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Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels tient un débat sur le droit e jouir de conditions de travail justes et favorables
17 juin 2015
Comité des droits économiques,
sociaux et culturels
16 juin 2015
Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a tenu, cet après-midi, une demi-journée de débat général sur le droit qu'a toute personne de jouir de conditions de travail justes et favorables, reconnu par l'article 7 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité doit éventuellement adopter une observation générale sur la question.
Le Président du Comité, M. Waleed Sadi, a souligné que l'article 7 porte sur un aspect très important du Pacte, à savoir des conditions de travail justes et favorables. Conformément à cette disposition, les États parties au Pacte «reconnaissent le droit qu'a toute personne de jouir de conditions de travail justes et favorables, qui assurent notamment: a) La rémunération qui procure, au minimum, à tous les travailleurs: i) Un salaire équitable et une rémunération égale pour un travail de valeur égale sans distinction aucune; en particulier, les femmes doivent avoir la garantie que les conditions de travail qui leur sont accordées ne sont pas inférieures à celles dont bénéficient les hommes et recevoir la même rémunération qu'eux pour un même travail; ii) Une existence décente pour eux et leur famille conformément aux dispositions du présent Pacte; b) La sécurité et l'hygiène du travail; c) La même possibilité pour tous d'être promus, dans leur travail, à la catégorie supérieure appropriée, sans autre considération que la durée des services accomplis et les aptitudes; d) Le repos, les loisirs, la limitation raisonnable de la durée du travail et les congés payés périodiques, ainsi que la rémunération des jours fériés».
Les représentants d'une dizaine d'organisations non gouvernementales et institutions des Nations Unies, ainsi que la Grèce, ont participé au débat, présentant leurs observations au sujet du projet d'observation générale qui a été présenté par les deux corapporteurs du Comité chargés de coordonner l'examen de ce texte, Mme Virginia Brás Gomes et M. Renato Zerbini Ribeiro Leão. Plusieurs membres du Comité sont également intervenus.
La prochaine séance publique du Comité se tiendra vendredi prochain, 19 juin, à l'occasion de la clôture des travaux de sa cinquante-cinquième session.
Aperçu des débats
MME MARIA-VIRGINIA BRÁS GOMES, corapporteuse du Comité pour le projet d'observation générale relatif au droit à des conditions de travail justes et favorables (article 7 du Pacte), a souligné que la crise économique n'est pas favorable à la création d'emploi et à la croissance et que ces dernières années ont vu les conditions de travail justes et favorables mises à mal, du fait de l'austérité et de l'affaiblissement général des conditions de travail, y compris des contrats de travail. C'est pourquoi il a été suggéré de rédiger une observation générale portant sur le droit à des conditions de travail justes et favorables (article 7 du Pacte), a expliqué la rapporteuse.
Mme Brás Gomes a ensuite attiré l'attention sur les implications sexospécifiques de l'article 7 du Pacte. Le débat de cet après-midi vise à recueillir les observations et propositions spécifiques de chacun concernant le projet d'observation général tel qu'actuellement rédigé, a-t-elle souligné, précisant que ce projet fera ensuite l'objet d'un examen en seconde voire en troisième lecture s'il le faut, avant d'être adopté préférablement d'ici l'an prochain.
M. RENATO ZERBINI RIBEIRO LEÃO, également corapporteur du Comité pour l'examen du projet d'observation générale, a notamment indiqué que le projet d'observation générale en l'état actuel comportait quatre parties respectivement consacrées à l'introduction, au contenu normatif (qui couvre des questions spécifiques d'application), aux obligations et aux violations (des droits énoncés à l'article 7).
Confédération syndicale internationale a félicité les deux corapporteurs pour ce projet d'observation générale, avant de souhaiter que soient précisées certaines parties du texte, s'agissant notamment de la question du salaire minimum, dont il conviendrait de souligner qu'il s'agit d'un salaire minimum de subsistance, propre à permettre aux familles des travailleurs de vivre dans des conditions acceptables. Il conviendrait aussi de préciser ce que l'on entend par «salaire équitable»; un tel salaire doit faire l'objet d'une négociation collective. Plutôt que de salaire réaliste, il conviendrait de parler de salaire adéquat (ou approprié).
