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Déclaration du Groupe d'éminents experts sur le rejet par le Conseil des droits de l'homme de la résolution visant à renouveler le mandat du GEE
08 octobre 2021
GENÈVE / ADDIS ABEBA (8 octobre 2021) - Le 7 octobre, malgré les efforts de plusieurs États, le Conseil des droits de l'homme a rejeté une résolution visant à renouveler le mandat du Groupe d’éminents experts sur le Yémen par un vote par appel nominal. Il s'agit d'un revers majeur pour toutes les victimes qui ont subi de graves violations pendant le conflit armé qui fait rage depuis plus de six ans au Yémen.
Le vote négatif émis hier par les États membres du Conseil ne fait que confirmer l'évaluation du Groupe selon laquelle il y a un manque de volonté politique pour faire face à la situation au Yémen. Par cette action, notre mandat prendra effectivement fin à la clôture de la 48e session du Conseil des droits de l'homme, lundi prochain.
Il est temps d'agir davantage, et non pas moins. En mettant fin aux activités de la seule entité indépendante des Nations unies qui enquête et publie des rapports publics détaillés sur les violations des droits de l'homme commises par toutes les parties au conflit au Yémen, le Conseil semble abandonner le peuple du Yémen.
Malgré la peur et les intimidations auxquelles ils sont confrontés, les victimes et les témoins ont continué de faire part au Groupe d'éminents experts de leur désir de voir leurs souffrances portées à la connaissance de la communauté internationale et de voir des mesures prises pour mettre fin à l'impunité. Les organisations locales de la société civile et les défenseurs des droits de l'homme ont déclaré à plusieurs reprises que le Groupe était pour eux une raison d'espérer.
Alors que notre mission touche à sa fin, nous souhaitons renouveler les recommandations que nous avons formulées au cours des quatre dernières années à l'intention des parties au conflit et nous les appelons à :
- Accepter une cessation totale des hostilités et parvenir à une paix durable et inclusive ;
- Cesser immédiatement tous les actes commis contre des civils en violation du droit international des droits de l'homme et du droit international humanitaire applicables et prendre toutes les précautions possibles pour protéger les civils et les infrastructures civiles ;
- Mettre immédiatement fin à toute mesure qui aggrave la crise humanitaire ; et à
- Mener des enquêtes rapides, transparentes, indépendantes, impartiales, approfondies, crédibles, efficaces et tenant compte de la dimension de genre sur toutes les violations et tous les crimes commis pendant le conflit ; et veiller à ce que les auteurs répondent de leurs actes et que justice soit rendue aux victimes et prendre des mesures pour assurer la protection des victimes et des témoins dans ces processus.
Nous continuons à demander à la communauté internationale de soutenir les parties dans le renforcement des mécanismes de responsabilité, et nous demandons également à la communauté internationale de prendre des initiatives spécifiques au niveau international ou dans des États tiers, selon le cas, afin d'assurer la responsabilité. Les victimes de ce conflit armé tragique ne doivent pas être réduites au silence par la décision de quelques États. Bien au contraire, elles doivent être soutenues par tous les moyens pour voir se réaliser leurs droits à la vérité, à la justice et à la réparation.
Il est d'autant plus important aujourd'hui de promouvoir et de soutenir tous les efforts déployés par l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen afin de parvenir à une cessation des hostilités et à une paix durable et inclusive, en accordant toute l'attention nécessaire au respect des droits de l'homme et à la responsabilité. En outre, le Conseil de sécurité devrait intégrer davantage les dimensions des droits de l'homme du conflit au Yémen dans son ordre du jour et veiller à ce qu'il n'y ait pas d'impunité pour les crimes les plus graves, notamment en déférant la situation au Yémen à la Cour pénale internationale et en élargissant la liste des personnes soumises aux sanctions du Conseil de sécurité en vertu de sa résolution 2140 (2014).
Nous invitons le Haut-Commissariat à publier des rapports sur la situation des droits de l'homme au Yémen par l'intermédiaire de son bureau de pays et à soutenir toutes les initiatives en faveur de la responsabilisation des victimes.
Nous remercions les Pays-Bas et les membres du Groupe restreint qui ont appelé à la création du Groupe d'éminents experts et l'ont soutenu sans relâche au fil des ans, et tous les États membres qui ont voté en faveur des résolutions successives. Ils ont évalué à juste titre le désespoir des personnes dont les droits fondamentaux sont violés depuis trop longtemps. Enfin, nous remercions également les organisations de la société civile et les activistes des droits de l'homme qui nous ont soutenus tout au long des quatre mandats, malgré le climat de peur et de représailles créé par les parties au conflit. Le peuple du Yémen ne doit pas être oublié ; le peuple du Yémen ne doit pas être réduit au silence.
À propos du Groupe d'éminents experts internationaux et régionaux sur le Yémen (Groupe d'experts).
Dans sa résolution 36/31 (2017), le Conseil des droits de l'homme a demandé au Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme de créer un groupe d'éminents experts internationaux et régionaux sur le Yémen chargé de surveiller la situation des droits de l'homme dans le pays et d'en rendre compte. Le Groupe d'éminents experts (Groupe d'experts) a été mandaté pour procéder à un examen complet de toutes les violations et abus présumés des droits de l'homme internationaux et d'autres domaines appropriés et applicables du droit international commis par toutes les parties au conflit depuis septembre 2014, y compris les éventuelles dimensions sexospécifiques de ces violations. Le mandat du Groupe d'experts comprend également son devoir d'établir les faits et les circonstances entourant les violations et abus présumés et, si possible, d'identifier les responsables.
Le Conseil des droits de l'homme a renouvelé le mandat du Groupe d'experts dans ses résolutions 39/16 (2018), 42/2 (2019) et 45/15 (2020).
Les membres du Groupe d'experts étaient :
- M. Kamel Jendoubi (Tunisie) – Président (Décembre 2017- octobre 2021)
- Mme Melissa Parke (Australie) (Décembre 2017- octobre 2021)
- M. Ardi Imseis (Canada) (Décembre 2019- octobre 2021)
- M. Charles Garraway (Royaume-Uni) – (Décembre 2017- octobre 2019)