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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION ENTEND LE MINISTRE TOGOLAIS DE LA PROMOTION DE LA DÉMOCRATIE ET LE VICE-MINISTRE BULGARE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

06 avril 2004



6 avril 2004


Quarante-quatre organisations non gouvernementales s'adressent à la
Commission des droits de l'homme s'agissant des droits
fondamentaux des femmes


La Commission des droits de l'homme a entendu, ce matin, le Ministre chargé de la promotion de la démocratie et de l'État de droit du Togo et le Vice-Ministre des affaires étrangères de la Bulgarie. Elle a en outre entamé l'examen des questions relatives aux droits de l'enfant après avoir entendu les représentants de quarante-quatre organisations non gouvernementales, qui étaient les derniers orateurs dans le cadre du débat général sur l'intégration des droits fondamentaux des femmes et de l'approche sexospécifique.

Dans sa déclaration, le Ministre togolais, M. Roland Y. Kpotsra, a estimé qu'il est temps pour la communauté internationale d'accorder une plus grande attention aux questions de la pauvreté, de la pandémie du VIH/sida, de la discrimination raciale, de la xénophobie et du trafic des enfants. Il a également condamné le recours inconsidéré à des sanctions, embargos ou autres mesures coercitives qui, non seulement font complètement fi des principes démocratiques et de justice, mais surtout, produisent des conséquences graves, voire même catastrophiques sur l'état humanitaire de la population qui y est soumise.

Le Vice-Ministre bulgare des affaires étrangères, M. Petko Draganov, a notamment souligné que la Bulgarie a placé la prévention du terrorisme au premier rang des priorités de sa présidence de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), en 2004. Il a réaffirmé la nécessité et la possibilité de lutter contre le terrorisme dans le respect du droit international et des normes des droits de l'homme.

Dans le cadre du débat sur l'intégration des droits fondamentaux des femmes, plusieurs organisations non gouvernementales ont dénoncé les violences sexuelles utilisées comme arme de guerre. Ont également été maintes fois dénoncées les pratiques traditionnelles telles que les mariages forcés, les mutilations génitales féminines, ainsi que les crimes dits d'honneur. De nombreux intervenants ont par ailleurs attiré l'attention sur la nécessité de lutter contre le trafic d'êtres humains, qui frappe particulièrement les femmes et les enfants. La pauvreté et l'analphabétisme figurent au nombre des causes expliquant ce phénomène, a-t-il été souligné. Les femmes sont prises dans un cercle vicieux de pauvreté, de marginalisation et de violence qui limite leur capacité à s'organiser pour transformer la situation d'oppression et de discrimination qu'elles subissent, a fait observer une délégation. Les violences domestiques ainsi que les discriminations que subissent les femmes du fait d'une interprétation erronée de la religion ont également été dénoncées.

Les représentants des ONG suivantes ont pris la parole: Franciscain international; Amnesty international; Femmes Africa Solidarité; Fédération démocratique internationale des femmes; Human Rights Advocates (au nom également de United Nations Watch); Fédération des femmes cubaines; Centre on Housing Rights and Evictions; Jubilee Campaign; Fondation de recherches et d'études culturelles himalayennes; Comité international pour le respect et l'application de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples - CIRAC; International Religious Liberty Association; Union nationale des juristes de Cuba; Organization for Defending Victims of Violence; Organisation de solidarité des peuples d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine; Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus; Association of World Citizens; Japanese Workers Committee for Human Rights; Comité d'action internationale pour les droits de la femme; Asia Pacific Forum on Women, Law and Development; Consejo Indio para la Educación; International Institute for Non-Aligned Studies; Union internationale humaniste et laïque; Vision Mondiale Internationale; Assemblée permanente pour les droits de l'homme; Institut international de la paix; Alliance mondiale des unions chrétiennes de jeunes filles; Confédération internationale des syndicats libres; Congrès du monde islamique; Société anti-esclavagiste; Families of Victims of Involuntary Disappearance; Fédération des femmes de Chine; Worldview International Foundation; Union nationale de la femme tunisienne; Fédération internationale islamique d'organisations d'étudiants; Third World Movement against the Exploitation of Women; Union des associations de Coréennes; Association civile des filles mères - MADRE; Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté; Asia-Japan Women's Resource Center; Centre Europe tiers-monde (CETIM); Rural Development Foundation; Women's Human Rights International Association; Minority Rights Group International; et Organisation néerlandaise pour la coopération internationale au développement.

Les représentants de la République dominicaine et de l'Égypte sont par aillerus intervenus dans le cadre du débat sur les droits de l'enfants.


La Commission poursuivra cet après-midi, à 15 heures, l'examen des questions relatives aux droits de l'enfant.


DÉCLARATIONS DE HAUT NIVEAU

M. ROLAND Y. KPOTSRA, Ministre chargé de la promotion de la démocratie et de l'État de droit du Togo, a estimé qu'il est temps pour la communauté internationale d'accorder une plus grande attention aux questions de la pauvreté, de la pandémie de VIH/sida, de la discrimination raciale, de la xénophobie et du trafic des enfants. Le Ministre a souligné l'interdépendance entre les droits civils et politiques d'une part, et les droits économiques, sociaux et culturels, de l'autre. À cet égard, il a insisté sur l'importance cruciale de la réalisation des droits économiques et sociaux pour les pays en développement. Il a estimé que le manque ou l'insuffisance de moyens adéquats pour accompagner et soutenir les efforts de démocratisation précarise dangereusement les efforts déployés par les pays en développement. C'est pourquoi, a affirmé le Ministre, l'on n'aura de cesse de condamner le recours inconsidéré à des sanctions, embargos ou autres mesures coercitives qui, non seulement font complètement fi des principes démocratiques et de justice, mais surtout, produisent des conséquences graves, voire même catastrophiques sur l'état humanitaire de la population qui y est soumise. M. Kpotsra a souligné que l'instrumentalisation des questions relatives aux droits de l'homme à des fins politiques ne peut que contribuer à la multiplication des tensions entre États et groupes d'États et à décrédibiliser les mécanismes et organes de protection mis en place dans le cadre des Nations Unies.