Autistic Minority International, «première organisation de défense des autistes qui soit dirigée par des autistes», a rappelé que l'autisme est une différence neurologique à la fois génétique et héréditaire, précisant qu'il touche 1% de la population mondiale. Les autistes passent leur vie à surmonter des obstacles que les non-autistes ne perçoivent même pas. La crainte de la discrimination sur le lieu de travail est la première raison pour laquelle les autistes ne parlent pas de leur maladie, ce qui peut entraîner de nombreux burn-outs. L'organisation est satisfaite que le projet d'observation générale tel qu'actuellement rédigé mentionne que les personnes handicapées sont victimes de discriminations, attirant l'attention sur les nombreux cas où des autistes ne sont pas payés ou touchent des salaires moindres.
Clean Clothes Campaign a indiqué que son organisation est un réseau international visant l'amélioration des conditions de travail dans l'industrie de l'habillement. Depuis 26 ans, on constate en effet que les conditions de travail dans cette industrie sont de plus en plus difficiles et que les droits des travailleurs y sont violés. Tout en jugeant «bon» le projet d'observation générale aujourd'hui présenté par le Comité, l'organisation souhaiterait que des précisions soient apportées concernant les questions du salaire, de la sécurité des bâtiments - sécurité au travail - et de la responsabilité des entreprises, y compris s'agissant des filières d'approvisionnement. Le salaire minimum doit fournir un salaire vital au travailleur.
La Grèce a souligné que ce serait une erreur de penser que les progrès en matière de respect des normes internationales en matière de conditions de travail sont définitivement acquis. C'est pourquoi le présent débat est particulièrement important; il convient en effet d'œuvrer à la promotion de chacune des dispositions de l'article 7 du Pacte. De l'avis de l'actuel gouvernement grec, la promotion du droit du travail, loin de miner la compétitivité, est bien une condition préalable pour toute croissance durable.
La Commission internationale de juristes a exhorté le Comité à abroger ou revoir la formulation du premier paragraphe du projet d'observation générale tel qu'actuellement rédigé, afin de souligner que ce texte ne vise pas seulement à aider les États dans la préparation de leurs rapports périodiques. En outre, le texte de l'observation générale doit bien faire comprendre que le degré de jouissance du droit à des conditions justes et favorables n'est pas lié au fait que le travailleur soit employé dans le secteur public ou dans le secteur privé.
Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme a souscrit au diagnostic mentionné au paragraphe 3 du projet d'observation générale s'agissant de l'écart de salaires entre hommes et femmes. Il conviendrait néanmoins dans ce texte de faire référence à la tendance générale à l'attribution de salaires inadéquats, y compris pour les travailleurs pauvres, avant même de parler d'écarts de salaires. Il faudrait en outre qu'un paragraphe porte spécifiquement sur les conditions de travail des travailleurs migrants.
Le Programme on Women's Economic, Social and Cultural Rights a souligné que toutes les femmes s'engagent dans des activités économiques diverses, contribuant non seulement aux revenus de leur foyer, mais aussi à la richesse nationale; elles consacrent beaucoup de leur temps et de leur énergie à garantir la sécurité alimentaire (subsistance) des membres de leur famille, mais ces contributions vitales sont sous-évaluées et non reconnues, considérées comme insignifiantes du point de vue économique. Il faut garantir que la majorité des femmes grâce à un salaire minimum bénéficient de conditions de vie minimales. Au-delà de l'égalité de jure, il faut s'interroger sur l'égalité de facto quant à la jouissance par les femmes de leurs droits économiques, sociaux et culturels.
