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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ PRÉSENTE SES CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS SUR LE LUXEMBOURG ET L'ARABIE SAOUDITE

15 mai 2002



CAT
28ème session
15 mai 2002
Afternoon




Il demande au Luxembourg de mettre fin au placement
de mineurs en prison et de limiter puis d'abolir le recours
au régime d'isolement cellulaire -

Il recommande à l'Arabie saoudite de réexaminer
la question des châtiments corporels et d'incorporer le crime
de torture dans la législation nationale



Le Comité contre la torture a présenté, cet après-midi, ses conclusions et recommandations sur le Luxembourg et l'Arabie saoudite.
S'agissant du Luxembourg, le Comité félicite le pays de maintenir un niveau élevé de respect des droits de l'homme en général et de respect de ses obligations au titre de la Convention en particulier. Il note que la torture a été incorporée dans le Code pénal en tant que crime spécifique. Il recommande cependant au pays de s'abstenir de placer des mineurs dans des prisons pour adultes à titre de mesure disciplinaire. Il recommande en outre que la détention en isolement cellulaire soit strictement et spécifiquement régie par la loi et que le contrôle judiciaire soit renforcé de manière à ce que cette peine ne soit appliquée que dans des circonstances graves, en attendant son abolition.
En ce qui concerne l'Arabie saoudite, le Comité se félicite de l'évolution du cadre juridique depuis la préparation du rapport, qui vise à et visant à favoriser la primauté du droit et une administration adéquate de la torture. Il recommande toutefois au pays d'incorporer expressément dans son droit interne le crime de torture en des termes conformes à l'article premier de la Convention. Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par l'imposition, par des autorités judiciaires et administratives, de châtiments corporels – notamment la flagellation et l'amputation de membres – qui sont contraires à la Convention. Il se dit aussi préoccupé par le faible niveau de contrôle judiciaire de la détention avant jugement, ainsi que par les informations faisant état de détention au secret de détenus, en particulier durant la procédure d'enquête avant jugement. Il est recommandé à l'Arabie saoudite de s'assurer que les agents de la Muttawe'en (police religieuse) exercent une juridiction claire et précise conforme à la Convention.
La délégation a assuré que l'Arabie saoudite entend continuer sa coopération avec le Comité mais a jugé inadmissible que certaines parties des conclusions du Comité reprennent des allégations qui proviennent d'une seule organisation non gouvernementale, à savoir Amnesty International. Elle a déclaré que son gouvernement ne saurait accepter que l'on s'immisce dans des questions juridiques internes telles que le châtiment corporel, qui est prescrit par l'islam et a été en usage pendant plus de 1 400 ans. Elle a estimé que les conclusions du Comité à cet égard ne s'inscrivent pas dans le cadre de son mandat.
En fin de séance, le Comité a examiné les propositions d'amendement à son règlement intérieur ayant trait en particulier à l'article 19 de la Convention concernant la présentation des rapports par les États parties à la Convention.
Demain matin, à 10 heures, le Comité examinera des questions d'organisation et autres questions. Dans l'après-midi, à 15 heures, il présentera ses conclusions et recommandations sur le rapport de la Fédération de Russie.

Conclusions et recommandations sur le rapport du Luxembourg
Dans ses conclusions et recommandations sur les troisième et quatrième rapports périodiques du Luxembourg, examinés conjointement les 7 et 8 mai dernier, le Comité félicite le pays pour l'excellente qualité de son rapport. Il le félicite en outre de maintenir un niveau élevé de respect des droits de l'homme en général et de respect de ses obligations au titre de la Convention en particulier. Au titre des aspects positifs, le Comité note que tous les sujets de préoccupation ainsi que les recommandations antérieures de cet organe ont été positivement traités dans le détail. Il note en outre que par la loi du 24 avril 2000, la torture a été incorporée dans le Code pénal en tant que crime spécifique et en tant que circonstance aggravante d'un crime ou d'un délit contre la personne. De plus, la définition de la torture est largement basée sur celle énoncée à l'article premier de la Convention et a trait à la torture tant physique que psychologique, note le Comité. Il prend également note de la loi du 14 mai 2000 par laquelle le Luxembourg a ratifié le Statut de la Cour pénale internationale.
Le Comité recommande cependant au pays de s'abstenir de placer des mineurs dans des prisons pour adultes à titre de mesure disciplinaire. Il recommande en outre que la détention en isolement cellulaire soit strictement et spécifiquement régie par la loi et que le contrôle judiciaire soit renforcé de manière à ce que cette peine ne soit appliquée que dans des circonstances graves, en attendant son abolition, en particulier durant la détention avant procès. Le Comité recommande au Luxembourg d'envisager de prendre des dispositions en vue d'une compensation appropriée visant spécifiquement les victimes de la torture.
La délégation luxembourgeoise a remercié les membres du Comité pour avoir pris très au sérieux le rapport de son pays et avoir mis en lumière les difficultés persistantes dont les autorités ont conscience même si elles n'ont pas encore pris les mesures nécessaires.