Le Ministre togolais a réaffirmé la détermination du Togo à continuer d'œuvrer pour la promotion, la défense et la protection des droits de l'homme. En adhérant à la plupart des instruments internationaux relatifs aux de droits de l'homme, le Togo nourrit l'ambition d'assurer à chacun, quel que soit son statut social, la pleine jouissance de ses droits. Le Ministre a par ailleurs déclaré que le Gouvernement togolais s'investit chaque jour davantage dans la construction de l'État de droit et la promotion de la démocratie afin d'offrir au peuple togolais la possibilité de participer pleinement à la gestion des affaires publiques et au processus de développement économique, social et culturel. Le déroulement des élections législatives du 1er juin 2003 dans la transparence, la justice et la liberté de choix, s'inscrit dans cette logique, a affirmé le Ministre. Ces élections, a-t-il précisé, ont satisfait les 187 observateurs internationaux présents et démontrent la détermination de l'État togolais à encourager l'expression des libertés et à favoriser les valeurs démocratiques.

M. PETKO DRAGANOV, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Bulgarie, a exprimé les sincères condoléances de son pays pour les victimes des attentats de Madrid, soulignant que ces actes odieux doivent renforcer la détermination de tous, à travers des efforts concertés, à lutter contre la menace terroriste. À cet égard, il a souligné que la Bulgarie a placé la prévention du terrorisme au premier rang de ses priorités pour sa présidence de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en 2004. Dans le même temps, il a réaffirmé la nécessité et la possibilité de lutter contre le terrorisme dans le respect du droit international et des normes des droits de l'homme. Par ailleurs, il a souligné le souci de son pays de protéger les droits des plus vulnérables, déplorant notamment que les enfants continuent d'être victimes des pires formes de violence et d'exploitation dans de nombreuses parties du monde.

La Bulgarie a ratifié les deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant et elle est attachée au principe qui veut que toutes les personnes, quel que soit leur état de santé, doivent pouvoir vivre dans la dignité et jouir de tous les droits de l'homme. À cet égard, le Vice-Ministre bulgare s'est félicité et a exprimé son soutien aux travaux du Comité ad hoc pour l'élaboration d'une convention internationale sur les droits des personnes handicapées; il a indiqué que le Gouvernement bulgare poursuit ses efforts pour offrir aux handicapés l'égalité des chances. Déplorant la poursuite des pratiques terrifiantes de torture, M. Draganov a appuyé les efforts du Rapporteur spécial sur la torture, notamment pour améliorer la situation des victimes. S'agissant du grave problème de la traite des personnes, il a affirmé que la présidence bulgare de l'OSCE a mis l'accent sur la nécessité de mettre en œuvre le plan d'action adopté à Maastricht et souligné la nécessité d'efforts concertés et d'un partage des responsabilités entre pays d'origine, de transit et de destination. La présidence bulgare de l'OSCE encouragera par ailleurs les activités visant à combattre le racisme et la discrimination sous toutes leurs formes, a indiqué le Vice-Ministre, soulignant le rôle clé de l'éducation aux droits de l'homme à cet égard. Il a en évoqué un certain nombre de mesures adoptées par la Bulgarie pour protéger les droits de l'homme, notamment la création de l'institution de l'Ombudsman et l'adoption d'une loi contre la discrimination. Il a précisé que la création d'une commission indépendante pour la protection contre la discrimination était envisagée.


Fin du débat sur l'intégration des droits fondamentaux des femmes et la sexospécificité

MME LILY GEORGE (Franciscain international) a exhorté tous les gouvernements à mettre en œuvre pleinement l'article 11 de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, qui prévoit une protection particulière de la femme en matière d'emploi et reconnaît les droits à une rémunération et à une protection sociale égales à celles des hommes. La représentante a par ailleurs appelé tous les États à étendre l'application des règles du droit international du travail aux domestiques, sans qu'il soit tenu compte de leur statut de migrant. Elle a enfin exhorté la Commission des droits de l'homme à inclure dans sa résolution relative à la violence contre les femmes une disposition visant spécialement la situation des domestiques.

MME MELINDA CHING (Amnesty international) a rappelé que les femmes et les filles souffrent de violences à la maison, souvent infligées par leurs partenaires ou parents. Dans les conflits armés, la violence contre les femmes, en particulier le viol, est utilisée comme arme de guerre pour déshumaniser les femmes elles-mêmes et persécuter leurs communautés. La Commission doit faire davantage pour éliminer cet affront aux droits de la moitié de l'humanité. La cause sous-jacente de la violence contre les femmes est la discrimination qui nie l'égalité entre hommes et femmes. Amnesty International exhorte notamment les gouvernements à renforcer leurs législations pour protéger les femmes de la violence, à prendre des mesures particulières dans le contexte des conflits armés et à contribuer activement à l'étude du Secrétaire général sur la violence contre les femmes.

MME EVELYN KANDAKA (Femmes Africa Solidarité), rappelant la réunion récente à New York de la Commission de la condition de la femme, a déclaré que, dans la perspective du respect des droits fondamentaux, la participation des femmes aux processus de paix est nécessaire. De par leurs rôles différents au sein des sociétés, les femmes ont une perspective différente de celle des hommes sur ce qu'il convient de faire pour assurer la survie de sociétés issues de conflits. La représentante a demandé à la Commission de répondre à l'exigence de parité entre les sexes dans le cadre des négociations de paix et de promouvoir l'instauration de codes de conduite destinés aux forces de maintien de la paix des Nations Unies et au personnel affecté à l'aide humanitaire. De même, et dans le cadre de la lutte contre l'impunité pour les crimes commis contre les femmes en temps de guerre, la Commission devrait demander au Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes de se concentrer sur la violence contre les femmes en situation de conflit et de mener des missions urgentes au Libéria, en République démocratique du Congo et au Soudan.

