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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale examine le rapport de la Géorgie

Rapport de la Géorgie

03 mai 2016

Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale

3 mai 2016

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a examiné, hier matin et cet après-midi, le rapport périodique présenté par la Géorgie sur les mesures qu'elle a prises pour donner effet aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant ce rapport, Mme Khatuna Totladze, Ministre adjointe des affaires étrangères de la Géorgie, a indiqué que l’une des plus récentes et importantes évolutions dans la législation du pays est la loi complète contre la discrimination adoptée le 2 mai 2014.  L’élimination de discrimination et la garantie de l’égalité doivent être contrôlées par un organe indépendant, à savoir le Défenseur public de la Géorgie, a-t-elle précisé.  La Ministre adjointe a ensuite assuré que le Gouvernement géorgien n’épargnait aucun effort pour assurer des conditions de vie décente à toutes les personnes déplacées internes, même si la seule solution durable pour ces personnes reste un retour volontaire, en toute sécurité et dans la dignité, comme cela est réaffirmé dans les résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies sur le statut des personnes déplacées et des réfugiés d’Abkhazie, Géorgie, et de la région de Tskhinvali/Ossétie du Sud, Géorgie.   Mme Totladze a ensuite évoqué la nouvelle Stratégie pour l’intégration et l’égalité civique, qui accorde une attention particulière à la population rom, et a assuré que les minorités ethniques en Géorgie ont accès à tous les niveaux d'éducation, y compris dans leur langue natale (azerbaïdjanais, arménien, russe).  Quant à l’obligation de rapatriement des personnes déportées de République socialiste de Géorgie par l’ancienne URSS dans les années 1940, elle a indiqué que quelque 5841 personnes de sept pays se sont portées candidates au rapatriement devant les autorités géorgiennes et que le statut de rapatrié a déjà été accordé à 1533 personnes qui avaient été déplacées de force.  

Actuellement, a enfin rappelé Mme Totladze, les territoires de deux régions de Géorgie – Abkhazie, Géorgie et région de Tskhinvali, Géorgie – sont occupés par la Fédération de Russie.  Ces deux régions qui restent sous occupation militaire étrangère constituent avant tout de dangereux «trous noirs» du point de vue de la vérification des violations des droits de l’homme et de l’obligation redditionnelle pour les violateurs.

Un représentant du Défenseur public de la Géorgie a également pris la parole.

La délégation géorgienne était également composée, entre autres, de M. Shota Rekhviashvili, Ministre adjoint pour les personnes déplacées internes des territoires occupés, le logement et les réfugiés, et de Mme Shalva Tsiskarashvili, Représentante permanente de la Géorgie auprès des Nations Unies à Genève.  Elle comprenait également des représentants du Ministère pour les personnes déplacées internes des territoires occupés, le logement et les réfugiés; du Ministère pour la réconciliation et l’égalité civique; du Ministère de la justice; du Ministère de l’éducation et des sciences; du Ministère des affaires étrangères; de l’Administration du Gouvernement; de l’Agence étatique sur les questions religieuses; de la Commission sur les questions migratoires; de la Cour suprême; ainsi que du Bureau du Procureur.

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant, notamment, de la baisse de la population géorgienne et de la composition ethnique du pays; de la situation des Kists, des Roms et des musulmans meskhètes; de la Stratégie pour l’intégration et l’égalité civiques; des infractions pour discrimination raciale; des personnes déplacées et du rapatriement des personnes déportées de Géorgie sous Staline; des questions de nationalité; des enfants sans abri; des questions d’éducation; ou encore des mariages précoces.

La rapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de la Géorgie, Mme Anastasia Crickley, a relevé que l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud continuent d’être hors du contrôle de la Géorgie, laquelle n’est donc pas en mesure d’assurer la mise en œuvre de la Convention sur ces territoires.  Elle a rappelé l’importance qu’il y a à assurer une représentation adéquate des minorités au Parlement national, ainsi qu’au sein de la municipalité de Tbilissi.  Elle s’est en outre inquiétée du chômage frappant les minorités dans certaines régions du pays.  Les enfants vivant dans les rues sont souvent des enfants roms, a par ailleurs fait observer la rapporteuse. 

