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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour la protection des droits des travailleurs migrants ouvre les travaux de sa session d'automne

22 novembre 2010

22 novembre 2010

Des représentants d'ONG présentent la situation au Sénégal et en Équateur, deux pays dont les rapports seront examinés cette semaine avec celui de l'Albanie

Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille a ouvert, ce matin, les travaux de sa treizième session, qui se tient au Palais Wilson à Genève jusqu'au 3 décembre prochain. Le Comité a adopté son ordre du jour et son programme de travail et a procédé à l'audition de représentants d'organisations non gouvernementales qui ont présenté la situation prévalant au Sénégal et en Équateur au regard de l'application de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Les rapports de ces deux pays, ainsi que celui de l'Albanie, seront examinés au cours de la présente session.

En début de séance, le responsable ad intérim du Service pour les questions économiques et sociales et du développement au Haut Commissariat aux droits de l'homme, M. Craig Mokhiber a présenté les faits récents intéressant les travaux du Comité, rappelant notamment que le Haut Commissariat aux droits de l'homme a fait de la promotion des droits de l'homme de tous les migrants l'une de ses six priorités thématiques pour la période biennale et que la Haut-Commissaire préside actuellement le Groupe mondial sur la migration, qui a adopté le 30 septembre dernier une déclaration qui fera date concernant la promotion et la protection des droits de l'homme des migrants en situation irrégulière. Cette déclaration rappelle sans équivoque que les normes universelles de droits de l'homme s'appliquent à tous les migrants, quel que soit leur statut d'immigration.

Le représentant du Secrétariat a souligné que «lentement mais progressivement», l'acceptation de la Convention continue de gagner du terrain, même si cette progression n'est pas assez rapide. La Convention compte maintenant 44 États parties, mais seuls deux d'entre eux acceptent la compétence du Comité de recevoir et examiner des plaintes. Au cours de la présente session, outre l'examen des rapports de trois États parties, le Comité doit se pencher sur son premier projet de commentaire général, qui portera sur les travailleurs migrants domestiques. En outre, dans le contexte du vingtième anniversaire de la Convention, le Comité tiendra, le 29 novembre, une journée de débats sur le thème: «Protéger les droits, construire la coopération».

Le Président du Comité, M. Abdelhamid El Jamri, a relevé que la question des droits de l'homme dans le contexte des migrations est de plus en plus débattue à travers le monde et que dans ce contexte, il apparaît clairement que la Convention reste le principal instrument de défense des droits des travailleurs migrants. Parallèlement, pas un jour ne passe sans qu'apparaissent les exactions dont sont victimes les travailleurs migrants. Par ailleurs, les migrants se sentent un peu abandonnés par ceux qui avaient pour habitude de les défendre, notamment par les syndicats et la société civile, a fait observer M. El Jamri.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de l'Albanie (CMW/C/ALB/1).

Déclaration d'ouverture

M. CRAIG MOKHIBER, responsable ad intérim du Service pour les questions économiques et sociales et du développement au Haut Commissariat aux droits de l'homme, a indiqué que beaucoup a été fait ces six derniers mois pour attirer l'attention sur la situation d'une catégorie particulière de migrants, à savoir les migrants en situation irrégulière et sur l'apport positif des migrants dans les sociétés du monde entier. Il a ajouté que la présente session du Comité devrait lui permettre de faire le bilan de sa contribution en ce vingtième anniversaire de la Convention, a-t-il ajouté.

M. Mokhiber a souligné qu'à l'occasion du Sommet sur les objectifs du millénaire pour le développement, en septembre dernier, les présidents des organes créés en vertu d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ont publié une déclaration conjointe dans laquelle ils exhortaient les États Membres à se fonder sur les droits de l'homme lorsqu'ils auraient à finaliser le document final de ce Sommet et lorsqu'ils établiraient des plans d'action au niveau national. S'agissant du renforcement du système des organes conventionnels, M. Mokhiber a rappelé qu'une réunion sur la question rassemblant des experts des organes conventionnels s'était récemment tenue à Poznan; le document final est désormais disponible. Il a en outre indiqué que le Haut Commissariat s'efforce de faciliter une série de consultations impliquant tous les organes conventionnels et que dans ce cadre, une réunion avec le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants est prévue pour le 9 avril 2011; l'objectif de ces consultations est d'identifier des options pour les travaux à venir du système des organes de traités. M. Mokhiber a en outre attiré l'attention sur la vingt-deuxième Réunion des présidents des organes créés en vertu d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme qui s'est tenue à Bruxelles les 1er et 2 juillet dernier, faisant observer qu'il s'agissait de la première réunion de ce type organisée en dehors de Genève, afin de rapprocher les organes conventionnels du niveau de la mise en œuvre et d'accroître la sensibilisation en Europe au sujet du travail desdits organes.

