'Israël les avait privés de leur terre. Il a accusé Israël de vouloir la paix selon ses propres termes et non en accord avec les résolutions du Conseil de sécurité. Il a regretté qu'Israël cherche encore à négocier les termes de son retrait des territoires arabes occupés.

Présentation du rapport sur la situation des droits de l'homme au Burundi
MME MARIE-THÉRÈSE KEITA BOCOUM, Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme au Burundi, a rappelé que le gouvernement de transition et des fractions du Parti de la libération du peuple Hutu/Forces nationales pour la libération (PALIPEHUTU-FNL), aile de Alain Mugarabona, et le CNDD-FDD, aile de Jean-Bosco Ndayikengurukiye, ont signé un accord de cessez-le-feu en octobre dernier à Dar es-Salaam. Le 2 décembre, un autre accord était signé entre le gouvernement de transition et le CNDD-FDD de Peter Nkurunziza. Cependant, la portée du cessez-le-feu est considérablement réduite par le refus, malgré les appels incessants de la communauté internationale et nationale, du FNL de Agathon Raswa de rejoindre le processus de paix et par la persistance des affrontements entre l'armée régulière et certains éléments du CNDD pourtant tenus par un accord de cessez-le-feu. Mme Kéita-Bocoum a indiqué avoir noté une augmentation de la violence et un accroissement du nombre des victimes parmi la population civile qui devient la principale cible de ce conflit. La violence a atteint son point culminant avec les attaques en septembre contre les communes de Itaba, de Rutegama et de Kanyosha. En novembre 2002, le Gouvernement a dû, à nouveau, affronter une opposition politique radicale regroupée au sein du PARENA, de l'ancien Président Jean-Baptiste Bagaza, placé en résidence surveillée depuis le 1er novembre. Au plan économique et social, la récente dévaluation de la monnaie burundaise et une nouvelle hausse du prix du carburant et des produits de première nécessité continuent d'accentuer les signes de paupérisation.
Dressant le tableau de la situation des droits de l'homme, dans le pays, Mme Kéita-Bocoum a souligné que les atteintes au droit à la vie sont autant le fait des agents de l'État que des groupes armés et même d'auteurs inconnus. Entre les mois de juillet et de septembre 2002, certains actes absolument condamnables dont se sont rendues coupables les forces armées régulières ont causé la mort d'un nombre considérable de civils. En outre, plusieurs dispositions du nouveau code de procédure pénale continuent d'être régulièrement violées. La torture continue d'être infligée, en particulier dans les cachots des différents corps de police et les lieux clandestins de détention et par les groupes armés. De nombreux vols à main armée et assassinats impliquant des rebelles, des gardiens de la paix et des forces de l'ordre ainsi que des auteurs inconnus ont été relevés. Les cas de viols et de violence contre les femmes ont augmenté, aggravés par le conflit armé. Les auteurs de toutes ces exactions sont rarement poursuivis. Les problèmes rencontrés par les représentants des médias sont les difficultés d'accès à l'information, la censure et l'intimidation, a poursuivi la Rapporteuse spéciale. Quant aux représentants des syndicats, ils se plaignent qu'un projet de loi sur les syndicats en attente de promulgation ne leur ait pas été soumis et n'ait pas reçu leur aval. En outre, la guerre et la crise économique entraînent des violations de tous les droits économiques, sociaux et culturels, a souligné Mme Kéita-Bocoum. La question des enfants-soldats se pose avec autant d'acuité que par le passé, a-t-elle poursuivi. De plus, en l'absence d'établissements spécialisés, la situation des femmes et des mineurs incarcérés demeure délicate. Ainsi, les activités liées aux droits de l'homme revêtent une importance capitale dans la situation au Burundi. Aussi, la Rapporteuse spéciale lance-t-elle un appel pressant à tous les belligérants afin qu'ils respectent les droits de la population civile, en particulier le droit à la vie, et qu'ils cessent toutes les hostilités et respectent le droit humanitaire international.