À l’instar de Mme Crickley, plusieurs membres du Comité se sont inquiétés des discriminations à l’encontre des musulmans en Géorgie.  Plusieurs experts se sont également enquis de la situation des personnes d’ascendance africaine en Géorgie, une experte faisant état des difficultés rencontrées par ces personnes en matière de logement et d’emploi.

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la Géorgie et les rendra publiques à l’issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 13 mai prochain.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de l’Azerbaïdjan (CERD/C/AZE/7-9).
 
Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays (CERD/C/GEO/6-8), MME KHATUNA TOTLADZE, Ministre adjointe des affaires étrangères de la Géorgie, a indiqué que bon nombre de développements positifs importants sont intervenus ces dernières années s’agissant du respect des instruments de droits de l’homme par la Géorgie.  Un groupe de travail interinstitutions permanent a été mis sur pied en 2014 afin de permettre à la Géorgie d’assumer effectivement ses obligations en termes de présentation de rapports devant les organes de traités et autres organes des Nations Unies.  En outre, le Gouvernement envisage d’inclure les recommandations des organes de traités dans un Plan national d’action pour la protection des droits de l’homme pour 2016-2017, a indiqué la Ministre adjointe, précisant que ce Plan d’action est en cours de finalisation.  Mme Totladze a également souligné qu’un certain nombre de titulaires de postes ont été nommés, tels que le Conseiller des droits de l’homme du Président ou l’Ambassadeur chargé des droits de l’homme au Ministère des affaires étrangères, le Premier Ministre et le Président ayant par ailleurs désigné des conseillers sur les questions relatives aux minorités nationales.  L’Agence étatique pour les questions religieuses a été créée en 2014 conformément aux meilleurs pratiques européennes, a insisté la Ministre adjointe.  Également en 2014, la Géorgie a adopté pour la première fois une Stratégie des droits de l’homme à long terme pour la période 2014-2020, assortie d’un Plan d’action (2014-2015).

L’une des plus récentes et importantes évolutions dans la législation du pays est la loi complète contre la discrimination adoptée le 2 mai 2014, a poursuivi Mme Totladze.  L’objectif de cette  loi doit être d’éliminer toutes les formes de discrimination et d’assurer que chaque personne jouisse sur un pied d’égalité des droits prescrits dans la loi, quels que soient sa race, sa couleur, sa langue, son appartenance nationale, ethnique ou sociale, son sexe, son orientation sexuelle ou son identité sexuelle, son statut marital ou sa situation sanitaire, son handicap, son âge, sa nationalité, son origine, son lieu de naissance, son lieu de résidence, son statut social, sa religion ou sa croyance, ses idées politiques ou quelque autre critère.  Toute forme de discrimination, directe ou indirecte, y compris la discrimination multiple, doit être interdite, a insisté Mme Totladze.  Cette loi interdit la discrimination tant dans le secteur privé que dans le secteur public, a-t-elle précisé.  L’élimination de discrimination et la garantie de l’égalité doivent être contrôlées par un organe indépendant, à savoir le Défenseur public de la Géorgie, a indiqué la Ministre adjointe, précisant que le Bureau de ce Défenseur avait vu son budget considérablement accru - de 77% - depuis 2013. 

En outre, en vertu d’un amendement apporté au Code pénal de la Géorgie en 2012, tous les crimes commis sur la base de l’intolérance raciale, religieuse, nationale ou ethnique ou sur la base de tout autre motif discriminatoire doivent être considérés comme s’accompagnant d’une circonstance aggravante, a fait valoir Mme Totladze.