MME SANDRA AGUILA (Fédération démocratique internationale des femmes) a condamné toute mesure unilatérale qui empêche la pleine jouissance des droits des femmes. Le blocus économique, commercial et financier imposé par les États-Unis au peuple cubain constitue un obstacle aux possibilités de développement de ce peuple et de ses femmes. Le blocus est la seule cause des violations massives et flagrantes des droits humains à Cuba. La FDIF demande par ailleurs la libération de cinq Cubains qui sont prisonniers aux États-Unis pour le seul fait d'avoir lutté contre le terrorisme. Elle demande en outre le droit d'Olga Salanueva et d'Adriana Pérez de visiter leurs époux en prison.

MME JACQUELINE BROWN (Human Rights Advocates, au nom également de United Nations Watch), rappelant que la traite à des fins de commerce sexuel affecte 4 millions de personnes chaque année, a souligné le rôle de la pauvreté, ainsi que l'implication des militaires dans la traite des femmes et de enfants. Elle a estimé que le point de départ pour lutter contre ce fléau est de s'attaquer à la demande et en particulier de la part des forces armées. Elle a pris l'exemple de ce qui se passe en Corée où 8500 femmes ont été amenées des Philippines et d'Europe de l'Est en remplacement des prostituées coréennes. Elle a insisté sur la nécessité d'un système de surveillance pour encourager les gouvernements à promouvoir réellement l'égalité des droits entre hommes et femmes. Elle a aussi jugé nécessaire la mise en place d'un mécanisme pour lutter contre la traite. Elle a en outre estimé qu'il faut accorder une attention soutenue à la pauvreté qui est à la racine de la traite.

MME MAGALYS AROCHA (Fédération des femmes cubaines) a dénoncé devant la Commission le sort réservé aux milliers de femmes cubaines victimes des actions terroristes que Cuba doit, et a dû, subir de la part des gouvernements successifs des États-Unis. Mme Pérez a également demandé la libération des cinq jeunes gens emprisonnés à perpétuité et condamnés de manière inique par les États-Unis au seul motif d'avoir voulu lutter contre le terrorisme. Les femmes et les mères de ces jeunes gens doivent avoir le droit de leur rendre visite, mais sont en attente de visas depuis sept mois. Les femmes cubaines ne cesseront jamais de réclamer leurs droits de manière digne et en dépit des tentatives pour les faire taire.

MME BIRTE SCHOLZ (Centre on Housing Rights and Evictions) a rappelé que près de 1,6 milliard de personnes dans le monde vivent sans toit ou sans accès à un logement digne. Sur ce nombre, 70% sont des femmes. Des milliers de femmes meurent chaque jour en raison de ces conditions de vie qui les exposent à l'insalubrité, à la violence et parfois aux évictions forcées. La violation du droit à un logement adéquat constitue une forme de violence à l'égard des femmes qui s'accompagne de graves conséquences. La représentante a appelé tous les États à adopter et à mettre en œuvre, conformément à leurs obligations internationales, des lois et des programmes d'éducation visant à protéger et à promouvoir le droit des femmes à un logement adéquat.

MME SUE YOON-LOGAN (Jubilee Campaign) a soulevé le problème des femmes nord-coréennes qui sont amenées en République populaire de Chine souvent à des fins de prostitution. Elle a affirmé que les autorités chinoises poursuivent des travailleurs humanitaires dans le cadre de leurs lois contre la traite simplement pour avoir fourni un asile aux réfugiés nord-coréens en Chine et ne poursuivent pas les véritables responsables de la traite des femmes. Elle a demandé que la Commission exhorte les autorités chinoises à poursuivre réellement les auteurs de la traite et à permettre au Haut Commissariat aux droits de l'homme d'avoir accès à cette population.

M. SYED MAQBOOL KAZMI (Fondation de recherches et d'études culturelles himalayennes) a dit que de nouvelles formes de violence apparaissent telles que celles liées à la situation des femmes dans les situations de conflit, comme au Jammu-et-Cachemire où les femmes sont victimes d'un regain de violence de la part des militaires et des mercenaires présents en grand nombre. Le représentant a évoqué les tortures cruelles auxquelles elle sont soumises. Au-delà des discours, a dit le représentant, les femmes sont les premières victimes de violences qui sont autant de menaces contre leurs droits en tant qu'êtres humains.

M. ARIF AAJAKA (Comité international pour le respect et l'application de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples - CIRAC) a attiré l'attention sur la pratique des crimes d'honneur au Pakistan. Des milliers de femmes ont été tuées au nom de l'honneur, a affirmé le représentant. Il a ainsi évoqué le rituel dit du «Karo Kari» dans la province du Sindh, utilisé comme moyen pour humilier les femmes, comme instrument de pouvoir ou moyen de s'enrichir. Le représentant a estimé que cette coutume, profondément ancrée dans certaines régions du Pakistan, relève du féodalisme. Il a insisté sur la nécessité d'éradiquer cette menace et de permettre aux femmes d'occuper une place respectable et égale à celle des hommes dans la société.

M. GIANFRANCO ROSSI (International Religious Liberty Association) a souligné que bon nombre des discriminations que subissent les femmes sont causées par des interprétations erronées de la religion ou par des règles religieuses révolues. Ainsi, les extrémistes islamistes insistent à vouloir appliquer des règles de la charia, ou loi islamique, qui sont fortement discriminatoires à l'égard des femmes. M. Rossi a en revanche cité l'exemple de pays musulmans tels que la Tunisie ou le Maroc, qui s'efforcent de réaliser l'égalité des droits et font évoluer la législation relative aux femmes. La Commission devrait demander à tous les États de ne pas invoquer des traditions liées à la religion pour se soustraire à leur obligation d'éliminer la discrimination à l'égard des femmes; elle devrait également demander aux dirigeants des grandes religions de contribuer à faire reconnaître l'égalité des droits fondamentaux des hommes et des femmes.