Conclusions et recommandations sur le rapport de l'Arabie saoudite
Dans ses conclusions et recommandations sur le rapport initial de l'Arabie saoudite, examiné les 8 et 10 mai dernier, le Comité se réjouit des développements juridiques intervenus depuis la préparation du rapport et visant à favoriser la primauté du droit et une administration adéquate de la torture. Le Comité se réjouit en outre que l'Arabie saoudite ait indiqué que sa législation interne assure qu'aucune circonstance exceptionnelle, pas même des ordres émanant de supérieurs, ne peut être invoquée comme élément de défense contre une accusation de torture. Il se réjouit aussi que le pays ait indiqué que les déclarations obtenues sous la torture sont inadmissibles au procès et que les aveux sont révocables à tout moment de la procédure. Le Comité se félicite en outre de l'invitation adressée par le pays au Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats.
Tout en notant l'indication fournie par le pays selon laquelle la loi de la charia interdit expressément la torture, le Comité se dit néanmoins préoccupé par le fait que la loi interne de l'Arabie saoudite ne reflète pas elle-même explicitement cette interdiction et n'impose pas de sanctions pénales. Il recommande à l'Arabie saoudite d'incorporer expressément dans son droit interne le crime de torture en des termes conformes à l'article premier de la Convention. Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par l'imposition, par des autorités judiciaires et administratives, de châtiments corporels – notamment la flagellation et l'amputation de membres – qui sont contraires à la Convention. Il est donc recommandé au pays de réexaminer l'imposition de tels châtiments. Le Comité fait également part de sa préoccupation face aux différents régimes applicables, en droit et en pratique, aux nationaux et aux étrangers du point de vue de leurs droits à ne pas être soumis à une violation de la Convention et du point de vue de leur capacité à porter plainte contre une telle violation. Il est recommandé à l'Arabie saoudite de s'assurer que ses lois s'appliquent dans la pratique à tous les individus, quels que soient, entre autres, leur nationalité, leur sexe et leur appartenance religieuse.
Le Comité se dit par ailleurs préoccupé par les allégations indiquant que certains individus auraient vu leur détention avant jugement se prolonger au-delà des limites prescrites par la loi, ce qui accroît le risque d'être confronté à une conduite violant la Convention et peut même dans certains cas constituer en soi une telle violation. Le Comité est également préoccupé par des exemples de déni d'accès consulaire opposé à des détenus étrangers, parfois pendant une longue période de temps. Il se dit aussi préoccupé par le faible niveau de contrôle judiciaire de la détention avant jugement, ainsi que par les informations faisant état de détention au secret de détenus, parfois pour de longues périodes de temps, en particulier durant la procédure d'enquête avant jugement. Le Comité recommande que tous les lieux de détention ou d'emprisonnement se conforment à des normes suffisantes pour garantir que personne n'y soit soumis à la torture ou à tout autre traitement ou peine cruel, inhumain ou dégradant. Il est en outre recommandé à l'Arabie saoudite de s'assurer que ses lois et pratiques reflètent les obligations imposées par l'article 3 de la Convention (relatif au refoulement et à l'extradition). Il lui est aussi recommandé de s'assurer que les agents de la Muttawe'en (police religieuse) exercent une juridiction claire et précise conforme à la Convention et aux autres règles applicables en matière de non-discrimination. Le Comité recommande également à l'Arabie saoudite de prendre des mesures adéquates pour permettre la création d'organisations non gouvernementales indépendantes actives dans le domaine de la défense des droits de l'homme en général. Il est enfin recommandé au pays d'envisager de faire la déclaration prévue au titre de l'article 22 de la Convention (concernant les plaintes individuelles).
La délégation de l'Arabie saoudite a souligné que la tâche n'a pas été facile pour elle. Pour ce qui est des recommandations du Comité, l'Arabie saoudite les prend très au sérieux. La délégation a assuré que l'Arabie saoudite entend continuer sa coopération avec le Comité ainsi qu'avec les autres organes des Nations Unies. Un autre membre de la délégation a déploré que certaines parties des conclusions du Comité, en particulier dans le paragraphe 4 (sujets de préoccupation) reprennent des allégations fondées sur des informations qui proviennent d'une seule organisation non gouvernementale, à savoir Amnesty International. Ceci est inadmissible. Comment peut-on parler de dialogue ouvert dans de telles circonstances, a demandé la délégation. Elle a par ailleurs jugé inadmissible que ce même paragraphe des conclusions remette en cause une religion. Elle a déclaré que son gouvernement ne saurait accepter que l'on s'immisce dans des questions juridiques internes telles que le châtiment corporel, qui est prescrit par l'islam et a été en usage pendant plus de 1 400 ans. Elle a estimé que les conclusions du Comité à cet égard ne s'inscrivent pas dans le cadre de son mandat.



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