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Le Comité des droits de l'homme examine le rapport de l'Irlande
15 juillet 2014
Comité des droits de l'homme
15 juillet 2014
Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport de l'Irlande sur la mise en œuvre par ce pays des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Présentant ce rapport, la Ministre de la justice et de l'égalité de l'Irlande, Mme Frances Fitzerald, a notamment indiqué que la réforme des mécanismes de surveillance et de reddition de comptes de la police constituait une priorité majeure pour le pays.
Depuis l'examen du précédent rapport du pays, des progrès ont été accomplis, notamment aux fins du rétablissement de la confiance dans les services de police irlandais, avec la future création d'une nouvelle Autorité de la Garda Siochàna, a fait valoir la Ministre. En outre, le Parlement vient juste d'achever son débat sur le projet de loi relatif à la Commission pour les droits de l'homme et l'égalité et des jalons ont aussi été posés quant à l'accès légal à une interruption volontaire de grossesses dans le cadre du Protection of Life During Pregnancy Act de 2013. Evoquant par ailleurs la situation des survivantes de la symphysiotomie, Mme Fitzerald a fait valoir que les victimes bénéficient désormais de réparations sous forme pécuniaire et de prestations de services sociaux et médicaux.
La délégation irlandaise était également constituée, entre autres, de Mme Patricia O'Brien, Représentante permanente de l'Irlande auprès des Nations Unies, ainsi que de représentants du Ministère de la justice et de l'égalité; du Ministère des affaires étrangères et du commerce; du Ministère de la santé; et du cabinet du Procureur général. Elle a répondu aux questions qui lui étaient posées s'agissant, entre autres, de la non-applicabilité directe du Pacte; des réserves émises par l'Irlande à l'égard de la Convention; de la réglementation afférente aux entreprises qui exercent une activité à l'étranger; de la situation des femmes, des personnes handicapées, des gens du voyage, des migrants et des transgenres; de la violence familiale et des châtiments corporels; de la question des laveries des sœurs Marie-Madeleine; de la symphysiotomie; de l'interruption volontaire de grossesse; de l'emprisonnement pour dettes; du Tribunal pénal spécial; des conditions carcérales; de la santé mentale; ou encore de la liberté de religion.
Concluant le dialogue, le Président du Comité, M. Nigel Rodley, a salué les améliorations multiples apportées au Code de procédure pénale, concernant notamment les conditions carcérales. Evoquant les abus commis dans les laveries des sœurs Marie-Madeleine et les affaires de maltraitance des enfants, M. Rodley a affirmé qu'ils sont certainement liés à l'idéologie d'un système qui était en place et a dominé l'Irlande. Certains membres du Comité ont exprimé leur inquiétude au sujet du droit de la mère à choisir quand elle veut avoir un enfant, a rappelé le Président de cet organe, avant de prier l'Irlande de refléter une idéologie plus moderne à cet égard. Evoquant par ailleurs la symphysiotomie, il a souligné que l'Etat irlandais devra encore examiner ce qu'il faut faire pour assumer ses responsabilités.
Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, des observations finales concernant tous les rapports présentés au cours de la session, qui seront rendues publiques à la clôture des travaux, le 25 juillet prochain.
A 15 heures cet après-midi, le Comité débutera, en salle XX du Palais des Nations, l'examen du sixième rapport du Japon (CCPR/C/JPN/6)) qu'il achèvera demain en fin de matinée.
Présentation du rapport de l'Irlande
MME PATRICIA O'BRIEN, Représentante permanente de l'Irlande auprès des Nations Unies, a souligné que l'interaction avec les membres du Comité était extrêmement importante car les organes de traités sont la colonne vertébrale du système des droits de l'homme. Elle a aussi indiqué que la chef de la délégation irlandaise (Mme Fitzerald) était vigoureusement engagée en faveur de la cause des droits de l'homme.
Présentant le rapport de son pays (CCPR/C/IRL/4), MME FRANCES FITZERALD, Ministre de la justice et de l'égalité de l'Irlande, a indiqué qu'en tant que membre du Conseil des droits de l'homme, son pays comprenait parfaitement l'importance du travail du Comité des droits de l'homme. Elle a attiré l'attention sur le rôle clef joué par l'Irlande dans le processus intergouvernemental visant au renforcement des organes conventionnels, qui a abouti à l'octroi de davantage de ressources et aidé à garantir l'intégrité et l'indépendance de ces organes.
