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Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes examine le rapport de l'Érythrée
26 février 2015
26 février 2015
Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné, aujourd'hui, le rapport de l'Érythrée sur les mesures adoptées pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.
Le rapport a été présenté par la Présidente de l'Union nationale des femmes érythréennes,
Mme Tekea Tesfamichael, qui a affirmé d'emblée que le Gouvernement de son pays avait la ferme volonté de faire avancer les droits des femmes érythréennes et d'appliquer les dispositions de la Convention. Le Gouvernement a, pour ce faire, révisé l'ensemble des lois et règlements afin d'en expurger les dispositions contraires aux droits des femmes et a notamment adopté une loi interdisant les mutilations génitales féminines. Au plan politique, l'Érythrée applique une approche «de bas en haut», garantissant la participation des femmes au niveau communautaire en vue d'influencer progressivement les prises de décision aux niveaux plus élevés. Le pays a obtenu de bons résultats dans les domaines de la santé et de l'éducation, marqués notamment par la progression du nombre des filles dans les filières d'enseignement technique et commercial. Au nombre des difficultés rencontrées par l'Érythrée dans la concrétisation du principe d'égalité entre les sexes et dans la promotion des droits des femmes, la délégation a cité les normes sociales, la persistance de stéréotypes, l'occupation de ses frontières et les sanctions infligées au pays. Malgré ces obstacles, le Gouvernement de l'Érythrée est fermement déterminé à favoriser l'autonomisation des femmes et à garantir leurs droits en améliorant le cadre législatif national et en intégrant les besoins spécifiques des femmes dans tous les projets de développement.
La délégation était composée de plusieurs autres membres de l'Union nationale des femmes érythréennes, d'un représentant du Ministère des transports et des communications et de membres de la Mission permanente de l'Érythrée auprès des Nations Unies à Genève. Elle a répondu aux questions des experts du Comité s'agissant, entre autres, de la durée du service national obligatoire, de la protection des femmes soldates et des femmes détenues contre la violence sexuelle, des raisons de l'exode massif de citoyens érythréens, de l'efficacité de l'action des pouvoirs publics contre les mutilations génitales féminines, de la protection des droits fonciers des femmes rurales ou encore de la discrimination et de la ségrégation persistantes des femmes dans l'enseignement supérieur.
Les membres du Comité ont relevé l'ampleur du problème de l'expatriation de la jeunesse érythréenne, qui risque de poser des problèmes existentiels au pays. Ils ont voulu savoir comment le gouvernement entendait protéger concrètement les droits des femmes dans ce contexte d'exode. Les experts ont observé également que la conception patriarcale de la propriété foncière empêche encore nombre de femmes rurales de bénéficier de leurs droits économiques fondamentaux et les relègue dans les franges informelles du secteur agricole. Les membres du Comité ont insisté sur la nécessité de prendre des mesures concrètes d'aide à la création d'emplois et d'entreprises pour favoriser l'emploi des femmes et des jeunes. Une experte s'est demandé comment l'Érythrée entendait assurer l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes dans la vie politique et publique en l'absence d'élections nationales et de système de compétition démocratique.
Le Comité rendra publiques en fin de session des observations finales sur les rapports examinés durant cette session, y compris celui de l'Érythrée.
Le Comité examinera demain, à partir de 10 heures, le rapport périodique des Maldives (CEDAW/C/MDV/4-5).
Présentation des rapports de l'Érythrée
Le Comité est saisi de deux rapports périodiques de l'Érythrée (CEDAW/C/ERI/4 et CEDAW/C/ERI/5), ainsi que de ses réponses (CEDAW/C/ERI/Q/5/Add.1) à une liste de points à traiter (CEDAW/C/ERI/Q/5).
MME TEKEA TESFAMICHAEL, Présidente de l'Union nationale des femmes érythréennes, chef de la délégation, a affirmé d'emblée que le Gouvernement de son pays avait la ferme volonté de faire avancer les droits des femmes érythréennes et d'appliquer les dispositions de la Convention. Mme Tesfamichael a indiqué que la préparation des rapports soumis au Comité avait engagé la participation de tous les ministères et autorités locales concernés, le secteur privé, le secteur universitaire, des membres de la société civile ainsi les femmes elles-mêmes, regroupées au sein de l'Union nationale des femmes érythréennes. Créée en 1979, l'Union a reçu en 1995, date de la ratification de la Convention, mandat du Président de la République pour servir de mécanisme de promotion des droits des femmes et de représentation du gouvernement au plan international pour les questions relatives aux droits des femmes. Elle compte actuellement 300 000 membres en Érythrée et au sein de la diaspora.