Mme Kéita-Bocoum a par ailleurs relevé que les affrontements ont continué jusqu'à une date récente, impliquant toutes les parties en conflit. En outre, le FNL refuse toujours de participer aux négociations et les agressions menées par certains combattants du CNDD indiquent bien que ces derniers n'ont pas l'intention de renoncer au conflit armé. Enfin, le climat politique est assombri par les inquiétudes suscitées par la proximité de l'échéance du 1er mai 2003, date de l'alternance du pouvoir dans l'esprit de l'accord d'Arusha, entre un président de la République tutsi et un prochain président, hutu.
Dans son rapport sur la situation des droits de l'homme au Burundi (E/CN.4/2003/45), la Rapporteuse spéciale lance un appel à tous les belligérants afin qu'ils respectent les droits de la population civile et en particulier le droit à la vie, à la sécurité et à l'intégrité physique. Elle les prie instamment de ne pas recruter les enfants ni comme soldats ni comme auxiliaires ni même de les mêler au confit armé. Elle invite ceux des groupes armés qui refusent toujours de rejoindre la table de négociations à saisir l'urgence d'une solution négociée, d'autant plus que le risque de voir la patience de la communauté internationale atteindre ses limites s'accroît considérablement devant l'intolérable souffrance des populations civiles. La Rapporteuse spéciale condamne fermement les exactions contre les populations civiles commises par l'armée gouvernementale, notamment à Itaba, Kanyosha et Rutegama et invite le gouvernement à prendre toutes les dispositions permettant d'éviter les exactions contre la population. Elle recommande aux autorités d'appliquer les mesures qu'elles ont elles-mêmes prises relativement à l'arrêt de recrutement des enfants dans l'armée et de procéder à la démobilisation de ceux déjà enrôlés.
Intervenant en qualité de partie concernée suite à la présentation du Rapport de Mme Kéita-Bocoum, MME JUSTINE BIHOTORI (Burundi) a estimé qu'il ne fallait pas perdre de vue que le Burundi était confronté à une guerre civile complexe depuis 1993. La représentante a assuré que son gouvernement s'évertuait néanmoins à respecter ses obligations eu égard au respect de la loi et la sécurité de ses citoyens. Elle a apporté des précisions sur une interprétation qu'elle a jugée erronée de la déclaration du porte-parole de l'armée selon laquelle tout civil qui ne fuirait pas à la vue des rebelles serait considéré comme tel. À cet égard, elle a déclaré qu'il s'agissait avait tout de protéger les civils en les invitant à fuir les zones de combat et à gagner les zones sécurisées. Elle a réfuté les propos de la Rapporteuse spéciale concernant la violence de la réaction de l'armée aux attaques des rebelles et le fait qu'elle serait dirigée contre les populations civiles. Elle a récusé les informations indiquant que 300 civils auraient perdu la vie à Kanyonga, Kagoma et Kivoga du fait principalement des agents de l'État. Elle a indiqué que le nombre de morts ne serait que de 173 et a fait savoir que quatre responsables militaires avaient été arrêtés et emprisonnés suite à ces événements. Elle a exprimé de sérieux doutes concernant les chiffres avancés dans le rapport.
Par ailleurs la représentante burundaise a fait savoir que Charles Mukasi, leader de l'aile opposante du parti UPRONA, avait été libéré. S'agissant de la situation des personnes déplacées, la représentante a reconnu que certains dérapages avaient eu lieu, mais que plusieurs militaires avaient été mis en cause et purgeaient maintenant des peines. S'agissant des droits économiques, sociaux et culturels, elle a déclaré que son gouvernement faisait son possible pour améliorer la situation des indigents, des enfants de la rue et des malades du sida. Elle a ensuite fait part de grands efforts consentis par le Gouvernement du Burundi en vue d'améliorer la justice et la protection des droits de l'homme, mais a appelé l'attention sur son manque cruel de moyens. En ce qui concerne le recrutement des enfants soldats, la représentante a déclaré qu'un projet de démobilisation et de réinsertion professionnelle était en chantier, avec l'appui de l'UNICEF. En dernier lieu, la représentante a précisé que les gardiens de la paix étaient une émanation de la volonté populaire pour se protéger des attaques des rebelles et que ces gardiens de la paix étaient dûment encadrés par les administrations locales. Dès que la guerre aura cessé, il n'y aura plus de gardiens de la paix, a-t-elle assuré.

