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Droit au développement

Un nouveau traité pour codifier le droit au développement

11 mai 2023

Une femme inspecte l’état des plantes dans un champ de lavande à l’aide de son ordinateur en Bulgarie. © Daniel Balakov/Getty Images

« Si la société ne connaît pas un développement équitable, ses membres ne peuvent pas réellement profiter des avantages de tous les autres droits de l’homme », a déclaré Zamir Akram, Président-Rapporteur du Groupe de travail intergouvernemental sur le droit au développement.

Pour M. Akram, ancien Ambassadeur et Représentant permanent du Pakistan auprès des Nations Unies à Genève, ce « développement équitable » s’inscrit dans le cadre du droit au développement. Ce concept, né de la décolonisation et de la lutte pour la justice mondiale, est inscrit dans la Déclaration des Nations Unies sur le droit au développement de 1986.

La Déclaration définit le développement comme étant « un droit inaliénable de l’homme en vertu duquel toute personne humaine et tous les peuples ont le droit de participer et de contribuer à un développement économique, social, culturel et politique dans lequel tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales puissent être pleinement réalisés, et de bénéficier de ce développement ».

« Pourtant, une fois adoptée, la Déclaration est restée lettre morte et une regrettable polémique politique s’est développée », a expliqué Ayuush Bat-Erdene, chef de la section du HCDH chargée du droit au développement. « Les discussions entre les États Membres ont été difficiles et ont même abouti à une impasse à un certain moment. Le droit au développement n’a pas encore réalisé pleinement son potentiel transformateur, c’est pourquoi de nombreux États Membres du Sud et des organisations de la société civile soutiennent l’idée qu’il est nécessaire d’adopter un instrument juridiquement contraignant. »

Il a fallu plus de 30 ans de lutte pour obtenir une réelle avancée. Cela s’est produit en septembre 2018, lorsque le Conseil des droits de l’homme a adopté la résolution 39/9, demandant l’élaboration d’un projet d’instrument juridiquement contraignant sur le droit au développement. Ces discussions sont presque terminées et une version finale du projet est à portée de main.

La voie vers un traité

L’idée d’un instrument juridiquement contraignant sur le droit au développement est apparue lors d’un sommet du Mouvement des pays non alignés en 1998 à Durban, en Afrique du Sud, sous la direction du Président de l’époque, Nelson Mandela. Le document final du sommet avait qualifié une éventuelle convention de « pas important vers la mise en œuvre du droit au développement ».

Vingt ans se sont écoulés entre ce document initial et la demande de rédaction de la convention formulée par le Conseil des droits de l’homme en 2018, mais les choses ont ensuite évolué rapidement. Un premier projet de texte de convention sur le droit au développement a été finalisé en janvier 2020, et une session du Groupe de travail sur le droit au développement en mai 2023 devrait conclure les discussions, de manière à permettre au Président-Rapporteur de présenter un texte final à la 54e session du Conseil des droits de l’homme en septembre. Le Conseil des droits de l’homme devra alors décider de transmettre ou non la Convention à l’Assemblée générale des Nations Unies à New York pour qu’elle soit débattue, ce qui lui fournira une plateforme multilatérale plus large et lui donnera un élan politique. Si elle est adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies, 20 pays devront la ratifier pour qu’elle entre en vigueur.

Le fait de transférer les négociations de Genève à New York n’est pas sans précédent : le débat sur la déclaration de 1986 a également été transféré de la Commission des droits de l’homme à l’Assemblée générale lorsqu’un groupe de travail composé de 15 experts gouvernementaux n’est pas parvenu à se mettre d’accord sur un texte au cours de neuf réunions en quatre ans.

Bien que la rédaction de la Convention ait rencontré de nombreux obstacles, ceux-ci ont été traités dans le cadre d’un « processus hautement consultatif, transparent et participatif », a déclaré Mihir Kanade, Président du Groupe d’experts chargé de la rédaction de l’instrument juridiquement contraignant sur le droit au développement. Parmi les obstacles qu’il a décrits figurent les divergences politiques entre États reflétant une division Nord-Sud sur la question de savoir si le droit au développement doit être mis en œuvre par le biais d’instruments juridiques non contraignants ou d’un traité international, ainsi que des désaccords sur le contenu précis de l’instrument.

L’alignement de la formulation du traité sur le texte convenu existant a également suscité des inquiétudes, mais l’ambassadeur Akram a indiqué que ce problème était en train d’être résolu.

« Je me suis efforcé, en collaboration avec les experts juridiques, de veiller à ce que cette convention soit fondée sur le langage international consensuel existant », a-t-il déclaré. « Il n’y aura pas de contradiction entre les droits et les obligations découlant de cette convention et les autres droits et obligations déjà acceptés par la communauté internationale. »

Une convention capable de changer la donne

Le traité proposé aborde des questions telles que la souveraineté sur les ressources naturelles, l’autodétermination et l’égalité des chances.

« Les aspects les plus importants sont les principes de participation pour faire progresser l’espace civique et le partage équitable des avantages découlant du développement pour lutter contre les inégalités », a déclaré M. Bat-Erdene. « La Déclaration de 1986 est le seul document relatif aux droits de l’homme qui associe la paix et la sécurité, le développement et les droits de l’homme, et le projet de convention se fonde sur cette Déclaration. La convention clarifierait les responsabilités des États Membres et permettrait aux citoyens ordinaires de faire valoir leurs droits. »

« Nous vivons aujourd’hui dans une société qui reconnaît beaucoup plus largement l’existence d’inégalités et de déséquilibres systémiques profonds, notamment en ce qui concerne l’ordre économique international », a déclaré Chee Yoke Ling, directrice exécutive du groupe de défense et de recherche Third World Network, en Malaisie. « Le droit au développement nous plonge au cœur de ces problèmes systémiques. Au minimum, elle permettrait de tenir les différents acteurs responsables de leurs actes. Cela mettra en lumière les inégalités. 

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