MME MAGALYS AROCHA (Union nationale des juristes de Cuba) a souligné que, dans le contexte de «la mondialisation néo-libérale», les femmes constituent la majorité des pauvres et sont durement frappées par l'analphabétisme. La discrimination dont elles souffrent n'est pas un problème limité au monde sous-developpé, a fait observer la représentante. Aux États-Unis, par exemple, elles sont moins bien assurées contre la maladie et toutes les neuf secondes, une femme est maltraitée par son conjoint dans ce pays. À Cuba, en revanche, la situation des femmes a connu des progrès notables depuis la Révolution; elles représentent notamment 36% des membres du Parlement et leur situation pourrait être encore meilleure s'il n'y avait eu le blocus économique imposé par les États-Unis.

M. YADOLAH MOHAMMADI (Organization for Defending Victims of Violence)
a affirmé que l'Iran a connu des avancées importantes lors des dernières décennies, notamment dans le domaine des droits économiques et sociaux des femmes. Toutefois, en dépit de ces avancées, les femmes iraniennes continuent de rencontrer un grand nombre de difficultés. Ainsi, la pratique du mariage forcé se perpétue-t-elle dans le sud du pays. En outre, le trafic de femmes et de fillettes à des fins d'exploitation sexuelle est un problème croissant dans de nombreuses régions du pays, a souligné le représentant. Enfin, du fait qu'elles ignorent leurs droits, nombre de femmes subissent encore la violence domestique. Aussi, le représentant a-t-il rappelé que son organisation met en œuvre des programmes d'éducation et d'assistance médicale dans un centre de réhabilitation.

MME LURDES CERVANTES (Organisation de solidarité des peuples d'Afrique, d'Asie et d'Amérique latine) a rappelé que 70% des personnes qui vivent dans des conditions d'extrême pauvreté sont des femmes et que malgré l'augmentation de l'emploi féminin, celui-ci ne se traduit pas par une véritable émancipation socio-économique des femmes, dont les salaires sont inférieurs de 20 à 30% à ceux des hommes. Les femmes sont prises dans un cercle vicieux de pauvreté, de marginalisation et de violence qui limite leur capacité à s'organiser pour transformer la situation d'oppression et de discrimination qu'elles subissent. La représentante a exprimé sa solidarité avec les femmes palestiniennes qui «résistent héroïquement à la répression et au terrorisme de l'État sioniste» ainsi qu'avec les femmes iraquiennes, victimes de la guerre et de l'occupation, et avec les femmes latino-américaines qui se mobilisent contre le néo-libéralisme. Elle a aussi exprimé sa solidarité avec les femmes cubaines qui ont participé à quatre décennies de transformation sociale ayant abouti à l'égalité des droits et au respect à leur égard.

MME MARÍA LUISA TOLEDO (Fédération latino-américaine des associations des familles des détenus disparus) a déclaré qu'il n'y avait pas de forme plus grave de violence contre les femmes que la disparition forcée. Celles qui, sous la dictature en Argentine, furent détenues et ont disparu pour des raisons politiques ont non seulement souffert pendant leur détention de tortures et de mauvais traitements, mais en plus, pour certaines d'entre elles, leurs enfants leur ont été volés, a insisté la représentante. Elle a par ailleurs dénoncé les meurtres de trois cents femmes qui ont été tuées à Ciudad Juárez, sans que le Gouvernement du Mexique n'apporte de réponse ni de réaction vraiment satisfaisantes. Des cas similaires se sont produits au Guatemala, a poursuivi la représentante. Elle a demandé à tous les gouvernements concernés de prendre les mesures nécessaires pour mettre un terme à ces pratiques.

MME YOKO KANEKO (Association of World Citizens) a déclaré qu'en raison de son appartenance au mouvement Falun Gong, elle a été, pendant 548 jours, l'otage du régime de Jiang Zemin. Elle a décrit les mauvais traitements dont elle dit avoir été victime lors de sa détention. Elle a ensuite souligné qu'à l'heure actuelle, plus de 915 adeptes de Falun Gong sont décédés et que plus de 100 000 ont été envoyés dans des camps de travail ou internés dans des hôpitaux psychiatriques. La représentante a affirmé que Falun Gong n'est pas un mouvement politique mais une organisation spirituelle et morale qui concerne des millions de gens innocents. Elle a estimé qu'il était temps de mettre fin aux persécutions dont sont victimes les adeptes de Falun Gong.

M. AKIRA MAEDA (Japanese Workers Committee for Human Rights) a attiré l'attention de la Commission sur la question de l'esclavage sexuel pendant les conflits armés et de la violence sexuelle comme arme de guerre. À cet égard, il a évoqué le cas des «femmes de réconfort» réduites à l'état d'esclaves sexuels par l'armée japonaise durant la deuxième guerre mondiale. Il a rappelé que l'esclavage sexuel est une violation de la Convention de l'Organisation internationale du travail sur le travail forcé. Il s'est félicité du jugement d'une cour japonaise qui a condamné pour la première fois l'État et une société privée à verser 88 millions de yens d'indemnisation à des Chinois forcés à travailler au Japon pendant la guerre. Il a demandé que la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes enquête sur les récentes situations d'esclavage sexuel dans le cadre de conflits armés et élabore des règles de protection et d'indemnisation des victimes.

MME REA A. CHIONGSON (Comité d'action internationale pour les droits de la femme) a rappelé que la violence contre les femmes est une forme extrême de discrimination à leur encontre et qu'il est impératif d'envisager la lutte contre ce crime sur le long terme. À ce titre, la représentante a appelé à une collaboration entre gouvernements et organisations non gouvernementales, ces dernières ayant acquis une grande expérience dans ce domaine. La représentante a également appelé les États ayant ratifié la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes à s'acquitter pleinement de leurs obligations en vertu de cet instrument, c'est-à-dire en ne se contentant pas de présenter des rapports mais en prenant surtout des mesures pour appliquer les dispositions de cet instrument et les recommandations du comité chargé de veiller à son application effective.