La Ministre a fait valoir que le processus d'élaboration du rapport a été transparent et consultatif; saluant le militantisme des organisations de la société civile, ainsi que leurs rapports, elle a souligné que des auditions publiques avaient été organisées par le Comité de consultation parlementaire publique Seanad. Souhaitant mettre à jour les réponses que son pays avait transmises au Comité en février dernier, Mme Fitzerald a précisé qu'elle était entrée en fonction il y a à peine plus de deux mois et a souligné que la réforme des mécanismes de surveillance et de reddition de comptes de la police constitue une priorité majeure. Des progrès ont été accomplis grâce au paquet de mesures pris en faveur du rétablissement de la confiance dans les services de police irlandais, a-t-elle insisté. Ainsi, le Gouvernement a-t-il décidé de créer une nouvelle Autorité Garda Siochàna.
Le projet de loi sur la Commission pour les droits de l'homme et l'égalité est sur le point d'être achevé, le Parlement ayant terminé son débat vendredi dernier et le projet étant désormais soumis à la signature du Président de la République, a poursuivi la Ministre de la justice et de l'égalité.
Des jalons ont aussi été récemment posés quant à l'accès légal à une interruption volontaire de grossesse dans le cadre du Protection of Life During Pregnancy Act de 2013, a par ailleurs indiqué Mme Fitzerald. Un document d'orientation des professionnels de la santé concernant l'application de cette loi a été préparé et sera publié sous peu, a-t-elle précisé. L'avortement a été une question très politisée qui a divisé la société durant bien des années et plusieurs référendums constitutionnels ont été organisés à ce sujet, autour de la question du droit du fœtus à la vie et de la portée de ce droit, a-t-elle rappelé. D'autre part, la problématique de l'avortement s'est invitée lors de la ratification du Traité de Maastricht et du Traité de Lisbonne car le Gouvernement irlandais, par la voie de référendums, a cherché à avoir des garanties pour respecter les vues nuancées de l'électorat sur cette question d'ordre profondément moral, a-t-elle expliqué.
S'agissant de la «terrible situation des survivants de la symphysiotomie», a poursuivi Mme Fitzerald, le Gouvernement a décidé d'un programme ex gratia offrant une solution souple et mixte (pécuniaire et non pécuniaire) du fait qu'un grand nombre des survivantes sont âgées de 75 à 91 ans. Ces femmes bénéficient également de services médicaux, de thérapeutes et physiothérapeutes et de services à domicile, ainsi que des prestations sociales, a précisé la Ministre.
Mme Fitzerald a aussi décrit le processus de révision de la section 37 de la Loi sur l'égalité des chances devant l'emploi – Loi qui, en l'état, autorise des discriminations dans le cadre des institutions appartenant à des groupes religieux aux fins de la protection de leur éthique religieuse, ce qui, dans certains cas, a des effets préjudiciables, notamment sur les enseignants LGBT.
La Ministre de la justice et de l'égalité de l'Irlande a ensuite fait part de la décision de son Gouvernement d'élaborer un plan national d'application des Principes directeurs sur les entreprises et les droits de l'homme. Elle a en outre fait valoir que le Gouvernement irlandais avait admis la nécessité d'amender le langage de l'article 41.2 de la Constitution traitant du rôle des femmes au foyer et organisera donc un référendum à ce sujet dans les meilleurs délais. Mme Fitzerald a également fait état d'une réforme concernant la protection de l'enfant dans les cas d'intimidation ou de violence entre les parents, qu'ils soient mariés, concubins ou du même sexe.
Concernant l'implication de l'Etat dans les violences commises dans les laveries des sœurs de Marie-Madeleine, Mme Fitzerald a indiqué que le rapport McAleese, publié, le 5 février 2013, a été pleinement accepté par le Gouvernement en tant que rapport «objectif, avec une position factuelle, préparé sous la supervision d'un président indépendant». Le 19 février dernier, le Taoiseach (Chef du Gouvernement) a présenté des excuses devant le Dàil Eireann (Parlement), a ajouté la Ministre. Certaines laveuses (de Marie-Madeleine, du Centre de formation St Mary, de Standhope Street…) bénéficient, gracieusement, d'un plan de paiement et le Bureau du Médiateur ouvrira une procédure d'appel indépendante.
