Contexte
Un coup d'œil sur les nombreux rapports sur les migrations, les politiques et les publications de recherche sur les migrations internationales montre que les contributions des migrants aux sociétés, aux politiques et aux économies du monde entier ont été non seulement largement négligées, minimisées et considérées comme allant de soi, mais aussi entravées par la prolifération des perturbations et de la désinformation à l'encontre des migrants. [1]
Les migrations sont devenues une priorité et une question politique de premier plan dans le monde entier. Aujourd'hui, plus de 281 millions de migrants dans le monde vivent en dehors de leur pays d'origine (3,6 %, ce qui correspond à la croissance démographique mondiale).[2] Cette question est devenue le centre de nombreux discours publics et programmes politiques, qui ont parfois renforcé des récits négatifs nuisibles et des mesures de répression symboliques contre-productives. La montée de la panique politique et la couverture médiatique des migrations ont souvent donné une fausse impression des migrations qui néglige les contributions des migrants et exagère la menace potentielle pour la sécurité et le bien-être des États. Il est donc essentiel de lutter contre les préjugés, la discrimination, le racisme et la xénophobie profondément ancrés dans les mentalités pour garantir aux migrants un avenir où leurs droits humains seront pleinement respectés, protégés et réalisés.[3] Dans la Déclaration de progrès du premier Forum international d'examen des migrations du Pacte mondial, adoptée en mai 2022, les États membres se sont engagés à prendre des mesures contre les stéréotypes nuisibles, les discours de haine et les crimes de haine, ainsi que les récits trompeurs qui génèrent des perceptions négatives des migrants.
Il est nécessaire de mettre davantage l'accent sur une approche basée sur les droits de l'homme et centrée sur les migrants lorsque l'on examine la contribution des migrants. Dans ce contexte, le rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, M. Gehad Madi, souhaite consacrer son premier rapport thématique au Conseil des droits de l'homme à une analyse fondée sur les droits de l'homme de la contribution des migrants à la société et des facteurs qui la facilitent ou l'entravent.
Le rapport mettra en lumière les nombreuses façons dont les migrants eux-mêmes, leurs familles et leurs communautés ont apporté une contribution substantielle, tant au cours de l'histoire qu'à l'heure actuelle, dans divers contextes. Il s'agit notamment des transferts de fonds, du commerce, des investissements, des réseaux, des innovations, de la diversité alimentaire, de la création musicale, des exploits sportifs, du partage des connaissances et de bien d'autres choses encore. Il est donc tout aussi important de noter que ce rapport n'a pas pour objectif de se concentrer sur les migrations sous l'angle des coûts et des bénéfices, car la mesure dans laquelle les migrants contribuent à leurs communautés va au-delà des activités économiques, telles que les facteurs socioculturels et civico-politiques. Les migrants apportent souvent des compétences, du dynamisme et des ressources qui renforcent les sociétés, les politiques, les cultures et les économies d'origine, de transit et de destination en tant que travailleurs, étudiants, entrepreneurs, innovateurs, athlètes, artistes, membres de la famille et bien plus encore. [4]
Le Programme de développement durable à l'horizon 2030 et ses Objectifs de développement durable (ODD) ont expressément inclus la migration dans trois de ses cibles[5] et ont reconnu " la contribution positive des migrants à la croissance inclusive et au développement durable ; [...] que les migrations internationales sont une réalité multidimensionnelle d'une grande importance pour le développement des pays d'origine, de transit et de destination, qui appelle des réponses cohérentes et globales " (A/RES/70/1). Il faut donc s'efforcer d'améliorer la capacité, les possibilités et la dignité des migrants pour qu'ils contribuent pleinement à la société et s'y intègrent.
Par conséquent, les États et les parties prenantes doivent favoriser les avantages de la migration internationale et s'efforcer d'éliminer les facteurs entravant les droits de l'homme des migrants et de leurs familles. Comme le souligne le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme dans son rapport intitulé "Migration et droits de l'homme : Améliorer la gouvernance des migrations internationales fondée sur les droits de l'homme, les contributions des migrants "peuvent être encore renforcées en réduisant les coûts de la migration, en garantissant leurs droits et l'égalité de traitement avec les nationaux en ce qui concerne les conditions de travail, les salaires, la sécurité et la protection de la santé, la transférabilité des pensions et autres prestations de sécurité sociale, et en promouvant la reconnaissance mutuelle des diplômes et des qualifications".
Dans le cadre de la préparation du Sommet du futur des Nations unies qui aura lieu en septembre 2024, le rapporteur spécial espère que son premier rapport thématique contribuera aux discussions en cours. Il réitère son appel aux États membres pour qu'ils garantissent explicitement que les droits de l'homme des migrants sont inclus lors de la négociation du Pacte orienté vers l'action pour le Sommet et la voie à suivre pour l'avenir.[6]
Les initiatives et les cadres doivent être axés sur les personnes, fondés sur les droits de l'homme, sensibles au genre, aux handicaps, aux enfants et à l'âge afin de garantir l'inclusion sociale de tous les groupes. Les processus de prise de décision doivent inclure la participation active et la consultation des migrants à tous les stades. Le rapporteur spécial est prêt à fournir un soutien technique aux États membres.