MME NARINDA TUKHAMMEE (Asia Pacific Forum on Women, Law and Development) a fait état d'un rapport qui documentait, en 2002, les violences commises par le régime militaire birman contre les femmes de l'ethnie shan, victimes de viols et de violences sexuelles systématiques. Pour cent soixante-treize cas qui ont été recensés et dûment documentés, un seul responsable a été sanctionné, a déploré la représentante. Ces pratiques se sont poursuivies après la publication du rapport et on recense aujourd'hui 150 victimes de plus. Un autre rapport, intitulé «Shattering Silences», fait quant à lui état d'autres viols encore, commis dans l'État de Karen par les forces birmanes. Cette violence se poursuit actuellement et il faut déplorer que le Gouvernement n'ait pas agi pour améliorer la situation, malgré l'adoption, année après année, d'une résolution traitant de ce sujet.

M. ANIKUR SRIVASJAVA (Consejo Indio para la Educación) a déclaré que la traite des femmes à tous les niveaux constitue une violation très grave de leurs droits. Les causes de ce phénomène répréhensible sont la pauvreté, l'aliénation et l'analphabétisme. Tous les efforts nécessaires doivent être déployés aux niveaux national, régional et international pour mettre un terme à ce fléau. Le représentant a lancé un appel pour que soit protégé le droit des femmes grâce à un éveil des consciences et en assurant le développement de l'assistance sociale, des soins de santé, de l'alphabétisation et de l'éducation.

MME PRAMILA SRIVASTAVA (International Institute for Non-Aligned Studies) a déploré que de nombreuses femmes de par le monde soient privées de leurs droits, y compris du droit à la vie et à la naissance. Elle a également dénoncé les pratiques fondamentalistes qui privent les femmes de leurs droits, au profit des hommes. Il faut garder à l'esprit les conséquences à long terme du viol, a-t-elle par ailleurs souligné.

M. MOHAMMED YOUNUS SHEIKH (Union internationale humaniste et laïque)
a rappelé les paroles du Rapporteur spécial sur la liberté de religion, M. Abdelfattah Amor, qui disait que «les religions ont toutes un problème avec les femmes». Ce problème existe en effet au niveau mondial, a dit le représentant, et pas seulement au Proche-Orient. Le cas de l'Iraq mérite cependant que l'on s'y penche. Dans ce pays, de nombreux responsables religieux souhaiteraient la création d'une société dans laquelle les femmes n'auraient pas leur mot à dire. La Constitution provisoire elle-même n'accorde pas toute la protection requise aux droits humains des femmes, en particulier en n'apportant pas de garantie explicite quant à leur droit à l'égalité devant le mariage et en matière d'héritage, et en ne prévoyant pas que les femmes iraquiennes mariées à un étranger puissent transmettre leur nationalité à leurs enfants. D'autre part, la violence contre les femmes augmente en Iraq : 350 femmes ont été enlevées depuis la fin de la guerre, a notamment indiqué le représentant.

MME SARAH ELIASON (Vision mondiale internationale) a déclaré que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et la Convention relative aux droits de l'enfant sont des instruments essentiels pour protéger les femmes et les enfants contre la violence. La représentante a exhorté les gouvernements, les organisations non gouvernementales et les institutions du système de l'ONU à s'engager pleinement dans la mise en oeuvre effective de ces instruments. Elle a en outre souligné l'importance de l'éducation. La représentante a également insisté sur la nécessité de traiter de la question du trafic des femmes et des fillettes et d'assurer l'élimination des pratiques traditionnelles telles que les mariages précoces et les mutilation génitales.

MME BRENDA VUKOVIC (Assemblée permanente pour les droits de l'homme) a déclaré que les lois qui garantissent l'égalité des chances entre hommes et femmes en Argentine ne sont pas suffisantes pour transformer la réalité; il faut des mesures concrètes pour changer les mentalités et la culture patriarcale. Dans le contexte de crise socio-économique que connaît le pays, la situation des femmes des secteurs populaires est très difficile; leurs droits n'ont pas évolué et elles subissent souvent des violences conjugales. En outre, le sida touche de plus en plus de femmes. La représentante a souligné l'importance qu'il y a à lancer des politiques publiques ainsi que des campagnes durables sur l'éducation sexuelle, sur les différentes formes de violence contre les femmes et sur les moyens d'émanciper les femmes et de les faire accéder aux postes de décision.

MME SAMINA IBRAHIM (Institut international de la paix) a déclaré que malgré les efforts déployés pour lutter contre la violence contre les femmes, leurs souffrances ne connaissent pas de répit : harcèlement, traite, violences domestiques, crimes dits d'honneur, viols systématiques. Toutes les femmes sont des victimes potentielles, mais celles appartenant à des minorités ethniques sont encore plus vulnérables. La représentante a par ailleurs rappelé que 80% des personnes déplacées et réfugiées sont des femmes et des enfants. Elle a en outre rappelé que 20 000 femmes bosniaques ont été violées pendant la dernière guerre des Balkans. On estime d'autre part qu'en l'an 2000, entre 700 000 et 2 millions de femmes et d'enfants ont été victimes de trafics illégaux à travers le monde, a encore déploré la représentante. Il incombe aux organisations internationales de contribuer à la sensibilisation de l'opinion publique à la gravité de la violence contre les femmes et les enfants, a-t-elle ajouté.