La Ministre adjointe a ensuite assuré que le Gouvernement géorgien n’épargnait aucun effort pour assurer des conditions de vie décente à toutes les personnes déplacées internes, même si la seule solution durable pour ces personnes reste un retour volontaire, en toute sécurité et dans la dignité, comme cela est réaffirmé dans les résolutions de l’Assemblée générale des Nations Unies sur le statut des personnes déplacées et des réfugiés d’Abkhazie, Géorgie, et de la région de Tskhinvali/Ossétie du Sud, Géorgie.  Une récente enquête d’intentions publiée par le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) a montré que 88% des personnes déplacées internes exprimaient leur volonté de retourner dans leurs lieux d’origine en toute sécurité et dans la dignité, a fait observer la Ministre adjointe.  Les personnes déplacées internes ne sont plus expulsées de leurs lieux de résidence temporaire et les indemnités leur sont versées de manière universelle ont doublé, a-t-elle fait valoir.  Après l’adoption de la nouvelle loi sur les personnes déplacées internes en 2014, quelque 10 708 familles déplacées vivant dans des résidences temporaires ont acquis la propriété de leur zone résidentielle.  Des solutions de logement durables sont adaptées aux besoins des personnes déplacées internes, a insisté la Ministre adjointe, précisant qu’au cours de ces deux dernières années, quelque 15 000 personnes déplacées internes avaient reçu un logement dans le pays.

Selon le recensement mené en 2014, du point de vue de sa composition ethnique, la Géorgie compte, «hors régions occupées», 87,8% de Géorgiens ; 6,3% d’Azerbaïdjanais ; 4,5% d’Arméniens ; et un certain nombre (en proportion toujours inférieure à 1% de la population totale) de Russes, d’Ossètes, de Yézidis, de Grecs, de Kists, d’Ukrainiens, de juifs, d’Abkhaziens, d’Assyriens et de Kurdes.

La Ministre adjointe a ensuite évoqué la nouvelle Stratégie pour l’intégration et l’égalité civique, qui accorde une attention particulière à la population rom, ainsi que le programme spécial «1+4» (système de quotas) instauré depuis 2010 pour les étudiants appartenant à une minorité ethnique.  Les minorités ethniques en Géorgie ont accès à tous les niveaux d'éducation, y compris dans leur langue natale (azerbaïdjanais, arménien, russe) ; le pays compte au total quelque 213 écoles publiques non géorgiennes, a précisé Mme Totladze.  L’identité culturelle des minorités ethniques, y compris leurs droits linguistiques, est préservée et bien protégée en Géorgie, a-t-elle assuré.  Elle a également souligné que les minorités ethniques étaient représentées au sein des pouvoirs exécutif et législatif, ainsi qu’au sein d’autres organes publics;  sept représentants de minorités ethniques siègent au Parlement, a-t-elle indiqué.  Les minorités ethniques bénéficient d’un accès total et égal aux programmes et prestations socioéconomiques, a-t-elle insisté.  En 2012-2015, quelque 275 Roms ont été enregistrés et se sont vu accorder le statut juridique approprié.  Si, en 2014, 88 enfants roms fréquentaient l’école, ils étaient 155 à la fréquenter en 2015, a d’autre part fait valoir Mme Totladze. 

La Ministre adjointe a ensuite rendu compte des importantes mesures prises ces dernières années pour faciliter l’intégration des personnes bénéficiant du statut de réfugié ou admises dans le pays à titre humanitaire.  Elle a notamment rappelé que le 2 avril 2014, la Géorgie avait ratifié la Convention de 1961 sur la réduction de l’apatridie.  Rappelant que le programme universel de soins de santé avait été lancé en Géorgie en 2013, Mme Totladze a souligné que la législation géorgienne protégeait aussi le droit des non-ressortissants aux services de santé.