Parallèlement à ses progrès réalisés en matière socioéconomique, l'Érythrée a accordé une attention particulière aux droits des femmes en vue de consolider leur rôle pour qu'elles puissent jouer un rôle productif dans des conditions d'égalité avec leurs homologues masculins. Le Gouvernement a, pour ce faire, révisé l'ensemble de ses lois et règlements afin d'en supprimer les dispositions contraires aux droits des femmes. Une loi interdisant les mutilations génitales féminines a été promulguée en 2007; le Gouvernement a ratifié, en 2014, tant la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, avec son protocole facultatif concernant la traite des êtres humains, que la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Dans le contexte de l'Érythrée, la prise en compte des besoins spécifiques des femmes dans toutes les activités de l'État est envisagée comme un moyen de garantir l'égalité entre les sexes dans l'intégralité du processus de développement national. À cette fin, l'Union nationale des femmes a adopté un plan d'action national pour intégrer les questions de genre dans les organismes gouvernementaux; les ministères ont chacun désigné une personne de contact pour toutes les questions touchant à l'égalité entre les sexes et aux besoins spécifiques des femmes.
Dans le domaine politique, l'Érythrée applique une approche «de bas en haut», garantissant la participation des femmes au niveau communautaire en vue d'influencer les prises de décision aux niveaux plus élevés. Trente-quatre pourcent des chefs de village sont des femmes, 22,5% des juges communautaires. Au titre des mesures temporaires spéciales, l'Érythrée réserve aux femmes 30% des sièges dans les assemblées élues, un siège sur trois dans chacun des tribunaux locaux et un siège dans toutes les fédérations sportives. La délégation a aussi fait valoir les bons résultats obtenus par son pays dans les domaines de l'éducation, marqués notamment par la progression du nombre des filles dans les filières d'enseignement technique et commercial.
Au nombre des difficultés rencontrées par l'Érythrée dans la concrétisation du principe d'égalité entre les sexes et dans la promotion des droits des femmes, la délégation a cité les normes sociales, la persistance de stéréotypes, l'occupation de ses frontières et les sanctions infligées au pays. Mais, malgré ces obstacles, le Gouvernement de l'Érythrée est fermement déterminé à favoriser l'autonomisation des femmes et à garantir leurs droits en améliorant le cadre législatif national, en sensibilisant la population, en renforçant les capacités et en intégrant les besoins spécifiques des femmes dans tous les projets, politiques et programmes nationaux de développement.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
Une experte a demandé à la délégation des précisions sur la durée du service national obligatoire. Elle a fait état d'informations selon lesquelles les femmes militaires sont soumises aux violences sexuelles commises par leurs supérieurs hiérarchiques masculins. L'experte a voulu savoir combien de ces cas avaient fait l'objet d'enquête et combien de condamnation avaient été prononcées. Ayant à l'esprit les images de femmes-soldates fréquemment associées à l'Érythrée, l'experte a voulu savoir dans quelle mesure ce pays appliquait les dispositions de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité. La délégation a été priée de donner des explications sur le sort des femmes détenues dans les prisons érythréennes, gardées souvent par des hommes et victimes, là aussi, de violences y compris de nature sexuelle. Le Gouvernement est-il disposé à autoriser des observateurs internationaux à visiter ses centres de détention? Enfin, l'experte a constaté un véritable exode de réfugiés depuis l'Érythrée, leur nombre ne le cédant qu'aux réfugiés syriens. L'experte a voulu connaître les raisons de ce phénomène et les mesures prises par le Gouvernement pour protéger sa population.
Une autre experte a voulu savoir comment le Gouvernement entendait protéger concrètement les droits des femmes dans ce contexte d'exode massif. Elle s'est interrogée sur la provenance des statistiques contenues dans le rapport, qui ne coïncident avec les statistiques internationales. Avec d'autres membres du Comité, elle a signalé à ce propos que l'Organisation internationale des migrations avait documenté de manière convaincante l'ampleur du problème de l'expatriation de la jeunesse, qui risque de poser des problèmes existentiels au pays. L'experte a aussi rappelé que le Comité compte beaucoup sur le rôle des Parlements dans la protection des droits des femmes: or, le Parlement érythréen ne s'est pas réuni depuis 2002.