MME NINO PEIKRISHVILI (Alliance mondiale des unions chrétiennes de jeunes filles) a souligné que le trafic d'êtres humains est un phénomène qui concerne tous les États. Plus de 4 millions de femmes et de jeunes filles dans le monde sont achetées et vendues aux fins de mariages forcés, de prostitution ou d'esclavage, a-t-elle précisé. La représentante a appelé tous les États qui ne l'ont pas encore fait à ratifier la Convention des Nations Unies sur la criminalité transnationale organisée et son Protocole facultatif sur la prévention, la suppression et la répression du trafic d'êtres humains. Il est également important que les États mettent en œuvre des stratégies spécifiques de lutte contre le trafic d'êtres humains aux niveaux national et régional. La représentante a par ailleurs insisté sur la nécessité de ne pas considérer ce phénomène uniquement comme un problème d'ordre public mais comme une atteinte grave aux droits de l'homme. À cet égard, elle a apporté son soutien à la nomination d'un rapporteur spécial sur cette question.

MME ANNA BIONDI BIRD (Confédération internationale des syndicats libres) a mis l'accent sur le lancement, le 8 mars dernier, d'une campagne ciblant les femmes dans l'économie informelle et dans les zones d'exportation afin de leur donner une chance de faire valoir leurs droits, en particulier au Maroc, en Algérie et en Mauritanie, où elles sont particulièrement touchées par les réformes structurelles. L'objectif est également d'accroître la syndicalisation des femmes dans cette région, notamment par la promotion des droits syndicaux. La représentante a par ailleurs mis l'accent sur la nécessité de modifier les structures syndicales elles-mêmes afin de parvenir à une représentation paritaire.

MME TABASSUM AMIN (Congrès du monde islamique) a condamné l'utilisation systématique au Cachemire occupé par l'Inde d'«armes d'humiliation massive», telles que le viol et d'autres formes de violences contre les femmes. Certaines organisations ont pu documenter en détail ces violations; les femmes semblent être les cibles directes et indirectes des forces de sécurité indiennes et de leurs mercenaires. La Commission doit absolument prendre des mesures pour mettre un terme au calvaire subi par les femmes du Cachemire entre les mains des forces d'occupation d'un pays qui a acquis une sinistre réputation en matière de violences sexistes, qu'il s'agisse de meurtres pour cause de dots insuffisantes, de prostitution ou de trafic d'êtres humains. La représentante a demandé à la Commission de mandater le Rapporteur spécial sur la violence contre les femmes pour enquêter sur les causes et conséquences de cette violence contre les femmes.

MME CHRISTIANE DEHOY (Société anti-esclavagiste) a attiré l'attention de la Commission sur la situation des femmes rohingya au Myanmar, où elles sont privées de leur droit à la citoyenneté et reléguées ainsi à un statut inférieur. Ces femmes sont pour une large part analphabètes et vivent dans un état d'extrême pauvreté, a déclaré la représentante. Aussi, a-t-elle exhorté la Commission à entamer un dialogue avec les autorités du Myanmar sur la question de la citoyenneté de ces femmes et à tout faire pour que leurs droits fondamentaux soient respectés et garantis.

M. LOUIE CRISMO (Families of Victims of Involuntary Disappearance) a attiré l'attention de la Commission sur la situation des victimes de disparitions forcées et de leurs familles du fait de la répression politique aux Philippines. Les femmes et mères de disparus sont particulièrement vulnérables et se retrouvent dans une situation très difficile, du point de vue économique, qui s'ajoutent à leurs souffrances. Le représentant a appelé à mettre un terme à la pratique des disparitions forcées, à punir les responsables et à mettre en place des programmes de réhabilitation en faveur de ces femmes.

MME MU HONG (Fédération des femmes de Chine) a fait observer que la violence contre les femmes est une préoccupation mondiale et traduit des relations historiquement inégales entre hommes et femmes, comme l'atteste l'exemple des États-Unis où doivent être déplorées des relations inégales entre les sexes au sein d'une société encore patriarcale. On relève par exemple dans ce pays de nombreux et graves cas de violences sexuelles et au total 700 000 cas de violences au foyer pour la seule année 2001. Ce problème est jugé très préoccupant par 92% des femmes aux États-Unis. Des rapports de l'armée des États-Unis font état de 20% de femmes engagées ayant subi une forme de harcèlement sexuel. Les États-Unis feraient donc bien de manifester davantage de respect pour les droits humains des femmes, a estimé la représentante.

MME MERCY SUANCHING (Worldview International Foundation) a déclaré que si femmes et hommes se battent pour le respect de leurs droits humains et pour la promotion de la démocratie en Birmanie, les femmes militantes font face à des risques qui sont doublés en raison de leur sexe. Il n'y a pour elles ni sécurité, ni protection, a souligné la représentante. Ces femmes sont l'objet de violences en raison de leur sexe, de leurs engagements et de leurs convictions politiques, ainsi qu'en raison de leur combat en faveur de la démocratie. Aussi, la représentante a-t-elle exhorté la Commission à accorder une attention particulière à la question des femmes prisonnières politiques en Birmanie lors de l'adoption de sa résolution concernant ce pays.

MME NAJOUA MILADI (Union nationale de la femme tunisienne) a indiqué qu'avant même d'adhérer aux principales conventions internationales, la Tunisie s'était déjà engagée sur la voie de l'émancipation de la femme, dès 1956, par la promulgation du Code du Statut personnel, aboutissement du processus de réforme initié dans les années 30 en conformité avec la religion musulmane et les traditions séculaires de la société tunisienne. Aujourd'hui, pratiquement aucune discrimination ne subsiste à l'égard des femmes, a assuré la représentante, ajoutant que la femme tunisienne a un statut privilégié et jouit de ses pleins droits grâce à une volonté politique indéfectible dans ce domaine. La violence conjugale est réprimée par la loi. En outre, des structures d'appui ont permis une véritable intégration des femmes dans le processus de développement durable.

