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LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DE SAINT-MARIN
11 juillet 2008
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Comité des droits de l'homme
11 juillet 2008
Il se penche également sur ses méthodes de travail s'agissant de l'examen des plaintes
Le Comité des droits de l'homme a examiné aujourd'hui le deuxième rapport périodique de Saint-Marin sur la mise en œuvre par ce pays des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
À l'issue de l'examen, le Président du Comité, M. Rafael Rivas Posada, a regretté que le poste d'ombudsman, dont la création est prévue depuis longtemps, n'a toujours pas été mis en place par Saint-Marin. Le Comité, a-t-il dit, continuera également à suivre de près l'exigence exagérée d'une résidence de 30 ans pour l'acquisition de la nationalité à Saint-Marin. Des membres du Comité ont par ailleurs tenu à souligner le rôle démocratique important joué par ce pays et le fait qu'il a servi de terre d'asile à de nombreux persécutés. Rappelant que Saint-Marin s'est présenté pour la dernière fois devant lui en 1990, ils se sont réjouis de la reprise du dialogue avec le Comité, déplorant toutefois que le rapport de l'État partie se focalise sur les dispositions législatives et ne rende pas compte des mesures concrètes qui ont été prises pour appliquer les dispositions du Pacte. Les observations finales du Comité concernant le rapport de Saint-Marin seront rendues publiques au terme de cette session.
L'importante délégation de Saint-Marin, dirigée par M. Dario Galassi, Représentant permanent de Saint-Marin auprès des Nations Unies à Genève, était également composée d'un juge pour les appels civils, de représentants du Ministère des affaires politiques et étrangères, du Directeur de l'Autorité sanitaire, du Directeur du secrétariat exécutif du Congrès de l'État, d'un juriste d'État et d'un représentant de la Gendarmerie. Elle a mis l'accent sur les mesures législatives prises par le pays pour se conformer aux dispositions du Pacte. Elle a, en particulier, souligné que la Constitution saint-marinaise consacre la prééminence des instruments internationaux sur le droit interne. La délégation a aussi fourni au Comité des informations sur les particularités du système politique et judiciaire du pays indiquant, notamment, qu'à Saint-Marin, le rôle d'ombudsman est tenu par les capitaines-régents, dont la fonction dérive d'une tradition médiévale. Selon cette pratique coutumière, institutionnalisée en 2005, l'ensemble de la population a la possibilité d'exposer ses doléances aux capitaines-régents, qui évaluent le bien-fondé des demandes et interviennent auprès des organes qui se sont rendus responsables d'une éventuelle violation. Cette intervention est de poids et c'est la forme de protection la plus puissante que l'on puisse garantir à Saint-Marin, a assuré la délégation.
En fin de journée, portant son attention sur ses méthodes de travail, le Comité s'est penché sur un projet de texte portant sur l'examen, par le Comité, de communications émanant de particuliers qui se plaignent de violations de leurs droits tels qu'ils figurent dans le Pacte, comme le prévoit le Protocole facultatif au Pacte. Il a notamment été question d'une règle visant à fixer un délai maximum à partir du moment où les recours nationaux sont épuisés avant de pouvoir déposer une communication auprès du Comité. Les experts sont toutefois restés divisés quant à l'opportunité de définir un délai. Le projet présenté par M. Yvan Shearer membre du Comité, prévoit que «En l'absence de circonstances exceptionnelles expliquant le retard, le Comité considérera qu'une période de 4 ans depuis l'épuisement des recours internes par l'auteur de la communication ou, dans le cas d'espèce, une période de 2 ans depuis la fin d'une procédure devant une autre instance internationale d'enquête ou de règlement, constituera un retard excessif.»
Lundi matin 14 juillet, le Comité poursuivra cette discussion sur ses méthodes de travail. L'après-midi, il entamera l'examen du troisième rapport périodique de l'Irlande (CCPR/C/IRL/3).