International Disability Alliance a indiqué qu'elle représentait environ un milliard de personnes handicapées dans le monde et a souligné l'importance du présent projet d'observation générale aux fins de l'inclusion de ces personnes dans le marché du travail. Trop souvent, on n'accorde aux personnes handicapées qu'un salaire de subsistance car on considère qu'elles sont moins productives que les autres. L'organisation a plaidé pour une campagne de sensibilisation auprès des employeurs afin qu'ils aient connaissance de l'ensemble de leurs devoirs à l'égard des personnes handicapées. Elle a également insisté pour qu'aucune discrimination ne frappe un travailleur en raison de sa proximité avec une personne handicapée, enfant handicapé à charge, par exemple.
Make Mothers Matter a attiré l'attention sur les pénalités dont souffrent les femmes du fait de la maternité, en particulier. Les choix de vie personnelle que font les femmes (congés-maternité, année sabbatique…) ne sont souvent pas de véritables choix. Il convient donc de permettre aux hommes comme aux femmes d'avoir des interruptions de carrière, afin en particulier de pouvoir s'occuper de leurs enfants. Il faudrait que ces questions soient abordées dans le texte du projet d'observation générale étudié cet après-midi.
L'Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social (UNRISD) a attiré l'attention sur la problématique du harcèlement sexuel sur le lieu du travail et a suggéré que soit renforcée la mention faite à ce problème dans l'actuel texte du projet d'observation générale, de manière à influer sur l'éventuelle adoption d'une norme internationale sur la question alors que l'OIT débat depuis deux ans d'une éventuelle convention sur le harcèlement sexuel.
L'International Lesbian and Gay Association (ILGA) a souhaité que le projet de texte fasse référence aux lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexes et à la question de l'identité sexuelle, alors que ces personnes font l'objet de harcèlements sur leur lieu de travail.
Une experte du Comité a insisté sur l'importance qu'il y a à assurer un salaire égal à travail égal pour les femmes comme pour les hommes; il s'agit là d'un droit immédiat plus que d'un droit à réalisation progressive, a-t-elle fait observer.
Une ONG a reconnu que dans nombre de pays, y compris au Japon ou en République de Corée, il existe d'importantes différences de contrats et de salaires entre hommes et femmes. En l'état, le projet d'observation générale est confus pour tout ce qui a trait à l'égalité de salaire pour un travail égal, a souligné la représentante d'une autre ONG; l'impression qui se dégage du texte est qu'il s'agirait là d'une norme susceptible de faire l'objet d'une réalisation progressive.
Une experte du Comité a exprimé l'espoir que les syndicats seront en mesure de contribuer de manière plus systématique à la réalisation de la norme relative à un salaire égal pour un travail égal. Un autre membre du Comité a exprimé l'espoir que le salaire minimum ne soit jamais invoqué pour justifier des mesures d'austérité.
La Grèce a fait observer que dans ce pays, le salaire minimum a été réduit de plus de 20% et même de plus de 30% pour les moins de 25 ans; il s'établit aujourd'hui en dessous du seuil de pauvreté, de sorte qu'il ne constitue pas un salaire décent.
Le Comité a toujours dit, mais sans aller au-delà, que le salaire minimum devait garantir une vie décente, a rappelé la corapporteuse pour ce projet, Mme Brás Gomes. Quant à la problématique des obligations des États et des acteurs privés, il y a toujours une différence entre le langage utilisé à l'intention des États et celui employé à l'intention des acteurs privés, a-t-elle ajouté. Pour ce qui est de la suggestion de revoir la formulation du premier paragraphe du projet d'observation générale tel qu'actuellement rédigé, Mme Brás Gomes a souligné qu'il s'agit là du libellé habituel du premier paragraphe de toute observation générale du Comité. Cette observation devrait permettre d'atténuer les inégalités socioéconomiques et c'est en tout cas à cela qu'il conviendrait de veiller, a conclu la corapporteuse.
L'autre corapporteur, M. Ribeiro Leão, a assuré que toutes les contributions qui ont été présentées seront prises très au sérieux aux fins de l'élaboration du projet final de cette observation générale.
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