Mme Fitzerald a d'autre part indiqué qu'un projet de loi serait promulgué cette année afin de garantir que des personnes ne restent pas en prison seulement pour n'avoir pas été en mesure de s'acquitter d'une amende.
La Ministre a également indiqué que la réforme législative en matière d'asile cherche à introduire une seule procédure d'application et vise à la simplification et à l'élargissement des arrangements existants. Soulignant que 12% de la population est étrangère, elle a indiqué que son Ministère a été chargé, en mars dernier, de diriger l'examen de la stratégie d'intégration de manière à ce que celle-ci promeuve l'inclusion sociale, l'égalité, la diversité et la participation des migrants dans la vie économique, sociale, politique et culturelle de leurs communautés.
Il importe aussi de répondre convenablement aux besoins particuliers des plus désavantagées, en particulier ceux de la communauté rom en Irlande, a poursuivi Mme Fitzerald. Rappelant qu'elle a publié, le 1er juillet, le rapport d'enquête de la Défenseur des enfants (Mme Emily Logan) sur les circonstances entourant l'affaire des deux enfants roms arrachés à leurs familles – affaire qui a conduit à la présentation d'excuses de la part du Taoiseach Enda Kenny – la Ministre a tenu à souligner que le rapport n'a pas révélé que les Gardai (policiers) impliqués avaient été motivés par un «racisme conscient» ni mus par une quelconque pratique de profilage ethnique institutionnalisé.
Examen du rapport
Questions et remarques des membres du Comité
Un membre du Comité a fait remarquer que le Pacte n'a pas été transposé dans la législation interne irlandaise et s'est inquiété de l'impossibilité qui en découle d'invoquer cet instrument. Cet expert s'est en outre enquis des autorisations et autres modalités de fonctionnement auxquelles sont soumises les entreprises privées irlandaises établies à l'étranger, renvoyant à cet égard à l'implication de sociétés privées dans l'organisation de grands événements sportifs, au Qatar par exemple.
Une experte a rappelé la réserve que l'Irlande maintient à l'égard du Pacte concernant la séparation des condamnés et des prévenus dans les centres de détention. Elle a en outre fait observer que, pour ce qui est des violences commises dans les laveries des sœurs de Marie-Madeleine, les réparations se font sur une base gracieuse; ainsi, l'Irlande n'est-elle toujours pas ouverte à l'idée de revoir cette affaire et se contente d'une indemnisation à travers un régime de réparations proposé par le juge John Quirke. Pourquoi le Gouvernement irlandais persiste-t-il dans son refus d'aborder cette affaire de front? Rappelant par ailleurs que le Pacte interdit l'emprisonnement pour dettes, l'experte s'est inquiétée du maintien d'une disposition légale pénalisant le non-paiement des amendes. Soixante-deux personnes seraient détenues pour «comportement subversif» en prison, a poursuivi l'experte, avant de s'enquérir de ce que l'Irlande entend par «groupes séditieux». Elle s'est en outre demandé pourquoi le Tribunal pénal spécial (Special Criminal Court) n'a pas de jury et a fait observer que les procédures de ce type de tribunal ne respectent pas le Pacte.
Un autre membre a souhaité savoir quand serait créée la Commission du Médiateur de la Gàrda Siochàna. Cet expert a également voulu savoir si le rapport final du Groupe de suivi du « Plan de mise en œuvre Ryan » sur la maltraitance des enfants était prêt. Il a aussi pris note des efforts déployés en matière de lutte contre la traite de personnes, mais a relevé que la grande majorité des victimes présumées ne peut bénéficier de la période de réflexion et de récupération – qui est en réalité un moyen de régulariser ou non la présence de la personne sur le territoire.
Un expert a plaidé en faveur de l'adoption de quotas pour l'emploi des femmes et leur participation à la prise de décisions dans les différentes sphères de la vie de la société. Il a aussi préconisé une approche globale afin de modifier le système électoral, ainsi que le lancement d'un programme d'éducation civique à l'école.
Un autre membre du Comité a préconisé la prise de mesures plus efficaces pour la protection des personnes handicapées et leur participation, sur un pied d'égalité, dans tous les domaines. Cet expert a rappelé que le Comité avait réclamé des statistiques sur les plaintes, les poursuites et les condamnations, notamment en ce qui concerne les femmes, les migrantes, les requérantes d'asile, les femmes du voyage, les femmes déplacées et les femmes réfugiées. Cet expert a en outre déploré qu'en vertu de la législation en vigueur en Irlande, la violence familiale ne soit pas incriminée en tant que délit distinct et ne puisse être poursuivie qu'en association avec un autre délit. Les femmes étrangères vivant en union libre doivent bénéficier de l'accès à la protection dans les cas de violence intrafamiliale, a souligné l'expert.