Présentation du rapport
M. DARIO GALASSI, Représentant permanent de Saint-Marin auprès des Nations Unies à Genève, a présenté les membres de sa délégation, qui a fourni des renseignements complémentaires (voir ci-après).
Le deuxième rapport périodique de Saint-Marin (CCPR/C/SMR/2) met en regard les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques avec le cadre institutionnel et juridique de ce pays. Le rapport indique notamment que l'article 2 de la Déclaration des droits des citoyens affirme que «la souveraineté de la République appartient au peuple, qui l'exerce sous les formes légales de la démocratie représentative» et à l'aide des autres institutions de la démocratie directe. Les électeurs ont le droit et le devoir de participer directement au développement politique, social et économique du pays en élisant les membres du Grand Conseil (Parlement) et par l'intermédiaire d'autres mécanismes de la démocratie directe tels que le référendum, l'initiative législative populaire et le droit de pétition. La République de Saint-Marin reconnaît le droit du peuple à disposer librement de ses richesses et de ses ressources naturelles dans le respect de la législation nationale et des traités internationaux auxquels le pays est partie. Le rapport cite que «Les accords internationaux dûment signés et appliqués concernant la sauvegarde des droits de l'homme et des libertés l'emportent sur la législation interne en cas de conflit avec cette dernière.» La seule dérogation envisagée par la Déclaration sur les droits des citoyens s'agissant de l'exercice des droits civils et politiques se trouve à l'article 6: «Toute personne jouit des libertés civiles et politiques. [...]. Aucune restriction ne s'applique à l'exercice de ces droits, à l'exception de celles qui sont prescrites par la loi et sont nécessaires à la protection de l'ordre public et du bien-être général.» Les mesures limitant l'exercice de ces droits et libertés ne sont donc admises que dans des circonstances exceptionnelles et particulièrement graves (par exemple, les délits qui sont susceptibles de gravement compromettre la coexistence civile). En pareil cas, le législateur envisage l'adoption de mesures restrictives visant à rétablir l'ordre.
Le rapport indique que la loi no 95 du 4 septembre 1997 et les règlements d'application ultérieurs ont modifié les dispositions passées concernant l'octroi de permis de séjour et de résidence aux étrangers. Les permis de séjour sont accordés dans des circonstances particulières, notamment en cas de relations commerciales ou professionnelles, d'études, de nécessité de traitement ou d'assistance, pour des raisons familiales, pour le tourisme ou le culte. En vertu de la loi no 22 du 24 février 2000, les autorités de police peuvent également ordonner à un étranger sans permis de résidence ou de séjour de quitter le pays immédiatement ou dans un laps de temps raisonnable si des raisons de prévention de délinquance, de sécurité ou d'ordre public l'exigent. Une telle mesure peut faire l'objet d'un appel dans les dix jours devant le juge des appels administratifs. Il faut également noter que, en vertu de la loi no 79 du 16 juin 2004, l'expatriation est soumise à la délivrance d'un passeport par les capitaines-régents et le Secrétaire d'État aux affaires étrangères pour les citoyens et les résidents apatrides.
À Saint-Marin, la procédure civile se fonde sur des textes législatifs et sur les lois coutumières. S'agissant de l'application du principe ne bis in idem en matière pénale, le rapport relève que la République de Saint-Marin a ratifié la Convention européenne sur la valeur internationale des jugements répressifs. La loi no 29 du 10 septembre 1973, qui accorde aux femmes (dont le droit de vote a été reconnu par la loi no 17 du 29 avril 1959) les mêmes droits qu'aux hommes, a supprimé toutes les restrictions empêchant les femmes d'accéder aux charges et emplois publics. Le rapport indique encore que Saint-Marin n'est pas touché par le problème de la discrimination raciale car il n'y a pratiquement pas de minorités ethniques vivant sur le territoire.
Renseignements complémentaires
La délégation a apporté des renseignements complémentaires en réponse aux questions qui lui avaient été adressées au préalable par le Comité (CCPR/C/SMR/Q/2 - des réponses écrites fournies par Saint-Marin figurent en outre au document CCPR/C/SMR/Q/2/Add.2).
