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Communiqués de presse Procédures spéciales

Mali : l'augmentation de la violence et de l'impunité dans la région centrale est préoccupante, selon l’expert de l'ONU

21 février 2020

GENÈVE / BAMAKO (21 février 2020) – L'Expert des Nations Unies s'est félicité de l'amélioration de la situation sécuritaire dans le nord du Mali, mais s'est dit préoccupé par la violence et l'impunité croissantes dans la région centrale du pays.

« La mise en œuvre de l'Accord d'Alger de 2015 dans le nord du Mali, avec le redéploiement progressif des Forces Armées Maliennes reconstituées à Kidal et Tombouctou et leur prochain déploiement à Menaka et Taoudénit, est une étape importante vers le retour à la paix », a déclaré Alioune Tine, Expert Indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme au Mali, à l'issue de sa visite dans le pays.

« Ce processus est le résultat du Dialogue National Inclusif, qui a été un tournant majeur. Les résolutions actuellement mises en œuvre apportent un nouvel espoir de paix et de retour progressif à un processus politique pacifique au Mali, à travers l'organisation d'élections législatives », a expliqué l'expert.

Tine a salué les efforts de l'État malien, des groupes armés et de la MINUSMA (Mission multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation au Mali) pendant tout le processus.

Cependant, la situation se détériore dans la région du Centre, où des civils sont victimes d'organisations criminelles transnationales, de groupes terroristes et de milices armées qui s'assurent de plus en plus le contrôle de la région, a déclaré l'expert. « Dans le Centre du Mali, j'ai observé un cumul des défaillances sécuritaires, judiciaires et administratives qui facilitent la violence de masse en toute impunité. Les Forces Armées Maliennes et la MINUSMA n'ont pas réussi à assurer une sécurité adéquate aux civils de la région. »

« En particulier, je suis consterné par l'attaque d'hommes armés sur le village d'Ogossagou, dans la région de Mopti, le 14 février. Au moins 33 personnes ont été tuées, trois blessées et 20 portées disparues. J'ai été choqué d'apprendre que le détachement des Forces Armées Maliennes, qui avait jusque-là assuré la sécurité du village, s'était retiré de la zone la veille », a expliqué Tine.

Presque tous les représentants de l'État et de l'armée rencontrés par l'Expert Indépendant ont souligné que les auteurs d'attaques similaires antérieures dans différentes régions n'avaient pas été amenés à répondre de leurs actes ; et que cette impunité est l'un des facteurs aggravants de la violence actuelle. Les autorités judiciaires ont assuré que des enquêtes étaient en cours, mais qu'en raison de la situation sécuritaire, qui signifie qu'il n'est pas possible d'arrêter les auteurs présumés, et du climat de peur, avec des témoins et des victimes craignant des représailles, le processus judiciaire est lent.

La violence croissante a contribué à une détérioration préoccupante de la situation humanitaire, a déclaré l'expert indépendant. Selon les chiffres de l'ONU, le nombre de personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays est passé de 99000 à 207751 de mars à décembre 2019 ; et le nombre d'écoles fermant leurs portes en raison de l'insécurité est passé de 866 à 1113, affectant environ 333900 enfants.

« La Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et l'Union africaine doivent trouver d'urgence, en coopération avec la communauté internationale, des moyens efficaces pour mettre fin à la violence et aux graves violations et abus des droits de l'homme dans le centre du Mali. Le Conseil de sécurité de l'ONU devrait également réévaluer la situation sécuritaire dans la région et ajuster le mandat de la MINUSMA en conséquence. La violence actuelle est de plus en plus difficile à contrôler et pourrait devenir une menace majeure pour l'ensemble de la sous-région », a déclaré Tine.

L'expert indépendant présentera un rapport complet de sa visite lors d'un dialogue interactif organisé en mars 2020 par le Conseil des droits de l'homme, en présence de représentants du gouvernement malien.

FIN

M. Alioune Tine (Sénégal) a pris ses fonctions d'Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme au Mali le 1er mai 2018. Le mandat d'expert indépendant a été renouvelé par le Conseil des droits de l'homme le 22 mars 2019 pour une période d'un an afin d'aider le gouvernement du Mali dans ses actions de promotion et de protection des droits de l'homme et dans la mise en œuvre des recommandations formulées dans les résolutions du Conseil. M. Tine a été un membre fondateur et le Président de la Rencontre Africaine Pour la Défense Des Droits de l'Homme (RADDHO) et Coordinateur du Forum des ONG Africaines à la Conférence Mondiale contre le Racisme en 2000. Entre 2014 et 2018, M. Tine a été directeur régional d'Amnesty International pour l'Afrique de l'Ouest et du Centre. Il a publié beaucoup d'articles et d'études sur la littérature et les Droits de l'Homme.

Les Experts indépendants font partie de ce qui est désigné sous le nom des procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. Les procédures spéciales, l'organe le plus important d'experts indépendants du Système des droits de l'homme de l'ONU, est le terme général appliqué aux mécanismes d'enquête et de suivi indépendants du Conseil qui s'adressent aux situations spécifiques des pays ou aux questions thématiques partout dans le monde. Les experts des procédures spéciales travaillent à titre bénévole ; ils ne font pas partie du personnel de l'ONU et ils ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants des gouvernements et des organisations et ils exercent leurs fonctions à titre indépendant.

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