Quant à l’obligation de rapatriement des personnes déportées de République socialiste de Géorgie par l’ancienne URSS dans les années 1940, la Ministre adjointe a indiqué que quelque 5841 personnes de sept pays se sont portées candidates au rapatriement devant les autorités géorgiennes, conformément à la législation en vigueur en Géorgie.  Le statut de rapatrié a déjà été accordé à 1533 personnes qui avaient été déplacées de force, a-t-elle précisé.  En 2010, a-t-elle ajouté, le Gouvernement géorgien a adopté une procédure simplifiée pour l’acquisition de la citoyenneté géorgienne par les personnes ayant le statut de rapatrié.

Actuellement, a enfin rappelé Mme Totladze, les territoires de deux régions de Géorgie – Abkhazie, Géorgie et région de Tskhinvali, Géorgie – sont occupés par la Fédération de Russie.  Ces deux régions qui restent sous occupation militaire étrangère constituent avant tout de dangereux «trous noirs» du point de vue de la vérification des violations des droits de l’homme et de l’obligation redditionnelle pour les violateurs.  Assez récemment, a rappelé la Ministre adjointe, le Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale, dans sa demande d’autorisation pour une enquête conformément à l’article 15 (13 octobre 2015), a souligné que des crimes avaient été commis avec une cruauté particulière et pour des motifs discriminatoires à l’encontre de personnes appartenant à l’ethnie géorgienne.  Suite à cette campagne de violence, la population civile d’origine ethnique géorgienne en Ossétie du Sud a considérablement chuté.  Le Bureau du Procureur a fait état d’une réduction d’au moins 75% de la population d’origine ethnique géorgienne vivant dans la zone de conflit, a indiqué Mme Totladze.

Examen du rapport

Questions et commentaires des experts

La rapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de la Géorgie, MME ANASTASIA CRICKLEY, s’est réjouie que la Géorgie ait présenté son rapport dans les délais impartis et a  relevé qu’un certain nombre de changements législatifs et pratiques sont prévus dans le cadre de la Stratégie nationale des droits de l’homme 2014-2020.  Mme Crickley a ensuite relevé que l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud continuent d’être hors du contrôle de la Géorgie, laquelle n’est donc pas en mesure d’assurer la mise en œuvre de la Convention sur ces territoires.

Mme Crickley a relevé que la population de la Géorgie et des différents groupes qui la composent a diminué et a souhaité obtenir des données ventilées à ce sujet.  La rapporteuse a par ailleurs rappelé l’importance qu’il y a à assurer une représentation adéquate des minorités au Parlement national, ainsi qu’au sein de la municipalité de Tbilissi.

Mme Crickley a rappelé le caractère insidieux de la discrimination indirecte et a insisté sur l’importance de veiller à la combattre.  Elle a souhaité savoir si les tribunaux géorgiens ont souvent appliqué ou invoqué la Convention.  Elle s’est également enquise du nombre de plaintes, poursuites et condamnations pour discrimination raciale enregistrées en Géorgie.

La rapporteuse s’est enquise des mesures prises ou envisagées pour assurer qu’il y ait des inspections du travail visant à détecter d’éventuels cas de discrimination raciale au travail.  Elle s’est en outre inquiétée du chômage frappant les minorités dans certaines régions du pays.

S’enquérant de ce qui est fait ou prévu pour lutter contre les organisations qui promeuvent la discrimination, Mme Crickley a indiqué avoir reçu d’inquiétantes informations qui font état de discriminations à l’encontre des musulmans.

Les enfants vivant dans les rues sont souvent des enfants roms, a par ailleurs fait observer la rapporteuse, avant de s’enquérir de la stratégie adoptée pour assurer une éducation adéquate aux enfants roms.  Mme Crickley a également indiqué avoir reçu des informations très inquiétantes concernant les enfants placés en institution.  Certes, l’âge minimum du mariage a été porté à 18 ans, mais qu’en est-il de la sensibilisation en la matière à l’intention des femmes issues des minorités, a demandé la rapporteuse?