Dialogue interactif avec la Rapporteuse spéciale sur la situation au Burundi
Le représentant de la Grèce a demandé à Mme Kéita-Bocoum si elle avait déjà programmé sa prochaine visite au Burundi? Quelle est son évaluation des chances du processus de paix, compte tenu de l'attitude d'une partie des acteurs de ce dossier? Quant aux violations des droits de l'homme des personnes âgées, des femmes et des enfants, qu'en est-il des enquêtes judiciaires menées par les autorités vis-à-vis des auteurs de ces violations, auteurs gouvernementaux comme extra-gouvernementaux? Les Nations Unies ont-elles participé à de telles enquêtes?
Le représentant des États-Unis a demandé à la Rapporteuse spéciale si elle savait quelle était la situation sur le front des minorités ethniques, y a-t-il des conflits ethniques au Burundi? Le Bureau du Haut Commissaire aux droits de l'homme au Burundi a-t-il pu apporter une assistance à la Rapporteuse spéciale?
Répondant à ces questions, la Rapporteuse spéciale, MME KÉITA-BOCOUM a reconnu qu'une prochaine mission serait nécessaire. S'agissant du processus de paix, elle a expliqué que tant que les accords ne seront pas suivis d'une paix effective, la population ne pourrait pas y croire. Elle a regretté que même les parties qui ont signé les accords ne les respectent pas et a demandé à la communauté internationale de s'impliquer plus avant pour faire respecter ces accords. Pour ce qui est des victimes civiles et de leur nombre réel, elle a estimé qu'il serait indispensable de nommer une commission d'enquête et a déploré que les quatre militaires inculpés aient déjà été relâchés. Elle a aussi regretté que les Nations Unies n'aient pas mené directement d'enquête sur la situation au Burundi. S'agissant de la transition démocratique, elle a répondu à la délégation américaine que le Président Buyoya avait fait part de son intention de céder le pouvoir à un président hutu. Elle s'est félicitée de l'aide qu'elle a reçu du Haut Commissariat, elle a considéré que ses ressources étaient trop faibles car son bureau au Burundi ne dispose que de deux agents, ce qui est nettement insuffisant. Pour ce qui est de ses sources, Mme Kéita-Bocoum a indiqué qu'elle avait utilisé les informations fournies par le Bureau du Haut Commissariat au Burundi et de diverses organisations non gouvernementales, mais que malheureusement la Commission gouvernementale des droits de l'homme n'avait publié aucun rapport et n'avait pu lui fournir aucune information au cours de ses entretiens avec ses membres.
Le représentant de l'Ouganda a demandé à la Rapporteuse spéciale si , dans ces entretiens avec les groupes rebelles, elle avait détecté une volonté de respecter les droits de l'homme et si ces groupes avaient une notion de ce que représentaient ces droits, notamment en ce qu'ils impliquent de respect des civils?
MME KÉITA-BOCOUM a répondu à la demande de l'Ouganda que toute la question était précisément là mais qu'elle n'avait pas pu approcher suffisamment ces groupes. Elle doit donc leur demander publiquement de respecter la vie des civils, qui sont les seules victimes, ou presque, de ce conflit. La Rapporteuse spéciale a relevé qu'il n'était cependant pas évident à ce stade que les belligérants tiennent vraiment compte de ses exhortations.