Un expert a souhaité en savoir davantage au sujet des activités et propositions de l'Equipe spéciale chargée d'analyser les réserves au Pacte. Certaines institutions carcérales, notamment celle de Cork, sont dangereusement surpeuplées et les conditions de vie ne répondent pas aux normes internationales, s'est inquiété cet expert. Le projet de modernisation de la prison de Mountjoy se poursuit encore mais la pratique inhumaine du «vidage de la tinette» reste en vigueur, a-t-il noté, avant de relever que l'Inspectorat des prisons a déclaré que celle-ci ne serait pas supprimée avant 2016, au plus tôt. Il a aussi demandé que les migrants détenus soient séparés des condamnés. L'expert s'est ensuite félicité que la loi de 1961 sur l'information, qui prévoyait une peine pour blasphème, ait été abrogée par celle de 2009.
Une experte a déploré que l'Irlande n'ait pas tout à fait appliqué le Pacte dans l'affaire des violations des droits de l'homme commises dans les laveries des sœurs Marie-Madeleine. Cette experte a toutefois pris note de l'ouverture manifestée par la délégation concernant les réserves au Pacte.
Un autre expert a évoqué la question de la prestation de serments religieux au travail. Il a en outre voulu savoir comment l'Irlande envisage d'appliquer le principe d'éducation laïque.
Un autre membre du Comité s'est enquis des conditions d'internement des personnes souffrant de maladies mentales. Cet expert a souhaité en savoir davantage au sujet de la coercition, de la réclusion et de la restriction physique, surtout à l'encontre des enfants et des adolescents en milieu hospitalier. En 2012, seuls 29% des centres hospitaliers respectaient les codes professionnels de conduite et les normes internationales en la matière, s'est-il inquiété. Il s'est également enquis de la capacité juridique des personnes handicapées en termes de consentement pour des traitements spécifiques tels que l'électrochoc. Ce même expert a en outre recommandé à l'Irlande de prendre des mesures visant à reconnaître les gens du voyage en tant que minorité. Les nomades en Irlande, qui représentent environ 36 000 personnes, dont 5000 Roms, doivent être distinctement reconnus dans le contexte d'une pratique ancestrale vitale pour eux. Les gens du voyage n'ont pas accès à un logement convenable; leur espérance de vie est plus faible; leur taux de suicide est plus élevé; et ils ne bénéficient pas de bonnes prestations de services publics, a fait observer l'expert. Il a rappelé que le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale avait recommandé à l'Irlande d'élaborer un Plan d'inclusion des gens du voyage.
Un autre expert a plaidé en faveur d'une reconnaissance des LGBT – et en particulier des transgenres qui sont très exposés aux discriminations.
Réponses de la délégation
Interpelée sur la non-applicabilité directe du Pacte, la délégation – après avoir rappelé que l'Irlande est un pays de tradition dualiste (et non pas moniste) – a fait état d'un projet de la Commission de la réforme du droit de l'Irlande, lancé en 2013, visant à intégrer dans la législation nationale les obligations découlant de tous les traités internationaux.
S'agissant des réserves émises par l'Irlande à l'égard du Pacte, la délégation a indiqué qu'il n'en reste que deux: celle relative au paragraphe premier de l'article 20; et celle relative au paragraphe 2 de l'article 10. Le Gouvernement irlandais n'a pas l'intention de lever ces réserves pour l'instant, a indiqué la délégation. Elle a expliqué que l'Irlande a hérité un système carcéral ancien et, si elle envisage certes de séparer les détenus, elle préfère pour l'instant maintenir sa réserve à ce sujet pour une question d'ordre pratique.
L'exécution du Plan d'action contre le racisme se poursuit et il existe désormais un programme beaucoup plus vaste pour le développement des communautés, a ensuite fait valoir la délégation. Cette année connaîtra un examen global de la législation pour voir comment formuler le délit de propagande et d'incitation à la haine, a-t-elle ajouté.
Tout est fait pour que la nouvelle Autorité de Garda (police) soit mise en place avant la fin de l'année, a souligné la délégation.