S'agissant de la place du Pacte et du Protocole facultatif dans la législation de Saint-Marin, la délégation a expliqué que, suite à une loi de 2002, la Constitution de Saint-Marin reconnaît comme faisant partie intégrante de son ordre juridique les dispositions des pactes et conventions internationaux auxquels Saint-Marin est partie. Dans la Constitution, il est également établi que les accords internationaux prévalent, s'il y a conflit, sur les lois internes. En incorporant ces dispositions dans son cadre législatif, Saint-Marin a accepté plusieurs principes qui sont, en quelque sorte, devenus des lois ordinaires. Non seulement les lois ont mis en œuvre la plus grande partie des principes internationaux – c'est notamment le cas de la loi sur la répression de la violence contre les femmes ou de la loi sur le procès équitable - mais elles déterminent également les modalités d'application des procédures, a précisé la délégation.
La délégation a ensuite expliqué que le rôle d'ombudsman est tenu par les chefs de l'État, c'est-à-dire les capitaines-régents. C'est une institution de droit romain, a expliqué la délégation, qui trouve son origine dans les institutions médiévales. Ce rôle continue à être détenu selon une disposition coutumière. Cette pratique a toutefois été institutionnalisée par une loi de 2005 qui prévoit la possibilité pour l'ensemble de la population de présenter ses doléances aux capitaines-régents qui évaluent le bien-fondé des demandes et interviennent auprès des organes qui se sont rendus responsables d'une éventuelle violation. Cette intervention est de poids et c'est la forme de protection la plus puissante que l'on puisse garantir à Saint-Marin, a assuré la délégation.
À Saint-Marin, deux dispositions sont prévues pour combattre le terrorisme, le blanchiment de produits illicites et les délits d'initiés, a expliqué la délégation; la loi 28 de février 2004 et la loi de juin 2008 visant à prévenir et à réprimer le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Ces dispositions se bornent toutefois à lutter contre les mécanismes de financement du terrorisme. La délégation a insisté sur le fait que ces dispositions ne limitent en aucun cas les droits civils et politiques. En réponse à un expert qui s'est étonné que la loi sur le terrorisme semble protéger celle ou celui qui agit pour protéger sa famille, la délégation a expliqué que l'alinéa en question ne se réfère pas au cas où le conjoint aide le coupable à perpétrer le délit. Dans le même esprit, comme dans d'autres législations, le conjoint n'est pas obligé de témoigner contre son conjoint.
En matière de lutte contre la discrimination et pour l'égalité entre les sexes, la délégation a souligné que législation saint-marinaise affirme l'égalité de tous les citoyens et interdit toute discrimination fondée sur le sexe. Des dispositions récentes ont également été prises pour éviter les comportements discriminatoires sur la base de l'orientation sexuelle, a indiqué la délégation. La loi du 20 juin 2008 comporte des mesures spécifiques de lutte contre la violence à l'égard des femmes. L'interdiction de ces comportements discriminatoires sont aussi prohibés par le biais des instruments internationaux ratifiés par Saint-Marin qui, a rappelé la délégation, prévalent en cas de conflit avec la législation nationale.
S'agissant des mesures prises pour garantir le principe de non-discrimination des personnes handicapées, la délégation s'est référée au Plan sanitaire de 2006-2008 dont les objectifs vont dans le sens de la protection des personnes handicapées et contient des dispositions pour la protection des femmes, des mères et des enfants. À Saint-Marin, a précisé la délégation, les interruptions de grossesse peuvent avoir lieu si elles visent à protéger la vie de la mère; l'avortement n'est pas punissable s'il est motivé par la nécessité de protéger la personne d'une atteinte à son intégrité physique.