Pour ce qui est des requérants d’asile, la rapporteuse a fait part de sa préoccupation face au refus parfois opposé aux demandes sur la base de préoccupations de sécurité nationale.  Mme Crickley s’est en outre inquiétée qu’un projet de loi sur l’asile semble prévoir de supprimer certaines exceptions permettant de rester dans le pays sur la base de considérations humanitaires.

Un autre membre du Comité a insisté pour connaître la représentation politique des groupes minoritaires vivant en Géorgie.  L’inversion de la charge de la preuve est-elle prévue dans les affaires de discrimination raciale, a-t-il par ailleurs souhaité savoir?

À l’instar de la rapporteuse, un expert a souhaité en savoir davantage sur la diminution globale de la population du pays, relevant que tous les groupes de population – minoritaires ou non – sont concernés.   Cet expert a rappelé que durant l’ère soviétique, de nombreuses populations ont été déportées mais a souhaité en savoir davantage au sujet de la situation des Turcs Meshkètes, relevant qu’aucun programme ne semble être prévu pour leur rapatriement en Géorgie.

Un autre membre du Comité a rappelé que dans ses précédentes observations finales, le Comité avait notamment fait part de préoccupations et souhaité que le pays lui en dise à l’avenir davantage s’agissant de la situation des non-ressortissants et apatrides et de l’accès des requérants d’asile aux services de santé et à l’emploi; or, il convient de déplorer le manque de réponses apportées jusqu’ici par la Géorgie à cet égard. 

Plusieurs membres du Comité se sont inquiétés de la persécution dont font l’objet les musulmans en Géorgie.  Des actes discriminatoires et d’intolérance, dont certains constituent des crimes de haine, ont été commis à l’encontre des musulmans en Géorgie, a dénoncé un expert.  Ces actes se produisent en toute impunité, a pour sa part affirmé une experte.

Plusieurs experts se sont également enquis de la situation des personnes d’ascendance africaine en Géorgie, une experte faisant état des difficultés rencontrées par ces personnes en matière de logement et d’emploi.

Une experte a rappelé que le Conseil de l’Europe recommandait de permettre aux étrangers de voter aux élections locales.  Elle a par ailleurs souligné l’importance des actions de sensibilisation concernant le problème des mariages précoces et a insisté sur la nécessité de faire preuve de pédagogie en prenant en compte les mentalités.

Une autre experte a noté que la question de l’éducation bilingue n’avait pas été résolue par la Géorgie.

Une experte a demandé quels groupes n’étaient pas considérés comme «minorité nationale».

Qu’est-ce qui est fait en matière de lutte contre la cyber-délinquance, a demandé un expert?

Déclaration du représentant du Défenseur public

Le représentant du Défenseur public de la Géorgie a rappelé que le Parlement géorgien avait adopté un texte de loi sur l’élimination de toutes les formes de discrimination.  L’un des acquis de ce texte est d’avoir permis d’introduire le concept de discrimination directe et indirecte, a-t-il fait valoir.  Malgré tout, des lacunes demeurent dans ce domaine qui affectent l’efficacité de cette loi, a-t-il déclaré.  Si cette loi oblige théoriquement les organismes publics à fournir des informations au Défenseur public, cela ne se fait en revanche que sur une base volontaire pour les sociétés privés; or, trop souvent celles-ci s’y refusent en alléguant du fait qu’elles n’ont aucune obligation à le faire, ce qui a pour conséquence de rendre difficile voire impossible d’examiner les circonstances des allégations de discrimination dans le secteur privé, a expliqué le représentant du Défenseur public. Afin d’y remédier, a-t-il indiqué, le Bureau du Défenseur a soumis au Parlement en février 2015 des propositions d’amendement qui ont été approuvées en commission mais qui restent à adopter en plénière.  Si rien n’est fait, le Défenseur public se heurtera à des obstacles sérieux dans la lutte contre la discrimination, a averti le représentant.