Une experte a reconnu les travaux et les efforts de l'Union nationale des femmes érythréennes, observant cependant que le cadre législatif et réglementaire qu'elle avait contribué à instaurer manque d'un volet proprement exécutoire. L'experte s'est interrogée sur le suivi des recommandations antérieures du Comité relatives au renforcement des compétences exécutives de l'Union nationale des femmes. Elle a aussi observé que besoins des Érythréens avaient beaucoup évolué depuis l'indépendance, comme en témoigne l'exode actuel d'une génération qui n'a pas connu la guerre d'indépendance. De l'avis de l'experte, pour améliorer la prise en compte des besoins des femmes, l'Union devrait envisager de s'ouvrir à toutes les couches de la société pour prendre en compte davantage d'opinions.
Une experte a assuré que le Comité ne préconise pas de solution unique à tous les problèmes; mais il estime cependant que la société civile doit pouvoir remettre en question l'action du Gouvernement. Cela pose la question de l'instauration d'une véritable dynamique entre l'action du Gouvernement, de l'Union nationale des femmes et de la société civile. Une experte a voulu connaître les raisons du refus du Gouvernement de répondre aux demandes de la communauté internationale de créer un mandat de rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Érythrée.
S'agissant des mesures temporaires spéciales, une experte a voulu savoir dans quelles conditions les sièges sont attribués aux femmes: une femme qui ne serait pas membre du parti au pouvoir peut-elle obtenir un siège réservé?
Une experte a souligné que les migrants sont potentiellement vulnérables à la traite des êtres humains. L'Érythrée participe-t-elle aux initiatives régionales concernant l'échange de bonnes pratiques contre ce problème?
Une experte a salué les efforts de l'Érythrée pour éliminer la prostitution et aider ses victimes à s'en extraire. D'autres questions ont porté sur la formation des fonctionnaires chargés de la lutte contre la traite des êtres humains et la prise en charge des victimes, de même que sur les mesures d'aide à la création d'emplois et d'entreprises pour favoriser l'emploi des jeunes.
Une experte s'est demandé comment l'Érythrée entendait appliquer l'article 7 de la Convention (éliminer la discrimination à l'égard des femmes dans la vie politique et publique) en l'absence d'élections nationales et de système de compétition démocratique. La même experte a regretté l'existence d'un véritable «plafond de béton» empêchant les femmes érythréennes d'accéder aux postes à responsabilité.
Une experte a souligné les contraintes juridiques et culturelles auxquelles font face les femmes rurales dans l'accès aux biens fonciers, contraintes qui conditionnent en grande partie leur intégration à la vie économique par le biais, en particulier, du crédit bancaire. La conception patriarcale de la propriété empêche ainsi nombre de femmes érythréennes de bénéficier de leurs droits économiques fondamentaux et les relègue dans les franges informelles du secteur agricole. La question est de savoir ce que comptent faire les autorités pour remédier à ces problèmes. La présence d'une seule femme au sein des comités locaux de répartition des terres suffit-elle à assurer l'égalité de traitement entre les sexes, s'est interrogé une autre experte. On a souligné que les femmes musulmanes risquent d'être victimes de discrimination du fait de l'application de la charia.
Une experte a voulu savoir de quelle manière les autorités appliquent leur approche du bas vers le haut de la participation des femmes à l'industrie minière naissante dont a parlé la délégation. En particulier, quels mécanismes et indicateurs assurent-ils la participation effective des femmes aux décisions relatives au choix et au lancement des projets d'extraction?
Une experte a fait état d'un rapport du Fonds des Nations Unies pour l'enfance publié en 2002, selon lequel il semble que pratiquement aucun système d'enregistrement des naissances n'existe en Érythrée.
S'agissant des questions d'éducation, une experte a constaté que l'Érythrée souffre d'un manque d'infrastructures et de d'enseignants qualifiés. Le taux d'abandon scolaire des filles est important, 20 % seulement des filles intégrant l'école secondaire. La forte participation des femmes aux programmes d'alphabétisation des adultes, attestée dans le rapport, ne compense pas cette importante lacune, a souligné l'experte. Plusieurs formes de discrimination et de ségrégation des femmes persistent, de plus, dans l'enseignement supérieur, encore largement dominé par les étudiants et enseignants de sexe masculin. Cette domination pose d'autre part la question de l'ampleur de la violence contre les élèves et étudiantes, notamment de la violence sexuelle.