Le représentant du Secrétariat a par ailleurs rappelé que le Haut Commissariat aux droits de l'homme a fait de la promotion des droits de l'homme de tous les migrants l'une de ses six priorités thématiques pour la période biennale. La Haut-Commissaire préside actuellement le Groupe mondial sur la migration, qui rassemble 14 institutions des Nations Unies, l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) et la Banque mondiale. Le 30 septembre dernier, a précisé M. Mokhiber, le Groupe mondial a adopté une déclaration qui fera date concernant la promotion et la protection des droits de l'homme de l'un des groupes les plus vulnérables de migrants, à savoir ceux qui se trouvent en situation irrégulière. Cette déclaration rappelle sans équivoque que les normes universelles de droits de l'homme s'appliquent à tous les migrants, quel que soit leur statut d'immigration.

M. Mokhiber a d'autre part rappelé que le quatrième Forum mondial sur la migration et le développement s'est tenu du 8 au 11 novembre 2010 à Puerto Vallarta, au Mexique. À cette occasion, le Haut Commissariat a organisé un événement parallèle afin de célébrer le vingtième anniversaire de la Convention – événement au cours duquel la Haut-Commissaire a invité tous les états à signer et ratifier cet instrument. Lentement mais progressivement, l'acceptation de la Convention continue de gagner du terrain, même si, du point de vue de beaucoup d'entre nous, cette progression n'est pas assez rapide, a ajouté M. Mokhiber, rappelant que les récentes accessions de la Guyane et de Saint-Vincent-et-les-Grenadines ont porté à 44 le nombre actuel d'États parties. En revanche, a-t-il fait observer, le nombre d'États parties ayant accepté la compétence du Comité pour recevoir des plaintes est resté inchangé, à deux.

S'agissant de la présente session du Comité, M. Mokhiber a rappelé que le Comité allait être amené à examiner les rapports de trois États parties, à savoir l'Albanie, l'Équateur et le Sénégal. Le Comité doit également consacrer un certain nombre de séances à l'examen de son premier projet de commentaire général, qui portera sur les travailleurs migrants domestiques. Dans le contexte du vingtième anniversaire de la Convention, le Comité tiendra une journée de célébration de cet anniversaire, le 29 novembre, sur le thème: «Protéger les droits, construire la coopération». Par ailleurs, le thème retenu cette année pour la célébration de la Journée des droits de l'homme, à savoir mettre un terme à la discrimination, est particulièrement pertinent pour le Comité, a souligné M. Mokhiber, rappelant qu'à maintes occasions, la Haut-Commissaire avait exprimé sa préoccupation face à la montée de l'intolérance, de la xénophobie et du racisme à l'encontre des migrants et de leurs communautés.

Audition d'organisations non gouvernementales

S'agissant du Sénégal

Un représentant de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme (RADDHO) a présenté un rapport alternatif de la société civile sénégalaise qui examine le respect par le Sénégal de ses obligations au regard de la Convention et fournit des informations sur les violations des droits qu'elle énonce pour lesquelles l'État sénégalais peut être tenu pour responsable, en partie ou totalement. Ces violations concernent les travailleurs migrants au Sénégal et les citoyens sénégalais en dehors du Sénégal, mais aussi les personnes qui se trouvent en transit au Sénégal durant une tentative de migration, a-t-il souligné. La loi de 2005 relative à la lutte contre la traite de personnes et les pratiques assimilées a rendu l'immigration clandestine illégale, y compris la tentative. Le rapport alternatif insiste sur la responsabilité du Gouvernement sénégalais pour ces violations lorsqu'elles sont le fait de ses propres agents. Mais il insiste également sur la responsabilité partielle du Gouvernement pour les violations qui se produisent en dehors des frontières du Sénégal à l'encontre de citoyens sénégalais résidant à l'étranger; en effet, le Gouvernement sénégalais n'accorde pas à ces derniers l'assistance consulaire pourtant requise par la Convention. De plus, il collabore activement aux politiques européennes qui entraînent des violations de droits, comme le montre la pratique par laquelle le Sénégal signe des accords de réadmission et facilite les expulsions en délivrant des titres d'expulsion au lieu de défendre ses ressortissants contre des expulsions arbitraires ou collectives.

S'agissant de ce dernier point, un membre du Comité a souhaité savoir en quoi consistent les titres d'expulsions qui ont été mentionnés. Quelle est la place de la Convention dans l'ordre juridique interne du Sénégal, a également demandé l'expert? Un autre membre du Comité a souhaité en savoir davantage au sujet de la loi de 2005 relative à la lutte contre la traite de personnes et les pratiques assimilées.

