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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES SOCIAUX ET CULTURELS A ENTENDU DES ONG CONCERNANT LA SITUATION DANS DES PAYS DONT LES RAPPORTS SONT À L'EXAMEN
13 août 2001
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CESCR
26ème session
13 août 2001
Après-midi
Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a entendu, cet après-midi, les déclarations de plusieurs organisations non gouvernementales qui sont intervenus sur la situation, au regard du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dans les États parties suivants, qui soumettent des rapports au Comité au cours de la session qui s'est ouverte aujourd'hui : Sénégal, Panama, Ukraine, Japon, Allemagne et Népal.
Les représentants des organisations non gouvernementales ont notamment mis l'accent sur les discriminations enregistrées à l'égard des populations vulnérables telles que les femmes, les minorités ethniques et les personnes handicapées dans ces pays. Un grand nombre de représentants ont attiré l'attention sur des violations des droits économiques, sociaux et culturels dans certains pays et demandé que les gouvernements concernés prennent des mesures pour y remédier.
Le Comité a entendu les représentants des organisations suivantes : Organisation mondiale contre la torture (OMCT); Centre d'études juridiques de défense des droits de la procréation; Rencontres africaines pour la défense des droits de l'homme (RADDHO); Comité d'Amérique latine pour la défense des droits de la femme (CLADEM); International Women's Rights Action Watch; Comité japonais des ONG pour le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels; Buraku Liberation and Human Rights Research Institute; Fédération japonaise d'association du barreau; Comité des travailleurs japonais pour les droits de l'homme; Réseau international des travailleuses (WWIN); Hyogo International Human Rights Research Group; Association pour les droits de l'homme des Coréens au Japon; Lawyers' Group for Postwar Compensation for Koreans Living in Japan who are Japanese Military Veterans or Allied Civilian Personnel; Lawyers Group for Philippino Victims (comfort women); Centre on Housing Rights and Evictions; Alliance contre la déportation de Bade du Sud; FIAN-pour le droit à se nourrir; Forum pour l'amélioration de la situation des personnes âgées nécessitant des soins en Allemagne; Rural Reconstruction Nepal.
Le Comité a, par ailleurs, entendu les observations de représentants d'organisations non gouvernementales concernant la situation en ce qui concerne l'application des dispositions du Pacte en Israël, en Angola et au Zimbabwe, États parties dont les rapports ont été examinés par le passé par le Comité.
Demain matin, à 10 heures, Mme Mary Robinson, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, s'adressera au Comité, qui entamera ensuite l'examen du rapport du Sénégal (E/1990/6/Add.25).
Audition d'ONG sur le rapport du Sénégal
La représentante de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a déclaré que la Constitution sénégalaise de 1991 garantit les droits fondamentaux. Elle a toutefois souligné qu'aucun organe n'a été mis en place pour garantir le respect des droits économiques, sociaux et culturels. L'OMCT constate que les réformes entreprises au Sénégal ne sont qu'administratives et juridiques et déplore un manque de participation de la société civile aux programmes et projets. L'OMCT est également préoccupée par la situation rurale du Sénégal et plus particulièrement par le manque d'accès des paysans aux crédits. Le déficit de droits syndicaux dans le secteur public est également une source d'inquiétude pour l'OMCT.
Le représentant du Centre d'études juridiques de défense des droits de la procréation a déclaré que malgré les efforts de la communauté internationale, des organisations non gouvernementales et des organismes des Nations Unies, le taux de mortalité infantile demeure très élevé au Sénégal. Cette mortalité est due au manque d'infrastructures adéquates ainsi qu'aux différentes pratiques dangereuses pratiquées au Sénégal telles que l'avortement illégal. Par ailleurs, sur les 79 000 adultes séropositifs dans le pays, 40 000 sont des femmes. Le Centre souhaite donc que les mesures de prévention de la propagation de la pandémie soient ciblées. Le Centre estime que les politiques mises en place par le Ministère de la santé en matière de santé génésique sont trop limitées et demande que le Sénégal reconnaisse l'importance de la place de la femme dans la société.
La représentante des Rencontres africaines pour la défense des droits de l'homme (RADDHO), a déclaré que des programmes ont été mis en place pour améliorer la situation de la femme au Sénégal mais a estimé que les mesures qui ont été prises sont insuffisantes. En raison de l'analphabétisme (71% en l'an 2000), les femmes ont des problèmes pour accéder au monde de l'emploi. EN matière de santé, RADDHO déplore que le personnel de santé soit concentré à Dakar et que les zones rurales soient souvent oubliées. La représentante de RADDHO a, par ailleurs, déclaré que la situation des handicapés dans le pays est déplorable. En ce qui concerne les réfugiés, RADDHO estime qu'ils ne sont pas suffisamment protégés et souhaite que des mesures soient prises pour leur permettre l'accès à l'éducation et à la santé.