La meilleure manière d'éviter le harcèlement des femmes au travail est de valoriser leur présence et leur rôle, le service public pouvant jouer un rôle exemplaire à cet égard, a noté une experte. Comment la société érythréenne valorise-t-elle le rôle des femmes dans le monde du travail? Quelles mesures sont prises pour assurer la protection du personnel domestique féminin et des jeunes conscrites contre la violence et le harcèlement sexuels? Selon certaines sources, le statut des femmes est secondaire même au sein du service militaire national.
La santé ne représente que 4,2% des dépenses nationales érythréennes, selon un rapport récent de l'Organisation mondiale de la Santé, contre 9,6% en moyenne dans les pays africains voisins, a noté une experte. Elle s'est interrogée sur l'écart important entre les chiffres concernant l'incidence des mutilations génitales féminines fournis dans le rapport (68%) et ceux du Fonds des Nations Unies pour l'enfance qui, dans une étude récente, estime qu'elles sont encore généralisées (89%). L'experte a demandé des précisions sur le taux d'utilisation des moyens contraceptifs en Érythrée et sur l'existence de lignes directrices pour encadrer l'avortement. L'Érythrée ne compterait qu'un médecin pour 22 000 habitants, une sage-femme pour 11 000 habitants: le Gouvernement compte-t-il combler ces lacunes dans la couverture de santé, et de quelle manière, a voulu savoir une experte.
Réponses de la délégation
La délégation a précisé que le service militaire national était obligatoire en Érythrée depuis 1995, prévoyant des exemptions usuelles pour raisons de santé, par exemple. Les trois premières années, sa durée était de 18 mois. Le service de durée illimitée s'est imposé au moment de la déclaration de guerre avec un pays voisin. L'État érythréen, né dans la souffrance par le sacrifice d'une génération de jeunes, a été immédiatement, et est toujours, contraint de continuer le combat pour protéger ses acquis. Le Gouvernement ne souhaite pas prolonger sans raison la mobilisation: mais la situation sur le terrain ne s'améliorant pas et l'occupation du territoire persistant, il ne peut procéder à la démobilisation.
Une experte du Comité ayant fait état d'informations selon lesquelles le mariage précoce constituerait, pour certaines jeunes filles, une échappatoire au service militaire obligatoire, le chef de la délégation a précisé que le service militaire n'est généralement pas perçu comme un fardeau par les femmes concernées, qui sont en majorité prêtes à œuvrer pour l'intérêt général et à participer sur un pied d'égalité avec les hommes. Mme Tesfamichael a précisé d'autre part que l'Union nationale des femmes, qui a ouvert un bureau dans le centre de préparation militaire de Sawa, ne dispose pas d'information selon lesquelles les jeunes filles en cours de formation y subiraient des violences sexuelles.
Les femmes combattantes représentaient un tiers des soldats du mouvement de libération: elles font, de ce fait, la fierté de l'Érythrée. Les anciennes combattantes entendent s'associer aux efforts de développement du pays et à la recherche de l'égalité entre les sexes. Elles participent aux initiatives régionales visant à restaurer la paix. Mais les femmes sauront aussi s'opposer à toute menace contre leur pays et leurs droits, a assuré le chef de la délégation.
Les centres de détention pour femmes ont une double fonction de correction et de réadaptation. La mise en détention au secret de femmes victimes d'agression par leurs geôliers, évoquée par une experte, n'existe pas en Érythrée, a assuré le chef de la délégation, se disant à ce propos «fatiguée de la propagande incessante contre son pays».
Les autorités, conscientes des nombreux changements intervenus en Érythrée depuis l'indépendance, savent qu'elles doivent modifier la Constitution. Un comité est chargé d'examiner la question, a indiqué la délégation en réponse à des observations. L'activité du Parlement s'est trouvée être une victime collatérale de la guerre avec l'Éthiopie, a aussi observé la délégation en réponse à une question d'une experte.
Le problème de l'émigration s'explique par des facteurs internes et externes, a expliqué la délégation. Il s'agit essentiellement d'un trafic organisé de jeunes gens, plutôt éduqués. Le phénomène s'épuisera de lui-même dans quelques années. L'Érythrée a ratifié les instruments internationaux relatifs à la protection des migrants.