Le représentant de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme a indiqué qu'au Sénégal, le terme de clandestin est devenu, dans une certaine mesure, valorisant pour les jeunes qui décident de partir, car cela veut dire qu'ils ont le courage de prendre les risques associés à leur émigration. Il a par ailleurs expliqué que la publication (par le Sénégal en tant qu'État d'origine) d'un titre d'expulsion signifie l'acceptation implicite de l'État d'origine qui collabore ainsi à l'expulsion de ses propres ressortissants se trouvant dans un pays tiers. Par ailleurs, les conventions internationales prévalent sur les dispositions du droit interne. Enfin, le principal problème pour ce qui est de la loi de 2005 sur la lutte contre la traite de personnes procède du fait qu'elle a été élaborée sans consultation avec les partenaires de la société civile.

Un autre représentant de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme a indiqué que l'Espagne avait accordé des visas à des travailleurs sénégalais afin qu'ils travaillent dans des plantations agricoles. Or, la plupart de ces travailleurs, qui ont déjà rencontré des difficultés d'intégration dans le pays d'accueil, se retrouvent dans une situation irrégulière au terme de leur contrat car leurs employeurs refusent de les renouveler et de leur permettre d'obtenir une prolongation de leur autorisation de séjour.

Un représentant de International Catholic Migration Commission a lui aussi attiré l'attention sur la pratique de plus en plus répandue des accords de réadmission conclus au niveau bilatéral entre pays d'origine et pays de destination des migrations. Les modalités de ces accords doivent être conformes aux obligations qui incombent aux États en vertu de la Convention, a souligné ce représentant.

S'agissant de l'Équateur

Un représentant de la Coalition pour les migrations et les réfugiés de l'Équateur a indiqué que son organisation avait établi, en 2007, un premier rapport alternatif sur la mise en œuvre de la Convention en Équateur et présente aujourd'hui un second rapport alternatif. Il y a environ trois millions de ressortissants équatoriens dans des pays tiers, en particulier en Espagne, en Italie et aux États-Unis, a-t-il précisé. L'Équateur compte en outre un certain nombre d'immigrants en provenance de pays limitrophes, en particulier de la Colombie et du Pérou, même si les flux se sont diversifiés ces derniers temps puisque le pays compte également un certain nombre de ressortissants cubains – 7000 à ce jour.

La Constitution équatorienne reconnaît le principe de non-refoulement, que la personne soit reconnue ou non comme réfugiée, a par ailleurs relevé le représentant. Mais il n'en demeure pas moins que dans la pratique, au niveau des règlements secondaires – c'est-à-dire des lois nationales applicables, dont certaines remontent aux années 70 – la législation mise en œuvre ne respecte pas les dispositions constitutionnelles. De ce fait, ces dernières années, il y a par exemple eu dans le pays bon nombre de détentions arbitraires dans le contexte des migrations. Par ailleurs, sont fortement préoccupants les contrôles sévères de l'immigration dont font l'objet les personnes d'origine colombienne et cubaine, en particulier dans les trois principales villes du pays.

Un membre du Comité a relevé que l'Équateur est désormais non seulement un pays d'origine, mais aussi un pays de destination des migrations. Dans ce contexte, existe-t-il dans ce pays des projets pour faire en sorte que les centres de détention pour immigrants offrent un certain nombre de services sociaux de base?

Nombre de textes juridiques en Équateur semblent obsolètes ou caducs, a relevé un autre expert, qui a voulu connaître les éventuelles contradictions entre les textes existants en droit interne et les dispositions de la Convention.

Le représentant de la Coalition pour les migrations et les réfugiés a rappelé qu'en 2008, l'Équateur avait éliminé les visas d'entrée pour toutes les personnes entrant dans le pays, quelle que soit leur nationalité. À l'origine, cette abolition des visas d'entrée répondait à des visées liées au tourisme; mais les autorités n'avaient pas prévu toutes les conséquences d'une telle mesure, si bien qu'il y a quelques mois, le visa a été réintroduit pour 14 pays africains et asiatiques, ce qui est incontestablement discriminatoire.

On estimait en 2008 à 5000 le nombre de Colombiens se trouvant en situation clandestine en Équateur, a poursuivi le représentant. Il a fait état d'une xénophobie croissante en Équateur, encouragée par les médias qui s'efforcent de lier les étrangers à la hausse de la délinquance, alors même que le défenseur du peuple a prouvé, statistiques à l'appui, que ce lien était erroné. Il y a des dispositions juridiques très concrètes qui ne semblent pas conformes à la Convention, a poursuivi le représentant, qui a notamment souligné que la loi sur l'immigration prévoit des restrictions à l'entrée dans le pays pour les personnes atteintes de maladies chroniques graves telles que la tuberculose et le VIH/sida. En outre, les personnes refoulées qui reviennent dans le pays sont criminalisées: elles sont passibles de trois mois à six ans d'emprisonnement. Nombre de lois sont orientées vers l'exclusion (de l'immigration) plutôt que vers l'exercice de droits, a insisté l'intervenant.

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