Présentation du rapport sur la situation des droits de l'homme au Myanmar
Présentant son rapport actualisé à la lumière de la visite qu'il a effectuée dans le pays la semaine dernière, M. PAULO SÉRGIO PINHEIRO, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar, a rappelé qu'il avait dû interrompre sa mission, au troisième jour de la visite d'une semaine qu'il avait prévue dans le pays, en raison d'un incident de microphone dissimulé qui était contraire aux normes de procédure opérationnelle applicables à la conduite de sa mission d'établissement des faits. Le Gouvernement a exprimé son regret et s'est engagé à enquêter sur cet incident et à prendre des mesures contre les responsables, a précisé M. Pinheiro. Il a par ailleurs souligné que sa réunion avec le Secrétaire du SPDC (Conseil d'État pour la paix et le développement, au pouvoir) a été franche et constructive, ce dernier ayant apporté son soutien à la proposition du Rapporteur spécial d'évaluer les allégations de violations des droits de l'homme dans des régions ethniques, y compris dans l'État chan. M. Pinheiro a précisé que le Secrétaire du SPDC l'a invité à se rendre dans l'État chan pour y recueillir des informations et y évaluer la situation par lui-même. Il a été décidé que les discussions sur cette question se poursuivraient au plus haut niveau dans les semaines à venir, a précisé le Rapporteur spécial.
Depuis novembre dernier, le Comité international de la Croix-Rouge a été autorisé à étendre sa présence dans les zones sensibles de l'État chan, a par ailleurs indiqué M. Pinheiro. Le Secrétaire du SPDC a par ailleurs assuré au Rapporteur spécial que la première visite qu'Amnesty International ait jamais effectuée au Myanmar n'est que la première étape d'un processus qui devrait se poursuivre. Selon les dernières informations fournies par le Ministre de l'intérieur, il ne reste que 101 détenus qui soient membres des partis politiques (dont 90 sont membres de la NLD, Ligue nationale pour la démocratie). Selon le dernier décompte du SPDC, 515 détenus membres de partis politiques ont été libérés durant la période 2000-2003. En comparaison avec l'an dernier, le rythme des libérations a notablement baissé, a relevé M. Pinheiro. Cela semble révéler un lien entre les libérations et le manque de progrès dans le dialogue politique, ce qui laisse penser que les libérations seraient utilisées comme outil de marchandage entre le SPDC et la NLD. Si cela s'avérait exact, ce serait inacceptable et cruel, a déclaré le Rapporteur spécial. Les préoccupations liées au fait que les prisonniers libérés pourraient provoquer des soulèvements politiques semblent influer sur la décision concernant leur libération. Or dans un pays doté d'appareils militaires et de sécurité si solides, il est difficile de concevoir comment 1200 prisonniers pourraient menacer la sécurité nationale. M. Pinheiro s'est dit encouragé d'apprendre que, bien qu'il n'ait pas pu vérifier cette information par lui-même, la situation de la population musulmane dans l'État septentrional de Rakhine s'était quelque peu améliorée.
Le Rapporteur spécial a souligné que la pauvreté est particulièrement aiguë et affecte toutes les catégories de la population du Myanmar, y compris les militaires. «Je suis convaincu que de véritables progrès ne pourront être enregistrés s'agissant de tous les droits de l'homme tant que ne seront pas produits de véritables progrès vers la réconciliation nationale», a déclaré M. Pinheiro. Cela constitue un grave recul que le dialogue entre le Gouvernement et Daw Aung San Suu Kyi n'ait pas encore pu s'engager au plus haut niveau, a-t-il ajouté. Plus que jamais, il est essentiel que l'Envoyé spécial du Secrétaire général puisse se rendre au Myanmar dès que possible afin qu'il puisse continuer à favoriser la reprise du dialogue. Dans ce contexte, M. Pinheiro a demandé au SPDC d'accorder une attention spéciale à des initiatives visibles et convaincantes dans le domaine des droits de l'homme. Il s'agit de la libération immédiate et inconditionnelle des prisonniers politiques, de la levée des restrictions pesant encore sur les libertés d'expression, d'information, de mouvement, d'assemblée et d'association, et de la nécessité de s'abstenir de toute arrestation arbitraire.
