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Communiqués de presse Haut-Commissariat aux droits de l’homme

Myanmar : la situation des droits humains s’aggrave alors que l’armée, accusant des pertes, procède à des attaques aveugles, selon Volker Türk

30 janvier 2024

Une photo prise le 3 avril 2021 montre des personnes passant à vélo devant une barricade de fortune en feu, érigée par des manifestants contre le coup d’État militaire, dans la commune de Tamwe, à Yangon. © AFP

GENÈVE (le 30 janvier 2024) – Trois ans après le coup d’État militaire, la crise des droits humains au Myanmar, qui ne cesse de se détériorer, atteint désormais son paroxysme, face à une communauté internationale qui n’accorde pas suffisamment d’attention à la misère et à la douleur de ce peuple, a déclaré aujourd’hui Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.

« Avec toutes les crises qui sévissent dans le monde, il est important de n’oublier personne. Le peuple du Myanmar souffre depuis trop longtemps. Depuis la fin du mois d’octobre de l’année dernière, la situation s’est encore détériorée en raison des tactiques établies de longue date par l’armée pour les cibler », a-t-il déclaré avant l’anniversaire du coup d’État, le 1er février.

« Les batailles rangées entre l’armée et les groupes d’opposition armés ont entraîné d’énormes déplacements et pertes civils. Après avoir essuyé revers sur revers sur le champ de bataille, l’armée s’est déchaînée, lançant des vagues de bombardements aériens et de frappes d’artillerie aveugles. »

Des sources ont pu confirmer que plus de 554 personnes sont mortes depuis le mois d’octobre. En 2023, le nombre total de civils tués par l’armée s’élèverait à plus de 1 600, soit environ 300 personnes de plus par rapport à l’année précédente. En date du 26 janvier, des sources crédibles ont établi que près de 26 000 personnes avaient été arrêtées pour des motifs politiques, dont 19 973 sont toujours en détention. Certaines de ces personnes auraient été victimes d’actes de torture et de mauvais traitements, sans espoir de pouvoir bénéficier d’un procès équitable. Ces trois dernières années, 1 576 personnes sont mortes alors qu’elles étaient détenues par l’armée.

« Les tactiques de l’armée ont toujours été axées sur la punition des civils qu’elle considère comme soutenant ses ennemis », a déclaré M. Türk. « En conséquence, l’armée a régulièrement pris pour cible des civils et des biens protégés par le droit international humanitaire, en particulier des centres médicaux et des établissements scolaires. »

« Les bombardements et les frappes aériennes aveugles soulignent l’absence de mesures visant à protéger les civils sur le terrain, notamment l’interruption des communications de base qui permettraient d’avertir les civils avant les combats afin qu’ils puissent se mettre à l’abri. »

Dans 74 communes, dont la plupart des 17 communes de l’État rakhine, les services de communication et le réseau Internet subissent des coupures partielles, intermittentes ou totales.

L’État rakhine a été particulièrement touché depuis la reprise des combats en novembre. De nombreuses communautés, en particulier les Rohingya, souffraient déjà des conséquences du cyclone Mocha et des restrictions imposées pendant des mois par l’armée à l’accès à l’aide humanitaire et aux autres formes d’assistance. Plusieurs rapports font état de morts et de blessés dans les villages rohingya bombardés par l’armée.

Le vendredi 26 janvier, des combats entre l’armée arakanaise et l’armée du Myanmar auraient fait au moins 12 morts et 30 blessés parmi les civils rohingya dans le village de Hpon Nyo Leik, où les habitants sont pris au piège entre les deux parties belligérantes. L’armée arakanaise aurait positionné ses troupes à l’intérieur et autour de ce village rohingya, anticipant les attaques de l’armée du Myanmar. Cette dernière a bombardé le village à de nombreuses reprises, détruisant ses infrastructures.

Les parties à un conflit armé doivent veiller constamment à épargner les civils et les biens de caractère civil dans la conduite des opérations militaires, ce qui implique de prendre toutes les précautions possibles pour protéger la population civile sous leur contrôle contre les effets des attaques, a déclaré le Haut-Commissaire.

De même, les réfugiés rohingya, piégés dans des conditions humanitaires désastreuses dans des camps au Bangladesh et sans perspective de retour en toute sécurité, risquent à nouveau leur vie lors de voyages désespérés et dangereux par la mer, ne trouvant que peu de ports ou de communautés dans la région prêts à les accepter ou à les accueillir.

La communauté internationale doit redoubler d’efforts pour demander des comptes à l’armée, a déclaré le Haut-Commissaire, rappelant les mesures provisoires ordonnées par la Cour internationale de Justice pour que le Myanmar prenne « toutes les mesures en son pouvoir » afin de protéger les membres du groupe rohingya de tout acte futur pouvant être assimilé à un génocide, et prenne des mesures efficaces en vue d’assurer la préservation des preuves liées aux actes présumés.

« Cette crise ne sera résolue qu’en insistant sur la responsabilité des dirigeants militaires, la libération des prisonniers politiques et le rétablissement d’un régime civil », a déclaré M. Türk.

« J’invite instamment tous les États Membres à prendre des mesures appropriées pour faire face à cette crise, et notamment à envisager d’imposer de nouvelles sanctions ciblées contre l’armée afin de limiter sa capacité à commettre de graves violations et à ignorer le droit international, en limitant son accès aux armes, au kérosène et aux devises étrangères. »

« Je salue le courage et la résilience dont font preuve la société civile et le mouvement démocratique du Myanmar, qui représentent toutes les communautés ethniques, et je les invite à participer à tout processus politique visant à rétablir la démocratie et le respect des droits humains au Myanmar. »

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