Objectifs
Tout au long de ce rapport, le rapporteur spécial souhaite particulièrement:
- Mettre en évidence le rôle des migrants et de leurs familles dans les interactions positives, en particulier les contributions socioculturelles, civico-politiques et économiques apportées aux sociétés d'origine, de transit et d'accueil, afin de lutter contre la multiplication des récits et des mythes publics, ainsi que contre la discrimination à l'égard des migrants ;
- Examiner et analyser les facteurs qui aident les migrants à apporter une plus grande contribution aux sociétés (d'origine, de transit et de destination) d'un point de vue socioculturel, civique, politique et économique ;
- Examiner et analyser les facteurs qui entravent et les obstacles aux contributions des migrants ; faire progresser la compréhension des défis en matière de droits de l'homme auxquels sont confrontés les migrants et leurs familles en analysant la manière dont ces facteurs augmentent leur vulnérabilité aux violations des droits de l'homme dans les pays d'origine, de transit et de destination ;
- Examiner les cadres et mesures nationaux, régionaux et internationaux existants qui entravent les contributions des migrants aux communautés d'origine, de transit et de destination, en mettant particulièrement l'accent sur les migrants touchés de manière disproportionnée, notamment les femmes et les filles migrantes, les enfants, les personnes âgées, les personnes handicapées, les autochtones et les personnes sans papiers ou en situation irrégulière ;
- Identifier les pratiques prometteuses et les exemples concrets aux niveaux local, national, régional et international, qui s'attaquent aux facteurs qui font obstacle et facilitent, maximisent et optimisent les contributions des migrants dans les sociétés, les économies, les politiques et les cultures ;
- Recommander des actions et des mesures applicables aux niveaux national, régional et international pour éliminer les violations des droits de l'homme des migrants ainsi que pour reconnaître et faciliter les contributions positives des migrants.
Questions clés et types de contributions/commentaires recherchés
Le rapporteur spécial invite toutes les parties intéressées, notamment les États, les organisations de la société civile, les organisations internationales et régionales, les institutions nationales des droits de l'homme, les organisations de la société civile, les universitaires, les agences des Nations unies, les juristes, les experts politiques, les représentants des entreprises, les migrants et les autres parties prenantes, à partager des informations, des documents, des déclarations, des analyses et des contributions à ce rapport thématique.
Les soumissions anticipées sont vivement encouragées. Des documents complémentaires, tels que des rapports, des études universitaires et d'autres documents de référence, peuvent être annexés à la soumission.
Bien que toutes les contributions soient les bienvenues et que la liste ci-dessous ne soit en aucun cas exhaustive, le rapporteur spécial souhaiterait recevoir des informations sur les questions suivantes :
- Fournir des exemples de la contribution des migrants à divers secteurs de la société et toute donnée statistique pertinente ou ventilée en fonction de l'âge, du sexe, du handicap, de l'appartenance ethnique, de la religion, de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre, du statut migratoire ou d'autres catégories.
- Quelles sont les mesures positives prises par les États aux niveaux local, national, régional et international pour faciliter, maximiser et optimiser les contributions des migrants, de leurs familles et de leurs communautés dans les sociétés d'origine, de transit et d'accueil ? Veuillez fournir des détails, qui peuvent inclure, sans s'y limiter, l'élaboration et/ou la mise en œuvre de cadres législatifs, politiques et institutionnels ; des mécanismes de régularisation et des programmes d'intégration ; des efforts d'intégration sociale et de cohésion sociale ; un soutien matériel et/ou financier ; des possibilités de recrutement, d'éducation et/ou de formation ; l'accès à la santé, à la protection sociale, à la justice et à la réparation.
- Quelles sont les mesures positives mises en œuvre par les organisations de la société civile et les parties prenantes non gouvernementales pour maximiser et optimiser les contributions des migrants ? Dans l'affirmative, veuillez fournir des détails.
- Quels sont les obstacles juridiques et pratiques qui entravent la réalisation et/ou la reconnaissance des contributions des migrants dans les communautés d'origine, de transit et de destination ? Veuillez fournir des détails, qui peuvent inclure, sans s'y limiter, l'élaboration et/ou la mise en œuvre de cadres législatifs, politiques et institutionnels, ainsi que le discours public.
- Quelle est l'efficacité des mécanismes existants utilisés par les migrants et leurs familles pour surmonter les obstacles auxquels ils sont confrontés ?
- Comment pouvons-nous sensibiliser, repenser et changer la façon dont on parle de la migration, en particulier lorsque des récits néfastes sur la migration sont insérés dans le discours public et politisés ?
- Quelles recommandations pratiques proposeriez-vous pour relever efficacement ces défis et protéger les droits de l'homme des migrants dans les pays d'origine, les pays de transit et les communautés d'accueil ?
Comment les contributions seront-elles utilisées
Toutes les soumissions seront publiées sur le site web du mandat. Si vous souhaitez préserver la confidentialité de votre contribution, veuillez l'indiquer clairement au moment de la soumission.
Pour plus d'informations sur le rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, veuillez cliquer ici.
[1] Voir A/HRC/53/26 ; et OIM, Rapport sur la migration mondiale 2020 : Chapitre 12 - Réflexions sur les contributions des migrants à une époque de perturbation et de désinformation croissantes.
[2] Voir OIM, Rapport sur les migrations mondiales 2022.
[4] Banque mondiale, "Rapport sur le développement dans le monde 2023 : Migrants, réfugiés et sociétés".
[5] L'objectif 8, qui vise à promouvoir une croissance économique soutenue, inclusive et durable, le plein emploi productif et un travail décent pour tous ; l'objectif 10, qui vise à réduire les inégalités au sein des pays et entre eux ; et l'objectif 17, qui porte sur les questions systémiques.