Audition d'ONG sur le rapport du Panama
La représentante du Comité d'Amérique latine pour la défense des droits de la femme (CLADEM) a salué les progrès enregistrés par le Panama dans le domaine des normes juridiques en matière de droits économiques, sociaux et culturels. Elle a toutefois souligné que, dans la pratique, on constate notamment que les entreprises mènent encore des politiques de discrimination à l'égard des femmes. Par ailleurs, les lois concernant le harcèlement sexuel ne sont pas encore très claires et le CLADEM préconise la mise en place d'un mécanisme pour protéger les femmes et leurs donner les moyens de se défendre. Le CLADEM déplore que le travail des femmes domestiques ne soit pas réglementé et estime, par ailleurs, que l'État doit prendre des mesures concernant l'accès des femmes aux soins de santé, et plus particulièrement en ce qui concerne les mineures enceintes et les filles mères.
Audition d'ONG sur le rapport de l'Ukraine
La représentante de l'International Women's Rights Action Watch a déclaré que les droits des femmes sont garantis par la loi ukrainienne mais que les discriminations se poursuivent. La notion d'égalité entre hommes et femmes n'est pas respectée. L'organisation estime que le Gouvernement ukrainien ne respecte pas ses obligations en vertu du Pacte. Il n'a pas pris de mesures concernant les groupes les plus vulnérables, tels que les femmes et les handicapés. Les femmes représentent 62 à 66% des chômeurs et la discrimination sur le marché du travail est la règle.
Audition d'ONG sur le rapport du Japon
Le représentant du Comité des ONG pour la présentation des rapports sur le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels a souligné les discriminations dont sont victimes les populations autochtones, les femmes, les handicapés et les homosexuels et a déclaré que beaucoup de progrès reste à faire dans ce domaine au Japon. Il a également souligné que les Coréens et d'autres étrangers continuaient d'être défavorisés dans plusieurs domaines, en particulier en matière d'emploi, de sécurité sociale, de soins médicaux et d'éducation. Le représentant a par ailleurs dénoncé la situation des sans-abri et les expulsions forcés dans le pays.
La représentante du Buraku Liberation and Human Rights Research Institute a déclaré que le Gouvernement japonais a adopté des lois spéciales depuis 1969 pour éliminer la discrimination à l'égard des Buraku. Mais le peuple buraku continue de souffrir de discrimination et de préjugés, en particulier en ce qui concerne le mariage, l'éducation et l'emploi.
Le représentant de la Fédération japonaise d'associations du barreau a déclaré que, dans la jurisprudence japonaise, les traités internationaux sont considérés comme législations nationales, mais le Gouvernement japonais estime que le Pacte représente pour les États parties des engagements politiques et non des obligations juridiques. Il a ajouté que les tribunaux ne permettent pas aux individus poursuivis d'invoquer le Pacte et il a souhaité que le gouvernement assure une formation aux fonctionnaires chargés de l'application des lois. Afin de respecter ses obligations en vertu du Pacte le Gouvernement japonais doit mettre en place une institution indépendante pour les droits de l'homme.
Le représentant du Comité des travailleurs japonais pour les droits de l'homme, a déclaré que le Gouvernement japonais exerce des discriminations à l'égard de certains de ses employés et que la procédure de recours est très longue. Le Comité estime que des réformes doivent être engagées au Japon pour répondre aux dispositions du Pacte. Le représentant a par ailleurs déclaré que son Comité a constaté que certains juges semblent ignorer que le Pacte est juridiquement contraignant.
La représentante du Réseau international des travailleuses a dénoncé les discriminations en matière de rémunération exercées contre les femmes au Japon. Les femmes sont considérées comme étant moins efficaces en raison du risque de grossesse et sont par conséquent moins bien rémunérées. La représentante a souligné que la Cour suprême a récemment constaté que ?notre pays n'a pas de législation sur l'égalité de rémunération entre hommes et femmes. Le Japon doit par respecter ses obligations en vertu du Pacte, en particulier en ce qui concerne la discrimination entre hommes et femmes. La représentante a souhaité l'adoption d'une législation sur l'égalité en matière d'emploi.
Le représentant du Hyogo International Human Rights Research Group a déclaré que lors du tremblement de terre de Kobé en 1995, l'assistance portée aux victimes était variable selon l'origine de la population. Certains groupes tels que les femmes, les handicapés et les Buraku ont été victimes d'une discrimination. Le représentant a souhaité que soit assurée l'égalité des chances en matière de logement à la suite de catastrophes naturelles et que soient prises des mesures de lutte contre les catastrophes.
La représentante de l'Association pour les droits de l'homme des Coréens au Japon a présenté le rapport de son organisation en mettant l'accent sur la situation déplorable des Coréens qui vivent au Japon depuis l'occupation coloniale de la Corée par l'armée japonaise. L'Association estime qu'aucune mesure n'a été prise pour lutter contre la discrimination. Le représentant a fait observer que le financement des écoles coréennes et des bourses était en déclin et qu'une politique d'élimination systématique de l'utilisation de la langue coréenne était appliquée.
Le représentant du Lawyers' Group for Postwar Compensation for Koreans Living in Japan who are Japanese Military Veterans or Allied Civilian Personnel a brièvement présenté sa situation personnelle en qualité de vétéran coréen enrôlé dans l'armée japonaise pendant la deuxième guerre mondiale, indiquant qu'en vertu des règlements en vigueur, il n'avait pas droit au versement d'indemnités en tant que vétéran de guerre.
