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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ CONTRE LA TORTURE ENTAME L'EXAMEN DU RAPPORT DE MONACO

05 mai 2004

Comité contre la torture 5 mai 2004
MATIN

Le Comité contre la torture a entamé ce matin l'examen du rapport de Monaco sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants.

Présentant le rapport de son pays, M. Gilles Noghes, Représentant permanent de Monaco auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a déclaré qu'aucune disposition législative ne permet, en droit monégasque, de justifier le recours à la torture. Aucune plainte relative à des actes de torture ou autres peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants n'a été enregistrée dans la Principauté.

La délégation monégasque est également composée de M. Bernard Gastaud, Conseiller juridique auprès du Ministre d'État; de M. Dominique Adam, Conseiller à la Cour d'appel des tribunaux de Monaco; de Mme Domique Pastor, Assistante du Conseiller juridique auprès du Ministre d'État et de M. Jean-Philippe Bertani, Premier secrétaire de la Mission permanente de Monaco auprès de l'Office des Nations Unies à Genève.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Monaco, M. Guibril Camara, a remercié la délégation pour la qualité de son rapport et souligné qu'aucune information faisant état de violations de dispositions de la Convention n'est parvenue au Comité. Il a demandé à la délégation de bien vouloir apporter des éclaircissements sur l'application de la Convention contre la torture, notamment en cas de conflit entre l'une de ses dispositions et la Constitution monégasque.

M. Claudio Grossman, corapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Monaco, a pour sa part demandé à la délégation de préciser si la Convention pouvait être appliquée de façon directe par les tribunaux. Un autre expert a demandé à la délégation de préciser si les autorités monégasques se tiennent informées des conditions de détention de Monégasques qui purgent leurs peines dans des prisons françaises.

À sa prochaine séance publique, cet après-midi à 15 heures, le Comité entendra les réponses de la République tchèque aux questions posées par les membres du Comité hier matin. Le Comité entendra les réponses de la délégation monégasque jeudi à 15 heures.


Présentation du rapport de Monaco

Présentant le rapport de son pays, M. GILLES NOGHES, Représentant permanent de la Principauté de Monaco auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, a fait valoir que l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe vient de donner un avis favorable à l'adhésion de Monaco au Conseil de l'Europe. Cette recommandation, a estimé le représentant, consacre le résultat d'un travail en profondeur au plan juridique mais elle reconnaît aussi une volonté politique du pays de renforcer les structures d'un État de droit. Ces changements profonds, qui instaurent de nouveaux équilibres, notamment entre les femmes et les hommes, ont nécessité beaucoup d'attention de la part des juristes monégasques mais n'ont pas permis de progresser aussi vite dans tous les domaines. Le Gouvernement estime cependant avoir enregistré des progrès dans l'approche des questions qui intéressent le Comité, a estimé le représentant. M. Noghes a expliqué que le Gouvernement est conscient de ne pas pouvoir dès à présent donner complète satisfaction aux demandes du Comité du fait, d'une part, de ne pouvoir avancer aussi vite qu'il le souhaite dans la mise à jour des codes et lois, mais aussi parce que le pays n'étant pas confronté à des problèmes graves dans ce domaine, les mesures à prendre peuvent parfois paraître sans rapport direct avec les moyens à disposition et les besoins immédiats auxquels il faut répondre.


Le deuxième rapport périodique de Monaco (CAT/C/38/Add.2) rappelle que la Constitution monégasque interdit les traitements cruels, inhumains ou dégradants et abolit la peine de mort. L'introduction, dans le droit monégasque, de la définition de l'acte de torture énoncée dans la Convention contre la torture a été opérée en décembre 1994 par une modification du Code de procédure pénale qui fait désormais expressément renvoi à l'article premier de la Convention pour conférer à un acte de torture la qualification juridique de crime. Le rapport souligne également que depuis l'examen du rapport initial par le Comité contre la torture, la Principauté a complété son Code de procédure pénale à l'effet d'harmoniser les règles de droit pénal avec les prescriptions établies par la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ainsi, le 'Code de procédure pénale permet désormais de poursuivre sur le territoire monégasque tout auteur, coauteur ou complice d'un crime consistant en un acte de torture au sens de 'de la Convention. Il suffit que l'auteur ou le complice se trouve dans la Principauté, qu'il y réside ou qu'il y soit de passage.

En droit monégasque, aucune circonstance justificative ou exonératoire dans les cas de torture n'est prévue ni par une disposition d'origine interne, ni par une stipulation d'une convention internationale à laquelle la Principauté est partie. Le rapport souligne par ailleurs que la Principauté s'est également dotée d'une importante loi relative à l'extradition, conciliant l'efficacité de la répression internationale et la liberté individuelle. Ainsi, l'extradition peut notamment être refusée si l'infraction pour laquelle elle est demandée est punie de la peine capitale par la loi de l'État requérant sauf si ledit État donne des assurances jugées suffisantes par la Principauté que la personne poursuivie ne soit pas condamnée à mort ou, si une telle condamnation a été prononcée, qu'elle ne soit pas exécutée, ou que la personne poursuivie ne soit pas soumise à un traitement portant atteinte à son intégrité corporelle. S'agissant des dispositions juridiques relatives à la détention préventive, le rapport indique que le juge d'instruction peut, exceptionnellement, par ordonnance spéciale et motivée, prononcer à l'égard de l'inculpé une interdiction de communiquer. Cette interdiction ne doit pas excéder une durée de huit jours; si les circonstances l'exigent, elle peut être renouvelée par le juge d'instruction, une seule fois, pour une période égale. L'inculpé peut interjeter appel mais l'appel ne suspendra pas l'exécution. La détention préventive dans la Principauté, au cours de l'information, ne peut excéder deux mois. Passé ce délai, si le maintien en détention paraît nécessaire, le juge d'instruction peut, pour une période d'égale durée, renouvelable, la prolonger. Le rapport fait par ailleurs valoir que nul n'a allégué avoir subi ou avoir connaissance d'acte de torture sur le territoire monégasque.
Examen du rapport de Monaco