Le rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Myanmar (E/CN.4/2003/41) dresse une évaluation de la situation dont il ressort que l'espace politique s'ouvre peu à peu de nouveau à la Ligue nationale pour la démocratie (NLD, selon l'acronyme anglais). Il devrait en être de même pour d'autres partis politiques autorisés, qui n'ont pas encore repris leurs activités. Les restrictions à la liberté d'expression et d'information et à la liberté de la presse n'ont toutefois pas encore été levées. Il semble y avoir désormais un consensus au sein du Conseil d'État pour la paix et le développement (SPDC) au sujet du nombre des détenus politiques et de la catégorie dont ils relèvent et les libérations de ces détenus se sont poursuivies, ajoute le rapport. Globalement, les conditions de détention se sont améliorées au cours des dernières années, quoique progressivement. Il a été mis un terme aux mauvais traitements physiques, tels que les passages à tabac que les prisonniers politiques ont eu à subir par le passé, et les prisonniers âgés ont bénéficié de soins médicaux réguliers. Toutefois, à plusieurs égards, les prisonniers politiques sont toujours dans une situation plus défavorable que les détenus de droit commun.
Parmi les questions sur lesquelles il conviendrait de se pencher davantage, figurent la qualité de la nourriture, les brutalités dont les prisonniers de droit commun feraient l'objet et l'accès à des soins et à des traitements médicaux de qualité, particulièrement en cas d'urgence. Les arrestations politiques opérées depuis juillet 2002 s'inscrivent dans un système de «non-droit», caractérisé notamment par des arrestations arbitraires, des détentions prolongées à l'isolement et des interrogatoires par les services de renseignement de l'armée, l'extorsion d'aveux ou d'informations, bien souvent par la violence ou la torture, suivis de procès sommaires, de condamnations et d'emprisonnement. En outre, le respect de la liberté de religion semble être plus grand dans les endroits proches des autorités centrales que dans les régions reculées ou dans les régions où sont menées des opérations anti-insurrectionnelles. Le rapport souligne par ailleurs que le recrutement volontaire ou forcé d'enfants dans les forces armées et les différentes façons dont ils sont utilisés par ces forces armées sont un réel problème au Myanmar. Il apparaît également que la façon dont l'armée traite les civils dans les zones où se déroulent des opérations anti-insurrectionnelles pose de réels problèmes. Il ne suffit pas de nier ces problèmes pour qu'ils disparaissent; si l'on veut les résoudre, il convient de reconnaître leur existence et de s'y attaquer de manière appropriée. Le Rapporteur spécial a pris note d'un communiqué du SPDC daté du 4 novembre 2002, dans lequel ce dernier réagit de façon positive à sa proposition de mener une enquête sur les allégations de violations des droits de l'homme commises dans les régions où vivent des communautés ethniques. Pour accélérer le processus de paix, il est nécessaire, plus que jamais, de tenir un discours rationnel sur les alternatives politiques et stratégiques. Il est grand temps de sortir de l'impasse dans laquelle se trouvent les relations entre le SPDC et la NLD. Un renforcement des progrès dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l'homme contribuera à créer l'atmosphère voulue pour sortir de cette impasse.
La Commission est également saisie d'un rapport du Secrétaire général sur la situation des droits de l'homme au Myanmar (E/CN.4/2003/33) qui rend compte des efforts déployés par le Secrétaire général et son Envoyé spécial, M. Razali Ismail, pour faciliter la réconciliation nationale et la démocratisation au Myanmar. Ce rapport fait observer qu'un certain nombre de faits nouveaux d'importance ont eu lieu, notamment la décision prise le 6 mai 2002 de rendre sa liberté de circuler à Daw Aung San Suu Kyi, même si le dialogue de fond entre le Gouvernement et celle-ci n'a pas encore été engagé. Préoccupé de voir la dynamique créée au printemps s'essouffler si des progrès tangibles ne sont pas réalisés dans un proche avenir, le Secrétaire général appelle de nouveau le Gouvernement et Daw Aung San Suu Kyi à entamer leur dialogue politique dès que possible afin qu'une réconciliation nationale acceptable par toutes les parties prenantes au Myanmar puisse devenir une réalité dans une date proche.