Par ailleurs, si la protection des minorités nationales n’a pas connu de changements majeurs ces dernières années, on peut noter des tendances positives mineures avec l’approbation en 2015 de la Stratégie publique d’égalité et d’intégration civiques, assortie  d’un plan d’action à l’horizon 2020.  La pleine implication des minorités ethniques dans la vie civique et politique demeure un défi, a souligné le représentant du Défenseur public.  En dépit d’engagements de hauts responsables du pays et de dirigeants de partis politiques, des membres des minorités sont peu présents dans le gouvernement central, a-t-il souligné. En revanche, la situation est nettement plus favorable dans les régions peuplées de minorités nationales, a-t-il relevé.  Par ailleurs, une réponse inadéquate a été donnée par l’État face aux violations liées à l’intolérance religieuse, a-t-il poursuivi.  Dans la majorité des cas, le processus d’enquête laisse à désirer, a-t-il précisé.

Le représentant du Défenseur public a ensuite attiré l’attention sur la situation des Géorgiens de souche habitant dans le district de Gali, qui ne peuvent bénéficier d’une éducation dans leur langue en raison de l’imposition du russe par les autorités abkhazes de facto.  À ce jour, l’Abkhazie demeure occupée par la Fédération de Russie et il apparaît clairement que la Fédération de Russie est responsable de la violation du droit à l’éducation dans sa langue dans le district de Gali, a insisté le représentant.

La protection des droits des Roms, en termes d’intégration, d’éducation, de santé ou encore d’accès à la sécurité sociale, demeure un important défi en Géorgie, a d’autre part reconnu le représentant du Défenseur public.  Aucun programme en faveur des Roms n’a été mis en route ces dernières années, a-t-il déploré avant d’énumérer les nombreuses recommandations faites aux autorités par le bureau du Défenseur afin de remédier aux problèmes de discrimination, insistant sur le problème posé par l’inégalité d’imposition fiscale de l’Église orthodoxe par rapport aux autres obédiences religieuses et soulignant que des mesures doivent être prises en faveur de la tolérance religieuse.  Il a aussi cité la nécessité d’informer les minorités nationales dans leurs langues et de leur assurer une meilleure représentation au sein de l’État. Il a enfin indiqué qu’une nouvelle loi sur la protection internationale devait être adoptée cette année.

Réponses de la délégation

S’agissant de la baisse de la population de la Géorgie et de la composition ethnique du pays, la délégation a rappelé que si le nombre de personnes appartenant à des minorités ethniques a diminué,  cela s’explique aisément du fait que c’est en fait l’ensemble de la population du pays qui a diminué.  Les minorités ethniques représentent 13,2% de la population totale, a précisé la délégation.

Les Kists sont 5700 en Géorgie, a ensuite indiqué la délégation , faisant observer que leur nombre a beaucoup baissé par rapport au recensement de 2002.  Le nombre actuel de Roms est quant à lui de 600 personnes, contre 472 en 2002; mais on parle ici des Roms résidant de manière permanente sur le territoire national, a précisé la délégation.  Depuis 2010, a-t-elle rappelé, la population rom est enregistrée.  La délégation a par la suite reconnu que l’intégration socio-économique des Roms demeurait un défi à relever; des conseils juridiques gratuits leur sont donnés et des mesures sont prises en faveur de la scolarisation des enfants roms, a-t-elle fait valoir.

La délégation a ensuite attiré l’attention sur la Stratégie pour l’intégration et l’égalité civique, précisant que cette Stratégie s’efforce notamment de promouvoir la participation de tous à la vie civile et politique, l’accès de tous aux médias, ou encore la possibilité pour tous d’accéder à une éducation de qualité,

La Mairie de Tbilissi compte 13 fonctionnaires appartenant à des minorités ethniques, a par ailleurs indiqué la délégation.

S’agissant des enfants sans abri, la délégation a rendu compte des mesures prises en leur faveur durant les années 2014-2016, en indiquant notamment que le nombre d’enfants vivant et travaillant dans la rue étaient alors de 536, dont bon nombre étaient des enfants roms; sur ce nombre, quelque 274 enfants ont bénéficié d’un accueil dans des centres d’accueil, a-t-elle précisé, avant de rappeler que ces enfants pouvaient également être placés dans des familles d’accueil ou dans des foyers de type familiaux ou encore être réintégrés.