Des précautions ont été prises dans l'octroi des licences aux entreprises irlandaises qui exercent des activités à l'étranger, a d'autre part fait valoir la délégation. Toutes les entreprises domiciliées sur le territoire irlandais doivent respecter les droits de l'homme et le meilleur moyen de traiter cette question complexe est d'utiliser les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l'homme, a-t-elle déclaré.
Le Gouvernement a admis la nécessité d'amender l'article 41.2 de la Constitution et garantit que tout nouveau texte devra rester neutre concernant la question des femmes au foyer. L'Equipe spéciale chargée de cette question est consciente des recommandations adressées à l'Irlande à ce sujet par le Comité des droits de l'homme et le Comité pour l'élimination de toutes les formes de discriminations à l'égard des femmes.
Des efforts sont consentis pour atteindre le quota de 40% de femmes dans les postes de prise de décision, a poursuivi la délégation, ajoutant qu'il convient à cet égard de viser spécifiquement les secteurs où les femmes sont sous-représentées.
La délégation a d'autre part indiqué que la législation irlandaise allait être modifiée afin d'être alignée sur la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.
Il faut faire en sorte que la violence familiale devienne plus visible pour dénoncer la situation des hommes et des femmes vulnérables, a par ailleurs souligné la délégation, précisant que les pouvoirs publics avaient mis en place un comité des données opérant au sein de la Garda. La délégation a fait part du désir du Gouvernement irlandais de doter le pays des meilleurs mécanismes qui soient concernant la lutte contre les violences familiales ainsi que de son intention de ratifier la Convention d'Istanbul du Conseil de l'Europe sur la prévention et l'élimination de la violence faite aux femmes.
L'Irlande a connu de longues périodes d'état d'urgence durant lesquelles elle n'a jamais transgressé le Pacte, a d'autre part fait valoir la délégation.
Répondant aux questions sur les violences commises dans les laveries des sœurs Marie-Madeleine, la délégation a réitéré que le rapport présenté s'agissant de cette question avait été entièrement accepté par le Gouvernement. Il y a eu 740 demandes de recours et environ 12,4 millions de livres ont été payées à titre de réparations, a en outre rappelé la délégation.
Une commission d'enquête va être établie sur les foyers (Home); un comité interministériel est en train d'examiner le mandat de cette commission, qui sera indépendante, a ajouté la délégation.
La délégation a déclaré qu'une centaine de cas ont été soumis dans l'affaire du recours à la symphysiotomie. Quelque 1500 femmes ont subi cette intervention, dont 350 sont encore vivantes, a-t-elle précisé, rappelant que l'objectif est d'éviter la césarienne en cas d'obstruction lors de l'accouchement et que la mortalité maternelle était plus faible avec la symphysiotomie. En fait, a poursuivi la délégation, la responsabilité de l'Etat est très difficile à établir dans cette affaire et l'on continue d'offrir un appui aux femmes concernées, grâce à un programme de réparation d'un montant de 32 millions d'euros; cependant, les femmes devront apporter des preuves de ce qu'elles ont subi et souffert en rapport avec cette opération. La solution offerte est juste et permettra de définitivement tourner la page d'une question très grave que le Gouvernement regrette profondément, a affirmé la délégation. Tout en assurant comprendre le terrible traumatisme des femmes qui ont subi la symphysiotomie, elle a tenu à préciser que cette intervention n'était pas effectuée de manière secrète. C'est certes une maigre consolation pour les personnes l'ayant subie, a-t-elle ajouté, rappelant que cette opération a persisté dans l'hôpital religieux Sainte Marie-Madeleine. La délégation a par ailleurs reconnu les conséquences psychologiques et médicales graves pour les femmes victimes. Dans certains cas, a-t-elle ensuite ajouté, la symphysiotomie a été effectuée à l'insu des femmes. Replaçant cette question dans son contexte historique, la délégation a expliqué que le consentement n'avait pas été obtenu dans les situations d'urgence pour la santé de la femme – le médecin ayant opéré dans l'urgence pour sauver la mère et l'enfant.