Fournissant des renseignements complémentaires concernant la mise en œuvre de la Convention à Monaco, la délégation a notamment affirmé qu'aucune disposition législative ne permet, en droit monégasque, de justifier le recours à la torture. En outre, si une loi permettait d'invoquer une circonstance exceptionnelle pour justifier des actes de torture, celle-ci serait jugée contraire à l'article 20 de la Constitution de 1962 et annulée par le Tribunal suprême. La délégation a par ailleurs souligné que toute mesure d'éloignement du territoire monégasque étant une mesure administrative, elle peut, comme toutes les mesures administratives, être déférée devant le Tribunal suprême. Avant de saisir le Tribunal suprême, les intéressés ont en outre la possibilité de former un recours gracieux devant l'autorité administrative pour tenter d'obtenir le retrait de la décision qui leur fait grief. La délégation monégasque a par ailleurs affirmé que l'extradition peut être refusée si l'infraction pour laquelle elle est demandée est punie de la peine capitale par la loi de l'État requérant, sauf si des assurances suffisantes sont données que la personne poursuivie ne sera pas condamnée à mort. La délégation a ensuite affirmé qu'aucune plainte, ni dénonciation d'actes de torture ou autres peines et traitements cruels, inhumains et dégradants n'a été enregistrée dans la principauté. En outre, a-t-elle précisé, aucun cas de violence physique ou morale sur les détenus n'a été enregistré.

La délégation monégasque a par ailleurs déclaré que les lieux de détention sont régulièrement contrôlés par le Procureur général et les magistrats du parquet. En outre, le contrôle de l'activité des officiers de police judiciaire est effectué par la Cour d'appel siégeant en assemblée générale ou en chambre du Conseil. S'agissant des voies de recours dont disposent les détenus contre les sanctions disciplinaires dont ils sont l'objet, la délégation a expliqué que le directeur de la maison d'arrêt est une autorité administrative et que ses décisions relèvent, en premier et dernier ressort, de la compétence du Tribunal suprême. La délégation a ensuite souligné que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ainsi que l'article 20 de la Constitution prévoient l'irrecevabilité de toute déclaration obtenue sous la torture. S'agissant enfin de l'éventuelle ratification par Monaco du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, la délégation a souligné que tout mécanisme de prévention, international ou national, serait dépourvu d'objet dès lors qu'aucun cas de torture n'a été dénoncé dans la Principauté. La Principauté n'entend donc pas ratifier le Protocole dans l'immédiat, ayant toutefois présent à l'esprit ses recommandations.


Questions des experts du Comité

M. GUIBRIL CAMARA, rapporteur du Comité pour le rapport de Monaco, a remercié la délégation pour la qualité de ce rapport, soulignant toutefois le retard pris dans la soumission des rapports que doit soumettre Monaco au Comité. Il a estimé que Monaco peut être considéré comme un État modèle s'agissant de la mise en œuvre des dispositions de la Convention. Aucune information faisant état de violations de dispositions de la Convention n'est parvenue au Comité, a-t-il noté. M. Camara a demandé à la délégation de bien vouloir apporter des éclaircissements sur l'application de la Convention contre la torture en cas de conflit entre l'une de ses dispositions et la Constitution monégasque. Le rapporteur a ensuite demandé à la délégation de bien vouloir préciser l'existence dans le droit pénal monégasque d'une «cause exonératoire» de responsabilité à raison d'acte de torture. Il ne suffit pas pour répondre à cette question d'affirmer que la torture est interdite en droit monégasque. S'agissant ensuite des voies de recours dont disposent les personnes frappées d'une mesure d'éloignement du territoire, M. Camara a demandé à la délégation de fournir davantage d'informations sur leur caractère effectif et suspensif.


M. CLAUDIO GROSSMAN, corapporteur du Comité pour le rapport monégasque, a demandé à la délégation de bien vouloir préciser les conditions concrètes de l'exercice par chaque prévenu de son droit à informer ses proches. Il a par ailleurs demandé des éclaircissements concernant le régime juridique applicable à la mise au secret de détenus. En outre, il a demandé à la délégation de préciser les règles régissant la pratique qui consiste à transférer dans des établissements pénitentiaires français les personnes condamnées à de longues peines. M. Grossman s'est également demandé si la Convention pouvait être appliquée de façon directe par les tribunaux. Il a enfin demandé à la délégation si le Gouvernement de la Principauté envisage de ratifier les conventions internationales pertinentes en matière de traite d'êtres humains.

Un expert a demandé à la délégation si les autorités compétentes se tenaient informées des conditions de détention dans les prisons françaises où sont incarcérées les personnes condamnées à de longues peines.



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