Répondant aux questions du Comité sur le droit à la liberté et à la sécurité de la personne et au droit à un procès équitable, la délégation a informé le Comité que la réforme du code de procédure pénale était en cours. Une nouvelle loi a été adoptée dans l'intervalle sur la question des procès équitables, qui vise à corriger certains dysfonctionnements, car jusqu'à peu, le juge était l'arbitre de toute situation, a expliqué la délégation. La nouvelle loi devra, notamment, rendre obligatoire l'enregistrement de l'accusation, garantir le caractère confidentiel de l'enquête et définira une date butoir pour conclure l'enquête. La délégation a indiqué que c'est le législateur qui décidera quand cette nouvelle loi sera en vigueur et définira donc le rôle du Procuratore del Fisco. Le droit à un avocat est accordé immédiatement et il n'y a pas de limite dans le temps à la présence d'un avocat, a ajouté la délégation.
S'agissant des mesures relatives à l'aide juridictionnelle, la délégation a souligné que cette possibilité est consacrée par la loi sur l'aide juridictionnelle du 20 décembre 1984. Si les conditions sont réunies, quiconque peut, en vertu de cette loi, prétendre à un soutien juridictionnel gratuit. La délégation a précisé que les victimes de violence ont le droit d'être défendues par un avocat même s'il n'y a aucun élément qui justifie l'aide juridictionnelle.
Répondant aux questions des experts sur la procédure de l'écoute téléphonique, la délégation a déclaré que la Constitution de Saint-Marin garantit le droit à la confidentialité des informations. En vertu de la loi pour la répression de l'exploitation sexuelle des mineurs et de la loi contre le terrorisme, les écoutes téléphoniques peuvent toutefois être autorisées dans certaines situations. C'est le cas également dans le cadre des dispositions pour combattre le terrorisme, le blanchiment de produits illicites et les délits d'initiés. Une législation particulière concernant les écoutes téléphoniques est encore en voie d'élaboration, a précisé la délégation. Ce projet de loi tiendra compte à la fois de la nécessité d'efficacité de cette mesure et de la nécessité de protéger l'intimité du citoyen.
Observations et questions complémentaires des membres du Comité
Des membres du Comité, rappelant que Saint-Marin s'est présenté pour la dernière fois devant lui en 1990, a tenu à souligner le rôle démocratique important joué par Saint-Marin et le fait que le pays a été terre d'asile pour de nombreux persécutés. Ils se sont réjouis de la reprise du dialogue avec le Comité, mais ont regretté que le rapport se focalise sur les dispositions législatives et ne rend pas compte des mesures concrètes qui ont été prises pour appliquer les dispositions du Pacte.
Dans quelle mesure, a souhaité savoir un expert, les juges et les avocats sont-ils informés des dispositions du Pacte relatif aux droits civils et politiques et, plus largement, comment le Pacte est-il porté à la connaissance des citoyens ? Il a aussi souhaité connaître la chronologie relative à la création du bureau du médiateur, quand ce bureau sera-t-il établi, a-t-il demandé, en soulignant la nécessité que cet organe soit conforme aux dispositions des principes de Paris concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection et la promotion des droits de l'homme. S'agissant du rôle joué par les capitaines-régents pour traiter les doléances des citoyens, s'il s'agit effectivement d'un mécanisme souple et efficace, il présente toutefois un problème quant à son indépendance. Par ailleurs, il s'agit, de fait, d'une voie de recours pour les citoyens et les résidents et non pas pour toutes les personnes sous la juridiction de l'État partie comme cela devrait être le cas.
Un membre du Comité a relevé que la législation de Saint-Marin ne mentionne pas les motifs de discrimination, ce qui ne permet pas de garantir que la loi sera appliquée de manière égale. Il est indispensable d'établir un véritable cadre, a recommandé l'expert. Y a-t-il des cas précis de procès invoquant la discrimination fondée sur la race, le sexe ou motif de discrimination?
Des membres du Comité ont relevé que 16% des personnes vivant sur le territoire ne sont pas des citoyens saint-marinais et proviennent de diverses régions du monde. La délégation peut-elle en dire plus sur cette immigration ? Quel est le statut des personnes qui résident sur le territoire ? Y a-t-il des Roms sur le territoire de Saint-Marin et, dans ce cas, l'État applique-t-il des mesures de contrôle à l'égard de ces personnes.