Les tribunaux communautaires garantissent l'accès des femmes aux procédures au sein même des villages. Les décisions de justice sont basées sur le code civil transitoire et tiennent compte, en outre, des coutumes des communautés concernées. Lors de son Examen périodique en 2009, le Gouvernement érythréen a fait savoir qu'il estimait le Statut de Rome discriminatoire: il n'a donc pas l'intention de le ratifier. La délégation a dit prendre bonne note de l'observation d'une experte concernant la résolution 1325 du Conseil de sécurité.
S'agissant des droits de l'homme, l'Érythrée regrette la politisation des forums internationaux sur cette question. La population de l'Érythrée mérite certes plus que ce à quoi le pays est parvenu à ce jour en matière de droits de l'homme. Des équipes techniques sur le terrain sont justement chargées d'évaluer les besoins précis à cet égard, avec l'aide du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme. Mais la situation contraint la capacité d'action du Gouvernement, a ajouté la délégation.
L'Union nationale des femmes érythréennes, représentante autorisée et légitime de toutes les femmes érythréennes, est dotée de fonctions quasi-ministérielles, en particulier s'agissant du contrôle et de la coordination de l'action des différents ministères pour répondre aux besoins des femmes.
La délégation a reconnu des carences dans l'établissement de statistiques ventilées par sexe dans un certain nombre de domaines. Mais, en tout état de cause, les données produites par l'Érythrée sont les plus fiables: le Programme des Nations Unies pour le développement, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance et les autres organisations internationales coopérant au développement de l'Érythrée puisent aux sources érythréennes officielles qui, seules, reflètent la réalité du terrain, a dit le chef de la délégation.
L'Érythrée connaît quelques cas de traite des êtres humains depuis 2001. L'une raisons de ce problème est le fait que les Érythréens bénéficient, en Europe, d'un statut privilégié pour obtenir l'asile qui constitue une véritable incitation à l'émigration et, par conséquent, à l'exploitation des migrants, a déclaré la délégation. L'Érythrée participe aux initiatives régionales de surveillance commune des frontières.
La prostitution n'est pas un délit en Érythrée, a indiqué la délégation. Les autorités souhaitent néanmoins encourager les quelque 2600 prostituées du pays à changer d'activité, en les incitant à discuter entre elles de leurs perspectives d'avenir.
Le patriarcat sera aboli, a assuré la délégation. La participation active des femmes au mouvement de libération nationale a éliminé 90 % des attitudes et stéréotypes patriarcaux. La lutte contre les mutilations génitales féminines a abouti en 2007 après trente ans de lutte acharnée contre une pratique très ancrée dans les communautés. Elle persiste aujourd'hui à un niveau anecdotique. Les mariages de filles mineures sont un autre exemple de persistance de pratiques néfastes pour les femmes. Les responsables de ces actes sont systématiquement poursuivis et sanctionnés. Le développement économique devrait, à terme, éliminer ces pratiques d'un autre âge. Les autorités utilisent les médias pour faire passer leurs messages - documentaires, entretiens - pour éliminer les stéréotypes et favoriser les changements de comportement.
La création d'emplois pour les jeunes est pour l'instant compliquée par les sanctions infligées à l'Érythrée. Mais l'émergence du secteur minier devrait permettre de remédier à une situation temporairement difficile imposée par l'extérieur.
La plupart des Érythréens sont rattachés à un parti politique. Mais cette affiliation n'a pas d'incidence sur l'attribution des sièges réservés aux femmes. L'attribution se fait au terme d'une compétition entre plusieurs femmes pour un même siège électif, a expliqué la délégation, à l'exclusion de tout autre critère, religieux, politique ou autre. Il est vrai que les objectifs de l'Érythrée en matière de participation des femmes ne sont pas encore atteints, a admis la délégation, beaucoup de travail restant à accomplir. Le problème principal réside dans les femmes elles-mêmes, a estimé le chef de la délégation: si les femmes votaient pour d'autres femmes, la représentation atteindrait 50%. La délégation a précisé que l'Érythrée a nommé une femme au poste d'ambassadrice en France.
S'il est vrai que les élections nationales n'ont pas été organisées depuis un certain temps, les scrutins locaux n'ont pas été interrompus, a souligné la délégation. Les femmes élues lors de ces scrutins vont constituer progressivement un personnel politique compétent qui irriguera, à partir de la base, l'intégralité du système. C'est cette approche ascendante qui a été retenue par l'Érythrée.
