Communiqués de presse Haut-Commissariat aux droits de l’homme
Navi Pillay très inquiète après la condamnation à mort de 152 paramilitaires au Bangladesh
Peine de mort au Bangladesh
06 novembre 2013
GENEVE (6 novembre 2013) – La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Navi Pillay, a fait part, mercredi, de sa très vive préoccupation après la condamnation à mort de 152 paramilitaires au Bangladesh, condamnations prononcées au terme de procès collectifs ne satisfaisant pas aux normes internationales relatives aux droits de l’homme.
Les agents des gardes frontière du Bangladesh (précédemment connus sous le nom de Bangladesh Rifles Border Guards) ont été reconnus coupables de crimes, dont ceux de meurtres et d’agressions sexuelles lors d’une mutinerie survenue à Dhaka en février 2009. Lors de cette mutinerie, 74 personnes, dont des officiers de l’armée, furent brutalement tués et leurs corps jetés dans des fossés. Les épouses de certains officiers de l’armée furent aussi victimes d’abus sexuels.
Hier, une cour spéciale établie au Bangladesh pour juger ces crimes a condamné 152 personnes à mort et 161 personnes à la perpétuité.
Des rapports indiquent qu’un certain nombre de suspects détenus pour leur rôle supposé dans la mutinerie sont morts en détention. Des allégations d’abus et de torture généralisés de détenus et d’obtention de preuves sous la torture auraient été jugés recevables par la cour lors de procès collectifs de centaines d’accusés.
« Les crimes commis lors de la mutinerie sont hautement répréhensibles et haineux, et ma sympathie va aux familles endeuillées, mais justice ne sera pas faite en menant des procès collectifs de centaines d’individus, en torturant les suspects en détention et en les condamnant à mort après des procès ne respectant pas les normes de procédure équitable les plus élémentaires », a déclaré la Haut-Commissaire.
« Les auteurs de ces crimes doivent rendre des comptes d’une manière conforme aux lois du Bangladesh et aux obligations internationales de ce pays, y compris celles relatives à l’équité des procès. Ces normes ont été établies par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques que le Bangladesh a ratifié en 2000. Le procès de ces 847 suspects a été truffé d’irrégularités de procédure, y compris l’absence d’accès à un avocat de manière adéquate et en temps opportun. »
La Haut-Commissaire a réclamé une enquête indépendante et approfondie sur les allégations d’abus des droits de l’homme, en particulier celles relatives à des tortures et des morts en détention ayant eu lieu après la mutinerie. « Les résultats de cette enquête devraient être rendus publics et les coupables devraient répondre de leurs actes », a-t-elle déclaré, tout en soulignant que le Bangladesh ayant ratifié la Convention des Nations Unies contre la torture avait l’obligation de prendre des mesures efficaces d’ordre législatif, administratif, judicaire ou autre pour prévenir les cas de torture sur tout territoire relevant de sa juridiction.
« La condamnation et le prononcé de la peine de chacun des suspects doivent être étudiés au cas par cas et aucune preuve obtenue sous la torture ne doit être jugée recevable par une cour », a ajouté Navi Pillay.
La Haut-Commissaire a également fait part de sa préoccupation face à la conduite des travaux du Tribunal international des crimes (TIC) établi en 2010 par le Gouvernement bangladais pour juger les citoyens accusés d’avoir commis des atrocités pendant la guerre d’indépendance survenue en 1971 dans le pays.
« Le TIC devrait constituer un moyen très important pour lutter contre l’impunité relative aux atrocités massives commises en 1971 et pour apporter réparation aux victimes, dont le chemin vers la justice a été long et épineux », a déclaré Navi Pillay. « Mais il est important que ses travaux respectent les standards les plus élevés si ils sont destinés à renforcer l’état de droit au Bangladesh et à lutter contre l’impunité dans toute la région. »
A ce jour, le tribunal a condamné 10 personnes, dont sept à la peine capitale.
La Haut-Commissaire a exhorté le Gouvernement bangladais à ne pas procéder aux exécutions dans les cas jugés par le tribunal, particulièrement en raison des réserves sur la nature équitable des procès.
Les Nations unies sont opposées à l’application de la peine de mort en toute circonstance, y compris pour les crimes internationaux les plus graves. La Cour pénale internationale - dont le Bangladesh est un Etat membre – et les autres tribunaux pénaux internationaux excluent tous la peine de mort pour les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et de génocide.
FIN
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