MME KAUKAB-UL-SABAB (Fédération internationale islamique d'organisations d'étudiants) a déclaré que les violences contre les femmes existent, sous leurs pires formes, dans les régions déstabilisées par des conflits et des occupations étrangères. Les femmes y sont victimes de graves injustices et fréquemment la cible de violations de leurs droits humains. L'histoire des femmes au Cachemire est à cet égard tristement exemplaire, du fait en particulier de l'utilisation par l'armée indienne du viol, et notamment du viol collectif, comme arme de guerre. Le traumatisme psychologique lié à ces pratiques est insupportable et plus de neuf mille incidents de ce genre ont été répertoriés depuis 1989. La Commission, en particulier sa Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes, doivent enquêter sur la nature systématique et planifiée de cette violence, a estimé la représentante.

M. EPI NARTI (Third World Movement against the Exploitation of Women) a attiré l'attention de la Commisison sur les actes de violence contre les femmes qui continuent d'être commis par les forces de sécurité en Indonésie. Elle a notamment fait état d'un viol en réunion commis par des soldats de la marine sur une mère de famille, en présence de ses enfants. Les auteurs de cet acte n'ont pas fait l'objet de poursuites, a-t-elle souligné. Aussi, a-t-elle appelé la communauté internationale à faire pression sur le Gouvernement de l'Indonésie afin qu'il amende les dispositions discriminatoires à l'égard des femmes qui subsistent dans sa législation et adopte les mesures juridiques permettant de protéger les femmes contre la violence. Le Gouvernement indonésien doit poursuivre les auteurs de violences contre les femmes et les punir, a insisté la représentante.

MME HEISOO SHIN (Union des associations de Coréennes) a indiqué qu'il y a quelques jours, une autre victime de l'esclavage sexuel des militaires japonais est décédée. Les victimes survivantes sont aujourd'hui moins de 1000 sur les 200 000 femmes qui ont été utilisées comme esclaves sexuelles. La représentante a dénoncé l'indifférence des autorités japonaises et demandé à la Commission d'exhorter fermement le Gouvernement japonais à respecter les droits de l'homme de ces victimes.

MME WENDY ISAACK (Association civile des filles mères - MADRE) a déclaré qu'aucune femme ne peut se déterminer sur son sort si elle ne dispose pas de la capacité de se déterminer sur sa sexualité. Quiconque se déclare favorable à la protection des droits de l'homme doit reconnaître en même temps que chaque femme a le droit d'assumer sa sexualité hors de toute discrimination. La représentante a attiré l'attention de la Commission sur les crimes odieux commis contre les lesbiennes qui sont, dans de nombreux pays, victimes de viols au motif que cela les «guérira» de leur orientation sexuelle. Cette violence se déploie à l'école, au travail, jusque dans les foyers. Les droits humains des lesbiennes et des hétérosexuelles sont pourtant liés de manière fondamentale. Dénier aux femmes, blanches ou noires, homosexuelles ou hétérosexuelles, leur droit à maîtriser leur corps et leur sexualité revient à leur dénier le droit inhérent à la dignité. La représentante a demandé aux Nations Unies de reconnaître et de remédier à ces graves violations des droits des femmes fondées sur leur orientation sexuelle.

MME NURSEL KILIC (Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté) a déclaré que l'outil le plus puissant du système de domination masculine consiste à prendre le corps et la sexualité de la femme sous son contrôle. De ce fait, la raison principale de la violence n'est autre que le système de la domination de l'homme, qui se nourrit des valeurs religieuses traditionnelles fondées sur la hiérarchie. Chaque année des centaines de femmes se font tuer à cause de pratiques telles que les crimes d'honneur dans des pays comme l'Inde, le Bangladesh, le Yémen, la Turquie, le Jordanie et le Pakistan. Par ailleurs, chaque jour dans le monde, 500 à 650 femmes meurent des suites d'actes de violence. Aussi, la représentante a-t-elle estimé qu'il est urgent que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes soit ratifiée par tous les pays qui ne l'ont pas encore fait.

MME TOMO SHIBATA (Asia-Japan Women's Resource Center) a dénoncé la violence sexuelle comme étant la conséquence de l'affirmation de la domination masculine et l'«objectivisation» sexuelle abondamment utilisée dans la pornographie et les médias. Elle a préconisé une intervention au plan juridique pour lutter contre cette objectivisation sexuelle véhiculée par la pornographie et perçue abusivement comme la seule voie de l'expérience sexuelle. Elle a préconisé la promotion d'un autre mode de sexualité basé sur l'identification et qui devrait enseigné dès le plus jeune âge.

MME IRMA YANNY (Centre Europe tiers-monde - CETIM) a rappelé que le processus de globalisation s'accompagne de nombreuses menaces contre la campagne, l'environnement, les cultures et les modèles de production traditionnels, ceci pour laisser la place aux nouveaux organismes génétiquement modifiés (OGM). Ce processus s'inscrit dans la vie de femmes déjà frappées de discrimination sexuelle. Le 10 mars dernier, six paysannes indonésiennes ont été abattues par la police dans la province de Nusa Tenggara, a par ailleurs déploré le représentant. Au Brésil, au cours du semestre 2003, les forces armées ont fait 31 victimes dans des conflits fonciers. Le CETIM soutient les paysans et demande notamment l'application immédiate de réformes agraires authentiques qui permettent une juste redistribution des revenus. Il demande en outre l'adoption par la Commission de la résolution sur la souveraineté alimentaire pour éradiquer la faim. La Commission devrait en outre examiner la proposition d'élaboration d'une convention pour les droits des paysans, a conclu le représentant.

MME SYLVIE O’CALLAGHAN (Rural Development Foundation) a estimé qu'au Jammu-et-Cachemire, c'est l'État qui est le premier responsable de la violence à l'égard des femmes. Des années de violence systématique ont eu un impact considérable sur la santé physique et mentale des femmes dans la région, a souligné la représentante. Elle a attiré l'attention de la Commission sur certains cas de violences commises contre des femmes au Cachemire, qui illustrent selon elle les changements intervenus dans cette région depuis les événements du 11septembre aux États-Unis. Peu après cette date, a dénoncé la représentante, le Gouvernement de l'Inde a mis en œuvre une vaste campagne de désinformation visant à encourager la communauté internationale à réinterpréter le combat pour la liberté de la population du Cachemire comme constituant une activité terroriste.