S'agissant de la diffusion de l'information relative au Pacte, un membre du Comité a suggéré que l'État partie réfléchisse à la possibilité d'élaborer un plan de sensibilisation aux dispositions du Pacte et envisage d'organiser un débat public sur le rapport et sur les observations finales du Comité.
Des membres du Comité ont relevé avec étonnement que Saint-Marin est le seul pays pour lequel le Comité ne dispose d'aucune information en provenance d'organisations non gouvernementales. Y a-t-il des organisations non gouvernementales à Saint-Marin et l'État partie compte-t-il encourager la création de telles organisations.
Notant que les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme se focalisent sur le financement du terrorisme, un expert s'est étonné de ce que Saint-Marin n'a toujours pas ratifié certaines conventions internationales de lutte contre le terrorisme comme la Convention sur le droit de la mer (piraterie) ou la Convention de 1971 pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile. Saint-Marin prévoit-il de ratifier ces conventions ? Y a-t-il eu des arrestations, dans le cadre de l'application de la nouvelle loi de lutte contre le terrorisme ?
Prenant note qu'aucun cas de plainte pour mauvais traitement par les forces de police n'avait été enregistré, le Comité a souhaité savoir ce qui expliquait ce phénomène positif.
Une experte s'est interrogée sur la différence entre les récentes dispositions relatives à la violence familiale et l'ancienne législation. Elle a relevé que 13 affaires ont été traitées à Saint-Marin et 2 ont abouti à une procédure juridique. Quelles mesures précises l'État partie a-t-il mises en place pour lutter contre les violences à l'égard des femmes ? Y a-t-il des foyers d'accueil, une formation de la police est-elle dispensée à ce sujet ?
Existe-il des différences entre les enfants dont les deux parents sont naturalisés et les enfants qui ont un parent de nationalité étrangère a encore demandé l'experte.
Un membre du Comité a estimé que les lois récentes assouplissant l'interdiction des écoutes téléphoniques ne sont pas conformes au Pacte. L'État partie compte-t-il par conséquent y apporter des modifications?
Un membre du Comité a relevé avec étonnement que la nationalité saint-marinaise ne peut s'obtenir qu'après 30 ans de résidence. Qu'est-ce qui explique ce délai particulièrement long ? Quels critères fondent la décision d'octroi de la nationalité ?
Le Comité a souhaité en savoir plus sur le rôle des femmes dans le secteur privé. Quelle est la proportion des femmes actives à Saint-Marin ?
Une experte a aussi voulu savoir comment Saint-Marin considère l'évolution de la biotechnologie dans le cadre de ses engagements pour le droit à la vie.
Une experte, notant que le Comité européen pour la prévention de la torture avait mis en évidence qu'il n'y avait pas, à Saint-Marin, de règles concernant les sanctions appliquées aux prisonniers et apparemment pas de possibilité de recours, a souhaité savoir ce qu'il en est aujourd'hui. Elle a aussi demandé des informations sur le statut de la nouvelle loi en matière de procédure pénale, sur l'accès des détenus à un médecin et sur l'usage d'enregistrements vidéo lors des interrogatoires.
Le Comité a mis en évidence le fait que si la Convention européenne et le Pacte se rejoignent sur beaucoup de points, le Pacte demeure plus détaillé et implique des questions de procédures qui sont différentes comme, par exemple les implications du Protocole facultatif.
Un expert a relevé le fait que beaucoup de personnes en résidence, celles provenant par exemple d'Ukraine ou de Moldavie, sont des femmes. Y a-t-il des problèmes de traite d'êtres humains dans le pays, a demandé l'expert.
