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Communiqués de presse Organe subsidiaire de la Commission des droits de l’homme

DEUX RAPPORTEUSES SPÉCIALES SOULIGNENT QUE LA PUNITION DE PRATIQUES TRADITIONNELLES PEUT ENCOURAGER CERTAINES POPULATIONS À S'ACCROCHER À DES PRATIQUES NOCIVES

17 février 1999




HR/99/13
17 février 1999






La déclaration conjointe suivante a été faite aujourd'hui par deux Rapporteuses spéciales des Nations Unies, Mme Radhika Coomaraswamy, Rapporteuse spéciale de la Commission des droits de l'homme chargée de la question de la violence contre les femmes, et Mme Halima Warzazi, Rapporteuse spéciale sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des fillettes, nommée par la Sous-Commission sur la lutte contre les discriminations et la protection des minorités. Cette déclaration intervient au lendemain la condamnation, par un tribunal français, à huit ans de prison de Mme Hawa Geou, française d'origine malienne, accusée d'avoir excisé une cinquantaine de fillettes.

«La violence à l'égard des femmes est depuis toujours un phénomène caractéristique qui existe dans toutes les parties du monde et se manifeste sous différentes formes, du viol aux sévices corporels en passant par les mutilations génitales féminines. Souvent, ces pratiques sont si courantes et tellement intégrées dans la société que des millions de femmes finissent par accepter voire même perpétuer ces injustices qui sont des violations de leurs droits fondamentaux. La perpétuation de pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et fillettes est un problème universel et multidisciplinaire.

De nombreuses études, déclarations et verdicts rendus, notamment ces dernières années, ont permis d'établir avec force que les principes religieux sont déformés et exploités par ceux qui mutilent les femmes et les maintiennent dans l'ignorance. Aucune religion n'autorise la mutilation d'une partie saine du corps quelle qu'en soit la raison. Il est donc impératif de ne pas mêler la religion à ces pratiques nocives.

Toutefois, il convient de ne pas oublier que les mutilations génitales féminines sont considérées par de nombreuses sociétés comme l'initiation des fillettes permettant leur intégration dans la communauté. Des rites alternatifs doivent être offerts à ces populations. De telles alternatives et initiatives ont commencé à être mises en oeuvre avec succès au sein de nombreuses communautés où les mutilations génitales sont remplacées par l'isolement des fillettes pendant une semaine. Semaine durant laquelle les fillettes reçoivent des éléments d'éducation traditionnelle sur leur rôle futur en tant que femmes. Les deux rapporteurs spéciaux demeurent convaincues que le dialogue patient dans le respect des croyances et des traditions mais aussi avec le souci du respect des droits fondamentaux des femmes et des fillettes peut aboutir à un changement des mentalités.

La punition et la condamnation fondées sur un jugement de valeur peuvent quelquefois se révéler contreproductives et encourager certaines populations à se refermer sur elles-mêmes et à s'accrocher à des pratiques nocives, certes, et le plus souvent clandestines, mais qui n'en demeurent pas moins l'unique expression de leur identité culturelle. La condamnation judiciaire de telles pratiques ne doit se faire qu'en ultime recours lorsque l'éducation, l'information et l'offre de rites alternatifs ne portant pas atteinte à l'intégrité des femmes et des fillettes n'ont pas connu le succès escompté.

Formation, information et éducation, en particulier dans les pays à fort taux d'immigration, avec les moyens matériels et financiers adéquats sont les moyens privilégiés permettant de combattre efficacement des pratiques traditionnelles nocives et de sortir des femmes et des fillettes de l'obscurantisme et de la violence».

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