M. U MYA THAN (Myanmar) a déclaré que les progrès accomplis par le Myanmar en matière économique, politique, sociale et culturelle et de droits de l'homme avaient été soutenus, continus et importants, et le rapport de M. Pinheiro en témoigne à plusieurs égards. D'autres développements importants rapportés par M. Pinheiro concernent le contenu de ses discussions avec le Secrétaire du Secrétaire du SPDC. Le Rapporteur a également émis des commentaires encourageants concernant la présence accrue du Comité international de la Croix-Rouge au Myanmar et du Haut Commissariat pour les réfugiés dans l'État de Rakhine. La visite d'Amnesty International est aussi un développement positif. Depuis la soumission du rapport de M. Pinheiro, le Myanmar a libéré 45 prisonniers le 16 mars dernier. Le nombre total de prisonniers, y compris des membres de la NLD, atteint le chiffre de mille pour les quatre derniers mois.
Cependant, il existe des malentendus concernant l'état du processus de réconciliation actuellement en cours au Myanmar. Il y a eu douze rencontres avec Mme Daw Aung San Suu Kyi, ainsi que d'autres rencontres à différents niveaux. Ce processus est un processus qui est appelé à se dérouler d'une manière traditionnelle, selon la coutume du pays. Enfin, les rapports que le Myanmar entretient avec ses voisins sont cordiaux, y compris avec la Thaïlande, a assuré le représentant du Myanmar.

Dialogue interactif avec le Rapporteur spécial sur le Myanmar
Dans le cadre du dialogue interactif avec le Rapporteur spécial, le représentant de la Norvège a demandé des précisions concernant la démobilisation des enfants soldats et la poursuite de la conscription forcée dans l'État chan.
Le représentant de l'Inde a demandé au Rapporteur spécial s'il pensait qu'au vu des développements positifs au Myanmar, des pressions extérieures seraient désormais contre-productives. Il s'est demandé si une politique de coopération n'apporterait pas de meilleurs résultats qu'une politique de sanctions. Pour sa part, le représentant de la Grèce, au nom de l'Union européenne, a demandé au Rapporteur spécial s'il était d'accord avec le rapport de l'Organisation internationale du travail selon lequel des progrès sur la question du travail forcé viendrait du processus de réconciliation nationale et de démocratisation.
Le représentant du Myanmar a demandé à M. Pinheiro s'il estimait que ses entretiens avec le Premier Secrétaire du SPDC avaient été fructueux.
Le représentant de l'Australie a voulu savoir quelles mesures étaient prises pour mettre fin aux viols systématiques commis par les forces de l'armées.
Soulignant l'importance de la libération de tous les prisonniers politiques pour les processus de transition, le représentant du Brésil a demandé des précisions sur le nombre de prisonniers politiques restant au Myanmar et sur les raisons qui ont empêché une libération de tous les prisonniers ou qui ont freiné ce processus.
Le Rapporteur spécial, M. PAULO SÉRGIO PINHEIRO, a déclaré que pour ce qui concerne les enfants soldats, ou la conscription forcée, toutes les informations dont il dispose sont de seconde main et n'ont pas encore été validées par son équipe. Les droits de l'homme ne connaissent pas de barrière nationale, ce qui se passe dans chaque pays intéresse tout le monde, et le dialogue doit s'instaurer avec les États membres. Quant à la notion d'engagement, le Rapporteur s'est toujours rapporté à un engagement de principe pour les droits de l'homme: il ne lui appartient pas de dégager les options, et les sanctions ne font pas partie de son mandat. Le Gouvernement du Myanmar doit comprendre que la libération des prisonniers politiques transforme les citoyens en agents actifs de la démocratie, et que l'on ne peut parler de transition quand il reste 1200 prisonniers politiques. Ces personnes ne seront pas une menace pour la sécurité publique quand elles seront libérées, bien au contraire.
Le Premier secrétaire du SPDC a donné son accord de principe pour une évaluation dans le pays concernant certaines allégations; les modalités doivent en être discutées. Le Rapporteur a constaté une amélioration de la lutte contre les travaux forcés, grâce à la présence de l'OIT sur place. Le Myanmar traverse une étape délicate. Le Gouvernement doit comprendre que les obstacles au dialogue politique de fond peuvent être levés grâce à la présence de l'envoyé du Secrétaire général.



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