Réponses de la délégation aux questions complémentaires du Comité
Répondant à des questions complémentaires des experts, la délégation a tout d'abord fait remarquer, s'agissant des observations du Comité sur la nature essentiellement théorique du rapport et des explications fournies, que, dans un petit État comme Saint-Marin, lorsqu'une loi est promulguée, elle formalise généralement une pratique déjà en vigueur. Le retard pris dans la remise des rapports aux organes conventionnels tient à une raison pratique, a déclaré Saint-Marin qui a expliqué qu'il lui a fallu du temps pour mettre sur pied une structure apte à coordonner les différents secteurs politiques et administratifs en vue de la rédaction des rapports.
Pour ce qui est de la connaissance des dispositions du Pacte de la part de tous ceux qui interviennent dans le secteur du droit, la délégation a indiqué que la diffusion des principes contenus dans le Pacte est assurée par la présence d'une institution juridique qui a précisément pour fonction de faire connaître la législation. Afin de faire connaître aux citoyens les principes à la base des droits de l'homme, plusieurs juges de la Cour européenne des droits de l'homme ont été reçus à Saint-Marin, a précisé la délégation.
Pour ce qui est de l'absence d'organisations non gouvernementales, la délégation a précisé que les ONG à Saint-Marin n'ont pas particulièrement de but humanitaire ou social. La raison en est peut-être que Saint-Marin est un état social qui couvre assez largement les besoins des citoyens pour ne pas rendre urgente la présence d'organisations non gouvernementales œuvrant à la défense des droits de l'homme, a estimé la délégation. Faute d'organisations non gouvernementales à proprement parler, il y a, à Saint-Marin, des associations qui jouent, d'ailleurs, un rôle prééminent puisque l'une d'elle a contribué à la rapide ratification de la Convention internationale pour les droits des personnes handicapées et qu'une autre, par exemple, est à l'origine de la législation en matière de vivisection, qui est l'une des plus avancées qui soient.
Répondant à une question sur les dispositions relatives à la diffamation, la délégation a relevé que le principe de la liberté d'expression n'est jamais un principe absolu, mais un droit qui est limité en regard d'autres droits et devoirs. Elle a par la suite souligné que tous les systèmes prévoient le délit d'insulte ou de diffamation et que toute reconnaissance de liberté trouve une limite là où commence celle de l'autre. La législation indique bien que la liberté d'expression comporte des droits et des devoirs.
La délégation a, par ailleurs, déclaré que le faible niveau de plaintes contre la police était à mettre sur le compte du «haut niveau de civilité» prévalant à Saint-Marin.
En réponse à une question sur la discrimination en matière d'héritage, la délégation a fait la distinction entre les héritiers résidant et les héritiers non résidants. Ces derniers, s'ils héritent d'un bien foncier, ne peuvent pas en garder jouissance, mais reçoivent, sous forme pécuniaire, la somme équivalente à la valeur de ce bien. Ceci est dû au fait que le territoire de Saint-Marin est si restreint.
En réponse à une question sur la procédure de désignation des magistrats, la délégation a indiqué qu'avec la réforme de l'ordre judiciaire, la procédure à ce égard a été modifiée; l'accès à la magistrature se fait désormais par concours, a indiqué la délégation, ajoutant que les citoyens de Saint-Marin, qui étaient autrefois exclus de la magistrature dans un souci d'impartialité, peuvent désormais être magistrats. En ce qui concerne la durée du mandat, les magistrats sont soumis à une période d'épreuve de trois ans avant d'être nommés, sauf les juges de 3e instance qui sont soumis à une période probatoire de cinq ans.
La législation de Saint-Marin établit une distinction entre la résidence et le permis de séjour, a expliqué la délégation. Le permis de séjour est le premier titre qui permet de vivre dans le pays et est généralement lié à un emploi, à des études ou au regroupement familial. Après cinq années, le permis de séjour donne droit à un permis de résidence qui donne accès à tous les droits, sauf au droit de vote. Saint-Marin introduit aussi une distinction entre la nationalité originelle et acquise, selon que les parents sont eux-mêmes saint-marinais ou non.
Répondant à une question des experts sur l'âge minimum d'enrôlement dans l'armée, la délégation a indiqué qu'en cas de mobilisation générale, une disposition exceptionnelle prévoit que tous les hommes de 16 à 60 ans peuvent être mobilisés. Il n'y a pas de service militaire obligatoire dans la République, a indiqué la délégation.