L’éducation est gratuite pour tous les enfants en âge scolaire, citoyens ou non de la Géorgie, a par ailleurs rappelé la délégation.  Un enseignement est également dispensé dans les langues des minorités ethniques, a-t-elle fait valoir.

À partir de 2016, la possibilité sera offertes aux minorités ethniques de passer des examens dans leur propre langue, a ensuite indiqué la délégation.

La Géorgie est un pays multiethnique, a poursuivi la délégation.  La question de l’éducation bilingue ne se pose pas dans les régions où la langue géorgienne est majoritaire et très largement employée, y compris par les membres des minorités, a-t-elle souligné.  En revanche, dans les régions où les minorités sont majoritaires, il convient de créer un environnement leur permettant d’employer plus couramment la langue géorgienne. Il s’agit notamment de permettre à ces populations d’accéder à l’administration. Il s’agit donc d’améliorer l’instruction en langue géorgienne.  La question de l’enseignement bilingue pose un problème de méthodologie qui fait actuellement l’objet d’une réflexion en vue de mettre en place cet enseignement bilingue de la maternelle au secondaire, a ajouté la délégation.

S’agissant des médias, la délégation a mentionné un certain nombre de programmes d’information en direction des minorités. Des émissions dans plusieurs langues – ossète, abkhaze, arménien, azéri et russe – sont diffusées et les zones les plus reculées sont en voie d’être couvertes, a-t-elle précisé.

La Géorgie a prévu de créer une inspection du travail digne d’un pays développé, celle-ci ayant été abolie en raison de la corruption qui la minait à l’issue de la période soviétique, a d’autre part indiqué la délégation.

Un recensement de toutes les personnes déplacées a été réalisé, leur nombre approchant les 270 000 personnes, a poursuivi la délégation, ajoutant que plus de 7000 personnes avaient bénéficié de l’attribution d’un logement définitif, tandis qu’un programme de rénovation (de logements) a été lancé.  L’an dernier, 1400 logements ont été acquis par l’État afin de les attribuer aux personnes déplacées, a indiqué la délégation. Plus de 700 personnes ont par ailleurs pu faire légaliser la parcelle qu’elles occupaient illégalement, a-t-elle ajouté.  Environ 20% des logements de Tbilissi sont considérés comme délabrés ou insalubres et le Gouvernement a prévu, à terme, leur rénovation ou leur destruction, selon les cas, a indiqué la délégation.

Évoquant ensuite la déportation de Géorgie des Turcs Meskhètes par Staline, la délégation a rappelé que ce problème de déportation avait également touché des populations azéries, kurdes et yézidis, les Turcs Meskhètes étant quant à eux désignés en Géorgie par l’appellation «musulmans meskhètes».  Dans le cadre du plan d’action pour leur rapatriement, des actions sont prévues, notamment en matière d’apprentissage de la langue géorgienne, a indiqué la délégation.  Des mesures ont aussi été prises afin de faciliter l’acquisition de la citoyenneté.  Par ailleurs, un certain nombre de personnes ayant émigré volontairement en 1934 ne peuvent bénéficier de ce rapatriement, a précisé la délégation.  La date limite pour déposer une demande était le 1er janvier 2013 et la totalité des près de 500 personnes qui en avaient déposé une ont vu leur demande acceptée. L’acquisition de la nationalité géorgienne par ces rapatriés n’est pas conditionnée par l’abandon d’une autre nationalité, même si la loi géorgienne ne prévoit normalement pas la double nationalité pour ses ressortissants, a ensuite expliqué la délégation.  Par ailleurs, la loi ne permet pas de refuser la nationalité géorgienne à une personne demandant à être naturalisée alors qu’elle n’a pas d’autre nationalité. Il y a 623 personnes apatrides actuellement en Géorgie, un chiffre qui a baissé depuis 2011, a indiqué la délégation.  La loi sur les réfugiés et les apatrides, adoptée en 2013, octroie à ces personnes des droits équivalents à ceux des citoyens géorgiens, en dehors de celui de participer à une formation politique.