La reconnaissance des organisations non gouvernementales et des associations est régie en Érythrée par une «proclamation». Une organisation de personnes handicapées vient de déposer une demande d'accréditation par le Conseil économique et social. Deux organisations non gouvernementales érythréennes sont accréditées par l'Union africaine.
La «proclamation du travail» (loi sur le travail) interdit toute discrimination, sur la base de quelque critère que ce soit, en Érythrée. Elle prévoit aussi la création d'un système d'inspection du travail. Le Ministère du travail peut être saisi de plaintes de femmes qui estiment que leurs droits ne sont pas respectés par leur employeur.
Répondant à des questions portant sur l'éducation, la délégation a indiqué que le Ministère de l'éducation encourage les jeunes filles à se lancer dans la carrière de l'enseignement par le biais de campagnes de sensibilisation et par des mesures de formation renforcée. D'une manière générale, les enseignantes sont encouragées à faire figure de modèle aux yeux de leurs élèves. L'école élémentaire est obligatoire pour tous, l'enseignement étant dispensé dans l'une des neuf langues reconnues: chaque enfant suit ainsi les cours dans sa langue maternelle. Les jeunes filles sont encouragées à s'inscrire dans les écoles techniques et professionnelles. Les filles scolarisées dans le primaire et le secondaire n'y sont la cible explicite d'actes de violence, a estimé la délégation. Des informations chiffrées seront communiquées au Comité par écrit sur ces questions, a dit la délégation.
Le Gouvernement subventionne très largement les soins de santé, au bénéfice en particulier des habitants des régions rurales. La qualité des services de santé érythréens est largement supérieure à celle des pays voisins, a assuré la délégation. La question de la nutrition est une priorité depuis l'indépendance, les autorités privilégiant dans ce domaine l'autosuffisance et non la dépendance à l'assistance internationale. Revenant sur la question des mutilations génitales féminines, la délégation a indiqué que l'espoir d'une éradication complète est permis puisque le taux de prévalence chez les jeunes filles est maintenant tombé à 12% (chiffres 2010).
Une experte s'étant inquiétée du départ de nombreux professionnels de santé érythréens formés à grands frais, la délégation a indiqué que son jeune pays connaît en effet des difficultés à retenir une partie de son personnel de santé. Tant que persisteront la guerre et les sanctions, l'Érythrée sait qu'elle sera confrontée à des problèmes de ce type. Elle n'en continuera pas moins à former des personnels de santé tout en sachant pouvoir compter, à terme, sur ses enfants qui se sont expatriés en majorité pour des raisons économiques.
Malgré des exceptions inévitables, la violence sexuelle est inexistante dans une société érythréenne caractérisée une très grande retenue, a expliqué la délégation: cette fausse question est souvent montée en épingle par les demandeurs d'asile érythréens en Europe. Le Gouvernement est conscient de la nécessité de lutter contre le problème des mariages précoces, a par contre admis la délégation. L'intégralité ou presque des naissances est désormais enregistrée grâce au fait qu'une écrasante majorité de mères accouchent dans des structures de santé.
Les femmes ont un droit garanti au foncier, à égalité avec les hommes, a précisé la délégation, étant entendu que la propriété foncière elle-même est réservée à l'État: les particuliers n'ont qu'un droit d'usage sur le sol mais restent propriétaires des équipements dont ils le dotent. Les comités locaux chargés de la répartition équitables des terres, composés de trois membres, doivent compter au moins une femme - certains en comptent davantage. L'Union nationale des femmes, présente dans tous les villages, contrôle à cet égard le respect de la loi au profit des femmes rurales.
Le rôle de la religion dans la transmission du patrimoine est également protégé, conformément à l'obligation de respect des religions. La délégation a précisé que les autorités ont œuvré progressivement, par le biais de la loi, à l'affranchissement des femmes de la tutelle de leurs maris: elles peuvent désormais avoir le statut de chef de famille, gérer en toute indépendance leur patrimoine, y compris des comptes en banque, et participent aux décisions importantes, notamment le choix du domicile.
La loi sur l'évaluation de l'impact environnemental des projets miniers s'impose à toutes les entreprises du secteur: elles doivent soumettre leur évaluation du risque environnemental induit par leurs activités au ministère concerné qui procédera à sa propre contre-expertise, en consultation avec les populations locales appelées à faire valoir leur point de vue.
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