À la question de savoir si Saint-Marin est un paradis fiscal, la délégation a relevé que ce n'était pas le cas, comme en a témoigné l' Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
La délégation a indiqué que 42% de la population de la population active de Saint-Marin est constituée de femmes, a dit une membre de la délégation soulignant que la population féminine jouissait d'un niveau d'éducation très élevé à Saint-Marin.
Répondant à l'observation d'un expert estimant que les capitaines-régents ne constituent pas des ombudsman indépendants, la délégation a précisé que les capitaines-régents ne son pas toujours d'extraction politique et sont un organe supra partes.
S'agissant de la visite du Comité européen de prévention de la torture, la délégation a indiqué que celui-ci est revenu à Saint-Marin en 2005 et a pris acte de toute une série de mesures qui a été introduites à sa demande. La délégation a assuré qu'il n'y avait aucune limite d'accès des détenus à un avocat et à un médecin. La population carcérale de Saint-Marin est très limitée, au point que lors de la dernière visite du Comité de prévention de la torture, la prison était vide, a dit la déclaration.
Réagissant à l'étonnement du Comité par rapport au fait qu'il faut 30 ans pour accéder à la nationalité, la délégation a dit que cette mesure s'imposait au vu de la taille très restreinte du territoire saint-marinais. Toutes les années de résidence de la personne qui demande la nationalité, de même que celles de ses ancêtres, sont inclues dans ces trente ans. La délégation a, par ailleurs, vivement réagi aux allégations quant à l'inhospitalité de Saint-Marin, rappelant notamment la fuite de Garibaldi à Saint-Marin et les quelques 100 000 réfugiés accueillis durant la deuxième guerre mondiale.
S'agissant des questions d'un expert sur les biotechnologies et le droit à la vie, la délégation a répondu que les autorités sanitaires ont élaboré un projet de loi visant à la création d'un Comité de bioéthique chargé d'évaluer l'état des expériences et des recherches pharmaceutiques et médicales. Ce projet de loi devrait être examiné sous peu.
Un membre du Comité ayant demandé qui rémunère l'avocat commis d'office si l'accusé n'en a pas les moyens, la délégation a expliqué que, pour les affaires pénales, l'aide juridictionnelle est assurée par le bais d'avocats officiels, a dit la délégation.
La législation saint-marinaise, pour punir les violences sexistes et en particulier les violences au sein de la famille, est forte et relativement complexe, a déclaré la délégation qui a dit que pour certains délits, il peut y avoir des poursuites d'office et que la nouvelle loi introduit de larges mesures de protection pour les victimes et des mesures de réinsertion.
La délégation a indiqué qu'il n'y avait pas de communauté rom à Saint-Marin, «sans doute parce qu'elle n'y a pas trouvé de conditions propices», a-t-elle ajouté.
Répondant à la question des permis de résidence délivrés à des femmes d'Europe de l'est, la délégation a expliqué que ces personnes bénéficient de permis de séjour temporaires liés à leur emploi auprès de familles saint-marinaises.
Observations préliminaires
Présentant des observations préliminaires sur la mise en œuvre du Pacte à Saint-Marin, le Président du Comité, M. RAFAEL RIVAS POSADA a déclaré que certains points saillants ont attiré l'intérêt du Comité. Il a cité le fait que le poste d'ombudsman, dont la création est prévue depuis longtemps, n'a toujours pas été comblé.
Le Comité, a poursuivi le Président, continuera également à suivre de près l'exigence exagérée de 30 ans de résidence pour l'acquisition de la nationalité à Saint-Marin.
M. Rivas Posada a, finalement, réitéré la préoccupation du Comité s'agissant des dispositions portant sur les étrangers jugés lors de procès civils, insistant sur le fait que même si elles sont obsolètes, ces dispositions existent, et que si elles ne sont pas appliquées, il conviendrait de les abroger.
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