Le projet de loi sur la protection internationale qui devrait être adopté cette année visera à remplacer la loi sur le statut humanitaire et les réfugiés, a ensuite précisé la délégation.  Outre, l’assistance humanitaire et la protection des réfugiés, ce texte prendra en compte une troisième catégorie, à savoir celle des personnes devant bénéficier d’une protection temporaire, a-t-elle ajouté.

La police et les personnels de justice bénéficient de formations sur les questions de discrimination, a poursuivi la délégation. Une formation à l’intention des procureurs sur la question des crimes de haine est prévue prochainement, a-t-elle indiqué.

Des lignes directrices doivent être publiées à l’intention des fonctionnaires sur la manière de traiter des questions religieuses. Par ailleurs, il a été décidé d’établir une stricte égalité fiscale entre toutes les obédiences religieuses, a indiqué la délégation.

Contrairement à certaines affirmations, la Géorgie dispose bien de textes permettant de poursuivre des infractions pour discrimination raciale, trois personnes ayant été condamnées pour ce délit l’an dernier, a souligné la délégation. Elle a ajouté qu’en 2014, 19 cas avait été enregistrés pour violation du droit à la liberté religieuse. En 2015, 22 poursuites ont été lancées, notamment pour des infractions physiques ayant des motifs religieux. Depuis le début de l’année, 11 cas ont été enregistrés, notamment pour entrave à la liberté religieuse et persécution. Lorsqu’un juge traite une affaire, il se base non seulement sur la loi locale mais aussi sur les conventions internationales, européennes en particulier, a indiqué la délégation.

La délégation a attiré l’attention sur la différence entre minorités ethniques et minorités nationales, notant qu’il n’existait aucune définition internationale de ces notions.  Le Gouvernement géorgien considère que toute personne résidant dans le pays est de nationalité géorgienne, ce qui n’exclut pas la reconnaissance d’une spécificité ethnique ou culturelle. Certains groupes résident depuis très longtemps sur le territoire géorgien, certains étant même massivement majoritaires dans certaines régions, a-t-elle fait observer. 

Les autorités considèrent comme une priorité la lutte contre les mariages précoces, le problème se posant surtout au sein des minorités ethniques, en particulier parmi les Azéris, a d’autre part indiqué la délégation.  Des brochures ont été éditées, non seulement en géorgien mais aussi en azéri et en russe, afin de sensibiliser les populations concernées.

Un organe consultatif, dans lequel siègent des ONG et une agence comme le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), traite des questions de violence domestique, ainsi que des mariages précoces, a ajouté la délégation.  Elle a souligné l’importance de la sensibilisation des enseignants et des enfants au problème des mariages précoces et a reconnu qu’il s’agissait d’un problème grave, dont la résolution exigerait du temps. 

À l’issue de ce dialogue, la cheffe de la délégation, Mme Totladze, s’est dite surprise par l’absence des ONG, alors que celles-ci sont très actives dans le pays.  Elle a assuré le Comité de la détermination de son pays à respecter les normes internationales et à s’inspirer des recommandations du Comité. La Géorgie est déterminée à continuer de coopérer avec tous les mécanismes des droits de l’homme, a conclu la Ministre adjointe des affaires étrangères de la Géorgie.
 
Remarques de conclusion

La rapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de la Géorgie, MME ANASTASIA CRICKLEY, a rappelé que la Convention couvrait toute personne présente sur le territoire d’un État partie et pas seulement les nationaux. Elle a attiré l’attention sur la nécessité pour la Géorgie d’évaluer l’impact de toutes les stratégies et plans d’action, qui doivent être mis en œuvre dans les meilleurs délais.

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