Le représentant du Lawyers' Group for Philippino victims (comfort women), a déclaré qu'à la fin de la guerre le Gouvernement japonais avait créé un fonds pour s'acquitter de ses obligations morales vis-à-vis des «femmes de réconfort» asiatiques. Les femmes réclament aujourd'hui des excuses officielles et souhaitent que la situation soit reconnue et rendue publique par le Japon. Le Groupe souhaite également que le Japon mentionne ces faits dans les livres d'histoire pour s'assurer qu'ils ne se reproduiront plus.
Le représentant du Centre on Housing Rights and Evictions a pris la parole au nom des victimes du déni du droit au logement au Japon. Dans ce pays, un grand nombre de personnes sont privées de logement et les autorités refusent d'admettre que le droit au logement peut être invoqué devant un tribunal. Un nombre de plus en plus élevé de sans-abri vivent au Japon. Lors du tremblement de terre de Kobé en 1995, les autorités japonaises ont favorisé la démolition de maisons saines alors que les victimes du tremblement de terre n'étaient pas encore relogées.
Audition d'ONG sur le rapport de l'Allemagne
Le représentant de l'Alliance contre la déportation de Bade du Sud a attiré l'attention sur la situation des réfugiés et demandeurs d'asile en Allemagne. Il a souligné les problèmes auxquels sont confrontés les demandeurs d'asile dans les centres d'accueil. Leurs conditions de vie dans ces centres sont très précaires et la police pénètre souvent de manière brutale et sans préavis. Selon le représentant, l'intégration des demandeurs d'asile n'est pas favorisé et ils sont généralement déboutés du droit d'asile. Les soins de santé sont limités aux personnes en danger de mort et aux femmes enceintes. Les enfants n'ont pas accès à une scolarité pendant la procédure de demande d'asile. L'accès au monde du travail est également réduit pour les demandeurs d'asile.
La représentante du FIAN-pour le droit à se nourrir (Allemagne), intervenant également au nom du réseau allemand des organisations des droits de l'homme, a estimé que le droit de bénéficier à l'assistance sociale doit être octroyé sans conditions et que les personnes ne souhaitant pas travailler ne doivent pas y être obligées. L'application universelle des droits protégés par le Pacte, notamment le droit à la santé, doit être respectée pour tous, y compris les migrants sans papiers. En Allemagne, les sans papiers risquent l'expulsion, c'est pourquoi ils craignent de se faire soigner dans des structures publiques, la loi prévoyant des poursuites judiciaires à l'encontre de toute personne venant en aide aux sans-papiers.
Un second représentant de l'organisation a abordé le thème des citoyens allemands vivant à l'étranger qui mènent des activités illégales dans des pays en développement. Le représentant a pris l'exemple de l'exportation de farines animales vers le Nigéria à la suite de la crise de la vache folle.
Le représentant du Forum zur Verbesserung der Situation pflegebedürftiger Menschen in Deutschland (Forum pour l'amélioration de la situation des personnes âgées nécessitant des soins en Allemagne) a soulevé les nombreux problèmes rencontrés dans les établissements médicaux sociaux. Les occupants de ces centres souffrent de malnutrition, de manque d'hygiène, de déshydratation et manquent généralement de soins en raison du manque de personnel. Il a déclaré qu'un grand nombre de résidents de ces centres sont drogués et que leurs conditions de vie sont intolérables. Le représentant demande au Comité d'interroger l'Allemagne à ce sujet.
Audition d'ONG sur le rapport du Népal
Le représentant de la Rural Reconstruction Nepal (RRN) a soulevé le problème du manque de protection juridique des personnes de certains groupes au Népal, et plus particulièrement les femmes. Les femmes subissent des discriminations dans les zones rurales. L'accès à l'éducation et à la santé n'est pas toujours accessible aux familles népalaises. RRN estime que les personnes vivant dans les zones rurales éloignées doivent être protégés et les droits des femmes dans ces zones doit être assurés par une législation appropriée. Le gouvernement doit également réduire le niveau de pauvreté qui touche 40% de la population et assurer un revenu minimum aux sans emplois.
Observations d'ONG concernant la situation en Israël, au Zimbabwe et en Angola
La représentante de l'Organisation mondiale contre la torture a déclaré que son organisation n'avait constaté aucune amélioration de la situation des Palestiniens dans les territoires occupés. Israël refuse l'application du Pacte dans les territoires occupés. L'OMCT souhaite que le Comité demande à Israël de s'expliquer sur sa politique de violation des droits de l'homme institutionnalisée à l'égard des Palestiniens.
La représentante du Women and Land Lobby Group , a déclaré que la situation des femmes ne s'est pas améliorée au Zimbabwe malgré les recommandations adressées à ce pays par le Comité lors de l'examen du rapport présenté par le gouvernement.
Le représentant de Congress of Racial Equality (CORE) a demandé aux autorités angolaises d'assurer le respect du droit au logement de 50 000 personnes vivant dans la banlieue de Luanda et de garantir qu'ils ne soient pas expulsés.
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