La loi a évolué concernant l'interruption volontaire de grossesse, a poursuivi la délégation. Un processus démocratique de consultation a été mené à travers plusieurs référendums, ainsi que des consultations approfondies avec les organisations non gouvernementales. Des lignes directrices nationales cliniques ont été adoptées et sont mises en œuvre. C'est la volonté du peuple et l'équilibre entre la vie de la mère et le droit de l'enfant à naître qui demeurent au cœur de cette problématique, a souligné la délégation. Elle a fait état des éclaircissements apportés, dans la loi, sur les «zones grises» concernant l'interruption volontaire de grossesse. Diverses institutions ont obtenu des ressources pour fournir des informations aux femmes enceintes et se trouvant dans une situation difficile. Le nombre de grossesses précoces, non désirées et des interventions faites à l'étranger a diminué, a fait valoir la délégation. L'exigence d'une évaluation de la femme enceinte par trois médecins avant l'IVG demeure de rigueur, a-t-elle précisé.
En 2012, l'Irlande a enregistré 41 personnes victimes présumées de la traite d'êtres humains, dont 17% étaient en fait des demandeurs d'asile, a ensuite indiqué la délégation.
S'agissant de l'emprisonnement pour dettes, l'Irlande est passée ces dernières années de 201 à 21 personnes emprisonnées pour incapacité à payer une amende, a fait valoir la délégation, avant d'ajouter que la question serait examinée plus avant par les autorités.
Le Gouvernement irlandais continue de penser que le Tribunal pénal spécial doit rester de rigueur car des groupes paramilitaires dissidents cherchent toujours à atteindre des objectifs par la violence, a d'autre part indiqué la délégation. L'Irlande a eu plusieurs lois traitant de la lutte contre le terrorisme, depuis 1930 et jusqu'en 2005, ce qui reflète l'histoire et les circonstances particulières de l'Irlande concernant le terrorisme, a-t-elle rappelé. Reste que le pays n'a pas jugé nécessaire de définir le terrorisme mais a préféré alourdir les peines pour des délits commis avec une intention terroriste, dans le contexte des activités des groupes mentionnés, a-t-elle expliqué. Dans tous les cas, il incombe à la direction du ministère public d'indiquer publiquement la raison pour laquelle un individu doit être jugé devant le Tribunal pénal spécial, a souligné la délégation.
S'agissant des détenus et des conditions dans les prisons, la délégation a répondu qu'il y a aujourd'hui 500 détenus de moins qu'il y a deux ans. Neuf millions d'euros ont été investis dans l'installation d'un système d'assainissement et de toilettes dans les cellules de la prison de Mountjoy, a-t-elle fait valoir, avant d'ajouter que des progrès répondant aux objectifs fixés dans d'autres centres pénitentiaires ont été accomplis. Environ 540 personnes se trouvent placées en détention préventive dans les prisons irlandaises, a poursuivi la délégation. La prison de Clover Hill est spécialement aménagée pour différents types de prisonniers. Les mineurs détenus sont placés dans des cellules plus adaptées, a par ailleurs souligné la délégation; ils se trouvent actuellement dans une aile séparée de Clover dans l'attente de la fin des travaux de rénovation de la prison de Cork. Par ailleurs, un arrêt de la Cour suprême a permis d'améliorer les droits des détenus, tout détenu devant désormais se voir informer de son droit à une défense.
L'Irlande accorde une grande priorité à la protection de l'enfance et bon nombre de réformes ont à cet égard été menées ces dernières années, notamment pour éviter les nombreux abus commis par le passé, a poursuivi la délégation. Les efforts ont été axés sur l'interdisciplinarité et sur la création d'une agence pour la protection de l'enfant et de la famille, qui permet d'offrir des services de meilleure qualité. La question générale du châtiment corporel est à l'examen et le législateur prévoit des interdictions et des sanctions très claires pour les auteurs de ce type de châtiment, a par ailleurs indiqué la délégation, avant d'ajouter que l'idée d'instaurer une obligation pour certains corps professionnel de faire rapport (face à ce type de violence) est à l'étude au Parlement. Nombre de familles suivent des cours sur la parentalité et il existe une agence de ressources pour la famille, a en outre souligné la délégation. Une étude menée par l'Institut de recherche sur les questions économiques et sociales a révélé une tendance à la baisse des châtiments corporels ces dernières années, a fait valoir la délégation.
L'usage de l'espace aérien irlandais n'est pas permis à des fins de transfèrement; le Gouvernement appliquera cette interdiction et ne tolère pas cette pratique, notamment à des fins de torture et de mauvais traitements, a d'autre part assuré la délégation. Il n'existe pas de preuves permettant d'étayer les allégations de l'Open Society Institute à cet égard, a-t-elle ajouté, avant de redire qu'aucun aéroport irlandais n'avait été utilisé à des fins de transfèrement.