MME FATIMA AHMARI (Women's Human Rights International Association) a dénoncé les courants rétrogrades qui agissent souvent au nom des religions et qui veulent faire obstacle à tout progrès s'agissant des droits des femmes. Il est inadmissible que des femmes soient lapidées au nom de la religion et on ne peut accepter que dans certains pays les femmes soient privées de droit de divorce, que la polygamie soit légale et que l'âge légal du mariage des filles soit inférieur à 15 ans. La représentante a affirmé que la religion n'est aucunement un obstacle à l'égalité totale entre homme et femmes et a dénoncé l'utilisation abusive du prétexte de la religion par les États. Elle a demandé instamment aux États de reconnaître et d'adopter le droit international et de supprimer la lapidation des textes de lois nationaux. Elle s'est en particulier dite très inquiète du sort de quatre femmes iraniennes condamnées à mort par lapidation et dont on reste sans nouvelle, ainsi que du maintien de la lapidation dans le code pénal iranien, malgré les promesses faites par les autorités iraniennes. L'islam peut être une religion de compassion, d'émancipation et d'égalité totale entre hommes et femmes, à condition qu'il soit mis fin aux abus, a-t-elle conclu.

MME CHRIS CHAPMAN (Minority Rights Group International) a dénoncé la situation des femmes twa (pygmées), dans la région des Grands lacs d'Afrique, qui appartiennent à l'une des communautés les plus marginalisées de la planète. Les femmes pygmées qui sont victimes de viols de la part de belligérants n'osent pas déposer plainte et sont souvent mises à l'écart de leur communauté, par crainte qu'elles n'aient été infectées par le virus du sida. Seules 9% d'entre elles sont scolarisées; elles sont marginalisées et deviennent donc victimes de la prostitution. Au Darfour, dans l'ouest soudanais, la situation des femmes est particulièrement précaire. Le Gouverneur de la province y a récemment fermé un camp de réfugiés qui abritait 10 000 femmes et enfants réfugiés, les condamnant à un nouvel exil. Le représentant a enfin évoqué le sort des femmes rom dans l'est de l'Europe, qui souffrent notamment d'un faible taux de scolarisation et de couverture médicale. La pauvreté généralisée favorise également la violence domestique, d'autant plus que les femmes ne peuvent s'opposer aux valeurs patriarcales dominantes, a enfin dit le représentant.

M. USMAN HAMID (Organisation néerlandaise pour la coopération internationale au développement) a exprimé sa vive inquiétude face aux violences faites aux femmes en Indonésie. Sur les 9 cas de viols connus par la Commission des droits de l'homme, seule une personne a été traduite en justice. Les victimes n'ont pas obtenu la moindre réparation. Le représentant a par ailleurs souligné l'importance de la violence domestique en Indonésie. Il a exhorté la communauté internationale à faire pression sur le Gouvernement indonésien afin qu'il enquête, poursuive devant les tribunaux et punisse les auteurs des actes de violence à l'égard des femmes. Le Gouvernement de l'Indonésie devrait par ailleurs lever sa réserve à l'article 29 de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.


Débat sur les droits de l'enfant

MME DILIA LETICIA JORGE MERA (République dominicaine) a réaffirmé l'engagement de son pays en faveur des enfants et des adolescents dominicains. À cet égard, elle a notamment cité la promulgation d'un nouveau code pour la protection des droits fondamentaux de l'enfant et de l'adolescent et la création d'un Conseil national pour l'enfance et l'adolescence. Elle a en particulier mis l'accent sur les mesures prises pour faciliter le processus d'enregistrement des naissances; les garanties fournies par le code pénal aux adolescents difficiles; et la protection des droits des enfants victimes d'exploitation sexuelle. S'agissant de cette dernière question, une commission a été créée afin de coordonner les actions contre ce fléau en République dominicaine. Ainsi, des campagnes de sensibilisation ont été lancées et doivent être diffusées en Europe et aux États-Unis à travers les consulats et les offices de tourisme dominicains, un code de conduite a été adopté par les hôteliers et restaurateurs, un département spécialisé a été créé pour enquêter sur l'exploitation sexuelle et la pornographie impliquant des enfants, et un programme de récupération et de réintégration des enfants victimes d'exploitation sexuelle a été lancé.

M. OMAR SHALABY (Égypte) a déclaré que la protection des droits de l'enfant revêt un statut particulier dans son pays, dans le cadre de l'édification d'une Égypte moderne. Le Gouvernement a décrété une décennie des droits de l'enfant et des résultats ont été obtenus en matière par exemple d'enseignement supérieur ou de généralisation de la couverture médicale des enfants. L'Égypte est le premier pays à avoir ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant, et a retiré ses réserves à l'égard des dispositions traitant de l'adoption. Au plan interne, une législation en faveur de l'enfance a été promulguée qui va dans le sens d'une politique de promotion de l'enfant. La Première Dame, Mme Susan Moubarak, a souhaité en particulier œuvrer en ce sens. La protection des droits de la petite fille fait l'objet d'un plan quinquennal. Les problèmes de l'excision, de la santé enfantine et maternelle, de la protection des plus défavorables sont pris à bras le corps par le Gouvernement. Une loi empêche aussi que les enfants de moins de 17 ans ne travaillent et une stratégie de protection des enfants des rues, en coopération avec l'UNICEF, a permis l'ouverture d'un centre de réinsertion pour les enfants. L'action des organisations non gouvernementales et du secteur privé est aussi encouragée. Le représentant a enfin eu un mot pour les enfants palestiniens victimes des nombreux actes de violence des forces armées israéliennes, enfants que l'Égypte s'est engagée à aider.

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