Un amendement de la loi sur la santé mentale est en cours d'examen, qui vise notamment à instaurer le consentement à l'admission (en soins spécialisés) et à des traitements comme l'électrochoc, a indiqué la délégation.
La délégation a ensuite fait état de la loi sur la protection et la résidence des migrants qui a été promulguée en Irlande et a permis de régler certaines situations. Une réforme administrative du système migratoire est en cours à des fins d'efficacité et de transparence, a-t-elle souligné. La procédure actuelle de plainte n'en est pas moins juste, a-t-elle ajouté; elle a été révisée à deux reprises par un groupe consultatif composé, entre autres, de représentants des ONG, des organismes publics et du bureau de l'Attorney général. D'un autre côté, il n'est pas de la prérogative du Médiateur de traiter des plaintes des migrants. Il n'est pas réaliste, en termes de coût, d'offrir tout ce que les demandeurs d'asile demandent, a déclaré la délégation. Il n'en demeure pas moins qu'ils peuvent bénéficier de services de base tels que le logement et l'accès à l'éducation et à la santé, a-t-elle fait valoir.
Il faut du temps pour parvenir à une loi sur la reconnaissance des personnes transgenres; en effet, il a fallu passer par un processus de consultation parlementaire afin d'identifier les améliorations qu'il convenait d'apporter à la loi en vigueur, a expliqué la délégation. L'organisation qui travaille avec les LGBT œuvre de concert avec les services de police pour la protection des jeunes, a-t-elle par ailleurs indiqué.
S'agissant de la liberté de religion au travail et dans le système éducatif, la délégation a indiqué que de nouvelles écoles primaires non confessionnelles ou multiconfessionnelles devront être construites et a souligné que certaines l'ont déjà été. Il n'y a aucun obstacle à l'établissement d'écoles laïques si les parents en formulent la demande, a insisté la délégation.
Le Gouvernement irlandais a pleinement conscience des appels lancés par les instances internationales en vue de la reconnaissance des gens du voyage en tant que minorité ethnique. En vertu de la Constitution irlandaise, ce groupe a les mêmes droits que les citoyens irlandais et ce, de la même façon que s'il était considéré comme une minorité, a fait valoir la délégation, avant de se dire tout à fait consciente du mode de vie et des besoins spéciaux des gens du voyage. Un Rom est considérée comme un ressortissant européen et ses besoins sont pris en compte conformément à la stratégie se rapportant à cette communauté.
Tous les droits inscrits dans le Pacte sous-tendent la réforme législative irlandaise, a conclu la délégation.
Conclusions
La délégation a mis l'accent sur les nombreux progrès enregistrés par l'Irlande grâce à l'insistance de la communauté internationale et s'est félicitée du travail et de la présence dans la salle de nombreuses organisations non gouvernementales. Elle a salué tous les partenariats instaurés avec la société civile. Le Gouvernement irlandais désire mettre en place les mécanismes les plus efficaces possibles pour les gens du voyage et la communauté rom, a-t-elle ajouté.
M. NIGEL RODLEY, Président du Comité des droits de l'homme, a conclu que l'Irlande est attachée aux droits de l'homme, qui sont toujours présents dans les discours de l'Etat partie devant les instances internationales. Il a rappelé qu'une ancienne Haut-Commissaire aux droits de l'homme était irlandaise (ndlr: Mme Mary Robinson). Il a salué les améliorations multiples apportées au Code de procédure pénale, concernant notamment les conditions carcérales. Evoquant les abus commis dans les laveries des sœurs Marie-Madeleine et les affaires de maltraitance des enfants, M. Rodley a affirmé qu'ils sont certainement liés à l'idéologie d'un système qui était en place et a dominé l'Irlande. Certains membres du Comité ont exprimé leur inquiétude au sujet du droit de la mère à choisir quand elle veut avoir un enfant, a rappelé le Président de cet organe, avant de prier l'Irlande de refléter une idéologie plus moderne à cet égard, à la lumière de l'article 7 du Pacte. La symphysiotomie tombe dans la catégorie des essais médicaux, a-t-il souligné. L'Etat irlandais devra encore examiner ce qu'il faut faire pour assumer ses responsabilités, qu'il s'agisse de sa passivité dans certains cas ou du non-exercice de ses prérogatives dans d'autres, a conclu M. Rodley.
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